Sondage : Quels sont les aspects de l'œuvre de Tolkien qui vous déplaisent le plus ?
Son aspect parfois moralisateur, et volontiers passéiste à l'occasion
La tendance que Tolkien avait de réviser constamment ses textes
La misogynie et le racisme que certains peuvent percevoir dans ses écrits
Peter Jackson
Son style littéraire (ou peut-être plutôt ses styles littéraires)
L'incapacité à achever la plus grande majorité de ses récits
Les langues elfiques
Le vernis d'érudition universitaire qui peut parfois sembler pédant
Le fonds spirituel catholique de l'œuvre
Son côté très anglais
La dévotion presque cultuelle qui entoure aujourd'hui son œuvre et sa personne
Christopher Tolkien
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Note : C’est un sondage public. Les lecteurs pourront voir les choix des votants.
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Qu'aimez-vous le moins chez Tolkien ?
#1
Même si nous sommes très probablement tous ici férus de l’œuvre de J.R.R. Tolkien, il se peut que nous n'en apprécions pas nécessairement tous les aspects pour autant... Mais y a-t-il certains aspects de son œuvre qui vous rebutent plus que d'autres ? Voire même qui ne passent pas du tout ?

Les options de ce sondage étant limitées, la liste ne sera évidemment pas exhaustive, mais n'hésitez pas à discuter dans les commentaires ci-dessous soit de votre choix, soit d'éléments que vous aurez aimé voir figurer !

Et enfin, je précise que ce sondage est à choix multiples, donc n'hésitez pas à laisser libre cours à votre insatisfaction !
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#2
Quand j'ai lu l'intitulé, je me suis dit que la réponse serait difficile, même si je dois bien admettre que la tendance qu'avait Tolkien d'abandonner ses récits en court de route m'a toujours parue regrettable. Et puis j'ai vu les options possibles, et la réponse est devenue évidente. Wink
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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#3
J'admire les précautions stylistiques adoptées par Hofnarr dans certaines de ces options Smile
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#4
Je m'étonne de constater l'intégration de "Peter Jackson" dans "l’œuvre de Tolkien" Wink J'ai comme dans l'idée que ce sondage risque d'être un peu faussé... Laughing

Je pense que c'est le "petit nombre" de figures féminines que je trouve dommage dans son œuvre... (même si, pour plein de raisons longuement débattues je peux le comprendre et l'accepter). J'ajoute que je ne vote pas pour l'option "La misogynie et le racisme que certains peuvent percevoir dans ses écrits" puisque je ne fais aucun lien entre ma remarque et une quelconque hypothétique ou imaginaire misogynie de l'auteur.
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#5
Je pense que c'est un débat en soi que je serais heureux d'ouvrir ailleurs (mais ici, pourquoi pas), mais si j'ai repris le terme de "misogynie" car il est souvent employé, je le considère en effet parfaitement inapproprié dans le cas de Tolkien. Je parlerais plus volontiers d'un certain machisme très anglais, où la femme s'occupe du foyer tandis que l'homme participe à des "clubs" exclusivement masculins. On retrouve cette même veine de machisme dans The Animals of Farthing Wood par exemple. Dans cette perspective, la femme n'est pas rabaissée ou méprisée comme ce serait le cas dans une vision misogyne, mais elle est certainement mise de côté et il ne lui appartient pas de s'affronter aux événements.

Peter Jackson, un aspect de l’œuvre de Tolkien ? Compte tenu de l'influence culturelle considérable des films et du pouvoir d'attraction qu'ils exercent aujourd'hui sur la faculté imaginative de représentation des décors, des personnages et des événements du livre, je pense qu'il est audacieux, mais non pas incorrect, de considérer la trilogie filmique comme participant désormais de l’œuvre de Tolkien. Culturellement, les deux sont désormais imbriquées, même si évidemment, elles sont loin de se recouper. Je ne crains pas cela dit que cela "fausse" les options car il y a à mon avis beaucoup de raisons d'apprécier les films et d'y voir au contraire une manière de renouer, d'une manière certes radicalement différente et nettement plus guidée, avec l'atmosphère mise en place par l’œuvre littéraire. En ce qui me concerne, les films participent également de mon appréciation du livre et de l'univers qu'il révèle.
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#6
Vous faites bien de distinguer la misogynie de la conception de la condition féminine et du machisme.

Je ne peux pas en vouloir à Tolkien de ne pas avoir réussi à achever de nombreux récits (quiconque se pique d'écrire, notamment dans ce genre-là, sait que c'est difficile), dans l'absolu... mais je n'arrive pas à dissiper mon léger agacement quand je vois qu'on sait tout des arbres généalogiques des Hobbits, et qu'en comparaison de très belles histoires sont effectivement inachevées, ou des pans de l'histoire d'Arda inconnus. Mais c'est vraiment une question de goût. Wink
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#7
(21.10.2019, 12:55)Hofnarr Felder a écrit : Je pense qu'il est audacieux, mais non pas incorrect, de considérer la trilogie filmique comme participant désormais de l’œuvre de Tolkien. Culturellement, les deux sont désormais imbriquées

L'argument me convient. Même s'il y a matière à en discuter longuement.
Je vote donc pour l'audace Smile

I.
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#8
J'ai esquivé l'appel un peu trop évident de certaine proposition (en me rendant compte que ce m'est plus compliqué que ça n'en a l'air... enfin, en partie)... et ai finalement opté pour le chronique défaut d'achèvement des textes. Même si ce côté fragmentaire participe de la construction de la mythologie, avec l'aspect palimpseste et le cadre pseudo-savant... je ne lui ai pas encore pardonné ne n'avoir pas achevé la réécriture de la chute de Gondolin ! Qui partait pourtant tellement bien !! Aaaargh !!! Twisted Evil

Et puis, c'est bien de refaire et refaire des morphologies nominales de ses langues inventées, mais comme ça, on n'arrive pas souvent au verbe et à la syntaxe. De quoi vraiment crier Hourrah ! quand on y parvient Mr. Green
Le langage a à la fois renforcé l'imagination et a été libéré par elle. Qui saura dire si l'adjectif libre a créé des images belles et bizarres ou si l'adjectif a été libéré par de belles et étranges images de l'esprit ? - J. R. R. Tolkien, Un vice secret
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#9
J'avoue apprécier énormément, au contraire, l'aspect "réécriture", car il participe d'une dimension humaine et progressive d'une oeuvre souvent essentialisée et vitrifiée.

L'aspect que j'aime le moins, c'est sans doute les langues, domaine qui me semble être un "État dans l'État", si développé pour lui-même qu'il s'approche d'une matière distincte.
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#10
Ah, mais ce ne sont pas les réécritures en soi que je trouve gênantes ... c'est le fait que maints récits n'aboutissent pas qui crée chez moi une certaine frustration. Je suis en fait d'accord sur la richesse apportée par cette diversité de styles et serais très heureux avec quinze versions complètes de Gondolin Very Happy Cela contribue certainement à l'impression de profondeur avec ce traitement constamment renouvelé des mêmes récits, manière effectivement semblable à une "mythologie" telle qu'il rêvait en sa jeunesse de créer.

