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Quelles sont les causes du changement linguistique chez Tolkien ?
#8
(10.01.2016, 19:38)faerestel a écrit : Il en est ici qui ont de bien plus considérables connaissances linguistiques dans les mondes primaire et secondaire que moi et qui te renseigneront bien mieux. Je pense à Elendil qui va finir, c'est sûr, par passer ici! Wink

Forcément...

(10.01.2016, 16:16)Hofnarr Felder a écrit : Quant aux individus, supposons par exemple qu'à une date A tel mot prenne la forme P1 et qu'à une date B plus tardive il prenne la forme P2. Je crois bien que de tels exemples sont nombreux chez Tolkien, non ? Maintenant, dans le monde des hommes de notre âge, il est assez peu probable qu'un même individu soit vivant aux dates A et B, qui sont généralement très éloignées l'une de l'autre (quoique cela soit matière à débat, mais là n'est pas le lieu). Or, pour les Elfes, qui n'ont pas de cause de mortalité interne, ceci doit bien arriver. Donc, disons que tel Elfe soit vivant à la fois aux dates A et B. Est-ce que l'on aurait alors un exemple, chez Tolkien, que ce même individu emploie, à la date A, la forme P1, et à la date B, la forme P2 ? Ou bien, parce qu'il utilisait P1 à la date A, il n'a pas actualisé le changement dans son propre langage, alors qu'il a eu lieu dans la langue ?

Déjà, il semble qu'on ait au moins un excellent de changement linguistique brutal et massif dans notre monde, rien moins que le grand changement vocalique qui a donné naissance à la prononciation moderne de l'anglais. D'après un linguiste de mes connaissances, le changement a été si brusque qu'en une génération les gens avaient complètement changé leur prononciation de certaines voyelles.

Par ailleurs, le « Dangweth Pengoloð » (PM, p. 395–402) que cite Hiswelókë répond exactement à ta question au sens où le sage y Pengolodh affirme que les Elfes, qui ont une excellente mémoire, peuvent se souvenir de discussions dans un passé très lointain, mais transfèrent sur le souvenir de cette discussion la manière dont ils parlent à l'instant présent (autrement dit, s'ils ont prononcé le mot P1 à la date A, quand ils se remémorent ces paroles à la date B, ils se souviennent avoir utilisé le mot P2 ; cf. PM, p. 399) :

J.R.R. Tolkien a écrit :For we have much lore concerning the languages of old, whether stored in the mind or in writings; but we hear not ourselves speak again in the past save with the language that clothes our thought in the present.

(10.01.2016, 17:36)Hisweloke a écrit : Dans un texte paru dans The Peoples of Middle-earth, Tolkien prête au sage Pengoloð une explication des raisons pour lesquelles les langues des Elfes changent, et se sont éloignées les unes des autres. Les changements sont beaucoup plus lents que pour les langues des Hommes, mais néanmoins se produisent peu à peu invitablement, en raison de la séparation des peuples, de leurs migrations et de leur rencontres avec les Hommes. A cela s'ajoute le plaisir de l'invention linguistique qu'éprouvent les Elfes, qui aiment ainsi altérer et modifier leur langue, qui reste vivante et non figée dans le passé de leur enfance. Pengoloð précise que ces modifications, qu'elles soient volontaires ou non, ressemblent, sur le plan linguistique, à l'évolution des langues des Hommes.

Ce bref résumé ne donne évidemment pas toute la saveur de l'explication de ce bon vieux Pengoloð -- dont le savoir n'est pas absolu non plus Wink

C'est toutefois un excellent résumé de l'essentiel. Wink

(10.01.2016, 18:11)Hofnarr Felder a écrit : Mais faut-il comprendre d'après Pengoloð que les causes du changement linguistique seraient différentes pour les Elfes et pour les Hommes ? Le changement serait alors chez les Elfes lié à un souci d'esthétique, si je comprends bien, éventuellement entériné par une sorte de convention sociale (dans le Schibboleth de Fëanor). Et pour les Hommes ? Des indices ?

En effet, pour les Elfes, c'est à peu près ça, notamment à Valinor. En Terre du Milieu, les changements aléatoires et involontaires arrivent aussi chez les Elfes, comme en témoigne l'éloignement considérable entre le sindarin (très transformé) et le quenya (relativement conservateur). Pour les Hommes, les changements se font comme le reconnaissent les linguistes du Monde Primaire : au hasard et sans intention particulière.

(10.01.2016, 18:11)Hofnarr Felder a écrit : D'ailleurs, pourrait-on, à partir de la langue des Orques, retrouver les racines linguistiques qui permettraient d'indiquer (sans certitude évidemment) quelle est, sur le plan linguistique du moins, leur origine la plus plausible (sur les autres plans, j'ai déjà lu l'article très intéressant de Tolkiendil sur le sujet) ? Ou alors, leur aurait-elle enseignée par Morgoth qui, pour "déconstruire" leur origine première, déconstruirait également leur langage, les forçant à parler une nouvelle langue détachée de toutes les racines qui auraient pu leur être familières ?

(10.01.2016, 19:38)faerestel a écrit : Néanmoins je ne pense pas me tromper en disant que l'orquin ne nous fournit pas assez de matériaux pour comprendre son évolution, ni même son état à la fin du Troisième Age. Nous ne connaissons que quelques phrases et mots isolés (comme "Sharkû").
Sauron a bien tenté d'imposer sa "novlangue", le Noir Parler, celui que l'on peut lire sur l'anneau unique (Ash nazg durbatulûk...) mais sans succès...

Assez d'accord avec Faerestel : ce n'est pas avec le vocabulaire orquien existant qu'on peut faire une étude comparative robuste.

Toutefois, on peut noter la proximité de l'orquien ghâsh « feu », dit être dérivé du parler noir avec le valarin #(i)gas « chaleur » (extrait d'Aþâraigas « Soleil », litt. « Chaleur établie » ; cf. WJ, p. 399, 401). Cela laisse penser que Sauron s'est inspiré du valarin lors de l'invention de sa langue personnelle, ce qui est d'ailleurs assez logique. Par ailleurs, au moins un autre mot est explicitement affirmé avoir été repris au quenya : l'orquien tark « Númenórien » est à priori une abréviation du quenya tarkil, de même sens. Compte tenu de la date tardive d'apparition de ce mot elfique, il ne peut que s'agir d'un emprunt et non d'un héritage. Toutefois, d'autres mots pourraient dérivés ou avoir été emprunté à une langue elfique dans une époque reculée, comme agh « et », qui peut évoquer les mots quenya ar et sindarins a, ah, de même sens. Dans un cas comme celui-là, il me semble impossible de trancher, d'autant qu'on connaît de manière encore plus fragmentaire les langues des Edain et des Nains, qui auraient permis de fournir des éléments de comparaison.
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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