25.01.2023, 10:57
Merci de votre intérêt pour cet article, et notamment à Elendil qui m'en a signalé plusieurs travers sur Academia.
Concernant les règles de dévolution, je partage entièrement son avis. L'exemple de l'Arabie saoudite actuelle est une continuité d'une pratique classique dans l'ère de civilisation islamique. Le souverain est choisi dans les descendants mâles du fondateur de la dynastie. Par exemple les souverains ayoubides devaient être descendants de Saladin.
L'inspiration de Tolkien était sans doute beaucoup plus proche des mérovingiens que des ayoubides aussi, vais-je essayer de préciser les règles de succession chez les descendants de Clovis, autant que je m'en souvienne.
La courte apogée mérovingienne du début du 7e siècle (Clotaire II et Dagobert) exerce une influence notable sur les monarchies anglo-saxonnes dont Tolkien connait bien la langue et la culture. Le trésor de Sutton Ho est en un témoignage archéologique. D'où l'idée de creuser dans cette direction pour trouver un modèle de dévolution ayant pu inspirer celui des Elfes.
Dans la monarchie franque, les souverains étaient nécessairement des descendants de Clovis et le Regnum Francorum était vu comme un bien patrimonial de la famille. Les rois francs qui régnaient à une époque donnée exerçaient en droit leur pouvoir sur l'ensemble du royaume, même si de fait ils n'en gouvernaient qu'une partie. Ils étaient toujours fondés à annexer la partie du royaume d'un cousin ou d'un neveu plus faible. Par exemple en 524 après la mort de Clodomir, ses frères liquident leurs neveux pour annexer sa partie du royaume, sans que cela ne heurte guère que la vieille reine Clotilde (qui sauve le petit Cloud). Ils sont fondés à le faire parce que le royaume leur appartient collectivement. En 558, Clotaire 1er a éliminé tous ses frères et neveux et le partage à la génération suivante se fait entre ses fils. Et ainsi de suite. Ce modèle de royauté collective peut nous éclairer sur le fait qu'il y ait de nombreux rois et seigneurs au Beleriand, tous issus de Finwë (pour les Noldor) le Haut Roi ayant une pré-éminence parmi d'autres rois.
Pour préciser les règles de dévolution elfiques, nous pouvons pointer que déjà avant la destruction des Arbres, la situation n'est pas évidente. Fëanor craint que Fingolfin intrigue contre lui auprès de son père, c'est l'une des raisons de leur brouille à cette époque. C'est donc que les droits de Fëanor à la succession d'un Finwë immortel n'étaient pas évidents. Quand la règle de dévolution est d'une force incontestable, par exemple le Dauphin dans la France d'Ancien Régime, ce genre de questions de ne se posent pas.
Pour la succession à la Haute Royauté des Noldor, une fois le cas de la Dépossession des Fëanoriens posé, les éléments sont assez clairs. La succession passe sans conteste à Fingon, puis à son frère, sans qu'à aucun moment l'hypothèse d'une succession vers Gil-galad soit posée à ce stade. La majesté de Turgon est grande et Tolkien la souligne plusieurs fois. Il était le prince des Noldor le plus craint du Morgoth.
Je crois surtout qu'après Nirnaeth Arnoediad, la situation est tellement désespérée qu'ils n'ont plus le loisir de s'interroger sur qui est le Haut-Roi, mais je ne me souviens d'aucun texte qui contesterait cette dignité à Turgon. Après la chute de Gondolin, il n'est pas non plus fait mention de Gil-galad, le seul leader qui émerge c'est Ëarendil avec le peuple à l'embouchure du Sirion. Et il n'a jamais revendiqué la dignité, même s'il est le petit-fils de Turgon.
On notera qu'au Deuxième Age, Gil-galad se présente comme Haut-Roi des Elfes et pas seulement des Noldor.
Si l'exemple franc nous renseigne sur le fait d'avoir plusieurs rois en même temps exerçant une monarchie collective (oxymore !) cela n’épuise pas le sujet des règles de dévolution du pouvoir au sein d'un peuple immortel.