Il est bien possible que ma perception soit colorée par mon intérêt pour les langues, car dans ce domaine, l'effet de palimpseste jamais achevé est sans doute encore plus accentué. Sans doute parce que Tolkien n'avait pas là de vraie perspective de publication pour le canaliser... ou le brider, selon le point de vue ! Et c'est d'ailleurs une source de divergence majeure dans la communauté des lambendili que de la façon de considérer la variation, qui apparaît aujourd'hui de façon manifeste comme un trait consubstantiel de son art.

En ce sens, ses langues ne sont certainement pas isolées du reste de l'œuvre. Mais on ne peut pas nier que l'accès à cette matière est ardu... de plus en plus au fur et à mesure que le corpus publié s'étoffe... et que c'est vraiment trop particulier pour parler à tous.

Je suis impatient de voir les impressions d'autres répondants sur ce sujet.
Le langage a à la fois renforcé l'imagination et a été libéré par elle. Qui saura dire si l'adjectif libre a créé des images belles et bizarres ou si l'adjectif a été libéré par de belles et étranges images de l'esprit ? - J. R. R. Tolkien, Un vice secret
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#11
Au vu des propositions, je rejoins, comme une évidence pour moi, ceux qui regrettent que Tolkien ait abandonné nombre de ses récits avant de ne les avoir terminés.

En revanche, si l'on me demande ce que j'aurais répondu personnellement sans les choix proposés, il est clair que ma première réponse aurait été son dégoût de la cuisine française Rolling Eyes
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#12
(22.10.2019, 09:34)Bergelmir a écrit : En revanche, si l'on me demande ce que j'aurais répondu personnellement sans les choix proposés, il est clair que ma première réponse aurait été son dégout de la cuisine française Rolling Eyes

Je suis assez d'accord, sans vouloir faire mon fan inconditionnel c'est là ma principale critique. Sa position sur la cuisine française m'est très problématique, surtout venant d'une personne dont le pays n'est pas réputé pour sa cuisine (mais bon, on ne va pas redémarrer la Guerre de 100 ans, surtout concernant un sujet où la France est nécéssairement supérieure, pardonnez le chauvinisme). En fin de compte, je ne sais si c'est de la mauvaise foi de la part du Professeur ?
But do not despise the lore that has come down from distant years; for oft it may chance that old wives keep in memory word of things that once were needful for the wise to know.
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#13
Mauvaise foi ou non, chez moi, c'est un crime de lèse-majesté que de toucher à la bouffe Mr. Green
Et évidemment, a fortiori lorsque c'est un Anglais qui critique la cuisine française...
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#14
(21.10.2019, 22:31)Tikidiki a écrit : L'aspect que j'aime le moins, c'est sans doute les langues, domaine qui me semble être un "État dans l'État", si développé pour lui-même qu'il s'approche d'une matière distincte.

J'avoue avoir du mal à comprendre cette position, dans la mesure où les langues chez Tolkien sont précisément des ingrédients indissociables de l'histoire, contrairement à la majorité des romans de SF ou de fantasy faisant intervenir des langues imaginaires, qui ne sont généralement que des prétextes littéraires pour donner une impression d'exotisme. Au demeurant, si les langues n'étaient pas si développées, il est évident que la nomenclature de Tolkien n'aurait en aucun cas la cohérence et la richesse qu'on connaît. Là encore, suffit de comparer avec d'autres cycles de fantasy pour imaginer ce que ç'aurait pu être.

D'ailleurs, Tolkien ne dit-il pas que pour lui mythologie et langues sont indissociables ? Imaginer le Légendaire sans les langues elfiques telles qu'il les a développées, c'est un peu la même chose que d'imaginer un Légendaire sans mythologie, donc faire à Tolkien le reproche - que j'ai parfois vu - d'avoir passé du temps sur le Silmarillion au détriment de nouveaux romans comparables au SdA. En fait, c'est passer à côté de ce qui pour Tolkien était une part essentielle, même primordiale, de son oeuvre.

Le seul défaut des langues elfiques est évidemment qu'il faut accepter de leur consacrer du temps et de l'énergie, comme le souligne Corchalad. D'autant plus de temps et d'énergie que ce qu'on en connaît s'apparente assez à la façon dont on pourrait percevoir une Histoire de la Terre du Milieu qui ne comporterait actuellement que sept ou huit tomes sur douze, sans Silm. et sans CLI pour se repérer.
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#15
Cela étant, en grande majorité les auteurs de fantasy ne sont pas des philologues ou des linguistes, ce qui explique cela ; en outre, chez eux, la création du monde imaginaire sous ses différents aspects reste schématique et est considérée avant tout comme un arrière-plan de l'action du ou des roman(s), qui n'est vraiment développé que lorsque le succès pousse à ajouter du contenu à l'univers (cf. les ouvrages récents de George R. R. Martin). Il est plus rare de voir des auteurs qui en font un hobby ou une passion. Les univers de fiction les plus développés, aujourd'hui, sont ceux qui sont conçus par de nombreux inventeurs, dans le cadre de franchises, ce qui change la donne.

Elendil a écrit :c'est un peu la même chose que d'imaginer un Légendaire sans mythologie, donc faire à Tolkien le reproche - que j'ai parfois vu - d'avoir passé du temps sur le Silmarillion au détriment de nouveaux romans comparables au SdA
Oui, il est vrai qu'on entend ou qu'on lit cela, parfois. Comme tu l'écris, ceux qui pensent cela passent décidément à côté de ce qui fait la singularité profonde de Tolkien. Mais j'imagine facilement que ce sont les mêmes que ceux qui ont du mal à lire les épopées antiques ou une oeuvre comme les Métamorphoses d'Ovide...
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#16
(21.10.2019, 23:19)Corchalad a écrit : Ah, mais ce ne sont pas les réécritures en soi que je trouve gênantes ... c'est le fait que maints récits n'aboutissent pas qui crée chez moi une certaine frustration. Je suis en fait d'accord sur la richesse apportée par cette diversité de styles et serais très heureux avec quinze versions complètes de Gondolin Very Happy Cela contribue certainement à l'impression de profondeur avec ce traitement constamment renouvelé des mêmes récits, manière effectivement semblable à une "mythologie" telle qu'il rêvait en sa jeunesse de créer.

Je suis heureux que vous ayez vous aussi saisi la nécessité de bien distinguer les deux ! Pour moi, il y a en effet une différence claire entre multiplier les versions, et achever ou non ses textes. Contrairement à toi cependant, j'ai tendance à avoir une aversion pour la première de ces deux options : je déteste que l'auteur ne tranche pas sur une version unique et officielle. Qu'un texte soit laissé inachevé ne me dérange pas tant, surtout dans un univers aussi riche que l'univers tolkienien, qui ne saurait de toute façon être achevé. Quoi que nous ayons, ce sera en définitive un fragment d'une histoire beaucoup plus vaste.

Que le Conte de Gilfanon soit laissé à l'état d'esquisses me crispe moins que de voir que tel ou tel détail est incohérent avec tel ou tel autre Conte... Cela me laisse une impression d'inaboutissement et d'incomplétion beaucoup plus sévère que les lacunes laissées dans le récit.
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#17
(22.10.2019, 13:32)Elendil a écrit : J'avoue avoir du mal à comprendre cette position, dans la mesure où les langues chez Tolkien sont précisément des ingrédients indissociables de l'histoire, contrairement à la majorité des romans de SF ou de fantasy faisant intervenir des langues imaginaires, qui ne sont généralement que des prétextes littéraires pour donner une impression d'exotisme.

