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[Parution] Le Seigneur des Anneaux - nouvelle traduction de Daniel Lauzon - 2014
Une petit chronique : http://www.phenixweb.info/Retour-du-roi-...anneaux-T3
What's the point of all this pedantry if you can't get a detail like this right?
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La conférence à la BNF est désormais disponible :
http://www.bnf.fr/fr/evenements_et_cultu...lkien.html
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J'ai particulièrement apprécié les moments de lecture d'extraits !
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Effectivement, le lecteur était très bon. Je ne suis pas spécialement client des livres audio, mais c'est vrai que ça donne une bonne idée de ce que ça peut donner.
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Parmi les choix opérés par Daniel Lauzon dans sa belle et heureuse traduction, Grand'Peur a fait parler je crois (mais je ne trouve pas les traces de ces débats), et je trouve également que ce n'est pas très convaincant (ça a un côté beaucoup trop train fantôme à mon goût). Il m'est venu à l'esprit que "Glaucquebois" (avec ou sans le c en trop qui me paraît amusant) aurait été assez sympathique, d'autant plus que ç'aurait bien exprimé le fait que "Vertbois" s'assombrit.
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On en avait surtout discuté en 2012, à la sortie du Hobbit, donc il faut regarder dans ce fuseau.
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Un témoignage intéressant sur ActuSF :
http://www.actusf.com/spip/Le-Retour-du-...velle.html
(Je regrette qu'il ne soit pas développé davantage en fait Razz)
"L'urgent est fait, l'impossible est en cours, pour les miracles prévoir un délai."
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Un bon retour de quelqu'un qui connaissait l'ancienne traduction, mais ne l'avait pas lu depuis longtemps et qui a lu la nouvelle après les films sans être gêné : https://tassedeculture.com/2017/05/05/la...r-tolkien/
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Apparemment cette même personne a beaucoup aimé :
https://tassedeculture.com/2017/05/12/le...r-tolkien/
https://tassedeculture.com/2017/05/18/le...r-tolkien/

Citation :Si j’ai adoré La Fraternité de l’Anneau, si j’ai été enthousiasmé par Les deux tours, Le retour du Roi a été extatique (oui, rien que ça). J’ai tout simplement dévoré ce volume.
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Bonjour,

Il s'agit de mon premier message sur Tolkiendil. Je me suis inscrit car je viens d'acheter la nouvelle traduction du Seigneur des Anneaux par Lauzon chez Christian Bourgois et, parcourant internet j'ai appris que votre communauté avait contribué à cette traduction.

Je suis un modeste lecteur. J'ai 44 ans et j'ai découvert Tolkien à 12 ans avec le Hobbit puis l'édition de poche du Seigneur des Anneaux (Rouge, Noire, Bleu du Livre de Poche). Ce livre m'a accompagné depuis sans jamais me quitter, j'ai dévoré ensuite le Silmarillion et les Contes et légendes inachevés. C'est une oeuvre que je relis régulièrement. Plus que cela la version française du Seigneurs des Anneaux m'accompagne depuis toujours.

Mon anglais me permet de tenir une discussion simple ou de lire des articles de journaux. J'ai lu assez d'articles sur Tolkien pour être à l'aise avec la version originale des termes principaux (Baggins, Mirkwood etc) même si je n'ai pas l'habitude de lire de roman en anglais.

Nouvelle traduction : pourquoi pas ? Je sais qu'il y a quelques coquilles et des oublis chez Ledoux. Je me lance j'achète les deux premiers tomes. Ils sont superbes avec des illustration d'Alan Lee. Je suis tout heureux. En avant et après deux pages je suis consterné. Je m'accroche même si toute la première partie est une purge. Je suis abasourdi. C'est tout simplement navrant. Le changement pour le changement sans aucune justification. En fait mon impression générale c'est que Lauzon à traduit une oeuvre américaine en français du Québec et que Ledoux a traduit une oeuvre anglaise en français. Il y a un gros problème dans cette nouvelle interprétation des noms propres. C'est inutile ou inadéquat.

