(11.01.2013, 14:00)Catilina a écrit : Pour Howard, je crois que l' "adaptation" de Solomon Kane a été bien plus ravageur que celles de Conan.
L'erreur principale du film de Michael J. Bassett de 2009, à mes yeux, aura été de vouloir raconter la genèse du personnage de Solomon Kane, alors que le propre du Kane howardien est précisément de ne pas avoir d'origine clairement identifiée...
(11.01.2013, 14:09)ISENGAR a écrit : Le succès de ces adaptations pourries est effectivement un gigantesque plus pour le monde littéraire tolkienien qu'il serait vain de nier en bloc.
Mais on peut préciser que l'idée de "tout devoir" à Jackson est un point de vue qui peut se discuter très... longuement
"Tout devoir" à Jackson, certes non, cher JR. Mais comme tu le reconnais sagement toi-même, le succès des films aura effectivement été un "gigantesque plus".
(11.01.2013, 16:12)Mairon a écrit :Hyarion a écrit :Alors, quand certains se plaignent de P.J., alors que eux, au moins, peuvent en profiter pour avoir accès aisément à l'oeuvre de Tolkien grâce à la médiatisation dû aux films
Je connais aussi des personnes qui auraient largement préféré découvrir Tolkien avant d'avoir Jackson dans la tête.
Et je peux les comprendre, car il y a forcément un décalage...
(11.01.2013, 16:12)Mairon a écrit :Hyarion a écrit :Je trouve parfois que les Tolkiendili ne se rendent pas compte de la chance qu'ils ont
Ah. Je pense que la situation est plus compliquée que cela. S'il est certain qu'en pratique la sortie des films et tout le ramdam autour de ceux-ci a eu des retombées positives par certains côtés, je ne suis pas sûr que tous les Tolkiendili ayant connu Tolkien "sans Jackson" considèrent que les films ont été une "chance". Pour les parutions (des oeuvres intéressant Tolkien, pas le "monde des films"), les films ont accéléré un mouvement qui aurait quand même eu lieu, plus lentement...
A mes yeux, la principale conséquence des films est tout de même la constitution d'une Terre du Milieu bis quasi-officielle, parfois très éloignée de l'originale, qui semble attirer davantage de monde que les livres proprement dits (parce qu'elle est dans l'air du temps), et qui a fini par remplacer l'Arda de Tolkien dans la culture populaire. Je ne sais pas si c'est une chance, étant donné que le résultat du travail de P.J. et de son équipe, même s'il est d'un grand intérêt et mérite de grands bravos en lui-même, est plus controversé en tant que médiation vers Tolkien. Pour reprendre l'expression, j'ai l'impression que les fans de A Song of Ice and Fire de Martin ont plus de chance avec Game of Thrones que nous avec ces films (d'ailleurs, Martin lui-même travaille à l'adaptation, donc c'est différent)... Mais je ne dirais pas que l'on peut considérer objectivement comme une "chance" par rapport à l'original que tel ou tel livre/univers fasse l'objet d'une adaptation cinématographique : il y a toujours un risque de déperdition, de travestissement, d'altération voire de renversement (l'adaptation prend le pas sur le livre). Dans le cas d'un énorme succès comme les films SDA ou Hobbit, bien sûr, il va y avoir une retombée dans les lectures de l'oeuvre, mais elles me semblent moins nombreuses que la mise en avant de l'adaptation elle-même, surtout pour de telles productions accompagnées de 10000 produits dérivés. Avant de faire connaître Tolkien, et seulement par une médiation complexe et parfois trompeuse, les films font connaître Jackson... Aussi peut-on dire que certains fans de tel ou tel auteur ont la "chance" de ne pas avoir de telles adaptations, parce qu'ils peuvent faire connaître l'oeuvre sans avoir une telle oeuvre alternative plus ou moins déformante à côté - mais certes, sans tout ce que permet la sur-médiatisation...
Je suis franc, c'est mon avis de personne qui remercie le ciel, à chaque fois qu'il relit un livre de Tolkien, ou de Martin par exemple (lu juste avant le 1er épisode de la série), d'avoir pu le faire avant les adaptations...
Bien évidemment, dans ces histoires, rien n'est jamais simple. Chaque lecteur et/ou spectateur est différent, avec son vécu et sa sensibilité.
Lorsque je parle de chance, j'avoue que je pense davantage à ceux qui ont eu cette autre chance de découvrir Tolkien avant les films de P.J. (ce qui est mon cas à titre personnel) qu'à ceux qui ont découvert Tolkien à la suite du visionnage desdits films.
Ceci dit, je ne suis pas certain que le "mouvement" même plus lent dont tu parles aurait eu lieu sans les films. Trouver évident soi-même que Tolkien mérite une reconnaissance, c'est une chose... mais croire que les choses seront évidentes, même à long terme, pour tout le monde en est une autre (c'est notamment le cas en France, mais sans doute pas seulement).
Il me parait évident que l'impact des films a été décisif, bien plus que n'importe quel centenaire ou anniversaire littéraire ne pouvait sans doute l'être (cela pourra peut-être être différent désormais, ce qui serait heureux de toute façon, mais seulement maintenant que l'impact médiatique dû aux films s'est produit). En ce sens, donc, oui c'est une chance, même si, évidemment, il valait mieux avoir découvert les livres avant les films, et même s'il faut être lucide face à toutes les conséquences culturelles d'un phénomène médiatique dont les films bien plus que les livres auront été le moteur.
Quoiqu'il en soit, je crois que le temps travaille pour Tolkien, et que les films auront objectivement eu une utilité pour lui dans la mesure où ils auront donné une impulsion décisive en matière de diffusion de l'oeuvre, impulsion qui engendre une nouvelle génération de lecteurs qui pourra transmettre ensuite un intérêt pour les livres de Tolkien a une autre génération, laquelle sera sans doute bien moins exposé à l'influence des films pour apprécier les livres. Quelle que soit l'opinion que l'on peut avoir sur les films en eux-mêmes, il me semble qu'en raisonnant sur le long terme, si l'oeuvre de Tolkien mérite de rester dans les mémoires comme nous le pensons, alors je crois que oui, on peut bien parler de chance.
Cordialement,
Hyarion.
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)