Tu as tout à fait raison, et d'ailleurs je n'ai pas comparé Tolkien à qui que ce soit, simplement exprimé une impression d'ensemble.

En outre, l'argument que tu emploies vient à l'origine du fait que la langue est indissociable de nos propres sociétés... on pourrait soutenir que, mettons, connaître l'histoire de l'Allemagne du XXème siècle impose de connaître précisément sa langue dans toutes ses nuances, et ainsi de suite pour chaque culture. Sans prétendre qu'il ne faille pas connaître la langue, je ne partage pas cette position, qui réserverait l'histoire aux seuls philologues. De surcroît, pour Tolkien, l'essentiel de ses textes n'est pas écrit dans ses langues inventées, et la question de la maîtrise de cette langue se pose donc beaucoup moins.
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#18
(22.10.2019, 16:26)Tikidiki a écrit : En outre, l'argument que tu emploies vient à l'origine du fait que la langue est indissociable de nos propres sociétés... on pourrait soutenir que, mettons, connaître l'histoire de l'Allemagne du XXème siècle impose de connaître précisément sa langue dans toutes ses nuances, et ainsi de suite pour chaque culture.

Je n'irais pas jusque-là non plus. En revanche, j'arguerais volontiers qu'on ne peut guère comprendre correctement les philosophes allemands postérieurs à Kant sans parler allemand. De même qu'on ne peut guère apprécier vraiment Goethe ou Schiller sans les lire dans le texte original. (Et je m'avoue défaillant à cet égard, ma maîtrise de l'allemand étant nettement insuffisante.)

(22.10.2019, 16:26)Tikidiki a écrit : De surcroît, pour Tolkien, l'essentiel de ses textes n'est pas écrit dans ses langues inventées, et la question de la maîtrise de cette langue se pose donc beaucoup moins.

Evidemment, pour Tolkien, la question est un peu différente, même si on ne peut vraiment apprécier Markirya sans avoir des bases de quenya. Néanmoins, la remarque qui vaut pour la langue vaut aussi pour les noms : connais-tu des gens qui admirent l'Edda ou le Kalevala ou l'Iliade tout en étant rebutés par l'onomastique des langues dans lesquelles ces textes ont été écrits ? Est-ce que le SdA aurait été aussi plaisant à lire si au lieu de la toponymie sindarine, nous avions eu celle de l'Epée de Shannara ?
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#19
En plus de mon vote, j'ajouterai : les importables pieds velus des Hobbits et le manque de clarté sur les oreilles d'Elfes qui provoquent des débats interminables Mr. Green
"L'urgent est fait, l'impossible est en cours, pour les miracles prévoir un délai."
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#20
Et l'origine de Tom Bombadil Very Happy ? (Spoiler: ce sera le contenu du dernier chapitre de ma thèse lol).
Plus sérieusement, je n'ai pas réussi à répondre au sondage...Il n'y a rien qui me "déplait" dans l'oeuvre de Tolkien, au mieux il y a des aspects qui "ne me parlent pas" et ce serait probablement juste les langues inventées.
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#21
(22.10.2019, 16:57)Elendil a écrit : Evidemment, pour Tolkien, la question est un peu différente, même si on ne peut vraiment apprécier Markirya sans avoir des bases de quenya. Néanmoins, la remarque qui vaut pour la langue vaut aussi pour les noms : connais-tu des gens qui admirent l'Edda ou le Kalevala ou l'Iliade tout en étant rebutés par l'onomastique des langues dans lesquelles ces textes ont été écrits ? Est-ce que le SdA aurait été aussi plaisant à lire si au lieu de la toponymie sindarine, nous avions eu celle de l'Epée de Shannara ?

Peut-être pas aussi plaisant, et d'ailleurs je n'ai pas de honte à avouer que j'apprécie ânonner certains poèmes elfiques, mais cela ne constitue sans doute pas la pierre angulaire de ma passion pour l'oeuvre. Je pense que l'écho que ces langues trouvent parfois chez un lecteur tient plus à une question de goût qu'à une éventuelle clairvoyance qu'elles apporteraient sur la Terre du Milieu.
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#22
(22.10.2019, 22:30)Tikidiki a écrit : Je pense que l'écho que ces langues trouvent parfois chez un lecteur tient plus à une question de goût qu'à une éventuelle clairvoyance qu'elles apporteraient sur la Terre du Milieu.

Je dois avouer être assez d'accord concernant les langues. On peut connaître une langue, admettons le français (j'suis très chauvin aujourd'hui), mais comment se dire que cela est suffisant pour connaître la France ? Les paysages qu'on peut y voir nous font ressentir des choses qu'on ne peut expliquer et que les langues ne représentent pas (comme tous les pays d'ailleurs). Pour moi, arpenter les TdM, c'est même plus important que connaître les langues de Tolkien, ça reste mon avis personnel, évitez les jets de pierres svp. L'univers du Professeur est tellement riche, notamment en matière mythique (et donc de façon quasi universelle) mais aussi en descriptions magnifiques, que ce qu'on ressent lors des lectures ne peut passer uniquement par ses langages, par la Raison du coup, mais plutôt d'une façon quasi inconsciente. C'est en ce sens que je ne souhaite pas vraiment étudier les langues tolkiennienes, car leur musicalité me suffit et que je ne veux pas que mon cerveau s'en mêle.

Désolé pour le hors-sujet ^^.

EDIT : ça me fait penser en matière linguistique à la relation entre le signifiant et le signifié. Connaître le signifiant amène-t-il une meilleure compréhension du signifié ? Tout dépend. C'est un vaste débat ^^.
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#23
Pour ma part ce sondage est vraiment plus délicat que les autres, car je partage tout à fait l'avis de Forfi : il n'y a rien qui me déplaise franchement chez Tolkien. Au contraire, il y a même un effet contagieux de bénéfices : si Tolkien en a parlé ou s'y intéressait, je mets mon nez dedans... Ainsi, moi qui n'ai pas, comme beaucoup à ce que je vois, de plaisir particulier à la linguistique, l'oeuvre du professeur m'y a fait toucher un peu. Quand je travaillais sur mon mémoire, je reprenais en même temps le latin, et je suis convaincu d'avoir enfin compris le système des déclinaisons grâce à la motivation que l'elfique m'avait donné. Je suis aussi sensible à l'onomastique dont parle Elendil, le fait que derrière un mot, il y a une histoire. Après, je n'ai pas non plus creusé beaucoup plus loin la question, me suffisant de savoir que cela existe. Ce n'est donc pas que cela me déplaît, mais seulement que je n'ai pas la patience de m'y plonger.

J'ai aussi pensé à voter au "culte" qui lui est rendu... mais d'une certaine façon, il me semble que j'y participe Mr. Green...

En ce qui concerne les réécritures et l'inachèvement, passée la frustration, c'est ce qui me plaît de plus en plus chez Tolkien (cf ma conclusion lors du séminaire Tolkien), comme on fouille un vieux grenier ou une brocante.

Pur Christopher, même si ses commentaires sont parfois très, très longs, je suis obligé de lui pardonner vu le travail de titan qui nous a valu tant de joies.

Peter Jackson ne me gène pas, au contraire, même si je sais avoir aujourd'hui un regard critique, je suis venu à Tolkien par les films, et j'ai encore des frissons en les regardant. Enfin, Le Seigneur des Anneaux. Pas le Hobbit.