Mr Baggins a désormais en français un nom gascon (ce qui tranche avec l'idée même de hobbit). Même si dans l'orthodoxie traductrice l'ordre déterminé-déterminant est inverse en français et en anglais ce n'est pas le cas au nord de la ligne Joret (en gros au nord de la Seine) ou l'on garde l'ordre déterminant-déterminé (propre aux langues germaniques) qui donne au nord de cette ligne Neuchatel et au sud Chateauneuf. La Comté se situant au "Nord-Ouest de l'ancien Monde" la traduction retenue par Ledoux me semble bien plus opportune.

Je passe sur Strider/L'Arpenteur qui effectivement doit-être une traduction strictement plus fidèle mais beaucoup moins poétique et évocatrice (ça fait partie du boulot de rendre l'atmosphère). Mirkwood/Grand-Peur c'est tout simplement ridicule. J'en passe et des meilleures. Avec des pinaillages sur un i à la place d'un e.

Consternation. Quel rôle a eu Tolkiendil dans cette traduction ? Quel est l'objet de tout cela ? Pourquoi ne pas se contenter d'effacer les coquilles et de réparer les oublis -ce qui n'est pas une gageure j'en suis convaincu- de la traduction de Ledoux ?

Bientôt "Le Maitre des Bagues" ?
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Bonjour reaumursebastopol, merci pour cet avis motivé et très intéressant Smile

Tolkiendil n'a eu aucun rôle dans cette traduction, qui se situe dans un planning éditorial des éditions Bourgois (publication en français des tomes de l'Histoire de la Terre du Milieu, retraduction du Hobbit, du SdA...). Les choix reflètent uniquement le parti pris du traducteur (et du Professeur Vincent Ferré qui y a été associé).

Si certains aspects que tu soulèves ont fait débat et divisent en effet la communauté (sans parler même de Tolkiendil), un véritable travail de retraduction ne pouvait pas se limiter à un toilettage de la précédente. Cependant, en ce qui me concerne, je crois que parler de "traduction de référence" serait une erreur littéraire. Une traduction est par nature un parti pris et il me semble qu'il serait réducteur pour Tolkien que de dire que l'un ou l'autre l'a mieux traduit, cela signifierait qu'il n'y a qu'une seule manière de le traduire et de l'interpréter, ce qui serait une insulte à son travail. On peut ensuite compter les points... mais en tant que fans, il est important d'être conscient de cette richesse.
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(03.07.2017, 02:37)Tikidiki a écrit : Tolkiendil n'a eu aucun rôle dans cette traduction, qui se situe dans un planning éditorial des éditions Bourgois (publication en français des tomes de l'Histoire de la Terre du Milieu, retraduction du Hobbit, du SdA...). Les choix reflètent uniquement le parti pris du traducteur (et du Professeur Vincent Ferré qui y a été associé).

Il ne s'agit pas, en effet, d'une entreprise collective qui engagerait la communauté de Tolkiendil proprement dite, mais pour être tout-à-fait exact, Daniel Lauzon a reconnu avoir été souvent aidé et inspiré par des essais et propositions de plusieurs participants de longue date aux forums/fora tolkieniens, dont sans doute celui de Tolkiendil, même s'il mentionne en particulier celui de JRRVF dans ses remerciements (Volume 1, p. 520). Ce n'est pas un scoop de préciser également que le travail de Daniel a généralement été bien accueilli par la communauté de Tolkiendil, même si tous les choix qui ont légitimement été les siens n'ont pas forcément fait l'unanimité.

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Mirkwood/Grand-Peur c'est tout simplement ridicule.

