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prépositions en sindarin
#1
Dans la continuité de la comparaison du sindarin avec les langues celtiques, commencée dans le thread "An Hobbit", j'aimerais savoir comment sont utilisées les prépositions en sindarin.
Comment traduire les expressions suivantes?
  • pour Aragorn
  • pour moi
  • avec Aragorn
  • avec moi
  • vers Aragorn
  • vers moi
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#2
C'est une question délicate puisque le sindarin est assez pauvrement attesté en ce qui concerne la gramaire : on a très peu de textes en sindarin (4 textes conséquents, quelques courtes phrases) et peu de desciptions grammaticales explicites de Tolkien.

Dès lors qu'on entre dans le domaine des prépositions et des différentes mutations existantes, on est en terra incognita... On sait qu'il existe une mutation douce ou adoucissante (aussi appelée lénition), ainsi qu'une mutation nasale, et qu'une mutation mixte probable semble être envisageable, mais pour le reste on est dans le flou. Helge fauskanger (suivant la théorie de David Salo) dans son article sur le sindarin table sur une mutation liquide et une mutation occlusive (ou durcissante), mais il n'y a aucune occurence des ces mutations au niveau grammatical : Helge suppose leur présence de part les modifications de consonnes dans certains noms propres ou toponymes du corpus. Or, il s'agit à mon avis d'une extension abusive et d'une utilisation en synchronie de phénomènes d'assimilation et de dissimilation qui ont eut lieu au niveau diachronique : ce sont des changement qui ont eut lieu de façon historique (or les noms propres et toponymes évoluent généralement moins vite qu'une langue et ont une tendance affirmée à conserver des traces anciennes de leur étymologie et des archaïsmes), mais il n'y a pas lieu d'y voir des mutations d'ordre grammatical (c'est en tout cas abusif dans le sens où ces mutations ne sont pas attestées grammaticalement).

Pour en revenir à nos moutons :

an = « pour, à ». On suppose que cette préposition déclenche une mutation nasale du mot suivant (ex. a Pherhael « pour Perhael (Samsagace, lit. "demi-sage") » < *an Perhael, dans la King's Letter).

go-, gwa- « ensemble » (utilisé peut-être aussi en tant que préposition indépendante « avec »). suppose que cette préposition déclenche une mutation adoucissante du mot suivant.

na « vers, à » déclenche la mutation adoucissante. Ex. l’expression na-chaered « au loin » dans l'hymne A Elbereth traduction), haered « loin, le lointain » subissant la mutation douce pour devenir chaered. (Pour haered sous forme non mutée, observez le nom Haerast « Rive Lointaine » mentionné dans le Glossaire du Silmarillion, entrée Nevrast.)

Le fait de chosir Aragorn ou « moi » pour les exemples n'est pas judicieux puisque Aragorn commence par une voyelle, et le pronom de la 1ère pers. du sg. im également : les mutations sont donc invisibles sur ces mots (il semblerait également que, comme en breton ou en gallois, toutes les consonnes ne soient pas également affectées par les mutations : certaines résistent aux mutations et toute ne mutent pas forcément de façon régulière).

Enfin, il faut répéter que le domaine des mutations consonantiques est encore très mal connu en sindarin : on a autant de cas où les mutations sont utilisées que de formes non mutées là on attendrait une mutation (bref, le sujet est loin d'être clair). En l'absence d'un tableau explicite de Tolkien, on manque d'exemples suffisants pour établir un paradigme complet et sûr des différentes mutations attestées (ce qui est présenté dans Ardalambion est très hypothétique), et de déterminer dans quels conditions grammatical ou syntaxiques les mutations interviennent.
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#3
Merci pour ces explications vraiment interessantes.
Cependant ce n'était pas la question des mutations que je cherchais à soulever, mais celle des conjuguaisons des préposistions. La simple traduction des phrases que j'ai demandé aurait probablement suffi à y répondre, donc si tu sais le faire ce serait parfait. En fait je voudrais savoir si le sindarin utilise des prépositions invariables suivies de pronoms personnels, ou si il conjugue les prépositions à toutes les personnes, comme dans les langues celtiques.
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#4
Bernard a écrit :La simple traduction des phrases que j'ai demandé aurait probablement suffi à y répondre, donc si tu sais le faire ce serait parfait.
Comme je l'ai dit plus haut, on est encore très mal documenté sur la grammaire et la syntaxe du sindarin. Déjà qu'on ne sait pas exactement quelles mutations existent réellement d'un point de vu synchronique (vs. dissimilations/assimilations diachroniques), alors pour ce qui est de mettre ces règles en oeuvre dans des reconstructions... Wink

Citation :En fait je voudrais savoir si le sindarin utilise des prépositions invariables suivies de pronoms personnels, ou si il conjugue les prépositions à toutes les personnes, comme dans les langues celtiques.
En l'état actuel de nos connaissances on ne peut se prononcer. D'après la section sur les pronoms de l'article d'Ardalambion sur le sindarin (à prendre avec des pincettes, comme toujours), on peut faire les constatations suivantes :
1) le paragdigme des pronoms sujets n'est pas complet, ni certain, et il est encore plus parcellaire pour les pronoms possessifs, objets ou objets seconds (datif) (on ne sait parfois même pas si le pronom est sujet, objet ou objet second).
2) il semblerait effectivement que certaines prépositions se déclinent en fonction des personnes (ex. anim « pour moi-même » et ammen « pour nous » ou « de nous »), mais les attestations sont bien minces pour en tirer une règle générale.