Quant au fond spirituel catholique, au côté anglais, à l'érudition du professeur, ce que j'aime dans ces éléments rassemblés, c'est plus qu'une oeuvre, rencontrer une personne, ce qui la constitue, ce qui l'a formée, ce qu'elle donne, émane, transpire, bref, ce qui fait que lorsque je lis les textes de Tolkien, je ne suis pas seulement devant un bel objet, mais je discute avec quelqu'un.
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#24
(22.10.2019, 18:20)Forfirith a écrit : Il n'y a rien qui me "déplait" dans l'oeuvre de Tolkien, au mieux il y a des aspects qui "ne me parlent pas" et ce serait probablement juste les langues inventées.

A contrario, c'est un point de vue que je comprends tout à fait, car les langues restent un sujet pointu et complexe, qui n'a pas de raison d'attirer tous les amateurs de Tolkien. Entre dire « cela ne me parle pas » et « cela me déplaît », je trouve qu'il y a une nuance de taille.

(23.10.2019, 00:06)MrBathory a écrit : EDIT : ça me fait penser en matière linguistique à la relation entre le signifiant et le signifié. Connaître le signifiant amène-t-il une meilleure compréhension du signifié ? Tout dépend. C'est un vaste débat ^^.

Déjà, on ne peut envisager de signifié sans signifiant et vice-versa : selon l'analogie de Saussure, ce sont comme les deux faces de la même pièce de monnaie. Sans signifiant, on a tout juste un objet (physique ou conceptuel). Sans signifié, on a simplement un son dénué de sens. L'un va donc avec l'autre et une connaissance minimale de l'un et de l'autre est donc requise.

À l'exception des noms propres, pour lesquels il y a débat, il est assez universellement admis que les connaissances relatives au signifiant (étymologie, rapport avec les mots voisins de la langue et avec les mots équivalents dans d'autres langues, proxémie, etc.) permettent une meilleure analyse du signifié, tout simplement parce que l'analyse passe nécessairement par une verbalisation (mentale, orale ou écrite). Il n'y a pas forcément besoin d'une connaissance exhaustive en la matière, mais plus la connaissance est poussée, plus l'analyse se permettra d'être fine. Ce n'est pas un hasard si bien des essais philosophiques commencent par une définition des concepts employés.

Il est vrai que l'analyse n'est pas la seule méthode de compréhension d'un signifié (les émotions et les sensations y jouent aussi un rôle, qui n'a pas forcément besoin d'être verbalisé), mais c'est un enjeu de compréhension majeur, ne serait-ce que parce que la communication des émotions et des sensations nécessite à son tour bien souvent d'être verbalisée pour être effective.
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#25
Je précise que le titre du fuseau est "Qu'aimez-vous le moins chez Tolkien", une différence sensible avec le titre du sondage qui est "Qu'est-ce qui vous déplaît le plus", mais personnellement j'ai voté selon le premier Smile
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#26
Je comprends mieux ainsi l'écart entre ton vote et tes commentaires. Smile
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#27
(23.10.2019, 11:48)Elendil a écrit : Déjà, on ne peut envisager de signifié sans signifiant et vice-versa : selon l'analogie de Saussure, ce sont comme les deux faces de la même pièce de monnaie. Sans signifiant, on a tout juste un objet (physique ou conceptuel). Sans signifié, on a simplement un son dénué de sens. L'un va donc avec l'autre et une connaissance minimale de l'un et de l'autre est donc requise.

À l'exception des noms propres, pour lesquels il y a débat, il est assez universellement admis que les connaissances relatives au signifiant (étymologie, rapport avec les mots voisins de la langue et avec les mots équivalents dans d'autres langues, proxémie, etc.) permettent une meilleure analyse du signifié, tout simplement parce que l'analyse passe nécessairement par une verbalisation (mentale, orale ou écrite). Il n'y a pas forcément besoin d'une connaissance exhaustive en la matière, mais plus la connaissance est poussée, plus l'analyse se permettra d'être fine. Ce n'est pas un hasard si bien des essais philosophiques commencent par une définition des concepts employés.

Il est vrai que l'analyse n'est pas la seule méthode de compréhension d'un signifié (les émotions et les sensations y jouent aussi un rôle, qui n'a pas forcément besoin d'être verbalisé), mais c'est un enjeu de compréhension majeur, ne serait-ce que parce que la communication des émotions et des sensations nécessite à son tour bien souvent d'être verbalisée pour être effective.

Je te suis tout à fait quant à la relation signifiant/signifié. Néanmoins, certains signifiants sont quelque peu conventionnels et sont perçus différemment selon les personnes. Par exemple, l'Amour (hier chauvin, aujourd'hui fleur bleue, je me demande de quoi demain sera fait), il est admis qu'il représente un attachement, néanmoins chacun le vit à sa façon, en tant que sentiment personnel et ayant de multiples objets. Et ce concept résiste quelque peu à l'analyse comme tu l'as souligné.

De fait, aimer une oeuvre litéraire, c'est exprimer un sentiment (on peut certes user de sa raison pour comprendre les langues du Professeur) qui je pense est au-delà de la Raison. Chacun est donc libre de raisonner ce sentiment ou non. Ca me fait penser au célèbre "Cellar Door", ce signifiant est communément admis comme beau, néanmoins peut-on dire la même chose de son signifié ? En élargissant, on arrive en fait à la perception qu'on a de la beauté d'une langue, regroupement de signifiants qui peut être, ou non, appréciée sans connaître les liens entre ces derniers et les constructions logiques les articulant entre eux. On en arrive en fin de compte à la perception de la beauté, car doit-on comme Boileau penser qu'elle est liée au Bien et au Vrai (et de fait liée et à la Morale et à la Raison) ou peut-on, tel Baudelaire, trouver de la beauté dans le putride (Les Fleurs du Mal) ? On ne va pas refaire la querelle Romantiques Vs Classiques Vs Modernes, d'autant qu'on peut même se demander si elle est vraiment utile ^^.

Un signifiant peut être beau sans que l'on s'attarde sur son signifé (notamment dans la poésie plutôt récente), et un signifié peut être beau (une montagne par exemple) sans que l'on puisse mettre de signifiants sur les sentiments qu'elle nous inspire (c'est la aussi un des enjeux de la poésie, et de l'art d'une manière générale, d'essayer de représenter le Réel, ou même l'imaginaire, de façon tangible).
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#28
Merci pour ce sondage, Hofnarr. Il donne l'occasion d'aborder, pour une fois, la question de l'absence récurrente, sur la planète Tolkien, d'un véritable discours critique vis-à-vis du "Professeur" et de son œuvre. Car il faut bien reconnaître que les discours en la matière ont fortement tendance à être plus ou moins systématiquement mélioratifs, du moins à ce qu'il me semble. Ce n'est pas forcément un mal lorsque l'on se contente d'être dans une admiration "spectatrice" (sinon "consommatrice"), mais ça peut l'être davantage lorsque l'on se pique d'étudier Tolkien, et surtout lorsque l'on prétend vouloir le "comprendre", a fortiori en se prenant pour un "initié".