Pour n'évoquer que ce point tout particulier, je me permettrais de rappeler que même parmi les personnes remerciées par Daniel, et bien sûr bien au-delà, il n'y a pas eu de complaisance : le choix du traducteur reste discutable, même si Daniel explique son choix personnel (déjà fait précédemment pour sa traduction du roman Le Hobbit) dans une note de bas de page vers la fin du dernier volume de sa traduction du Seigneur des Anneaux. Personnellement, sans vouloir me répéter, je préfère très clairement le(s) choix de Francis Ledoux sur ce point : soit Mirkwood comme dans le Hobbit, soit Forêt Noire comme dans le Seigneur des Anneaux.

Pour le reste, le(s) débat(s) a (ont) déjà eu lieu il y a longtemps, ici et ailleurs, de façon parfois très virulente et même excessive (voir par exemple sur JRRVF, en janvier-février 2016, si vous avez le temps), et je ne crois pas que l'on puisse rajouter aujourd'hui grand-chose à ce qui a déjà été dit par le passé...
Ce que j'ai toujours dit, pour ma part, c'est qu'il vaut mieux avoir deux traductions d'une œuvre qui soient accessibles au lecteur plutôt que d'en avoir qu'une seule, sachant qu'elles ont évidemment chacune leurs qualités et leurs défauts.

Au-delà de la question des noms, peut-être avez-vous cependant apprécié, par exemple, la nouvelle version des poèmes et chansons ? C'est, me semble-t-il, un des points positifs majeurs des nouvelles traductions de Daniel Lauzon, pour le Hobbit comme pour le Seigneur des Anneaux.

Cordialement,

Hyarion.
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
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Afin de compléter les deux réponses précédentes, je t'invite reaumursebastopol, à lire si ce n'est pas déjà fait, l'intégralité du fuseau actuel ainsi que celui sur la retraduction du Hobbit dans lesquels tu trouveras nombre d'explications sur ces changements. J'espère que ça adoucira ton jugement, car dire que c'est une purge, c'est très limite tout de même.
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L'une des grandes richesses de cette nouvelle traduction est par ailleurs la maîtrise de niveaux de langage très divers qui rend justice, d'une part, à la richesse de l'original (Tolkien ayant voulu montrer toutes strates socio-culturelles de l'anglais), et qui d'autre part permet de mieux apprécier les différences profondes entre les personnages, entre le Sam fraîchement débarqué de son potager et les grands de ce monde, princes ou habitués à la cour des rois. Les répliques de Sam sont, tout particulièrement, rendues de manière excellente, selon moi.

Quant au changement systématique des noms, les questions de droit sur le travail de Ledoux ont forcé Lauzon à changer systématiquement tous ses choix de traduction, même quand il aurait souhaité ne pas le faire (par exemple, il aurait préféré garder Hobbitebourg plutôt que de passer à Hobbiteville, qui selon moi fait très village des Schtroumpfs). Donc ce n'est pas du "changement pour le changement", c'est du "changement parce que c'est la loi sur le droit d'auteur".

Concernant "Grand-Pas", il a une coloration bon enfant que "Strider" n'a pas. Ce qui le rend plutôt surprenant lorsque Aragorn décide de nommer ainsi sa Maison. L'Arpenteur n'est peut-être pas idéal, mais ça reste à la fois un peu grandiloquent (comme l'est Strider) tout en étant familier (voir les origines de beaucoup de noms de famille en Le + caractéristique marquante ou activité habituelle de la personne).

Pour la forêt de Grand-Peur, je ne peux rien dire, je ne comprends malheureusement pas moi-même ce choix, même s'il a de bonnes raisons d'être (notamment cela traduit d'assez près le nom elfique). On ne peut pas tous être sensibles aux mêmes aspects !
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(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Je m'accroche même si toute la première partie est une purge. Je suis abasourdi. C'est tout simplement navrant. Le changement pour le changement sans aucune justification.