Je ne me risquerai donc pas à décliner les prépositions en fonctions des personnes ou à tenter des reconstructions très hypothétiques.
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#5
Je ne pensais pas que nos connaissances du sindarin étaient aussi parcellaires. Tout le monde n'éprouve pas autant de remords que toi à généraliser à fond à partir des rares extraits. J'ai vu sur le web plusieurs grammaires détaillant à l'extrême les mutations par exemple Wink.
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#6
Bernard a écrit :Je ne pensais pas que nos connaissances du sindarin étaient aussi parcellaires. Tout le monde n'éprouve pas autant de remords que toi à généraliser à fond à partir des rares extraits. J'ai vu sur le web plusieurs grammaires détaillant à l'extrême les mutations par exemple Wink.

remords ? Tu voulais dire "scrupules" je pense...
Eh oui, sur le Net il y en a qui font n'importe quoi, histoire de se rendre intéressants. Cool
Comme chacun est libre de s'exprimer sur Internet ces dérives sont monnaie courante, presque normal sur un tel média. Pour pouvoir juger de la qualité d'un travail, il faut un temps soit peu l'avoir étudié soi-même.


Ces "grammaires" détaillant le sindarin sont le fruit de "délires" et non d'études de linguistes. Il est honteux de berner ainsi le public. :cry:

bonne journée,

E. Kloczko
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#7
Edouard a très bien résumé la situation de ce qui se passe sur internet... mais je ressens le besoin d'en remettre une couche ! Twisted Evil

Ainsi, l'article sur le sindarin d'Ardalambion, qui est considéré comme un site "sérieux" (par rapport à des délires encore plus aberrants comme le Greylvish qui mélange allégrement quenya et sindarin + inventions totales en un gloubiboulga indigeste), pêche de part le point de vue et l'approche adoptés par l'auteur, ce qui est valable pour la plupart des autres articles : Helge Fauskanger a pour but clairement énoncé de fournir une version "utilisable" des langues elfiques de Tolkien, quitte pour cela à mélanger des matériaux d'époques différentes (et donc pas forcément compatibles) pour combler des trous, à théoriser des règles hypothétiques en se basant sur très peu d'occurences (théories qui ne sont pas toujours présentées comme talle au lecteur, ce qui est une forme de tromperie), voire à rejeter des formes de Tolkien, sous prétextes qu'elles ne rentrent pas dans le cadre de ses théories personnelles.

La motivation même de ces travaux, fournir une forme "utilisable" des langues de Tolkien, suffit à les décridibiliser : 1) c'est une attitude non scientifique, 2) c'est mettre la charrue avant les boeufs (d'abord on étudie les données, après on interprète, on déduit des règles et enfin on peut tenter des reconstructions pour tester la validité des hypothèses), 3) cette approche est subjective et fausse les recherches (on élabore des théories pour justifier tel ou tel emploi en néo-sindarin, ou pour trouver comment exprimer telle ou telle notion qui n'apparaît pas dans le corpus), 4) enfin, cette approche est à l'opposé des intensions de Tolkien qui n'a jamais voulu fournir des langues utilisables (en dehors des quelques textes qu'il composait pour son plaisir) mais plutôt de fournir un "background" linguistique cohérent à ses histoires (chose qu'il ne trouvait jamais dans la littérature fantastique). Son amusement résidait dans l'évolution historique des langues (cf. les Etymologies) et dans la conception de structures linguistiques.

Au final, les langues décrites par Fauskanger et consorts ne sont pas les langues de Tolkien mais des langues inspirées et basées sur les langues elfiques de Tolkien, reconstruites selon les interprétations de H. Fauskanger et David Salo (et d'autres). On a donc affaire à du néo-sindarin et du néo-quenya (à l'image de la cuisine bidouillée par David Salo pour les films de Peter Jackson).

Le problème, c'est que cette attitude et cette approche sont presque les seules qui soient défendues sur internet (comme l'a justement dit Edouard, "chacun est libre de s'exprimer sur Internet", mais ce sont rarement les gens les plus sérieux ou compétents qui font des sites sur les langues de Tolkien), et nombreux sont ceux qui, emboîtant le pas d'Ardalambion, élaborent des dictionnaires, cours et autres grammaires, principalement basées sur... les travaux d'Helge Fauskanger ! (alors que les sources originales sont les écrits de Tolkien, mais c'est tellement plus facile de reprendre ce qui est donné sur le net pour pondre son truc, plutôt que de faire de longues et fastidieuses recherches dans des sources nombreuses où les données linguitiques sont éparpillées)

Tout cela amène le public à penser que les langues imaginaires de Tolkien sont utilisables pour écrire tout et n'importe quoi (des poèmes, des gravures sur des alliances ou des tatouages), et que, puisqu'elles sont imaginaires, ce n'est pas si grave si l'on fait un peu ce qu'on veut avec (création de pseudos en elfique, néologismes douteux, etc.). Je ne crois que cela soit faire honneur à la mémoire d'un homme qui a consacré toute sa vie à l'élaboration d'un monde où ses langues pouvaient exister (sa subcréation littéraire : Arda), contrairement à ce qu'affirme Helge Fauskanger...
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