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De la noblesse au Rohan
#1
Peut-on parler de noblesse au Rohan?

Le fait que la société soit dominée par des seigneurs suffit-il à créer une noblesse?

Le terme n'est pas employé par Tolkien au Rohan - seulement des "lords". C'est tout le contraire du Gondor, où le terme est employé, où le sang dùnedain constitue de facto une noblesse certaine, et où l'on sait que cette noblesse se voit comme telle, puisqu'elle entre en rébellion avec Castamir contre Eldacar.

Pour moi, la noblesse est un groupe socio-culturel-politique à part dans la société. Elle se définit contre une partie de la société, a des valeurs et une histoire qui la définissent, elle se voit bien comme noble. Noblesses franque, romaine, britannique... c'est ce qu'elles évoquent.

Or, je n'ai pas le sentiment (parce que je n'ai rien lu qui puisse me faire penser que les seigneurs aient une conscience aiguë de leur groupe) qu'il en soit ainsi au Rohan. J'avancerais que cette domination de la terre aurait nécessité davantage de temps pour établir une histoire, des valeurs, un groupe (500 ans de royaume, c'est très peu chez Tolkien), et qu'il n'ont que peu d'arguments pour établir une certaine "noblesse", de sang ou autre.

J'ai eu comme contre-argument que les seigneurs constituaient de toute façon la noblesse en histoire, et qu'il ne pouvait en être qu'ainsi au Rohan. Or, il y a deux problèmes à cet argument: 1/ cette question noblesse-chevalerie est (pour y avoir jeté un oeil) débattue en histoire et n'est pas tranchée, sans compter qu'il est difficile d'estimer ce que Tolkien aurait pu lire à ce sujet à son époque. 2/ même si c'était établi historiquement, le texte de Tolkien n'invite pas à le penser, et je pense pas qu'on doive calquer une société médiévale (même si on connaît la source d'inspiration de Tolkien pour le Rohan) sur une autre fictive.

Qu'en pensez-vous?

Cette question a émergé sur le Warfo où vous pouvez retrouver les arguments en détail ici.
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#2
Loin d'être spécialiste, je vais tout de même donner modestement mon avis. Il me semble que la terre de Rohan est vassale de celle du Gondor (la flèche rouge en est d'ailleurs la marque). Par conséquent, une vassalité signifie de facto une noblesse (lié à un suzerain certes, mais tout de même). Theoden est Seigneur du Rohan, (si je ne m'abuse une fois encore) ce qui est un titre de noblesse.

C'est une noblesse féodale à la Charlemagne (liée par la terre et pas une noblesse de Cour).

Après, ce n'est qu'une impression personnelle.
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#3
Tout comme Barandon, j'ai tendance à penser qu'à partir du moment où l'on parle de Royaume du Rohan et de seigneurs, cela implique forcément un degré de vassalité et souveraineté qui tient de la noblesse. Le titre de lord est à l'origine celui de seigneur et maître en vieil-anglais. Cependant, il n'y a pas forcément de féodalité. Chaque homme semble être libre, mais ceux de haute extraction et de grand richesse (de terres principalement) font partie de la caste de la noblesse, partant du principe qu'ils ont accès aux arcanes du pouvoir.

Quand à la vassalité du Rohan envers le Gondor, je ne pense que ça soit le cas. Je crois plutôt que la Flèche est juste le rappel de l'Alliance historique et de la dette de terres que le Rohan doit au Gondor.
What's the point of all this pedantry if you can't get a detail like this right?
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#4
(03.06.2015, 22:50)Tikidiki a écrit : Pour moi, la noblesse est un groupe socio-culturel-politique à part dans la société. Elle se définit contre une partie de la société, a des valeurs et une histoire qui la définissent, elle se voit bien comme noble. Noblesses franque, romaine, britannique... c'est ce qu'elles évoquent.
Ce présupposé comme quoi la noblesse se définirait "contre" la société m'étonne.
Peut-être peut-on dire ça d'une noblesse de cour, avec sa morgue et son mépris du peuple, mais à l'origine, cette noblesse est issue de la classe guerrière. Et cette dernière à une place "positive" et intégrée dans la société (cf fonctions tripartites qu'on retrouve chez les gaulois -et ailleurs- puis dans les ordres médiévaux) : ceux qui prient, ceux qui travaillent et ceux qui combattent.

Le Rohan n'a peut-être que deux des trois fonctions, mais c'est un royaume et les chefs des combattants sont des seigneurs. Partant de là, on doit pouvoir considérer ces derniers comme l'expression d'une noblesse (ou au moins comme une "proto-noblesse").
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#5
Il me semble un peu rapide de dire que la noblesse (qui marque étymologiquement une réputation favorable voire admirable) soit issue de la classe guerrière même si la noblesse a souvent exercé des fonctions guerrières

Chez les Romains, sous la République, la noblesse était constituée de deux groupes principaux: les Patriciens, dont les origines remontaient ou étaient censées remonter à la fondation de Rome (les Iulii, famille de Jules César, prétendaient même descendre d'Enée) et les Magistrats curules plébéiens.
Sous l'Empire, apparait le plus vieux titre nobiliaire du continent, le Comte (comitis), à l'origine une personne de la suite d'un important personnage voire de l'Empereur. Avec le temps, et tout au long du Moyen-Age et sous l'influence législative du Saint Empire Romain Germanique, ces Comtes se verront attribuer d'importantes fonctions magistrales et militaires qu'ils ne possédaient pas nécessairement auparavant.
Dorées les feuilles tombent, mais le rêve se poursuit
Là où l'espoir demeure, les eaux chantent sous la nuit
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#6
Merci pour vos réponses, je vais préciser mon propos Smile

Comme certains d'entre vous le disent, la société seigneuriale implique la présence d'une noblesse.

Cependant, je parle d'un groupe, et non d'un seul statut seigneurial. Un groupe qui existe par la conscience qu'il a de lui-même et de sa place dans la société. Qui existe par la présence de valeurs communes, d'un héritage historique ou culturel, racial. Le tout leur est commun mais différent du reste de la population (le peuple, voire le roi, d'autres élites...). Par exemple, sous l'Ancien Régime, la noblesse entre en Fronde contre le Roi: elle a d'autres objectifs que lui; par exemple, sous la République romaine, les nobles méprisent Cicéron, homme nouveau qui arrive au sommet du pouvoir. Il s'agit de groupes fermés sur eux-mêmes, aux côtés d'autres groupes, mais celui-ci est central pour l'Etat.

S'ajoute à cela que, pour le Gondor, nous avons bien une conscience de groupe, au moins à un moment de son histoire. Ce sont des nobles qui se révoltent devant la politique d'alliance avec les Northmen qui, selon eux, affaiblit le Gondor et le sang Nùmenoréen. Ce groupe peut se définir par la détention de hautes charges dans la société, mais pas seulement: tout particulièrement le sang de Nùmenor qu'ils ont en commun et qui est la marque de leur grande histoire commune, et qu'ils défendent contre le sang des hommes moindres.
Au Rohan, nous n'avons rien qui permette de penser que les seigneurs se sentent différents, séparés du reste de la population. C'est en ce sens que je veux parler de noblesse de classe (et non pas tant de noblesse individuelle). Une noblesse "impériale" (au sens d'Etat avancé), non "seigneuriale".
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#7
(03.06.2015, 22:50)Tikidiki a écrit : Le fait que la société soit dominée par des seigneurs suffit-il à créer une noblesse?