Certes, on peut critiquer certains points : je trouve effectivement que Grand'Peur est un fort mauvais choix et à ma connaissance personne, hormis Daniel Lauzon (édit : et Isengar ! — voir plus bas), ne l'estime meilleur que le simple Forêt Noire. D'autres peuvent être considérés comme peu ou pas utiles (Brandivin au lieu de l'excellent Brandevin, notamment).

Toutefois, dire qu'il n'y de justification à rien est une aberration : il y avait tout autant de choix douteux, voire erronés chez Ledoux. En fait, il y en avait beaucoup plus : que dire du village de Stock, non traduit contrairement à tous ses voisins ? De même pour Bree à côté d'Archet. Frodon pour Frodo pouvait se concevoir à la rigueur, mais Bilbon était vraiment mauvais, quand bien même on s'y était habitué. Fendeval sonne mieux et est plus proche du sens que Fondcombe. Les exemples pourraient être multipliés à l'avenant.

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Nouvelle traduction : pourquoi pas ? Je sais qu'il y a quelques coquilles et des oublis chez Ledoux.[...] Pourquoi ne pas se contenter d'effacer les coquilles et de réparer les oublis -ce qui n'est pas une gageure j'en suis convaincu- de la traduction de Ledoux ?

Quelques... douzaines, oui. À l'origine, c'était bien une correction de la version Ledoux qui était envisagée, comme Lauzon l'explique dans ses interviews. Mais il s'est avéré, après plus de dix ans de travaux par Lauzon, Ferré et quelques autres, que ce n'était pas seulement une gageure : c'était purement impossible, car cela aurait conduit à dénaturer complètement la traduction d'origine, tant il y avait à reprendre. Coquilles, contresens, problèmes stylistiques, on trouvait tous types de problèmes, certains avec de larges impacts.

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : En fait mon impression générale c'est que Lauzon à traduit une oeuvre américaine en français du Québec et que Ledoux a traduit une oeuvre anglaise en français.

Autant je suis un inconditionnel de l'imparfait du subjonctif et regrette sa disparition dans la traduction de Lauzon, autant j'attends encore qu'on me sorte plus d'un ou deux québécismes dans toute l'œuvre. Jusqu'à présent, j'attends en vain... Et si l'on parle niveaux de langue, Lauzon rend bien mieux les parlers dialectaux des Hobbits ou des gens de Brie que ne le faisait Ledoux. Quand au style noble, Lauzon s'y meut au moins aussi bien que Ledoux. Je ne mentionnerai qu'en passant les poèmes : la comparaison y est trop cruelle.

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Même si dans l'orthodoxie traductrice l'ordre déterminé-déterminant est inverse en français et en anglais ce n'est pas le cas au nord de la ligne Joret (en gros au nord de la Seine) ou l'on garde l'ordre déterminant-déterminé (propre aux langues germaniques) qui donne au nord de cette ligne Neuchatel et au sud Chateauneuf. La Comté se situant au "Nord-Ouest de l'ancien Monde" la traduction retenue par Ledoux me semble bien plus opportune.

Certes, l'ordre est habituellement germanique dans la partie nord de la France, mais la séparation ne suit pas la ligne Joret, à ma connaissance, puisque celle-ci est une délimitation purement phonétique. Au passage, on notera qu'il y a au moins un Châteauneuf dans le Finistère, ce qui de mon point de vue de sudiste correspond suffisamment au Nord-Ouest de l'Ancien Monde pour mon goût. D'ailleurs, Tolkien s'inspirait beaucoup du parler des Midlands pour les Hobbits et les Midlands sont plutôt au centre qu'au nord de l'Angleterre...

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Quel rôle a eu Tolkiendil dans cette traduction ? Quel est l'objet de tout cela ?

