20.11.2022, 20:45
Lorsqu’il le reconnut, le teint du guerrier vira au gris et ses épaules s’affaissèrent. Quelque-chose dans la tournure du jeune homme l’avait terrassé. Grumbar le vit se tasser sur lui-même, s’agripper des deux mains à sa lance. Ses yeux exorbités se levaient haut vers le géant, atterrés dans son ombre écrasante. Sa barbiche tremblotait, flasque et terne sur sa face décomposée…
Le jeune homme savait avoir grandi et pris de l’assurance ; mais il fut surpris par la réaction de ce vétéran, ce chasseur chevronné. Un plaisir barbare fit frissonner l’échine de Grumbar. Un sang de prédateur irriguait ses artères et gonflait sa musculature. Pour rien au monde le géant n’aurait montré sa surprise ; au contraire, il laissa enfler sa colère avec délectation.
Le visage du vieux avait pris dix ans d’un coup, marqué de cernes et tendu de lambeaux larmoyants. Se sentait-il en faute ? Sous le regard scrutateur de Grumbar, le chasseur se mit à gesticuler comme un damné à l’hallali. Non plus la peur qui mobilise les facultés du guerrier, mais la terreur panique qui submerge, l’instinct qui chuchote que la mort le regarde.
Devant cette agitation, les chiens se mirent à geindre, la queue basse, les oreilles inquiètes, quêtant un signe de leurs yeux implorants, tant auprès du vieux chasseur que de leur jeune maître. Les yeux écarquillés, le regard éperdu, Sarro tentait de pointer sa lance de ses mains tremblantes, mais le cœur du chasseur battait la chamade et ses jambes le trahissaient.
L’ombre d’un sourire cruel aux lèvres, pesant de son regard impitoyable sur le vieux, Grumbar savourait cette revanche sur les heures d’humiliation à jeûner, à collecter du bois, à construire des pièges, à assurer la garde du camp des jeunes chasseurs, à supporter le jugement du clan à son égard. Il outrait son air sévère, roulant des biceps et des épaules. Comme il se sentait à l'étroit dans ses braies de jeune homme, devant ce chasseur, son maître autrefois, qui se tortillait à présent comme un vieillard effarouché.
Sarro, livide et courbé, eut à peine la force d’articuler :
– Tu es bien comme ton père ! Que Bema Wealdafréa nous protège !
A suivre...
Le jeune homme savait avoir grandi et pris de l’assurance ; mais il fut surpris par la réaction de ce vétéran, ce chasseur chevronné. Un plaisir barbare fit frissonner l’échine de Grumbar. Un sang de prédateur irriguait ses artères et gonflait sa musculature. Pour rien au monde le géant n’aurait montré sa surprise ; au contraire, il laissa enfler sa colère avec délectation.
Le visage du vieux avait pris dix ans d’un coup, marqué de cernes et tendu de lambeaux larmoyants. Se sentait-il en faute ? Sous le regard scrutateur de Grumbar, le chasseur se mit à gesticuler comme un damné à l’hallali. Non plus la peur qui mobilise les facultés du guerrier, mais la terreur panique qui submerge, l’instinct qui chuchote que la mort le regarde.
Devant cette agitation, les chiens se mirent à geindre, la queue basse, les oreilles inquiètes, quêtant un signe de leurs yeux implorants, tant auprès du vieux chasseur que de leur jeune maître. Les yeux écarquillés, le regard éperdu, Sarro tentait de pointer sa lance de ses mains tremblantes, mais le cœur du chasseur battait la chamade et ses jambes le trahissaient.
L’ombre d’un sourire cruel aux lèvres, pesant de son regard impitoyable sur le vieux, Grumbar savourait cette revanche sur les heures d’humiliation à jeûner, à collecter du bois, à construire des pièges, à assurer la garde du camp des jeunes chasseurs, à supporter le jugement du clan à son égard. Il outrait son air sévère, roulant des biceps et des épaules. Comme il se sentait à l'étroit dans ses braies de jeune homme, devant ce chasseur, son maître autrefois, qui se tortillait à présent comme un vieillard effarouché.
Sarro, livide et courbé, eut à peine la force d’articuler :
– Tu es bien comme ton père ! Que Bema Wealdafréa nous protège !
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A suivre...