Vaste question qui, bien au-delà de la création littéraire tolkienienne, renvoie à la définition du terme "noblesse" et aussi aux conditions historiques de la naissance en Occident de ce que l'on appelle la noblesse ainsi que ce que l'on appelle la chevalerie.

Un nom d'historien me revient à l'esprit à ce sujet, celui de Karl Ferdinand Werner, spécialiste de la féodalité et du monde franc, qui avait consacré un livre à la naissance de la noblesse en Europe. Une communication de Werner, faite à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres en 1985 et consacrée aux origines de la noblesse et de la chevalerie, est d'ailleurs consultable en ligne : http://www.persee.fr/web/revues/home/pre...29_1_14253

Concernant la chevalerie et ses origines, Dominique Barthélemy y a consacré un ouvrage récent, La Chevalerie - De la Germanie antique à la France du XIIe siècle, dont voici un compte-rendu : http://www.parutions.com/index.php?pid=1...4&ida=8239

Je ne sais pas si cela "cadre" bien avec le sujet, mais peut-être qu'il est possible de trouver des éléments de réponses dans le "bouillon de culture" de l'Antiquité tardive et du Haut Moyen Âge à la source de tant de choses en Occident, cela même en sachant ce que Tolkien pensait des historiens et sans oublier que l'on a affaire à une œuvre littéraire mélangeant volontiers des éléments historiques et culturels d'époques diverses (quoique de façon plus limitée que chez d'autres créateurs de mondes secondaires, me semble-t-il)...

Ce qui pourrait peut-être aider à y voir plus clair, s'agissant de la création littéraire, serait de savoir jusqu'à quel point Tolkien s'est inspiré des Anglo-Saxons de l'Angleterre d'avant la conquête normande pour son Rohan ? Le fait que l'écrivain ait ajouté des chevaux à sa société fictive rohanaise, pour la préserver symboliquement d'une défaite militaire de type Hastings si je me souviens bien, tend à montrer que de facto, il ne s’accommode pas a priori d'un modèle médiéval historique précis à imiter tel quel...

Je ne sais pas si je suis très clair, mais bon... la journée a été chaude et chargée. ^^'

Amicalement,

Hyarion.
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
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#8
La nature des différents types de noblesse et leur mode d'apparition est une question bien trop complexe pour y répondre rapidement.

Maintenant, en ce qui concerne le Rohan, il suffit de consulter la situation des tribus germaniques de l'époque des grandes invasions pour se faire une idée de l'opinion de Tolkien à ce sujet : bien sûr qu'il y a une noblesse au Rohan. Suffit de voir la position privilégiée des "hirdmen" de Théoden (les chevaliers de sa Maison), sans parler des "jarls" (les grands seigneurs comme Erkenbrand, Elfhelm, etc.) Pour autant, il faut bien concevoir cette noblesse comme celle des Mérovingiens ou des Carolingiens, et certainement pas comme celle de la cour de Louis XIV...

(04.06.2015, 19:01)faerestel a écrit : Chez les Romains, sous la République, la noblesse était constituée de deux groupes principaux: les Patriciens, dont les origines remontaient ou étaient censées remonter à la fondation de Rome (les Iulii, famille de Jules César, prétendaient même descendre d'Enée) et les Magistrats curules plébéiens.

Pas le moins du monde : si on peut parler de noblesse romaine antique, elle comprend effectivement les Patriciens, mais aussi les Chevaliers (Equitis), classe à laquelle appartient Cicéron, qui n'est un homo nouus que parce qu'aucun membre de sa famille n'a précédemment exercé de magistrature importante. Les magistrats plébéiens sont justement des plébéiens, au même titre qu'au cours du Moyen Âge les grands bourgeois des villes restent membres du Tiers Etat. La noblesse de robe est une invention relativement récente, qui n'existe pas sous la République romaine.

(04.06.2015, 20:40)Tikidiki a écrit : Comme certains d'entre vous le disent, la société seigneuriale implique la présence d'une noblesse.

Pas nécessairement : le cas du royaume de Navarre médiéval est assez intéressant à cet égard.

(04.06.2015, 20:40)Tikidiki a écrit : Au Rohan, nous n'avons rien qui permette de penser que les seigneurs se sentent différents, séparés du reste de la population. C'est en ce sens que je veux parler de noblesse de classe (et non pas tant de noblesse individuelle). Une noblesse "impériale" (au sens d'Etat avancé), non "seigneuriale".

La guerre civile qui agite le Rohan à l'époque de Wulf, fils de Freca, considéré de rang inférieur parce que d'ascendance mixte rohanaise-dunlendaise tend au contraire à souligner qu'une notion de préséance, voire de classe, existe d'ores et déjà au Rohan, bien avant la guerre de l'Anneau. Et comme au Gondor, il semble bien que l'origine ethnique en soit un des marqueurs, ce qui est d'ailleurs un cas classique en histoire. Mais c'est une question qui mériterait un essai entier, pas un simple paragraphe.
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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#9
Je rejoins Elendil sur la première partie de son post concernant la Maison de Theoden et les "jaris" qui me font penser pour ma part aux grands barons du début du Moyen-Age. Il est difficile en outre d'envisager une société entière composée de cavaliers prêts à partir en guerre en cas de besoin. Je pense que les "Eorlingas" qui partent à la guerre sont justement la caste guerrière qui forme la noblesse du Rohan, répartis sur l'ensemble du territoire. Evidemment, dans les cas de grands troubles, les "roturiers" prennent également les armes dans le cadre de l'Ost mais je doute qu'il y ait un cheval par habitant.
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#10
(05.06.2015, 08:58)Elendil a écrit :
(04.06.2015, 19:01)faerestel a écrit : Chez les Romains, sous la République, la noblesse était constituée de deux groupes principaux: les Patriciens, dont les origines remontaient ou étaient censées remonter à la fondation de Rome (les Iulii, famille de Jules César, prétendaient même descendre d'Enée) et les Magistrats curules plébéiens.

Pas le moins du monde : si on peut parler de noblesse romaine antique, elle comprend effectivement les Patriciens, mais aussi les Chevaliers (Equitis), classe à laquelle appartient Cicéron, qui n'est un homo nouus que parce qu'aucun membre de sa famille n'a précédemment exercé de magistrature importante. Les magistrats plébéiens sont justement des plébéiens, au même titre qu'au cours du Moyen Âge les grands bourgeois des villes restent membres du Tiers Etat. La noblesse de robe est une invention relativement récente, qui n'existe pas sous la République romaine.

Faerestel n'a pas vraiment tort, il y a bien des status différents. La nobilitas républicaine est formellement constituée des descendants de consuls (pas des édiles curules ou des préteurs, que je sache, et il est préférable d'avoir plus d'un consul comme aïeul). Ce groupe est plus étendu que celui des patriciens, qui à la fin de la République se résume à peu de familles. Les Chevaliers ne sont donc pas pour la plupart dans la nobilitas: seule une fraction d'entre eux intègre le Sénat, et une fraction plus faible encore accède à la magistrature suprême. Ces élus ne sont plus alors plus considérés comme des chevaliers, mais comme des membres de l'ordre sénatorial, l'ordre supérieur.