Comme déjà expliqué par d'autres, Tolkiendil n'a rien eu à voir avec cela. Certains membres de Tolkiendil (j'en fais partie) ont eu la chance de discuter de certains points avec Lauzon, mais c'est toujours lui qui a eu le dernier mot. Quant à l'objet de tout cela, il était — et reste — de fournir une traduction plus cohérente, plus fidèle et plus conforme aux vœux de Tolkien. Ce en quoi le travail de Lauzon est incontestablement une réussite, même si l'on peut effectivement regretter certains choix précis.
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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(03.07.2017, 19:30)Elendil a écrit : je trouve effectivement que Grand'Peur est un fort mauvais choix et à ma connaissance personne — hormis Daniel Lauzon — ne l'estime meilleur que le simple Forêt Noire.

Voilà un commentaire qui ne fait pas dans la dentelle mais on peut dire à tout le moins que c'est un choix qui n'a pas fait beaucoup d'adeptes. On peut également remarquer que c'est ici que le traducteur s'est autorisé la plus grande licence en produisant un nom (sur plusieurs centaines) qui s'éloigne considérablement de l'anglais ou de toute autre traduction précédente. Je ne répéterai pas l'expérience.

D'autres noms controversés, comme l'Arpenteur, ou Scadufax, ont le "défaut" d'être trop différents de ceux de Ledoux. On ne peut pas gagner à tous les coups, ni aux yeux de tout le monde ; je trouve, moi, par exemple, que Sacquet est beaucoup plus "dur" que Bessac, alors que je lisais l'inverse un peu plus haut.

Sur cette question en général j'ai déjà dit beaucoup de choses : il faudra que les nouveaux (anciens) lecteurs fassent leur apprentissage, sinon tant pis, ils seront privés de dessert ! Wink

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : Je sais qu'il y a quelques coquilles et des oublis chez Ledoux.
Elendil a écrit :Quelques... douzaines
Centaines... milliers...

(02.07.2017, 23:48)reaumursebastopol a écrit : En fait mon impression générale c'est que Lauzon à traduit une oeuvre américaine en français du Québec et que Ledoux a traduit une oeuvre anglaise en français.

C'est une impression qui sent le chauvinisme eurocentrique à plein nez, je m'excuse d'être obligé de le dire, et qui ne se vérifie pas dans les faits, à moins de considérer l'anglais british comme nécessairement soutenu, ce qui serait une erreur, même si l'on peut dire que l'anglais américain et sa littérature se manifestent le plus souvent dans un registre populaire, pour des raisons historiques et culturelles. (Les Américains n'ont pas eu la "chance", contrairement aux Québécois, de voir leur idiome rabaissé et étouffé par une vision excessivement normative de leur langue, aussi ils l'écrivent et la parlent comme ils l'entendent. Les peuples triomphants ont ce droit, les vaincus, non.)

J'ai mon style, ce style n'est sans doute pas celui que j'aurais eu si j'étais né de l'autre côté de la mare, mais je vous prie de croire que cela peut avoir ses avantages. J'ai un recul supplémentaire et ma vision du français a le mérite d'être plus intemporelle et moins régionaliste (voire moins parisianiste) – cela dit en toute modestie. Savoir l'origine gasconne de tel nom peut, en outre, être moins important que d'en choisir un qui serve le texte au mieux – dans ce cas précis, le besoin impératif d'une allitération en B.

Quand je traduis pour l'international je fais bien sûr l'effort conscient (devenu habituel, voire automatique) de supprimer à l'écrit les traits de ma langue maternelle (orale). Nous avons ici deux langues usuelles, bien sûr, même si beaucoup d'entre nous ne s'en rendent pas compte : le français québécois, parlé à la maison, et le français standard, ou littéraire, langue écrite, apprise à l'école. Comme tout bilinguisme (réel, je ne parle pas de la méthode ASSIMIL) cela vous triture un peu le cerveau, mais si vous arrivez à maîtriser cela peut rapporter.

