(10.01.2013, 21:52)Elendil a écrit : Entièrement d'accord avec cette analyse. C'est pour moi le nœud du problème. J'ai tendance à croire que Jackson aurait pu faire une adaptation magistrale des œuvres de Fritz Leiber, de Terry Brooks, de Marion Zimmer Bradley, voire de Robert Howard, mais qu'il ne perçoit nullement que Tolkien ne se situe pas dans la lignée de ceux qui l'ont imités.
Je ne suis même pas convaincu qu'il eût pu adapter correctement ces oeuvres. En effet, la fantasy américaine a ses propres codes plus basés sur l'action, la force (physique ou de volonté) que sur des considérations morales (mêmes si elles sont loin d'être absentes, juste secondaires).
On est loin de la caricature d'un "moi vois, moi tue" dans Conan, Kull, ou Solomon Kane; Leiber (dont je ne suis pas sûr que l'on puisse dire qu'il aie imité Tolkien, le début de son Cycle des Epees étant légèrement antérieur au Hobbit) a lui aussi des codes affirmés.
Ses codes sont essentiellement dus à un contexte littéraire (pour Howard, le format pulp l'obligeant à la nouvelle et à l'ajout du fantastique par exemple) n'existant plus.
Vu la "méthodologie" utilisée par P.J pour ses films, j'ai peur qu'il n'eût réussi qu'à faire un amas de clichés (un peu comme le film Conan de son côté).
Peut-être aurait-il réussi à adapter le Conan revu et corrigé par Sprague de Camp, mais le Conan proprement howardien (c'est à dire plus travaillé, nihiliste, nitzchéen et héros "pessimiste")?
Par contre, il eût peut-être réussi pour Brooks, parce qu'ici nous sommes dans le pastiche (au sens strict du mot), dans l'imitation (c'est à dire la reprise de la forme) de Tolkien ce qui aurait collé à la vision de P.J : "faire comme mais en différent".
(Je précise que je n'ai rien contre Brooks, mais il faut bien considerer d'un coté des "maîtres" comme Tolkien, Howard, Leiber ayant la capacité de créer des codes, et des "honnêtes artisans" qui ne peuvent qu'imiter)
Citation :Or la plupart des jeux de rôle et, par nature, tous les jeux-vidéos, sont fondés sur des calculs.
Je ne suis pas vraiment convaincu pour la nature du calcul dans le "jeu de role". Si il est vrai (et surtout dans les années 90) que les systèmes étaient lourd (le systeme Rolemaster pour JRTM est une sorte de référence dans le genre), la collaboration et la réciprocité des histoires permet de s'échapper des chiffres (ce n'est pas systématique, mais du moins le support le permet largement).
Ici P.J ne profite pas du support, il est dans une logique d'"artisan". Ce qui serait tout à fait correct si il ne s'agissait pas de replâtrer Tolkien comme l'on replâtrait les fresques médiévales dans les églises au XVII pour faire "moderne".
Citation :Dit autrement : la pitié dans le SdA est incalculable, elle paraît être une force mineure alors même qu'elle change radicalement le cours des choses avec trois fois rien. Mais la simple force se calcule sans trop de difficulté : qu'arrive-t-il quand un Ent met une baffe à un orc ?Encore que P.J a eu le sentiment qu'il fallait ne serait-ce qu'en parler. Mais il ne montre pas réellement le pouvoir de la pitié, comment elle réussit à changer l'histoire.