Quant à Cicéron lui-même, il n'est pas un homo novus du fait que ses ascendants n'ont pas géré de magistratures importantes, mais du fait qu'ils n'en ont pas géré du tout. La questure, toute première étape du cursus honorum, conditionne à cette époque l'entrée au Sénat, et il est le premier de sa famille à y pénétrer.

(05.06.2015, 08:58)Elendil a écrit : La guerre civile qui agite le Rohan à l'époque de Wulf, fils de Freca, considéré de rang inférieur parce que d'ascendance mixte rohanaise-dunlendaise tend au contraire à souligner qu'une notion de préséance, voire de classe, existe d'ores et déjà au Rohan, bien avant la guerre de l'Anneau. Et comme au Gondor, il semble bien que l'origine ethnique en soit un des marqueurs, ce qui est d'ailleurs un cas classique en histoire. Mais c'est une question qui mériterait un essai entier, pas un simple paragraphe.

Ce n'est pas une guerre civile, il me semble, mais une guerre. La parentèle de Freca s'enfuit et prend la tête de gens de Dun, qui sont déjà des ennemis du Rohan. Il n'y a donc pas au sein du Rohan une division de sang rohanais/de Dun assez prononcée pour qu'on puisse parler de classes différentes entrant en conflit entre elles.

Au contraire, au Gondor Eldacar commence par s'appuyer sur les Dùnedain ou d'autres hommes du Gondor, puisqu'il est assiégé à Osgiliath qui lui est fidèle. Il est certes soutenu par les Hommes du Nord par la suite, mais il obtient également l'aide des Dùnedain vivant au nord du Gondor. Il n'est donc pas exactement un "Freca ayant réussi", puisqu'il est certes de sang mêlé, mais dispose d'un parti au Gondor, ce qui n'est pas le cas de Freca.

Or je parle bien de noblesse dans le cas où elle se distingue singulièrement du reste de la population, et pas uniquement par leur fonction élevée dans l'Etat. Dans le cas du Rohan, la noblesse fait corps avec le roi comme avec le peuple, et tous sont vaincus ensemble. C'est ce qui permet pour moi de contester cette idée de noblesse comme groupe.
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#11
(05.06.2015, 13:10)Tikidiki a écrit : Quant à Cicéron lui-même, il n'est pas un homo novus du fait que ses ascendants n'ont pas géré de magistratures importantes, mais du fait qu'ils n'en ont pas géré du tout. La questure, toute première étape du cursus honorum, conditionne à cette époque l'entrée au Sénat, et il est le premier de sa famille à y pénétrer.

Non, c'est exactement ce que je dis : il est le premier à être élu à la questure, mais pour autant que je sache, des membres de sa famille avaient déjà tenu des magistratures locales à Arpinum.

(05.06.2015, 13:10)Tikidiki a écrit : Ce n'est pas une guerre civile, il me semble, mais une guerre. La parentèle de Freca s'enfuit et prend la tête de gens de Dun, qui sont déjà des ennemis du Rohan. Il n'y a donc pas au sein du Rohan une division de sang rohanais/de Dun assez prononcée pour qu'on puisse parler de classes différentes entrant en conflit entre elles.

Freca est suffisamment rohanais pour prétendre descendre de Fréawine et être appelé aux conseils royaux. Quand Freca insulte Helm en plein conseil royal, il est visiblement entouré d'un bon nombre de suivants, qui ne sauraient être tous de purs Dunlendings, sans quoi leur simple présence aurait été considérée être un acte d'hostilité envers le Rohan, ce qui ne correspond pas au déroulé des événements. Par la suite, Wulf et sa parentèle s'enfuient en Dunlande parce qu'ils ont été mis hors-la-loi par le roi Helm et ne sont pas en mesure de résister. On est d'autant plus fondé à parler de guerre civile dans les événements qui suivent que Wulf se déclare roi à Meduseld (Tolkien ne précise pas de quoi, mais le contexte impose d'y lire « roi du Rohan »).

La seule différence tient à la manière de la présentation, car ici le résultat de la guerre est l'exact opposé de ce qui se passe au Gondor. Il ne faut pas oublier que les Appendices sont supposés être tirés d'archives du Gondor ou d'Imladris et que leur présentation est nécessairement biaisée par leurs auteurs supposés.
Rollant est proz e Oliver est sage.
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Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
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#12
Oui, effectivement ils en ont géré, quand bien même ça n'a aucune importance pour Rome vu que le cursus honorum ne prend pas en compte les magistratures locales. C'est même avec mépris qu'on considère ces magistratures, qualifiant leurs détenteurs de "domi nobiles", des gens "nobles... chez eux" ("des gens bien connus chez eux" selon les versions).

Pour le Rohan, ce n'est pas parce que Wulf se déclare roi qu'on peut parler de guerre civile. Au fond, Odoacre et d'autres ont été couronnés à Rome à la suite de guerres tout à fait classiques. Les troupes de Wulf sont-elles des Rohirrim? Non, puisqu'il prend la fuite et s'appuie sur le pays de Dun. Oui, il dispose sans doute de suivants du même sang que lui, mais il n'a pas d'assise populaire au Rohan. Cette guerre est celle de Dun contre le Rohan, à ceci près que le chef de Dun a du sang rohanais, mais la société n'est pas du tout divisée. Incidemment, la noblesse n'est pas divisée non plus, puisque chacune fait corps avec son sang: peuple contre peuple.

D'accord, Eldacar réussit là où Wulf échoue, et les histoires ont été écrites par les vainqueurs. Mais, au Gondor, la société était vraiment divisée: il est difficile de sortir de nulle part un siège comme celui qui causa l'incendie d'Osgiliath et la perte du palantir. Il y a donc eu guerre civile. Mais au Rohan, je ne vois pas une société en guerre contre elle-même, et incidemment pas de séparation entre un peuple et sa noblesse.

edit: je n'ai pas pu publier le message avec les citations, c'est un problème fréquent?
edit: problème réglé!
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#13
(06.06.2015, 01:49)Tikidiki a écrit : edit: je n'ai pas pu publier le message avec les citations, c'est un problème fréquent?
Si tu peux me décrire le phénomène en mp stp
"L'urgent est fait, l'impossible est en cours, pour les miracles prévoir un délai."
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#14
(06.06.2015, 01:49)Tikidiki a écrit : Pour le Rohan, ce n'est pas parce que Wulf se déclare roi qu'on peut parler de guerre civile. Au fond, Odoacre et d'autres ont été couronnés à Rome à la suite de guerres tout à fait classiques.

Odoacre n'a pas été le seul "barbare" à être couronné à Rome. Plusieurs empereurs antérieurs étaient d'origine germanique Ce qui sépare justement Odoacre de ses prédécesseurs, c'est qu'il a déposé le dernier empereur, Romulus Augustule, sans se proclamer empereur à sa suite. D'où le fait qu'on considère souvent cet événement comme le marqueur de la fin de l'Empire romain d'Occident.

