05.10.2013, 17:53
(Modification du message : 05.10.2013, 18:10 par Thorin II Ecu-de-Chêne.)
Attention de ne pas dévier.
D'une façon générale, l'oeuvre de Tolkien sourd de considérations judéo-chrétiennes sous des habits germano-celtiques. L'oeuvre de Tolkien est, à mon sens, une oeuvre d'édification morale (plus que ce que Tolkien voulait, c'est-à-dire une mythologie nationale alternative).
Il y a deux possibilités de s'y appliquer : ou en faisant comme Lewis avec un parallèle évident et des questions posées franchement, le tout donnant par essence une oeuvre chrétienne affichée quoi qu'à mon avis un peu vulgaire par son côté appuyé. Il y a ensuite une version que je pense plus érudite, moins manifeste mais, puisque les abords n'en sont pas ouvertement moralistes, aptes à toucher un public plus large que celui "en éducation" (la jeunesse, qui apprend les concepts moraux de notre culture) ou "compatibles" (des adultes qui comprennent et sont d'accord avec les parallèles). Tolkien a eu la force, la finesse et le talent suffisants pour toucher une population qui n'était pas raccordée au culte, même inconsciemment : les libertaires de Berkeley auraient ri d'un texte où on aurait trop clairement affiché une volonté moraliste.
Une petite remarque de rien du tout : le terme "adorer" était utilisé dans le mariage car la femme devait "adorer" son mari (qui lui en retour lui devait respect et protection). Donc l'adoration dans l'Histoire chrétienne est un très, très long sujet, qui n'est peut-être pas inutile d'aborder mais pas sans échauffement, sinon gare au claquage.
De là à considérer que Sauron ou Morgoth se présentent comme des "dieux créateurs", je ne serais pas d'accord parce que je pense qu'on n'en sait rien. Le problème du culte dans le SdA, sauf effectivement à Numenor, n'est pour ainsi dire jamais abordé. Lorsqu'il l'est (à Numenor justement, où sur le Meneltarma), il n'y avait à proprement pas parler d'édifice à Eru, ce qui renverrait donc à un culte individuel dans la profondeur de chaque âme, dans le palais de sa conscience, ce que l'on peut rapprocher du fait que Dieu, pour les Chrétiens, est là où on est rassemblé pour lui. Mais il n'est pas certain que Morgoth et à défaut Sauron se fassent adorer comme des dieux créateurs plutôt que comme des prophètes -en somme ceux qui auraient compris Eru plutôt que "la fange des médiocres". Nous savons par exemple que les Orques craignent Sauron et ses représentants mais il n'est pas, pour eux du moins, mention d'un culte ni d'amulettes ni même d'objet fédérateur d'un culte propre à exciter la combativité (comme la Vraie Croix). Il n'est même pas dit qu'ils n'aient pas la capacité de révérer puisque Tolkien n'a jamais arrêté sa décision sur la conscience des Orques. Donc ce qu'imposent Sauron ou Morgoth comme culte, on n'en sait rien.
La Terre du Milieu est peut-être un monde de croyants, mais pas un monde de religion : même dans le Rath Dinen il n'est pas mention d'un symbole ; on peut y exprimer son respect pour ses ancêtres mais c'est tout. Il est fait mention de "rois barbares" qui se feraient brûler mais il n'est même pas dit que ce soit commandité par le culte sauronique.
Donc dire que le SdA raconte la lutte entre une volonté de liberté de culte et une imposition de culte, je ne sais pas mais je pense que non. Pour autant, l'absence de l'emprise de Sauron semble propice à ce qui fait le beau (une nature préservée, des champs fertiles, une population heureuse et paisible) et, au travers de cela, il me semble que c'est davantage la volonté de paix qui est célébrée (rappelez-vous les derniers mots de Thorin). Ces aspects sont dans la droite ligne de ce qui est perçu comme le Bien en Occident (le Beau, la Paix, la Liberté), dans la veine de ce que le Nouveau Testament indique comme les deux commandements majeurs ("aime" et "comprend"), ce qui peut s'opposer aux commandements d'autres religions (l'Islam serait plutôt "lis" et "obéis", le Bouddhisme (oui je sais ce n'est pas une religion) "détache-toi pour te sublimer" etc.) mais qui, dans l'oeuvre de Tolkien, ne sont pas même énoncés pour, peut-être ! ne pas fustiger. Malgré le verbe riche de Tolkien, il a à sa façon fait dans la concision césarienne...