Concernant les règles de dévolution, je partage entièrement son avis. L'exemple de l'Arabie saoudite actuelle est une continuité d'une pratique classique dans l'ère de civilisation islamique. Le souverain est choisi dans les descendants mâles du fondateur de la dynastie. Par exemple les souverains ayoubides devaient être descendants de Saladin.
L'inspiration de Tolkien était sans doute beaucoup plus proche des mérovingiens que des ayoubides aussi, vais-je essayer de préciser les règles de succession chez les descendants de Clovis, autant que je m'en souvienne.
La courte apogée mérovingienne du début du 7e siècle (Clotaire II et Dagobert) exerce une influence notable sur les monarchies anglo-saxonnes dont Tolkien connait bien la langue et la culture. Le trésor de Sutton Ho est en un témoignage archéologique. D'où l'idée de creuser dans cette direction pour trouver un modèle de dévolution ayant pu inspirer celui des Elfes.
Dans la monarchie franque, les souverains étaient nécessairement des descendants de Clovis et le Regnum Francorum était vu comme un bien patrimonial de la famille. Les rois francs qui régnaient à une époque donnée exerçaient en droit leur pouvoir sur l'ensemble du royaume, même si de fait ils n'en gouvernaient qu'une partie. Ils étaient toujours fondés à annexer la partie du royaume d'un cousin ou d'un neveu plus faible. Par exemple en 524 après la mort de Clodomir, ses frères liquident leurs neveux pour annexer sa partie du royaume, sans que cela ne heurte guère que la vieille reine Clotilde (qui sauve le petit Cloud). Ils sont fondés à le faire parce que le royaume leur appartient collectivement. En 558, Clotaire 1er a éliminé tous ses frères et neveux et le partage à la génération suivante se fait entre ses fils. Et ainsi de suite. Ce modèle de royauté collective peut nous éclairer sur le fait qu'il y ait de nombreux rois et seigneurs au Beleriand, tous issus de Finwë (pour les Noldor) le Haut Roi ayant une pré-éminence parmi d'autres rois.
Pour préciser les règles de dévolution elfiques, nous pouvons pointer que déjà avant la destruction des Arbres, la situation n'est pas évidente. Fëanor craint que Fingolfin intrigue contre lui auprès de son père, c'est l'une des raisons de leur brouille à cette époque. C'est donc que les droits de Fëanor à la succession d'un Finwë immortel n'étaient pas évidents. Quand la règle de dévolution est d'une force incontestable, par exemple le Dauphin dans la France d'Ancien Régime, ce genre de questions de ne se posent pas.
Pour la succession à la Haute Royauté des Noldor, une fois le cas de la Dépossession des Fëanoriens posé, les éléments sont assez clairs. La succession passe sans conteste à Fingon, puis à son frère, sans qu'à aucun moment l'hypothèse d'une succession vers Gil-galad soit posée à ce stade. La majesté de Turgon est grande et Tolkien la souligne plusieurs fois. Il était le prince des Noldor le plus craint du Morgoth.
Je crois surtout qu'après Nirnaeth Arnoediad, la situation est tellement désespérée qu'ils n'ont plus le loisir de s'interroger sur qui est le Haut-Roi, mais je ne me souviens d'aucun texte qui contesterait cette dignité à Turgon. Après la chute de Gondolin, il n'est pas non plus fait mention de Gil-galad, le seul leader qui émerge c'est Ëarendil avec le peuple à l'embouchure du Sirion. Et il n'a jamais revendiqué la dignité, même s'il est le petit-fils de Turgon.
On notera qu'au Deuxième Age, Gil-galad se présente comme Haut-Roi des Elfes et pas seulement des Noldor.
Si l'exemple franc nous renseigne sur le fait d'avoir plusieurs rois en même temps exerçant une monarchie collective (oxymore !) cela n’épuise pas le sujet des règles de dévolution du pouvoir au sein d'un peuple immortel.