Pour autant, la guerre qui a mis Odoacre au pouvoir était bien une guerre civile, puisque les troupes germaniques d'Odoacre étaient intégrées dans l'armée romaine et que le peuple d'Odoacre vivait déjà sur les terres de l'empire d'Occident.

(06.06.2015, 01:49)Tikidiki a écrit : Les troupes de Wulf sont-elles des Rohirrim? Non, puisqu'il prend la fuite et s'appuie sur le pays de Dun. Oui, il dispose sans doute de suivants du même sang que lui, mais il n'a pas d'assise populaire au Rohan. Cette guerre est celle de Dun contre le Rohan, à ceci près que le chef de Dun a du sang rohanais, mais la société n'est pas du tout divisée.

Là, Tolkien est muet sur la question : tu t'autorises à penser que les troupes de Wulf sont extérieures au Rohan par le fait qu'il est obligé de prendre la fuite. Mais il suffit que ses troupes soient suffisamment inférieures en nombre pour qu'il soit forcé de fuir. Qu'il se réfugie dans un pays où il compte des alliés est parfaitement logique, d'autant qu'il est d'extraction mixte.

Si on souhaite une comparaison historique, on peut prendre l'exemple de Louis XVIII ou celui de Charles Édouard Stuart, deux bons exemples où la société locale était bel et bien divisée (et pas entre noblesse et roture, puisque les nobles comme les roturiers étaient divisés entre eux).

(06.06.2015, 01:49)Tikidiki a écrit : Mais au Rohan, je ne vois pas une société en guerre contre elle-même, et incidemment pas de séparation entre un peuple et sa noblesse.

Je ne suis toujours pas sûr de saisir ce que tu entre par "séparation entre un peuple et sa noblesse" : différence d'origine, de richesse, d'intérêts, de valeurs ? luttes de classes ? Je pense que c'est un présupposé qui mériterait d'être explicité pour clarifier la discussion.
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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#15
D'accord pour retenter une définition: au sein du peuple (peuple-tout ensemble de la société) dont l'on peut étudier une infinité de groupes (les jeunes ou les vieux, les paysans ou les seigneurs, les combattants et les autres...) un groupe particulier manifeste une forte cohésion et se présente comme une communauté achevée dont les membres sont solidaires: la noblesse.
C'est, déjà, un groupe-race lié par un sang vu comme supérieur (celui de Nùmenor, par exemple, ou des patriciens à Rome).
C'est un groupe social avec des valeurs, des idées et des représentations (d'eux-mêmes, mais aussi de l'Etat), des pratiques communes: l'astrologie, voire la sorcellerie, ou l'héraldique pour l'ancienne noblesse gondorienne décrite par Faramir.
C'est un groupe politique dont l'ambition est d'assurer sa prééminence au sein de l'Etat, au détriment de ceux ne partageant pas son sang ou ses valeurs.
C'est un groupe qui n'existe que parce qu'il pense en groupe. Et de fait il "agit" en tant que groupe: au cours de l'histoire d'une société, on le voit donc se démarquer du pouvoir royal comme de l'ensemble de ses sujets.

(09.06.2015, 13:14)Elendil a écrit : Là, Tolkien est muet sur la question : tu t'autorises à penser que les troupes de Wulf sont extérieures au Rohan par le fait qu'il est obligé de prendre la fuite. Mais il suffit que ses troupes soient suffisamment inférieures en nombre pour qu'il soit forcé de fuir. Qu'il se réfugie dans un pays où il compte des alliés est parfaitement logique, d'autant qu'il est d'extraction mixte.

Mais on a aucune indication de troupes de Freca ou de Wulf qui soient présentes au sein du Rohan, tout au contraire: ils fuient parce que déjà poursuivis, mais il ne s'agit que de la proche parenté (near kin) de Wulf:

Citation :Helm proclama le fils de Freca et sa proche parenté ennemis du roi, et ils fuirent, car il avait envoyé de nombreux cavaliers dans les marches occidentales.
Helm then proclaimed Freca's son and near kin the king's enemies; and they fled, for at once Helm sent many men riding to the west marches.
App. A.

Cette guerre est bien créée par une invasion, de Dun comme d'Orientaux; par ailleurs, la coalition qu'ils représentent ainsi que l'attaque des corsaires sur le Gondor invite à penser qu'il s'agit d'un plan sauronien pour harceler ses adversaires en prenant appui sur des peuples ennemis.

Citation :2758. Rohan attaqué d'ouest et d'est, et submergé. Gondor attaqué par des flottes de Corsaires. Helm de Rohan se réfugie au Gouffre de Helm. Wulf tient Edoras.
2758. Rohan attacked from west and east and overrun. Gondor attacked by fleets of the Corsairs. Helm of Rohan takes refuge in Helm's Deep. Wulf seizes Edoras.

Ces ennemis qui viennent explicitement de l'extérieur sont finalement "repoussés" et se "retirent": aucun n'était là avant la guerre.

Citation :Les envahisseurs orientaux périrent ou se retirèrent. Avant la fin de l'année, les Dunlendings furent repoussés, même d'Isengard.
The Eastern invaders perished or withdrew (...) Before the year (2759) was ended the Dunlendings were driven out, even from Isengard
App. A

On en sait un peu plus sur cette "coalition" Dun/Orientaux, et on voit que les Dunlendings profitèrent d'un plan d'invasion simultanée, y compris par la mer, ce qui dépasse de très loin leurs capacités diplomatiques: ce plan est conçu par quelqu'un d'autre.

Citation :A cette époque, le Rohan fut encore envahi de l'Est, et les Dunlendings, y voyant leur chance, traversèrent l'Isen et prirent l'Isengard. Il fut bientôt connu que Wulf était leur chef.
Ils étaient puissants, car ils furent rejoints par des ennemis du Gondor qui avait débarqué aux embouchures du Lefenui et de l'Isen. Les Rohirrim furent défaits et leur pays envahi; et ceux qui ne furent pas tués ou capturés fuirent dans les vallées des montagnes.

At the same time Rohan was again invaded from the East, and the Dunlendings seeing their chance came over the Isen and down from Isengard. It was soon known that Wulf was their leader.
The were in great force, for they were joined by enemies of Gondor that landed in the mouths of Lefnui and Isen. The Rohirrim were defeated and their land was overrun; and those who were not slain or enslaved fled to the dales of the mountains.
App. A, toutes traductions maison.

A aucun moment l'idée de troupes internes au Rohan n'est évoquée, et c'est même une guerre d'invasion qui implique trois peuples différents, plus le Gondor. Wulf, qui n'a été que par hasard au même moment déclaré ennemi du roi, vient se greffer à ce plan général, et prend la tête de Dun. Les guerres n'ont rien à voir avec la situation de la famille de Wulf, ni avec une guerre civile, puisque le peuple du Rohan est chassé et mis en esclavage. Enfin, Wulf ou Freca n'ont sans doute même pas planifié l'intervention des Dunlendings, puisque Dun a fort bien pu contracter dès avant l'invasion du Rohan en tenaille avec les Orientaux. Au contraire, Freca voulait le pouvoir par la fille de Helm qui serait mariée à Wulf: il n'était donc pas question d'une prise du pouvoir par la force, qu'il n'avait pas de toute façon. N'eût été le plan inespéré pour eux de Sauron.
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#16
(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : D'accord pour retenter une définition: au sein du peuple (peuple-tout ensemble de la société) dont l'on peut étudier une infinité de groupes (les jeunes ou les vieux, les paysans ou les seigneurs, les combattants et les autres...) un groupe particulier manifeste une forte cohésion et se présente comme une communauté achevée dont les membres sont solidaires: la noblesse.