Quand je lis les propositions du sondage "Qu'est-ce qui vous déplaît le plus chez Tolkien et son œuvre ?" (je garde, de mémoire, l'intitulé originel), je me dis qu'en enlevant "le plus" dans la question, il y aurait en fait toujours une raison pour cocher les cases d'un bon nombre des choix possibles... pour peu que l'on soit capable de faire un examen critique de chaque sujet auquel renvoie les propositions et un examen critique de son intérêt personnel, voire de son engouement, pour Tolkien. Mais il y a cependant une difficulté : celle de distinguer ce qui relève bien de Tolkien et de son œuvre d'une part (même en y incluant Peter Jackson), de ce qui relève de ses lecteurs/admirateurs/"fans"/spécialistes et de leurs grilles de lecture d'autre part.

Voici toujours mon "explication de vote" (pour une seule proposition).

La tendance que Tolkien avait de réviser constamment ses textes ne me dérange pas, pas plus que son incapacité à achever la plus grande majorité de ses récits : même si j'aime bien retomber sur mes pieds avec une fin comme celle du Hobbit, révisions et inachèvements rappellent la dimension humaine de son travail, le mérite que Tolkien a eu, comme écrivain non professionnel, à réussir à achever tout de même certains récits, et cela tend à prouver qu'il n'était pas le génie créatif quasi-parfait que certains s'imaginent, même s'il se trouvera toujours des commentateurs pour développer des discours exagérément mélioratifs et téléologiques même sur ces aspects-là. Quant aux styles littéraires, ils sont ce qu'ils sont, et je crois qu'avec Tolkien il y en a, tout simplement, à peu près pour tous les goûts.

Pour ce qui est en particulier du "côté très anglais" de l'écrivain, la francophobie ou gallophobie de Tolkien a très tôt été un motif d'interrogation et de critique de ma part vis-à-vis de cet auteur : mon premier message sur le forum de JRRVF, il y a maintenant bien des années, portait précisément sur cette question ! On a certes voulu minimiser l'importance de ce travers, en évoquant la relation de Tolkien avec le père Bouyer par exemple, voire avec Simone d'Ardenne qui était belge francophone : mais encore aujourd'hui cela ne me parait pas suffire à nous débarrasser du sujet. L'aversion de Tolkien pour la cuisine française apparait assez mesquine (de quelle cuisine française parlait-il d'ailleurs au juste ?), mais son aversion pour la langue française me semble plus fondamentale : il ne supportait pas du tout l'idée que l'anglo-saxon ait disparu en Angleterre après la conquête normande, et il voyait avant tout le français comme une langue à la fois élitiste (celle d'élites politiques et sociales) et "ennemie" de la "vraie" langue anglaise des "vrais gens" d'Angleterre, pour ainsi dire. Sa vision de notre langue était de facto assez étriquée d'un point de vue dépassant le tropisme insulaire anglais : on peut y voir une forme sophistiquée et (ironiquement) élitiste de chauvinisme, à la sauce philologique universitaire, ce qui rend Tolkien un peu original sur la forme, mais sur le fond pas plus sympathique que n'importe quel Anglais francophobe. Notez bien que je parle ici de chauvinisme plutôt que de patriotisme ou de nationalisme, le chauvinisme me paraissant se situer plus ou moins entre les deux : quand on prétend aimer son pays, on n'est pas obligé de détester son voisin pour autant, qui plus est pour des motifs assez sophistiqués remontant à très loin dans l'histoire, et n'ayant plus grand-chose à voir avec la situation de sa propre époque, en l'occurrence en Angleterre comme en France (voire au-delà à l'échelle de la francophonie). Ceci dit, au-delà de ce point particulier, avoir un "côté très anglais" ne me semble pas être un problème en soi, dans le contexte d'une création tendant à une dimension de plus en plus universelle au fil des différentes strates d'écriture... ce en quoi les fameux palimpsestes chers à Hofnarr semblent remplir assez heureusement leur office.

Moralisme, passéisme, érudition universitaire confinant au pédantisme, catholicisme, anglo-centrisme : on peut sans doute trouver tout cela chez Tolkien, et ainsi ne pas l'apprécier en conséquence, ou du moins le goûter très modérément vis-à-vis de ces aspects, mais à mon avis, ce ne sera jamais pire que les commentaires de ceux qui se veulent en phase avec l'auteur au point de tout ramener au christianisme conservateur de l'écrivain, à son statut de "sachant" universitaire, etc., à l'aune de leurs propres convictions et préférences personnelles, notamment idéologiques et religieuses. À cette aune, et à la décharge de tous les tolkienophiles qui se piquent d'érudition, au risque, c'est vrai, de paraître parfois un peu pédants, la tentation de l'élitisme a sans doute été nourrie par Tolkien lui-même, mais j'aurai tendance à penser que ce qui peut le plus lasser, ce sont davantage les commentaires que la création littéraire elle-même. Concernant le fonds spirituel catholique de l'œuvre et la tentation récurrente de lui accorder une place hégémonique dans l'appréhension de l'œuvre, c'est un problème récurrent, présent notamment dans certaines discussions en ligne (sur JRRVF en particulier, mais aussi parfois sur Tolkiendil), et existant aussi surtout à travers diverses publications dans le sillage (déjà un peu lointain) d'un Joseph Pearce, et désormais de plus en plus souvent à travers une certaine presse confessionnelle. Or, en matière de promotion de certitudes religieuses, Tolkien était nettement plus subtil qu'un C. S. Lewis, me semble-t-il, et je ne peux donc que regretter que certains aient tendance à vouloir, même en s'en défendant, à plus ou moins "léwisiser" Tolkien à l'aune de leurs propres convictions chrétiennes. Le sujet du rapport de Tolkien et de la religion me parait avoir été traité avec un sens exemplaire de la nuance par Leo Carruthers : c'est dans son sillage qu'il me parait plus intéressant de considérer cette question, même si chacun est libre d'adopter personnellement toutes les grilles de lecture spirituelles que l'on voudra pour appréhender l'œuvre de Tolkien pour sa propre édification.
S'agissant de la misogynie et du racisme, tout le problème se situe encore dans la perception des lecteurs/commentateurs : bien des "fans" et des spécialistes font tout ce qu'ils peuvent pour tirer l'œuvre de Tolkien vers leurs idéaux féministes et antiracistes, en citant toujours les mêmes lettres de l'écrivain et en répétant toujours les mêmes arguments, tout en faisant finalement peu de cas de ce que pouvait vraiment penser Tolkien, dans le contexte de sa génération, sur les femmes et leur place dans la société ou sur ce que l'on appelle aujourd'hui le multiculturalisme. Certes, la misogynie et le racisme me dégoutent à titre personnel, mais disons que le "politiquement correct" de certains discours sur Tolkien à ce propos ne me satisfait pas pour autant : le sujet mérite mieux que les "éléments de langage" constitutifs d'un discours systématiquement défensif et tendancieusement mélioratif à l'égard de l'écrivain.