J'ai bien sûr traduit de l'anglais autant que Ledoux ; l'évitement de l'imparfait du subjonctif, par exemple, va de soi quand on traduit de l'anglais un récit au passé, puisque chaque tournure subjonctive est susceptible de produire en français quelque chose que l'on aurait tendance à formuler autrement – à moins de donner dans la préciosité la plus facile. Relisez les classiques : m'est avis que vous n'en trouverez pas à la pelletée et à tout propos, mais peut-être chez des auteurs plus obscurs dont le style n'a pas aussi bien vieilli. Cette disposition à l'endroit de l'imparfait du subjonctif ne date pas d'hier. Or en traduisant de l'anglais un récit au passé, il est toujours trop facile d'avoir recours à ce temps de verbe, par paresse ou par manque de moyens. Mécanique 101 de la traduction de l'anglais vers le français. Pour Ledoux, je dirais : manque de temps, et biais stylistique. D'ailleurs, il se corrige à mesure qu'il progresse. Nous l'avions constaté à l'époque où nous avons comparé les deux textes.

(Bien sûr l'imparfait du subjonctif n'a pas disparu de ma traduction [du Seigneur des Anneaux ; le Hobbit, un peu plus] ! Seulement il apparaît moins souvent dans des contextes où l'on nous explique ce que les hobbits aiment manger au petit déjeuner. Par souci d'équilibre et de fidélité.)

En espérant que ces commentaires puissent vous éclairer un peu plus sur la démarche. Et sur le traducteur.

D
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Merci pour ta réponse, cher Daniel.

Les réactions extrêmes, comme celle de Reaumursebastopol, restent heureusement à la marge - et dans ce cas précis, elle est souterraine, sinon comment expliquer ce pseudo Wink

Les Français, d'une manière générale, ont heureur du changement et horreur d'être bousculés dans leurs habitudes. Même les plus progressistes Smile
Qu'on touche à Frodon Sacquet, et - pour certains - ça devient un drame, à propos duquel il devient urgent de s'exprimer. Quitte à tenir des propos qui ressemblent plus à des sorties de route qu'à des analyses mûrement travaillées.
(Il n'y a pas si longtemps, j'étais moi même le premier à écrire des horreurs sur ce menteur opportuniste de Peter Jackson et sa "trilogie" ratée).

La nouvelle traduction est une très grande réussite.
Elle fera date, pas seulement parce qu'elle est soutenue par une communauté de qualité, mais parce que le texte est brillant en lui même: plus frais, plus précis, plus érudit, plus proche du ton de l'oeuvre originale, et libéré du carcan clacissiste, archaïsant et monocorde dans lequel s'était enfermé Ledoux.
Et ces poèmes et chants traduits. Quelles merveilles !

On préfère Sacquet à Bessac ? Grands-pas à l'Arpenteur ? Saroumane à Saruman ?
Peu importe ! Le texte est le plus important. Le goût pour les noms compte, certes, mais compte peu. Il viendra avec le temps, fusionnant inévitablement avec la force du texte.

Moi j'aime l'Arpenteur, et tous les autres.

Et j'aime aussi Grand'Peur, ce coup de génie de subtil connaisseur de Tolkien. Car la traduction n'est pas qu'une question de mot pour mot, mais aussi une question de transmission d'ambiance.
Forêt noire ? Bois sombre ? Noiresylve ? Mirquevoûte ?...
Et quoi ? Toutes les forêts sont sombres, non ?
Mais derrière Mirkwood, il y a plus que de l'obscurité. Il y a une terreur sous-jacente, qu'exprime le toponyme en VO, chargé du poids de son inspiration mythique, mais qu'aucune adaptation littérale ne saura rendre.
Grand'Peur, je le redis tout en étant conscient de ma position minoritaire, est un coup de génie.

Moi, c'est le Comté, avec lequel j'ai (un peu) de mal.
Est-ce que ça m'a empêché d'apprécier la redécouverte inespérée du Seigneur des Anneaux ? Absolument pas.