Si cette affirmation de cohésion et de solidarité se veut avoir une portée générale et non spécifique, je ne pense pas qu'elle reflète la réalité.

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : C'est, déjà, un groupe-race lié par un sang vu comme supérieur (celui de Nùmenor, par exemple, ou des patriciens à Rome).

C'est souvent le cas (comme à Numenor) ou fictivement le cas (comme à Rome), mais pas toujours. La noblesse française, même la seule noblesse d'épée, n'a jamais été restreinte à la noblesse franque. On peut même citer d'excellents contre-exemples, comme la classe mandarine chinoise, non héréditaire et fondée sur le mérite, mesuré lors d'examens nationaux.

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : C'est un groupe social avec des valeurs, des idées et des représentations (d'eux-mêmes, mais aussi de l'Etat), des pratiques communes: l'astrologie, voire la sorcellerie, ou l'héraldique pour l'ancienne noblesse gondorienne décrite par Faramir.

C'est sans doute le point avec lequel je suis le plus en accord, encore que cela tienne sans doute plus à une question de représentation que de pratique réelle. On voit bien comment Faramir, confronté à la réalité de la noblesse gondorienne de son temps, prend soin de distinguer ce qu'il perçoit comme une déchéance (le goût des armes) chez beaucoup de nobles avec la représentation qu'il se fait de l'ancienne noblesse gondorienne. Au vu des guerres de conquêtes menées par le Gondor au cours de son existence, on est en droit de mettre en doute ce pacifisme supposé des Gondoriens (et je pense que Tolkien introduit ces nombreuses guerres à dessein dans les appendices du SdA).

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : C'est un groupe politique dont l'ambition est d'assurer sa prééminence au sein de l'Etat, au détriment de ceux ne partageant pas son sang ou ses valeurs.
C'est un groupe qui n'existe que parce qu'il pense en groupe. Et de fait il "agit" en tant que groupe: au cours de l'histoire d'une société, on le voit donc se démarquer du pouvoir royal comme de l'ensemble de ses sujets.

Si l'ambition que tu mentionnes est certainement l'ambition d'une partie de toute forme de noblesse, je doute qu'elle soit universelle. En particulier, je ne connais aucun exemple où la noblesse agisse réellement en tant que groupe, justement parce qu'elle est une collection d'aristocrates qui ont souvent des vues individualistes. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la noblesse a systématiquement fini par plier dans tous les conflits qui l'ont opposé à un pouvoir central (ex : début de l'ère Meiji au Japon, Fronde en France) ou à un pouvoir populaire uni (ex : Révolution française).

Accessoirement, la noblesse terrienne est bien souvent plus proche de ses vassaux et du peuple que ne l'est l'administration du pays : témoin les terribles guerres civiles qui ont déchiré la France depuis au moins la croisade albigeoise et jusqu'à la Révolution française (Chouannerie, Vendéens...). A chaque fois, ce sont des régions entières, noblesse et roture réunies, qui se liguent contre d'autres régions. Seule la disparition progressive de la noblesse après la Révolution et malgré la tentative napoléonienne a fini par émousser cette traditionnelle alliance.

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : Mais on a aucune indication de troupes de Freca ou de Wulf qui soient présentes au sein du Rohan, tout au contraire: ils fuient parce que déjà poursuivis, mais il ne s'agit que de la proche parenté (near kin) de Wulf:

C'est effectivement la vue véhiculée par les Appendices, qui sont, faut-il le rappeler ?, supposés être extraits des archives du Gondor. Libre à chacun de considérer qu'ils doivent être pris au pied de la lettre. Mais à aucun endroit Tolkien ne fournit une vue impersonnelle et omnisciente de la situation. Témoin le fait qu'on ignore tout de Wulf dès lors qu'il n'est pas en contact avec la parenté de Helm : que fait-il ? comment règne-t-il pendant sa courte domination ? aucune information n'est disponible, parce que Tolkien tient à la crédibilité de ses sources supposées. Et il serait surprenant qu'il ait considéré que des sources "historiques" puissent être d'une objectivité parfaite.

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : Ces ennemis qui viennent explicitement de l'extérieur sont finalement "repoussés" et se "retirent": aucun n'était là avant la guerre.

Citation :Les envahisseurs orientaux périrent ou se retirèrent. Avant la fin de l'année, les Dunlendings furent repoussés, même d'Isengard.
The Eastern invaders perished or withdrew (...) Before the year (2759) was ended the Dunlendings were driven out, even from Isengard
App. A

Je note pour ma part que Tolkien dit driven out, soit "expulsés" et ne parle que des Dunlendings, sans en distinguer les parents de Wulf.

(09.06.2015, 17:21)Tikidiki a écrit : On en sait un peu plus sur cette "coalition" Dun/Orientaux, et on voit que les Dunlendings profitèrent d'un plan d'invasion simultanée, y compris par la mer, ce qui dépasse de très loin leurs capacités diplomatiques: ce plan est conçu par quelqu'un d'autre.

Sur le plan global d'invasion, je te rejoins, mais le terme joined est ambigu : alliance de circonstance entre les Dunlendings et les pirates ou prévue de longue date ? Tolkien laisse planer l'idée que c'est la première solution qui prévaut, puisque les Dunlendings agirent seeing their chance.

Au final, ce qui motive le plus mes réflexions sur le sujet, c'est qu'on observe un parallélisme frappant entre les personnages d'Eldacar et de Helm, de Wulf et de Castamir, d'Ornendil et de Haleth, tout cela avec d'incessantes inversions entre les différents personnages et leur destin respectif. Cela me fait penser que Tolkien construit ces deux épisodes d'histoire en miroir et qu'il faut les analyser de concert (y compris la façon dont ils sont racontés) pour comprendre son intention narratrice.

Mais je m'arrête là dans le cadre de cette discussion : le sujet est passionnant et j'ai quelques pistes de réflexion pour la suite, mais aucunement le temps de les éprouver sérieusement et encore moins de les mettre en forme pour l'instant. Si quelqu'un souhaite se lancer...
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
La Chanson de Roland
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#17
C'est une période à laquelle j'ai beaucoup réfléchi également et qui m'intéresse même si je n'ai pas le temps de la discuter à fond ce soir. Quelques points quand même :

Il s'écoule deux ans entre l'exil de Wulf et le déclenchement de la guerre. Si il faut bien sûr voir la main de Sauron derrière cet assaut, qui se venge ainsi, peut-être, du rôle joué par Eorl dans la Bataille des Champs du Celebrant (attaque qu'il avait semble-t-il planifié puisque ce sont ses émissaires qui agitent les Orientaux), il me paraît probable que Wulf ait été son outil. Il est notable que les Dunlendings ne semblent pas avoir eu de chef identifiable hormis Wulf, si l'on prend en compte leurs origines communes avec les Halethrim et les Hommes de Bree, il est tout à fait possible que la royauté ne soit pas dans leur culture. Sauron a peut-être fourni à Wulf les moyens (or, hommes, réseau, que sais-je ?) d'unir les Dunlendings sous sa bannière en jouant sur leur grief envers les Rohirrim.