Concernant les langues elfiques, il est vrai que c'est une passion tolkienienne qui ne m'a jamais beaucoup attirée, mais là encore, le problème réside finalement moins en Tolkien qu'en ses admirateurs/spécialistes, car une impression revient régulièrement : les lambendili, ou du moins certains d'entre eux, semblent avoir des difficultés à concevoir que l'on puisse trouver un intérêt à Tolkien en dehors de l'étude de ses langues inventées. Pourtant, on peut avoir envie de les questionner très simplement à ce propos. Tolkien a-t-il écrit des dictionnaires de quenya, de sindarin, etc., ou bien des romans, des poèmes, des récits mythologiques ? Qu'est-ce qui est avant tout lu de lui, aujourd'hui comme hier, et dans quelle(s) langue(s) ? Rappelons, en outre, que pour qui n'est pas féru d'élitisme et d'ultraspécialisation, il peut être difficile de ne pas avoir l'impression d'être une sorte d'imbécile (tout lecteur de Tolkien que l'on soit) devant quelqu'un récitant des déclinaisons en quenya ou s'interrogeant sur la question de savoir si tel terme de cette langue fictive est allatif, datif ou un peu des deux... Je me souviens que c'est un reproche qu'avait vertement fait Vincent F. à Édouard K., il y a maintenant longtemps... mais ce souvenir lointain me parait renvoyer à une problématique qui reste assez actuelle dans la façon que l'on peut avoir de simplement "parler de Tolkien".
J'ai eu l'occasion de discuter récemment avec Elendil, sur le forum de JRRVF, sur la question du recul que l'on peut avoir vis-à-vis de ce que l'on fait dans le cadre d'une passion, en l'occurrence l'étude des langues de Tolkien : il m'est apparu que le degré d'investissement dans cette passion est une question de perception personnelle. Mais je pense que Corchalad et Elendil, que je connais quelque peu, ne seront pas surpris si je leur dit que des discussions entre eux sur tel ou tel point d'un sujet qui passionnent avant tout les lambendili ne sont pas forcément de nature à relever de discussions ouvertes en soi aux tolkiendili. Même quand on est très familier de l'œuvre littéraire de Tolkien, il est très facile de se sentir exclu de ce type d'échanges, ce pourquoi il me parait difficile de tout ramener à une mythologie et des langues conçues comme indissociables chez Tolkien, a fortiori pour justifier une passion spécifique pour les langues qui équivaudrait, par là-dessus, à mieux "comprendre" Tolkien que d'autres.
Par exemple, j'aime lire les Métamorphoses d'Ovide, en français, et je peux être curieux de variations de traduction d'après le latin, mais je ne me sens pas tenu d'être forcément un parfait latiniste (ou helléniste) pour parler de mythologie classique (gréco-latine) et pour simplement en apprécier la saveur, a fortiori à travers la lecture d'une œuvre littéraire. Cependant, il est vrai que je n'ai pas de prétentions universitaires très élevées, étant vacciné depuis longtemps (grâce à d'obligeants professeurs durant mes études supérieures) contre l'image quelque peu iréniste que certains peuvent encore avoir à l'égard de l'Université (cadre certes fort utile pour avoir les moyens d'étudier et de chercher, mais sujet à bien des travers à l'image de notre société actuelle)... Par ailleurs, s'agissant de la mythologie classique, il est vrai qu'elle a l'avantage de faire si profondément partie de notre culture occidentale que l'on peut facilement l'appréhender à travers bien des usages linguistiques, ce qui est sans doute nettement moins le cas pour la mythologie nordique par exemple (dans ce cas précis, ne lisant pas le vieux norrois, je ne peux d'ailleurs que me féliciter de connaître des connaisseurs et des spécialistes lorsque j'ai besoin d'être éclairé quant à certains éléments figurant dans telle ou telle saga scandinave... Wink ...).
Mais tout dépends aussi de ce que l'on veut, qui plus est s'agissant de Tolkien : veut-on lire de la littérature ? étudier toute une planification mythographique ? plonger sans fin dans la sophistication linguistique d'une œuvre ? Existe-t-il, à cette aune, une façon plus légitime qu'une autre d'appréhender Tolkien ? Il est permis d'en douter, m'est avis, mais je pense cependant que nous pourrons être d'accord là-dessus.

Concernant Peter Jackson, on ne va pas encore refaire le procès, longuement instruit, notamment sur JRRVF (je ne vise personne Wink ...) mais ailleurs aussi. Les discours jacksonophiles ne sont pas particulièrement ma tasse de thé (en particulier en ce qui concerne la deuxième trilogie, et plus généralement le traitement infligé sur six films au personnage de Legolas), mais surtout ils n'ont pas grand-chose à voir avec Tolkien selon moi. Quant aux discours jacksonophobes, que j'ai bien connu par le passé, j'avoue qu'ils ont pu contribuer à un certaine lassitude de ma part s'agissant du partage autour de Tolkien. Là encore, le problème est moins le sujet que le commentaire sur celui-ci. Heureusement, en tout cas, que nous sommes enfin passés à autre chose depuis quelques années... ce qui ne veut pas dire que je vois d'un bon œil la série d'Amazon à venir, car on aura encore certainement droit aux mêmes excès (de toutes sortes) qu'à l'époque des deux trilogies jacksoniennes...

S'agissant de Christopher Tolkien, c'est un sujet délicat puisqu'il semble y avoir comme une obligation impérieuse, sur la planète Tolkien, a être d'une déférence extrême à son égard, sans jamais vraiment pouvoir faire preuve d'esprit critique. Il me semble pourtant, à la lumière de tout ce temps passé, que nous sommes trop tributaires de ce qu'il a décidé, seul, de transmettre au public s'agissant des écrits et de la pensée de son père, pendant tant d'années. Je m'étais permis de poser cette question ouverte lors de la clôture du Séminaire Tolkien à l'ENS : le portrait de Tolkien transmis par son fils est-il un portrait ressemblant ? En l'état, je n'en suis pas sûr. Reste évidemment le travail immense de déchiffrage et d'édition du fils à partir de la masse des écrits du père : qui pourrait s'en plaindre ? C'est à saluer comme tel, mais c'est à mon avis plutôt une erreur de voir cela comme une sorte de "cadeau pour fans" qui justifierait une vénération de leur part : à mon avis le fils a travaillé pour la mémoire de son père, par piété filiale, mais ni plus, ni moins.