Finalement, plus les choix de traduction nous éloignent du texte de Ledoux et mieux c'est ! Et pas seulement pour la nomenclature et les contraintes juridiques qui vont avec.
La richesse du français permet ces alternatives et ces variations. Le talent et l'intelligence du traducteur fait le reste pour se rapprocher encore mieux de l'esprit du texte original.

C'est aussi, je le crois sincèrement, une question vitale, pour faire perdurer l'intérêt francophone autour du roman et le rendre accessible à d'autres générations.
Et quoi de mieux que laisser le choix aux uns et aux autres, entre une version historique délicieusement surannée et une version rythmée et variée pour l'avenir.

Si Reaumursebastopol n'aime pas la purge que représente pour lui la nouvelle traduction, il reste - heureusement pour lui - quelques exemplaires encore accessibles du texte de Ledoux, qui - Ô miracle - ne s'est pas désintegré à la sortie du texte de Daniel...

Quoi qu'il en soit, cher Daniel, merci encore pour ta disponibilité, ta classe, et ton talent.

I.
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Personnellement je trouve ça compliqué de commenter la traduction de Daniel Lauzon... D'abord je n'ai pas relu le SdA en intégralité mais juste quelques passages donc je serai un peu gonflé de le faire ! Embarassed

Je trouve que les poèmes et chansons sont indiscutablement brillants par rapport à la version de Ledoux ; pour les noms propres et les tutoiements/vouvoiements j'ai un avis purement émotionnel et non rationnel : ma sensibilité des textes de Tolkien date de l'enfance et une nouvelle traduction "chasse" ces "bons souvenirs" de jeunesse.

Comme beaucoup de gens l'ayant lu très jeune, je le relis notamment pour retrouver ces sensations initiales. Alors comme tout le monde il y a des termes que je préfère maintenant ("Arpenteur", oui !) et d'autres que je n'aime pas ("Grand'peur", j'avoue... Wink ).

En revanche j'ai quand même conscience de ne pas avoir d'avis argumenté ; le "oh... ben non... c'est pas comme dans mon souvenir" ne me paraît pas très valable Wink. Cela étant, ce n'est pas parce que cela n'a aucune valeur littéraire que ça ne compte pas ; je pense qu'ISENGAR a raison et que c'est en partie un passage de générations. J'imagine que les défenseurs de l'ancienne traduction sont toujours des anciens lecteurs... (et à nouveau je les comprends) mais y a-t-il déjà eu des critiques de lecteurs qui ont préféré la traduction de Ledoux après avoir lu celle de Lauzon ?
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(20.07.2017, 12:54)ISENGAR a écrit : Et j'aime aussi Grand'Peur, ce coup de génie de subtil connaisseur de Tolkien.

Hé bien, voilà qui m'apprendra à éviter les affirmations trop péremptoires, même s'il y avait effectivement une bonne part de provocation (amicale !) dans celle-ci. Wink

(20.07.2017, 15:02)Irwin a écrit : J'imagine que les défenseurs de l'ancienne traduction sont toujours des anciens lecteurs... (et à nouveau je les comprends) mais y a-t-il déjà eu des critiques de lecteurs qui ont préféré la traduction de Ledoux après avoir lu celle de Lauzon ?

Pour le coup, les protestations d'anciens lecteurs ne me surprennent guère, mais je serais fort surpris qu'un lecteur de Lauzon découvrant Ledoux a posteriori se mette subitement à préférer la traduction de ce dernier.
Rollant est proz e Oliver est sage.
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(20.07.2017, 19:17)Elendil a écrit : Pour le coup, les protestations d'anciens lecteurs ne me surprennent guère, mais je serais fort surpris qu'un lecteur de Lauzon découvrant Ledoux a posteriori se mette subitement à préférer la traduction de ce dernier.