Un autre point intéressant c'est la population de métis qui vit sur les terres de Wulf, "d'allégeance plutôt froide envers Edoras" nous dit Tolkien, parce qu'ils se souviennent de la mort de Wulf et Freca des mains de la maison d'Eorl. Il semble donc que Wulf avait, même après son exil, une tête-de-pont en Rohan formée par ces populations mixtes qui l'ont certainement soutenu dans son accession au trône. On ne sait si Wulf était seulement chef de l'armée Dunlending d'invasion ou chef du Pays de Dun mais si c'est la deuxième hypothèse alors il a peut-être imaginé, aidé par ses origines, un royaume mixte dont Edoras était le centre : après tout l'objectif des Dunlendings était de récupérer leurs terres. En régnant à Edoras, Wulf ne leur tourne pas le dos, bien au contraire.
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#18
(03.06.2015, 22:50)Tikidiki a écrit : Peut-on parler de noblesse au Rohan?

...

Qu'en pensez-vous?

Si vous n' orientez pas les questions selon un axe prédéfini, qu' il soit personnel ou qu' il s' inscrive dans une ligne à vocation encyclopédique, on pourrait se permettre de dire:

La noblesse dans le Rohan, c’ est cette étincelle que Gandalf arrive à rallumer en Théoden en lui bottant le derrière.
C’ est aussi la confiance qu’ un roi, qui n’ est pas un titre anodin, inspire à son peuple par le sens de la décision juste, au moment où elle s’ impose, et aussi par l' exemple qu' il donne, par ses gouvernement et commandement.

Cette étincelle, que l’ on a vu raviver un vieillard courbé regagnant vigueur et force se retrouve d' ailleurs plus tard sous les pas de Nivacrin, ravivant d’ un feu verdoyant l’ herbe rabougrie du Pelenor parmi les ténèbres du Mordor suite à la décision la plus courageuse du roi.

On verra certainement aussi dans la symbolique des écus, le soleil et le cheval, ainsi que dans l’ élevage de ce dernier, une autre signature des valeurs sûres du Rohan, le cheval étant de tout temps considéré comme un animal noble.

_

“Une image est plus forte que mille mots, un son est plus fort que mille images”. C' est ainsi que Tolkien nous offre à voir et à entendre. Il serait dommage de passer à côté de l' essentiel ! ... Que faut-il de plus ? Smile
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#19
Il est question de la noblesse comme groupe socio-politique, non comme valeur (noblesse de coeur, d'esprit, roi noble), ou alors je ne vois pas bien où tu veux en venir Smile
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#20
(27.07.2015, 01:29)Crayon Volant a écrit : “Une image est plus forte que mille mots, un son est plus fort que mille images”. C' est ainsi que Tolkien nous offre à voir et à entendre. Il serait dommage de passer à côté de l' essentiel ! ... Que faut-il de plus ? Smile

Vaste question, là encore, et il y aurait beaucoup de choses à dire... mais bon, cela vaut-il le coup d'intervenir encore ici vu l'attention dont a fait l'objet mon dernier message sur le présent fuseau ? Razz Et en plus, là, on me dirait sans doute que l'on se dirige vers du "hors-sujet" (et pourtant...)...

Je crois en tout cas que ce que Crayon Volant veut dire, c'est qu'il ne faut pas avoir peur de sortir des sentiers battus de l'approche analytique pure, tout simplement. Mais cela mériterait sans doute en soi une discussion particulière.

Amicalement,

Hyarion.
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
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#21
Au contraire, n'y vois pas un désintérêt pour ce que tu as écrit, simplement tu proposais des pistes avec lesquelles j'étais d'accord mais que je ne me vois pas exploiter de suite (quelle est l'histoire dont Tolkien s'inspire à son époque, à quel point diffère-t-elle de l'histoire que l'on connaît aujourd'hui...). J'attendais plutôt une mise à l'épreuve de cette idée au sein du Légendaire, plus facilement accessible à l'étude et à la discussion.

Enfin je serais curieux de voir où mène le hors-piste analytique Smile
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#22
… Ou mène l’ approche intuitive d’ un auteur ou d’ un sujet “riche” ? C’ est cela la vrai question.

j' ai entraperçu une étude de comparaison entre le Rohan et le Gondor en déroulant la page. Je ne l’ ai pas lu mais voici ce que m’ évoque le problème au premier abbord:

Qui arbore un cheval comme emblème vénère probablement le language et le chant (le rythme) et les arts (... je ne peux m' empêcher de penser aux scythes); qui arbore un aigle comme emblème vénère certainement le pouvoir, la puissance et la science, il portera des ambitions de civilisation (d' où l' appellation culturellement moderne d' "aigle impérial"); qui arbore un arbre vénère l' esprit de lignée avec ses ancêtres et sa descendance (fruits/graines) et donc aussi le sang lié à la lignée (sève). Qui arbore un oeil veille sur le monde ou sur sa création, ou si des intérêts s' en mêlent, il sera un usurpateur.

Vous avez là, à travers une héraldique choisie par l' auteur de quoi "voir et entendre" vôtre lecture. Un exemple que vous aurez tout le loisir d’ apprécier et d’ étudier au sein du monde qu’ il a mis en place, et pourquoi pas considérer sous cet angle maints faits de l’ Histoire ou de la mythologie, et aussi des contes... Et même la Nature ! Encore faut-il prendre le temps de laisser croître une démarche de ce genre, car elle touche à la nature de l’ être humain (ce que l’ intellect ne fait pas) et ne peut se plier à une volonté arbitraire. "Désapprendre" tout ce que l' on nous a inculqué et qui formate la pensée "moderne". C' est sans prétention pour ma part, je pointe mon doigt, c' est tout.

... Voici en tout cas un exemple de symbolique de nature analogique avec laquelle Tolkien semble être tout à fait à l' aise et que je n' ai jamais entendu mentionnée à son sujet. Il la porte bien plus loin que la seule application héraldique: on retrouve cet esprit, probablement lié à son soucis de la chose qui "sonne" juste ( plus qu' à ses "croyances" ^^ ) et enrichie d' une large culture dans des faits "clé" de ses récits, et dans ses personnages. Mais ce n' est pas systématique.
L' esprit d' analogie n' est pas spécifiquement culturel, il est universel. Il fait juste appel à la perception et à l' entendement des choses comme elles sont, dans les rapports que nous établissons de tous temps avec le monde et les "choses" du monde, sans "invention".
Partant de là vous risqueriez fort d' intéresser des interlocuteurs ou des lecteurs, en particulier les enfants qui, plus que tout autres sur cette planète, ont aujourd' hui besoin de trouver une éducation digne de leur ouvrir les yeux sur le monde qui les entoure, de la manière la plus attractive qui soit, sans débilité et sans la poussière des encyclopédies. (... Toutes sciences bien venues !)... Sans parler de la richesse, non pas intellectuelle, mais vitale que vous trouverez pour vous-même en vous plongeant dans vos études. Ceci n' exclut en rien l' analyse en paralèlle, à condition de la laisser à la place qu' elle mérite: un simple outil de triage. Qui mettrait une pelle sur un trône ?...
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#23
(27.07.2015, 19:19)Tikidiki a écrit : Au contraire, n'y vois pas un désintérêt pour ce que tu as écrit, simplement tu proposais des pistes avec lesquelles j'étais d'accord mais que je ne me vois pas exploiter de suite (quelle est l'histoire dont Tolkien s'inspire à son époque, à quel point diffère-t-elle de l'histoire que l'on connaît aujourd'hui...). J'attendais plutôt une mise à l'épreuve de cette idée au sein du Légendaire, plus facilement accessible à l'étude et à la discussion.

