Hello,
merci à Simon (et Didier ?) pour la publication de cet article en avant première. Une belle initiative !
Je voudrais faire deux ou trois remarques en vrac.
Dans l'introduction, je trouve qu'il y a une ambiguïté dans la façon de présenter "l'héritage" cartographique de Tolkien, notamment dans le passage citant Fenlon, Fonstad et Strachey.
D'abord, j'aurais séparé le premier des deux dernières, car les intentions ne sont pas comparables (jeu vs études) et ensuite, je trouve que ce passage n'insiste pas assez sur le fait que les nombreux travaux cartographiques de Tolkien étaient inconnus de ces auteurs avant 1988, date de la publication de la première carte de la Comté dans
The Return of the Shadow. Strachey et Fonstad ont toutes les deux publié leurs ouvrages dédiés à la Terre du Milieu en 1981, et la plupart des cartes de Fenlon pour les modules de jeu de rôle d'ICE sont antérieures à 1988...
L'intro laisse involontairement entendre que ces artistes auraient pu être inspirés par les cartes préparatoires de Tolkien, or ce n'est pas le cas, mais ce n'est pas suffisamment et clairement exprimé.
Un autre point concerne la méthode de travail de Tolkien et ses cartes préparatoires.
Sur ce point, je trouve également qu'il est fait abstraction du fait qu'il faut distinguer chez Tolkien les cartes destinées à être une aide à la conduite du récit, et les cartes destinées à être éventuellement publiées.
Parmi ces dernières, celles du
Seigneur des Anneaux, que Tolkien trouvait insatisfaisantes. Son insatisfaction jusqu'à la veille de la publication des romans, c'est la raison pour laquelle il a fait appel en dernier recours à Christopher, qu'il considérait plus compétent que lui-même pour cet exercice.
Tolkien a d'ailleurs également fait appel à Christopher pour des cartes "de travail" (cf les cartes réalisées en 1943)
Sur l'apport de Christopher à la cartographie de Fantasy, je suis bien évidemment entièrement d'accord, mais il ne faut pas oublier que ses cartes étaient validées par le paternel, et qu'elles s'inscrivaient dans une filiation évidente : elles succédaient à la carte "Wilderland" du Hobbit, qui elle a bien été dessinée en vue cavalière/aérienne par J.R.R. Tolkien. Et cette carte fondatrice, avec son orographie stylisée et ombragée, ses moutonnements d'arbres, ses motifs figuratifs, on ne peut pas dire qu'elle ait été influencée par Christopher, qui devait avoir 12 ans au moment de sa conception. Et pourtant, c'est bien elle qui, à mon avis, est à l'origine de
tout.
Une dernière remarque sur l'influence des cartes militaires sur le dessin cartographique de Tolkien.
C'est une hypothèse à laquelle j'ai pensé quand j'ai écrit mon petit essai sur les cartes de la Comté pour
Le Façonnement II. Je n'avais alors évidemment pas accès aux cartes préparatoires publiées par la suite dans
The Art of the Lord of The Rings et j'ai donc laissé tomber cette idée (à ce moment prématurée) et qui ne collait ni avec la toute première carte de la Comté par Tolkien (1938, publiée en 1988 ), ni avec la carte du Christopher pour le roman (1954, rééditée et corrigée en 1966).
Mais avec le recul (et le temps passé le nez dans la cartographie anglaise du siècle précédent) je vois autant d'influence possible de la cartographie militaire sur le dessin de Tolkien que la cartographie civile a pu en avoir.
En effet une multitude de cartes civiles grand-public, auxquelles Tolkien avait accès, peut répondre exactement aux mêmes caractéristiques que celles citées dans l'article. L'exemple de la figure 4 (carte de Thiepval en 1915) peut-être comparé à n'importe quelle carte civile "O.S" anglaise au 1/20 000 de la même époque, ou d'époque plus tardives (et contemporaines des cartes préparatoires en couleur des années 40/50, réalisées par Tolkien).
Donc, pour moi, l'art cartographique de Tolkien n'est pas
forcément un art de la Grande Guerre, même si je ne minimise en rien l'influence de l'expérience de La Somme dans l'art de Tolkien d'une manière plus globale.
Je trouve même, en général, le dessin cartographique de Tolkien très original et plutôt émancipé des modèles cartographiques auxquels il pouvait avoir accès.
Bon, ces remarques sont jetées en vrac et n'engagent que moi, bien entendu.
Elles n'enlèvent rien à la qualité de cet article et aux apports très intéressants sur la lecture et l'interprétation des paysages par la compréhension des courbes de niveaux (la "vision vraie" de Tolkien
)
Donc, encore une fois, bravo pour cet article, et encore merci pour le partage
A pluches !
I.