05.11.2018, 17:40
(Modification du message : 05.11.2018, 17:45 par Hofnarr Felder.)
Cher Daniel Lauzon,
J'espère qu'il ressort, de mes longs développements sur ce forum, tout le respect et l'estime que j'ai pour votre œuvre de traduction ; et d'ailleurs je ne demande que de vous voir traduire les Contes Perdus, le Silmarillion et les Contes et Légendes Inachevés, et enfin les tomes manquants de l'Histoire de la Terre du Milieu, parce que votre travail me paraît excellent et emporte toute mon admiration (sans que cela me fasse déprécier la traduction de Ledoux, qui a ses charmes propres, lesquelles ressortent d'autant plus évidemment aujourd'hui qu'il y a matière à comparer les traductions).
Il n'en demeure pas moins que je suis un peu ébranlé par votre message, puisque vous écrasez mon intervention par a°) un argument d'autorité (Tolkien souhaitait que...) et b°) un jugement absolument formel et irrévocable (ma proposition "dénaturerait" la création). Or cette intervention n'avait pas pour but de contester vos choix ou de les "améliorer", mais d'essayer de sentir et de faire sentir un certain "parfum" de l'original qu'on ne peut pas retrouver, sous tous ses aspects, dans la traduction.
"Shire" a donc un parfum (je répète à dessein) rural, profondément territorial. Il est clairement ancré dans une tradition anglaise et dans un lien avec le vécu des lieux. "Comté", en français, ne renvoie guère qu'à un découpage administratif, féodal, aujourd'hui dépassé et la plupart du temps entièrement obscurci, et qui n'entretient pas la même intimité avec le territoire. Il me semble que "Pays", au contraire, garde encore cette connotation, et la retranscrit mieux en français, la capture partiellement, car, dans certaines régions rurales du moins, il me semble que ces "pays" ont encore un sens (par exemple, le mot paysan). Il est vrai que je suis normand et les distinctions entre Pays de Caux et Pays de Bray ont tout leur sens là-bas, ce qui biaise peut-être un peu mes perceptions (alors même que je crois que les habitants seraient bien incapables de se référer à un quelconque comté).
Mais donc, pourquoi traduire "Shire" plus spécifiquement par Comté, en mettant l'accent sur l'aspect "démarcation féodale" (de l'Arnor ici en l'occurrence), plutôt que par "Pays", qui met au contraire en avant l'idée d'un territoire dans les limites duquel on circule, caractérisé par une certaine cohésion, par une sorte de communauté de vécu, un territoire enfin très ancré dans le terroir, quelque chose de profondément campagnard, qui fait sens pour ses autochtones qui lui reconnaissent une certaine réalité, une certaine pertinence dans l'organisation de leur espace et dans leur mise en perspective de ce qui est "chez eux" et de ce qui est "ailleurs".
Je ne dis évidemment pas qu'il aurait fallu traduire "Shire" par "Pays" ou que ma proposition est meilleure que quoi que ce soit, simplement, je pense qu'elle permet, dans le cadre très spécifique de ce fuseau de forum que je ne prétends certes pas déborder, de discuter de l’œuvre, de saisir et comme de déplier certaines dimensions du toponyme original que "Comté" laissent voilées, et qu'elle ne mérite donc peut-être pas de se trouver écrasée du talon comme vous le faites sans une once de discussion possible.
J'espère qu'il ressort, de mes longs développements sur ce forum, tout le respect et l'estime que j'ai pour votre œuvre de traduction ; et d'ailleurs je ne demande que de vous voir traduire les Contes Perdus, le Silmarillion et les Contes et Légendes Inachevés, et enfin les tomes manquants de l'Histoire de la Terre du Milieu, parce que votre travail me paraît excellent et emporte toute mon admiration (sans que cela me fasse déprécier la traduction de Ledoux, qui a ses charmes propres, lesquelles ressortent d'autant plus évidemment aujourd'hui qu'il y a matière à comparer les traductions).
Il n'en demeure pas moins que je suis un peu ébranlé par votre message, puisque vous écrasez mon intervention par a°) un argument d'autorité (Tolkien souhaitait que...) et b°) un jugement absolument formel et irrévocable (ma proposition "dénaturerait" la création). Or cette intervention n'avait pas pour but de contester vos choix ou de les "améliorer", mais d'essayer de sentir et de faire sentir un certain "parfum" de l'original qu'on ne peut pas retrouver, sous tous ses aspects, dans la traduction.
"Shire" a donc un parfum (je répète à dessein) rural, profondément territorial. Il est clairement ancré dans une tradition anglaise et dans un lien avec le vécu des lieux. "Comté", en français, ne renvoie guère qu'à un découpage administratif, féodal, aujourd'hui dépassé et la plupart du temps entièrement obscurci, et qui n'entretient pas la même intimité avec le territoire. Il me semble que "Pays", au contraire, garde encore cette connotation, et la retranscrit mieux en français, la capture partiellement, car, dans certaines régions rurales du moins, il me semble que ces "pays" ont encore un sens (par exemple, le mot paysan). Il est vrai que je suis normand et les distinctions entre Pays de Caux et Pays de Bray ont tout leur sens là-bas, ce qui biaise peut-être un peu mes perceptions (alors même que je crois que les habitants seraient bien incapables de se référer à un quelconque comté).
Mais donc, pourquoi traduire "Shire" plus spécifiquement par Comté, en mettant l'accent sur l'aspect "démarcation féodale" (de l'Arnor ici en l'occurrence), plutôt que par "Pays", qui met au contraire en avant l'idée d'un territoire dans les limites duquel on circule, caractérisé par une certaine cohésion, par une sorte de communauté de vécu, un territoire enfin très ancré dans le terroir, quelque chose de profondément campagnard, qui fait sens pour ses autochtones qui lui reconnaissent une certaine réalité, une certaine pertinence dans l'organisation de leur espace et dans leur mise en perspective de ce qui est "chez eux" et de ce qui est "ailleurs".
Je ne dis évidemment pas qu'il aurait fallu traduire "Shire" par "Pays" ou que ma proposition est meilleure que quoi que ce soit, simplement, je pense qu'elle permet, dans le cadre très spécifique de ce fuseau de forum que je ne prétends certes pas déborder, de discuter de l’œuvre, de saisir et comme de déplier certaines dimensions du toponyme original que "Comté" laissent voilées, et qu'elle ne mérite donc peut-être pas de se trouver écrasée du talon comme vous le faites sans une once de discussion possible.