Merci pour tes précisions. Smile

(27.07.2015, 19:19)Tikidiki a écrit : Enfin je serais curieux de voir où mène le hors-piste analytique Smile

Assez loin, à la lecture du dernier message de Xavier. Wink Et encore une fois, cela pourrait mériter (au moins) un fuseau en soi.

Amicalement,

Hyarion.
All night long they spake and all night said these words only : "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish." "Dirty Chu-bu," "Dirty Sheemish," all night long.
(Lord Dunsany, Chu-Bu and Sheemish)
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#24
Effectivement je t'encourage, Crayon Volant, à pousser plus loin dans un fuseau approprié, à moins que tu n'expliques concrètement comment cette approche intuitive peut aider à résoudre la question ici posée Smile
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#25
... On peut toujours essayer Smile.

... J' ai dit plus haut que le cheval, symbole de choix du Rohan était un animal noble, voici une des raisons pour lesquelles il est considéré ainsi:
Dressage et "Droiture" ... Voilà le rapport privilégié que l' Homme entretient avec cet animal de tout temps, et quand il a l' habitude d' entretenir de tels rapports avec la Nature (via l' animal pour ce cas), cela prend racine dans sa mentalité. C' est une tendance générale, une signature. Le Rohan est donc signé de cette Nature. Alors, peut-on parler de noblesse au Rohan, précisons, dans le contexte que donne l' auteur: celui d' un conte / roman, inspiré des formes de l' Histoire mais aussi (et surtout ?) du fond des mythes souvent universels dont il signe sa création ?

... Ce n' est pas moi qui définit les limites, c' est l' oeuvre... Et elles ont le mérite de ne pas être bornées.

Regardons dans la mythologie chez les centaures: c' est un peuple qui s' "emballe", c' est à dire qui n' a pas la maîtrise de sa nature "animale". Seul Chiron, initiateur d' Hercule, possède cette Sagesse, car sa pensée gouverne l' instinct.

... Le Rohan est un peuple fort, et avec le sens de l' honneur et de la fidélité ( droiture donc) à leur roi, ce qui induit un contrôle sur les bas instincts de la nature humaine, l' agressivité etc... Tolkien nous dépeint tout une gamme de caractères à travers les personnages de ce peuple, et en montre l' éveil progressif après son endormissement. Ce réveil est marqué des même signatures encore. Sans cette organisation préalable ce peuple ne pourrait jouer un grand rôle dans la "guerre de l' Anneau". Alors, peut-on s' appuyer sur ce que l' auteur veut bien nous donner ?...

L' écu du soleil qui accompagne celui du cheval n' est il pas important lui aussi ? Le Soleil est symbole de Beauté, et de bien d' autres choses... La noblesse peut être gouvernée par la beauté... Ou par la luxure. Dans ce dernier cas le sens des valeurs est faussé... On pourrait développer.

Puisse une étude sur Tolkien nous donner à voir, à entendre, à sentir, et à penser. Une étude basée sur la nature peut le faire, et fera toujours honneur à l' auteur qui aimait tant celle-ci.

Je ne développerai pas plus, préférant laisser cela à qui voudra bien entendre. Je ne dis nullement que cette approche doit être exclusive, mais sans cela il me semble qu' on s' éloignera de Tolkien et de l' intelligence de son oeuvre.
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#26
Pourquoi pas, mais est-ce que tout ça a un rapport avec la noblesse comme groupe (les nobles autour du roi par exemple), et non comme valeur?
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#27
La valeur ne participe-t' elle pas de la fonction ? ... Dans un monde idéal me répondriez-vous... A l' origine répondrais-je... ^^

Mais je ne me suis jamais aventuré à me poser des questions sur l' oeuvre de Tolkien de sorte qu' elles m' obligent à plier les arguments à ma propre volonté. Ceci est l' éternel problème des livres. Soit vous faites honneur à l' oeuvre en trouvant et en lui rendant ce qui lui appartient, soit vous faites honneur à vôtre étude et à vôtre propre intelligence en déballant du matériel que vous prenez pour *servir* le but que vous avez décidé pour vous-même.

Le problème est le même que l' homme entretient avec la nature, toute discipline confondue: il prend. Pourtant, en toute logique, s' il veut la "dompter" et apprendre à la connaître, il lui faut apprendre d' abord à se soumettre à ses lois. Il me semble que c' est ce qu' un artiste comme Tolkien s' efforce de faire, et de faire savoir. C' est d' ailleurs cela qu' il appelle une "sub-création". Ce n' est donc pas ma définition, c' est la sienne. Vous pouvez vérifier son exposé.

Mais la fin de vôtre post d' ouverture s' avançait déjà sur le fait qu' il n' y a pas de rapprochement arbitraire à décider. C' est déjà ça, un préjugé en moins ! Smile A partir de là des possibilités peuvent s' affirmer d' elles même.
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#28
(29.07.2015, 22:17)Crayon Volant a écrit : Mais je ne me suis jamais aventuré à me poser des questions sur l' oeuvre de Tolkien de sorte qu' elles m' obligent à plier les arguments à ma propre volonté. Ceci est l' éternel problème des livres. Soit vous faites honneur à l' oeuvre en trouvant et en lui rendant ce qui lui appartient, soit vous faites honneur à vôtre étude et à vôtre propre intelligence en déballant du matériel que vous prenez pour *servir* le but que vous avez décidé pour vous-même.

Le problème est le même que l' homme entretient avec la nature, toute discipline confondue: il prend. Pourtant, en toute logique, s' il veut la "dompter" et apprendre à la connaître, il lui faut apprendre d' abord à se soumettre à ses lois. Il me semble que c' est ce qu' un artiste comme Tolkien s' efforce de faire, et de faire savoir. C' est d' ailleurs cela qu' il appelle une "sub-création". Ce n' est donc pas ma définition, c' est la sienne. Vous pouvez vérifier son exposé.