D'une façon générale, l'oeuvre de Tolkien sourd de considérations judéo-chrétiennes sous des habits germano-celtiques. L'oeuvre de Tolkien est, à mon sens, une oeuvre d'édification morale (plus que ce que Tolkien voulait, c'est-à-dire une mythologie nationale alternative).
Il y a deux possibilités de s'y appliquer : ou en faisant comme Lewis avec un parallèle évident et des questions posées franchement, le tout donnant par essence une oeuvre chrétienne affichée quoi qu'à mon avis un peu vulgaire par son côté appuyé. Il y a ensuite une version que je pense plus érudite, moins manifeste mais, puisque les abords n'en sont pas ouvertement moralistes, aptes à toucher un public plus large que celui "en éducation" (la jeunesse, qui apprend les concepts moraux de notre culture) ou "compatibles" (des adultes qui comprennent et sont d'accord avec les parallèles). Tolkien a eu la force, la finesse et le talent suffisants pour toucher une population qui n'était pas raccordée au culte, même inconsciemment : les libertaires de Berkeley auraient ri d'un texte où on aurait trop clairement affiché une volonté moraliste.
Une petite remarque de rien du tout : le terme "adorer" était utilisé dans le mariage car la femme devait "adorer" son mari (qui lui en retour lui devait respect et protection). Donc l'adoration dans l'Histoire chrétienne est un très, très long sujet, qui n'est peut-être pas inutile d'aborder mais pas sans échauffement, sinon gare au claquage.
De là à considérer que Sauron ou Morgoth se présentent comme des "dieux créateurs", je ne serais pas d'accord parce que je pense qu'on n'en sait rien. Le problème du culte dans le SdA, sauf effectivement à Numenor, n'est pour ainsi dire jamais abordé. Lorsqu'il l'est (à Numenor justement, où sur le Meneltarma), il n'y avait à proprement pas parler d'édifice à Eru, ce qui renverrait donc à un culte individuel dans la profondeur de chaque âme, dans le palais de sa conscience, ce que l'on peut rapprocher du fait que Dieu, pour les Chrétiens, est là où on est rassemblé pour lui. Mais il n'est pas certain que Morgoth et à défaut Sauron se fassent adorer comme des dieux créateurs plutôt que comme des prophètes -en somme ceux qui auraient compris Eru plutôt que "la fange des médiocres". Nous savons par exemple que les Orques craignent Sauron et ses représentants mais il n'est pas, pour eux du moins, mention d'un culte ni d'amulettes ni même d'objet fédérateur d'un culte propre à exciter la combativité (comme la Vraie Croix). Il n'est même pas dit qu'ils n'aient pas la capacité de révérer puisque Tolkien n'a jamais arrêté sa décision sur la conscience des Orques. Donc ce qu'imposent Sauron ou Morgoth comme culte, on n'en sait rien.
La Terre du Milieu est peut-être un monde de croyants, mais pas un monde de religion : même dans le Rath Dinen il n'est pas mention d'un symbole ; on peut y exprimer son respect pour ses ancêtres mais c'est tout. Il est fait mention de "rois barbares" qui se feraient brûler mais il n'est même pas dit que ce soit commandité par le culte sauronique.
Donc dire que le SdA raconte la lutte entre une volonté de liberté de culte et une imposition de culte, je ne sais pas mais je pense que non. Pour autant, l'absence de l'emprise de Sauron semble propice à ce qui fait le beau (une nature préservée, des champs fertiles, une population heureuse et paisible) et, au travers de cela, il me semble que c'est davantage la volonté de paix qui est célébrée (rappelez-vous les derniers mots de Thorin). Ces aspects sont dans la droite ligne de ce qui est perçu comme le Bien en Occident (le Beau, la Paix, la Liberté), dans la veine de ce que le Nouveau Testament indique comme les deux commandements majeurs ("aime" et "comprend"), ce qui peut s'opposer aux commandements d'autres religions (l'Islam serait plutôt "lis" et "obéis", le Bouddhisme (oui je sais ce n'est pas une religion) "détache-toi pour te sublimer" etc.) mais qui, dans l'oeuvre de Tolkien, ne sont pas même énoncés pour, peut-être ! ne pas fustiger. Malgré le verbe riche de Tolkien, il a à sa façon fait dans la concision césarienne...
Que vos barbes poussent toujours plus longues
Thorïn II Ecu-de-Chêne
Roi Sous la Montagne
Thorïn II Ecu-de-Chêne
Roi Sous la Montagne