In fine, on l'aura compris, ce qui me déplait le plus vis-à-vis de Tolkien est donc, au fond, "la dévotion presque cultuelle qui entoure aujourd'hui son œuvre et sa personne" (mon seul choix de vote pour ce sondage), puisque c'est ce à quoi renvoie la plupart de mes remarques précédentes concernant les lecteurs/admirateurs/"fans"/spécialistes. J'ai de toute façon maintes fois eu l'occasion de le dire et de l'écrire, ici et ailleurs : idolâtrer Tolkien, le parer de toutes les vertus, hurler au génie à son propos, le concevoir comme une sorte d'"être supérieur" dans le domaine de la fantasy ou plus largement de la littérature, concevoir sa lecture et sa compréhension comme une sorte de "trip pour initiés", tout cela n'est non seulement pas ma tasse de thé, mais surtout ce n'est pas un service à rendre, ni à lui, ni à son œuvre.
J'ai récemment écrit, sur le forum de JRRVF, que j'ai peut-être trop fréquenté la planète Tolkien, durant toutes ces années, pour ne pas être, aujourd'hui, au bord d'une sorte de « burn out » tolkienien. C'est sans doute d'abord lié à mes travaux auquel j'ai consacré tant (trop ?) de temps et que je m'efforce d'enfin achever à présent. Mais plus généralement, ce que j'ai désormais (mais aussi bien n'est-ce pas nouveau) le plus de mal à supporter, c'est cette dévotion décidément démesurée, dont Tolkien n'a pas besoin selon moi, et qui me fait toujours me sentir plus ou moins en décalage avec la plupart des personnes avec qui je suis censé pouvoir partager "quelque-chose" dans ce milieu. Ceci dit, c'est la même chose avec d'autres milieux focalisés sur un autre écrivain ou artiste...
Non, décidément, je ne suis "fan" de rien. J'ai ce que j'appelle des amitiés littéraires, et plus largement artistiques, qui peuvent être profondes (indépendamment de ce que je peux penser des écrivains/artistes en tant qu'individus, tant ils sont souvent inférieurs à leurs œuvres), mais "être fan" (comme dirait l'autre), je ne sais pas trop ce que c'est, et en tout cas, "c'est pas ma guerre" (comme dirait encore un autre). Sans vouloir exagérer, mais pour les besoins "visuels" de la démonstration, c'est un peu comme si l'on me demandait de porter des oreilles de Mickey Mouse pour parler d'une chose qui m'intéresse si cette chose s'appelait le monde merveilleux de Walt Disney : a minima, disons que... j'ai passé l'âge, mais surtout que ce n'est pas mon truc par rapport à la façon dont je conçois une amitié littéraire (ceci dit sans vouloir par ailleurs dénigrer les cosplayers, hein : eux, au moins, ne se prennent pas au sérieux comme certains tolkienologues). Ceci dit, je respecte naturellement la passion d'autrui, même si selon moi elle ne doit pas non plus tout excuser.

Cela me fait penser qu'il y aurait sans doute quelque intéressante étude sociologique à faire sur ce que j'appelle le "fanariat", cette sorte de condition de "classe culturelle" au sein des mondes de l'art. Je partage l'idée en passant, fut-elle "dangereusement" marxisante pour certains... Wink

En espérant ne pas avoir trop "plombé" l'ambiance... en ces temps de réjouissances "presque" obligatoires... ^^'

Amicalement à toutes et tous,

Hyarion.

[EDIT: corrections de coquilles]
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
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#29
Il est très facile de se sentir exclu lorsqu'on écoute une discussion ou lorsqu'on assiste à une conférence de linguistes ou de philologues plus ou moins spécialisés, mais c'est aussi vrai dans bien d'autres domaines du savoir. Je ne comprends pas trop la partie de ton propos abordant ce point, Hyarion. Tolkien était philologue, a voulu construire des langues et un système de langues plutôt solides y compris dans la diachronie, donc on peut en parler en spécialiste, certes, mais surtout on peut difficilement parler autrement qu'en spécialiste des points plus ardus. Bien entendu, il est tout à fait possible d'être pédant, au sens propre, dans ce domaine, ou de vouloir parader, mais la plupart du temps, ce n'est ni ce que font ni ce que veulent faire les spécialistes... Bon, je ne peux prêcher contre ma paroisse, comme je suis doctorant et ATER.

Par rapport au discours mélioratif : en France, c'est peut-être aussi le produit, par réaction, d'une réception assez difficile de l'oeuvre de Tolkien, comme objet littéraire et culturel digne d'intérêt et d'étude, y compris en matière de recherche universitaire. Plus récemment, les adaptations n'y sont peut-être pas pour rien non plus : le visage de la Terre du Milieu qu'elles présentent est, parfois, tellement éloigné des textes, qu'on peut présenter en regard une figure de Tolkien valorisée, dans l'espoir de conduire les téléspectateurs à devenir des lecteurs ou à comprendre qu'il ne faut pas voir Tolkien par le biais des films. Je vois donc une partie de la valorisation, parfois excessive, de la figure de Tolkien, comme la conséquence d'une attitude défensive ou démarcative. Il y en a sans doute certains qui idolâtrent Tolkien, ou qui l'admirent excessivement, mais est-ce vraiment cela qui traduit le climat d'ambiance du monde tolkienien (cependant je ne le connais que par le biais d'internet, pas dans des formes plus directes de sociabilité) ?

Concernant le "fanariat" : avec Tolkien, j'ai l'impression globale que le milieu des amateurs et des passionnés de Tolkien est souvent mixte, avec un aspect d'amicale littéraire d'un côté, et de l'autre une approche qui ressemble plus à celle des autres groupes d'amateurs d’œuvres marquées par une forte popularité, et qui inclut aussi des "fans" au sens propre. J'ajoute que depuis la sortie des films de Jackson, il y a aussi des "fans des films" et de leurs produits dérivés avant tout, aussi hérétique cela semble-t-il aux plus purs des puristes.
Effectivement, le fait d'avoir une amitié littéraire pour un auteur ne doit pas empêcher d'être en mesure d'avoir un regard vraiment critique sur celui-ci. Il me semble aussi qu'il est sain d'être capable, malgré l'admiration, de regarder l'objet de celle-ci avec une certaine distance. Les plus "gros fans" n'en sont pas forcément capables.
Je pense par là à un phénomène de société et du monde culturel qui existe effectivement, et dont l'industrie culturelle use et abuse : par exemple, le fan ultime de Star Wars, dont la chambre ruisselle d'objets collectors, et qui ne sent pas forcément que la larme qui lui coule à l'œil quand il regarde la bande-annonce de l'épisode IX, est plus le produit d'une campagne de mercatique bien dosée, que celui de concepteurs aussi futés et inspirés que l'équipe de la saga originale. Certes, mon avis est orienté.

Cela étant dit, je comprends tout à fait qu'au bout d'un moment, quels qu'aient été l'admiration et l'éblouissement initiaux, on ne puisse que se lasser d'échanges qui n’incluraient pas une portée plus critique. Et je suis un peu méfiant envers ceux qui ne sont pas du tout critiques.
Malgré cela, je n'arrive pas à voter au sondage. Rolling EyesLaughing Notamment parce que "les aspects de l'oeuvre de Tolkien" et "les aspects liés à l'oeuvre de Tolkien", ce n'est pas exactement la même chose.

Concernant Tolkien et le français, Tolkien et les français : d'accord avec ce que tu écris, Hyarion.
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#30
(23.10.2019, 23:02)Mairon a écrit : Il est très facile de se sentir exclu lorsqu'on écoute une discussion ou lorsqu'on assiste à une conférence de linguistes ou de philologues plus ou moins spécialisés, mais c'est aussi vrai dans bien d'autres domaines du savoir. Je ne comprends pas trop la partie de ton propos abordant ce point, Hyarion. Tolkien était philologue, a voulu construire des langues et un système de langues plutôt solides y compris dans la diachronie, donc on peut en parler en spécialiste, certes, mais surtout on peut difficilement parler autrement qu'en spécialiste des points plus ardus. Bien entendu, il est tout à fait possible d'être pédant, au sens propre, dans ce domaine, ou de vouloir parader, mais la plupart du temps, ce n'est ni ce que font ni ce que veulent faire les spécialistes... Bon, je ne peux prêcher contre ma paroisse, comme je suis doctorant et ATER.

