21.11.2016, 11:11
J'ai l'impression, Druss, qu'à la fois je comprends et je ne comprends pas ta démarche.
D'un côté, en se plaçant dans la perspective de Tolkien, on peut s'interroger, effectivement, s'il est si rare en effet qu'un pays n'ait pas de mythologie qui lui soit propre. Dépendant des critères (qui restent à déterminer et dans l'absolu et pour Tolkien), il se peut en effet que très peu de pays puissent se targuer d'avoir une mythologie, si les critères que l'on pose sont trop restrictifs. Se pose aussi la question de la différence entre folklore et mythologie (la distinction se situant, à mon avis, hors du contexte qui leur est commun, et sans doute peu pertinente en définitive, mais je ne m'y connais guère).
De l'autre, je ne comprends pas ta recherche de textes exempts d'influence chrétienne. C'est simple : soit la tradition est restée authentique, et elle s'est alors adoptée au contexte religieux ambiant ; soit elle a été consignée il y a longtemps dans un texte qui en a souvent signé la mort (ou bien qui l'a sauvée de l'oubli) et en ce cas, comme il n'y a pas trace de texte écrit avant la christianisation du territoire de la Gaule à ce que l'on sache, c'est raté d'avance.
Mais je ne comprends vraiment pas pourquoi tu rejettes les textes où se lit une influence chrétienne. Comme mentionné plus haut par d'autres, Beowulf est parsemé de telles influences ; même l'antagoniste, le dragon, est par endroits nommé draco, donc avec un vocable qui n'appartient pas au fonds mythique de la tradition dont Beowulf est issu. Les runos finnois "souffrent" d'un même syncrétisme, et ce n'est pas parce que les touches chrétiennes ont été artificiellement expurgées dans le Kalevala, qu'elles n'existent pas. De même, la mythologie estonienne du Kalevipoeg est en très grande partie inventée par Kreutzwald (qui s'inspire d'ailleurs du Kalevala dans l'affaire), alors qu'il essaie de retrouver la mythologie recouverte par le vernis chrétien. Mais sa mythologie est alors un objet du dix-neuvième siècle, lorsque le syncrétisme traditionnel qui s'est opéré dans la culture estonienne (comme dans toutes les autres) est lui beaucoup plus authentique. On pourrait multiplier les exemples. Faut-il ainsi rejeter le statut mythologique du cycle de Manas (qui constitue tout de même le plus vaste cycle épique connu), sous prétexte que les Kirghizes ont été islamisés ?
Mon point ici, c'est que les influences chrétiennes constituent une adaptation du matériau précédent qui a permis, le plus souvent, de le sauvegarder intact. Autrement, ce matériau aurait fini par être en décalage avec la culture existante et donc à se désagréger (à moins qu'un Snorri ou qu'un Lönnrot passe par là et sauve les meubles).
D'un côté, en se plaçant dans la perspective de Tolkien, on peut s'interroger, effectivement, s'il est si rare en effet qu'un pays n'ait pas de mythologie qui lui soit propre. Dépendant des critères (qui restent à déterminer et dans l'absolu et pour Tolkien), il se peut en effet que très peu de pays puissent se targuer d'avoir une mythologie, si les critères que l'on pose sont trop restrictifs. Se pose aussi la question de la différence entre folklore et mythologie (la distinction se situant, à mon avis, hors du contexte qui leur est commun, et sans doute peu pertinente en définitive, mais je ne m'y connais guère).
De l'autre, je ne comprends pas ta recherche de textes exempts d'influence chrétienne. C'est simple : soit la tradition est restée authentique, et elle s'est alors adoptée au contexte religieux ambiant ; soit elle a été consignée il y a longtemps dans un texte qui en a souvent signé la mort (ou bien qui l'a sauvée de l'oubli) et en ce cas, comme il n'y a pas trace de texte écrit avant la christianisation du territoire de la Gaule à ce que l'on sache, c'est raté d'avance.
Mais je ne comprends vraiment pas pourquoi tu rejettes les textes où se lit une influence chrétienne. Comme mentionné plus haut par d'autres, Beowulf est parsemé de telles influences ; même l'antagoniste, le dragon, est par endroits nommé draco, donc avec un vocable qui n'appartient pas au fonds mythique de la tradition dont Beowulf est issu. Les runos finnois "souffrent" d'un même syncrétisme, et ce n'est pas parce que les touches chrétiennes ont été artificiellement expurgées dans le Kalevala, qu'elles n'existent pas. De même, la mythologie estonienne du Kalevipoeg est en très grande partie inventée par Kreutzwald (qui s'inspire d'ailleurs du Kalevala dans l'affaire), alors qu'il essaie de retrouver la mythologie recouverte par le vernis chrétien. Mais sa mythologie est alors un objet du dix-neuvième siècle, lorsque le syncrétisme traditionnel qui s'est opéré dans la culture estonienne (comme dans toutes les autres) est lui beaucoup plus authentique. On pourrait multiplier les exemples. Faut-il ainsi rejeter le statut mythologique du cycle de Manas (qui constitue tout de même le plus vaste cycle épique connu), sous prétexte que les Kirghizes ont été islamisés ?
Mon point ici, c'est que les influences chrétiennes constituent une adaptation du matériau précédent qui a permis, le plus souvent, de le sauvegarder intact. Autrement, ce matériau aurait fini par être en décalage avec la culture existante et donc à se désagréger (à moins qu'un Snorri ou qu'un Lönnrot passe par là et sauve les meubles).