Si cette situation existe j'avoue que je serai très curieux de découvrir l'argumentaire.
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Les trois tomes de la nouvelle traduction paraissent ce 14 septembre, dans deux éditions poche chez Pocket :
https://www.pocket.fr/tous-nos-livres/ro...266282390/
https://www.pocket.fr/tous-nos-livres/sc...266282369/
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Avec les mêmes visuels que l’édition poche de Ledoux.
Attention aux erreurs lors de l’achat Smile
Même si pour le premier tome c'est un peu plus simple "Fraternité/communauté" mais les deux autres tomes ont le même titre ..
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Oui, c'est un choix malheureux, mais je suppose qu'ils n'avaient pas envie de se tracasser à refaire du design. Peut-être vont-ils ajouter un macaron nouvelle traduction comme Livre de Poche l'avait fait pour le Hobbit ?
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J'espère surtout qu'ils auront repensé la présentation de la carte, inutilisable en grand format, et corrigé pas mal des coquilles qui écornaient considérablement cette dernière édition !
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De quelle carte grand format parles-tu ? Celle de Bourgois ?

Pour ce qui est des coquilles, je pense qu'il y en aura toujours moins que dans les versions poches actuelles, mais je ne doute pas que toutes les coquilles de l'édition Bourgois récoltées par Daniel Lauzon auront été corrigées avant ou pendant le transfert à Pocket.
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(10.09.2017, 17:16)Druss a écrit : Pour ce qui est des coquilles, je pense qu'il y en aura toujours moins que dans les versions poches actuelles, mais je ne doute pas que toutes les coquilles de l'édition Bourgois récoltées par Daniel Lauzon auront été corrigées avant ou pendant le transfert à Pocket.

Quant à moi, je doute toujours, mais pour cette fois les pronostics semblent bons !

Amicalement Very Happy
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Je me suis permis de glisser l'info dans le calendrier de JRRVF.
Après tout, c'est un événement, et ça concerne Daniel, qui est chez lui, sur JRRVF Smile

I.
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(10.09.2017, 17:41)Daniel Lauzon a écrit : Quant à moi, je doute toujours, mais pour cette fois les pronostics semblent bons !

Merci à vous pour ces informations ! C'est toujours très satisfaisant pour un lecteur de voir un auteur/traducteur s'impliquer ainsi, voilà qui fait vraiment plaisir, merci !

Je ne savais pas que vous faisiez vous-même la chasse aux coquilles ; pour ça aussi, merci !

J'avais en tout cas un peu de difficulté à comprendre pourquoi Bourgois n'a pas consacré sur cette nouvelle édition un peu plus d'efforts et de minutie quant à la relecture et la finition de l'ouvrage. Je trouve un peu dommage de finalement racheter le Seigneur des Anneaux dans une traduction nouvelle et dans un joli format illustré pour devoir le racheter encore un peu plus tard une fois qu'il aura été amendé des coquilles, si l'on souhaite une édition en quelque sorte "définitive", belle, propre, avec une traduction à jour.

Pour la carte, oui, je parle de celle de Bourgois, sur deux pages, avec l'Anduin au milieu noyé au niveau de la reliure. Je ne suis pas le seul à l'avoir trouvée assez inutilisable pour cette raison (cf. les commentaires Amazon).
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C'est seulement dans le premier tome, dans les suivants la carte est découpée avec une marge suffisante pour que la reliure ne gâche rien. Quant aux coquilles, pour avoir été de la partie sur ce sujet de la relecture, je peux te dire que sur un tome de la taille de la Fraternité, ce n'est pas aussi simple de les trouver toutes, même en étant très consciencieux. Je comprends parfaitement que ça ne soit pas agréable, mais pour une première édition qui sera corrigée plus tard, c'est tout de même relativement correct. On ne va se retrouver avec le nombre de coquilles de l'ancienne traduction dans des versions poche.
What's the point of all this pedantry if you can't get a detail like this right?
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Merci pour ces précisions !

D'après moi, la partie la plus criblée de coquilles reste les Appendices (avec des erreurs notamment dans les arbres généalogiques, dates de mort, etc.).
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