Tolkien était philologue, certes, et un philologue médiéviste reconnu par ses pairs qui plus est, mais personnellement, ce qui m'intéresse, c'est l'écrivain, quand bien même on pourra toujours insister sur le fait que l'un ne va pas sans l'autre, etc. Le sens de mon propos, c'est que l'étude des langues de Tolkien n'a selon moi d'intérêt ("général") qu'en ce qu'elle est mise en rapport avec l'œuvre littéraire (soit ce pourquoi Tolkien est lu), cette dernière ne devant pas, à cette aune, être subordonnée à la spécialité professionnelle universitaire de Tolkien et a fortiori à l'ultraspécialisation de certains tolkienologues. Sinon, à mes yeux, on ne fait que rajouter de l'élitisme à l'élitisme, dans la mesure où, encore ces temps-ci, certains ne se gênent pas pour proclamer une très haute supériorité littéraire à l'égard d'un écrivain qui, comme tant d'autres, a pu être immense dans son genre, mais limité par ce genre-même.

Je ne pense pas que telle ou telle compétence scientifique liée à une spécialisation universitaire fasse en soi de quelqu'un un grand artiste, s'il s'agit toujours de parler d'art, de littérature. La philologie, à cette aune, devrait être considérée comme une spécificité, une originalité, mais non comme en soi un gage de qualité, et encore moins de supériorité. Même sur le terrain particulier de la mythographie, Tolkien a eu ses limites, ce dont, je pense, il fut bien conscient face à son impossibilité d'achever son "Silmarillion", à force de réécritures et de remises en cause de tout ou partie de la structure sophistiquée qu'il voulait ériger avec des mots. On parle parfois de l'encyclopédisme de Tolkien, comme pour mieux souligner à quel point il n'était "pas comme les autres", mais en dehors de sa spécialité universitaire, était-il plus compétent que d'autres pour créer un univers fictif crédible et évocateur ? Faut-il d'abord inventer des langues imaginaires pour écrire de la fiction de qualité, dans sa propre langue maternelle (ou adoptive) pour commencer ? En quoi même le fait que d'autres écrivains inventent des bribes de langues, passant pour "des prétextes littéraires pour donner une impression d'exotisme" selon l'expression d'Elendil, feraient-ils d'eux, ontologiquement des écrivains moins sérieux ou moins importants que Tolkien, même "seulement" à l'échelle de la fantasy ? C'est là que l'on en revient peut-être à cette dimension "cultuelle" suggérée par Hofnarr...

Ceci étant dit, je ne fais qu'exprimer là un point de vue : celui-ci est forcément distancié par rapport à une passion que l'on peut nourrir pour les langues inventées de Tolkien et qui se trouve ne pas être la mienne. Pour moi, les langues inventées sont avant tout intéressantes par rapport à un résultat littéraire recherché, quel que soit le degré de sophistication de l'invention linguistique elle-même, mais d'autres sont toujours bien sûr libres d'aller plus avant dans l'exploration de cette dimension particulière de la créativité tolkienienne, ce qui suppose naturellement une spécialisation que tout le monde ne peut pas adopter.

(23.10.2019, 23:02)Mairon a écrit : Par rapport au discours mélioratif : en France, c'est peut-être aussi le produit, par réaction, d'une réception assez difficile de l'oeuvre de Tolkien, comme objet littéraire et culturel digne d'intérêt et d'étude, y compris en matière de recherche universitaire. Plus récemment, les adaptations n'y sont peut-être pas pour rien non plus : le visage de la Terre du Milieu qu'elles présentent est, parfois, tellement éloigné des textes, qu'on peut présenter en regard une figure de Tolkien valorisée, dans l'espoir de conduire les téléspectateurs à devenir des lecteurs ou à comprendre qu'il ne faut pas voir Tolkien par le biais des films. Je vois donc une partie de la valorisation, parfois excessive, de la figure de Tolkien, comme la conséquence d'une attitude défensive ou démarcative. Il y en a sans doute certains qui idolâtrent Tolkien, ou qui l'admirent excessivement, mais est-ce vraiment cela qui traduit le climat d'ambiance du monde tolkienien (cependant je ne le connais que par le biais d'internet, pas dans des formes plus directes de sociabilité) ?

Oui, c'est vrai, la réception de Tolkien en France a longtemps été contrariée (quoique moins, selon moi, que celles d'autres auteurs comme Robert E. Howard), justifiant sans doute un certain discours défensif (même si c'était éventuellement au prix d'une certaine "fanitude" militante), mais il me semble que ce n'est plus guère le cas aujourd'hui. Les préjugés et les idées reçues ont bien sûr la vie dure (et ils ne seront pas tous vaincus par une exposition à la BNF, aussi éloquente soit-elle), mais en tout cas Tolkien ne me parait pas (ou plus) avoir besoin qu'on le défende comme par le passé, que ce soit dans le souci de rééquilibrer les choses (on connait mon propre attachement à la recherche de l'équilibre en toutes choses... Wink ...), ou que ce soit avec la foi du charbonnier si prompte à vous faire basculer d'un extrême à l'autre sans précisément s'arrêter à la case "équilibre".
Je dis cela en fréquentant la planète Tolkien au-delà de la Toile depuis déjà longtemps, mais bon, ce n'est là évidemment que mon point de vue, fort rapidement esquissé qui plus est.

(23.10.2019, 23:02)Mairon a écrit : Effectivement, le fait d'avoir une amitié littéraire pour un auteur ne doit pas empêcher d'être en mesure d'avoir un regard vraiment critique sur celui-ci. Il me semble aussi qu'il est sain d'être capable, malgré l'admiration, de regarder l'objet de celle-ci avec une certaine distance. Les plus "gros fans" n'en sont pas forcément capables.
Je pense par là à un phénomène de société et du monde culturel qui existe effectivement, et dont l'industrie culturelle use et abuse : par exemple, le fan ultime de Star Wars, dont la chambre ruisselle d'objets collectors, et qui ne sent pas forcément que la larme qui lui coule à l'œil quand il regarde la bande-annonce de l'épisode IX, est plus le produit d'une campagne de mercatique bien dosée, que celui de concepteurs aussi futés et inspirés que l'équipe de la saga originale. Certes, mon avis est orienté.

Ton avis est orienté, Mairon, mais je le comprends tout-à-fait : cela fait des années que j'ai moi-même renoncé à m'intéresser à Star Wars en raison du contexte que tu évoques. Il me parait à présent impossible de même se sentir libre d'apprécier la création telle qu'elle se décline aujourd'hui, essentiellement par la faute de ceux qui ont, ou ont eu, ladite création entre les mains. George Lucas avait déjà commencé à faire n'importe quoi du temps où il était encore seul maître à bord, mais depuis le deal juteux passé avec Disney, on est encore passé dans une autre dimension, propice aux pires travers de ce que j'appelle le "fanariat", dimension qui n'a plus rien à voir avec la "galaxie lointaine, très lointaine" du départ... et de fait, cela ne m'intéresse plus du tout.

Concernant Tolkien, ce que je crains, à présent, c'est de finir par perdre la magie qui m'avait fait aimer l'œuvre de cet écrivain à l'origine, à force de n'être confronté qu'à un "culte" qui me dépasse et à tout ce qui peut tourner autour, y compris l'élitisme et l'ultraspécialisation. Cela n'empêche pas les rapports personnels amicaux, mais disons que je suis fatigué (comme je l'ai déjà dit sur JRRVF récemment d'ailleurs, ce pourquoi je ne gonflerai pas plus l'assistance ici avec ça)... Bref, que j'en finisse avec mes travaux, et ce sera déjà bien. ^^'

Hyarion.
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