... Et il faut donc pour cela consulter un livre, avec l'éternel problème que cela suppose... Wink En l’occurrence, en relisant « Du conte de fées », qui est un essai de Tolkien et non un de ses récits de fiction, on trouve bien ce que tu dis... sauf que bien souvent, le lecteur tolkienophile a tendance a rester prisonnier de deux grilles de lecture qui constituent autant de bornes intellectuelles (et spirituelles) : soit, pour résumer, une grille de lecture rationaliste/positiviste/scientiste et une grille de lecture religieuse chrétienne, des grilles de lecture devenues tellement habituelles, routinières, que l'on ne fait même pas (ou plus) attention à ce qu'elles peuvent avoir de pertinent ou non.
Car tu sais bien, Xavier, que rien qu'en mentionnant le mot "sub-création", par exemple, on pourra venir te rappeler la dimension religieuse du concept, lié à ce que Tolkien considérait comme un "mythe vrai" par rapport à d'autres, et on pourra avoir volontiers tendance à borner (religieusement) ainsi la portée de la chose, tout en se positionnant paradoxalement hors d'autres bornes, celles du rationalisme. Et d'un autre côté, si l'on parle du Rohan, comme ici, d'autres viendront rappeler la dimension historique et culturelle (médiévale) lié à cet aspect de la création de Tolkien, en restant dans le domaine des sciences humaines... ce que j'ai moi-même d'ailleurs plutôt fait dans mon premier message (même si je n'oublie surtout pas l'aspect littéraire et artistique de l'objet d'étude), car que je ne vais pas renier mon passé universitaire même si des horizons autres qu'analytiques m'intéressent également ! Wink
Mais donc ainsi, dans un cas comme dans l'autre, c'est vrai que l'on reste prisonnier et que l'on tourne en rond... On sent bien que Tolkien, comme d'autres auteurs, a pu toucher du doigt quelque-chose avec son œuvre, au point qu'elle puisse parler au cœur (on en a parlé ailleurs), hors de toutes bornes intellectuelles ou spirituelles, et cependant, in fine, on n'ose pas sortir de sa "zone de confort", celles de certitudes et de savoirs supposés "maitrisés", souvent qui plus est sous prétexte de fidélité à "Tolkien l'universitaire" et/ou à "Tolkien le catholique"... et c'est ce que je regrette, personnellement, au bout de toutes ces années à suivre le mouvement des études tolkieniennes(*)...

Mais revenons à cette histoire de noblesse au Rohan, et à la subcréation aussi en même temps, forcément : peut-être, pour ce sujet comme pour d'autres, devrions-nous aborder les choses en commençant par ne pas trop segmenter notre vision de l'œuvre, notamment dans ses dimensions "interne" et "externe" (mais pas seulement) ? Cela peut peut-être permettre de donner moins de poids inutile à certaines grilles de lecture, même si elles conservent leurs légitimités et leur intérêt, et de mieux nous donner à voir, autrement. Dans ce contexte, je crois qu'effectivement, il me parait d'autant plus pertinent de ne pas isoler valeur et fonction, comme l'a écrit Xavier. J'avais d'abord moi-même initialement évoqué le fait que la question de Tikidiki renvoie à la définition du terme "noblesse" : quitte à partir d'une "zone de confort" analytique, on pourrait déjà commencer par étudier la notion en question dans toutes ces dimensions possibles vis-à-vis de l'œuvre littéraire concernée. Déjà, l'horizon serait sans doute plus ouvert... pour essayer de voir autrement, encore une fois. Car, au fond, même si Tolkien disait préférer la littérature à la peinture pour évoquer la fantasy (ça aussi, c'est dans « Du conte de fées »), c'est bien souvent à des images, à des tableaux même, que nous avons affaire... et ce qu'ils nous donnent à voir ne peut sans doute s'appréhender seulement avec des grilles de lecture toutes faites et qui peuvent finir par cacher plutôt que par faire apparaître. Il s'agit pas ici de renoncer à son rationalisme ou à sa foi chrétienne, mais simplement de ne se fixer aucune borne pour essayer de mieux percevoir et mieux entendre.

Je ne sais pas si je fais bien d'écrire tout cela, ni même si ça vaut le coup... Enfin, bref : puisse quelque lecteur y trouver éventuellement de l'intérêt !

Amicalement,

Hyarion.

(*): si jamais cela intéresse quelqu'un, il est possible de discuter éventuellement de ce constat fait avec regret, mais ailleurs que sur ce fuseau.
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#29
... "Garde tes procédés secrets, n' en montre que les résultats" - Lao Tseu

... Se plier à la logique et en partager les fruits est une chose, théoriser sur le cheminement et la méthode de travail en est une autre. Et là, gare aux recettes prêtes à l' emploi car elles ne peuvent s' adapter à tous les cas de figures. Les bonnes méthodes auront toujours une touche personnelle et leur "perfection" pourra toujours être mises en cause. Tolkien connaissait les dangers de la théorisation et il en averti le lecteur dès les premières lignes de Fäeries.

Ainsi ne faut-il pas céder à la panique de savoir comment on va justifier sa démarche, et de "prouver". On n' a rien à prouver ni à démontrer. Qui aime n' a pas à se justifier. Ceci est un autre de nos problèmes récurrents: celui du mental discursif (dont Hyarion viens de déplier l' éventail) qui cherche à tout prix à convaincre ou à se rattraper aux branches par la myriade d' arguments qu' il a accumulé. Ceci est gouverné par la négation: opposition et comparaison... Qui s' occupe de lier et de rassembler ?

Or, la véritable nature du mental est le Silence. Et c' est seulement au coeur du Silence que peut se trouver le Sens de la Parole. Ce n' est pas un fervent de la Bible qui contredira cette affirmation, encore faut-il en saisir là aussi un sens de portée universelle. "L' Etre naît du Non-Etre", (Lao-Tseu encore) tout comme l' activité journalière découle d' une bonne nuit de repos, tout comme une action naît d' une méditation. La Parole découle de la Nature, non de nôtre ego. Elle n' a rien à voir avec le bavardage.

Comment peut-on donner à voir et à entendre, c' est à dire offrir une nourriture consistante pour la pensée, si l' on ne fait pas l' effort d' écouter ?

... Vous comprendrez que l' on ne va pas faire un fuseau spécifique pour inviter les gens à se taire ! Smile Il vaut mieux s' économiser soi-même et ne signaler des choses essentielles qu' une seule fois. A force de bavardage on risquerait de finir par les oublier soi-même tout en se prenant pour de grands philosophes !... Soyons prudents !...
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#30
Avant que ce fuseau ne parte définitivement en vrille, je vais commencer par répondre au peu qui concerne le sujet de départ:

(29.07.2015, 22:17)Crayon Volant a écrit : La valeur ne participe-t' elle pas de la fonction ?
(30.07.2015, 02:03)Hyarion a écrit : Il me parait d'autant plus pertinent de ne pas isoler valeur et fonction, comme l'a écrit Xavier. J'avais d'abord moi-même initialement évoqué le fait que la question de Tikidiki renvoie à la définition du terme "noblesse" : quitte à partir d'une "zone de confort" analytique, on pourrait déjà commencer par étudier la notion en question dans toutes ces dimensions possibles vis-à-vis de l'œuvre littéraire concernée. Déjà, l'horizon serait sans doute plus ouvert... pour essayer de voir autrement, encore une fois.

Je crois que personne n'a isolé valeur et fonction. Dans les définitions que j'ai proposées de la noblesse mais que Crayon Volant n'a peut-être pas vues "en déroulant la page", j'ai notamment mis en avant l'idée des valeurs. Mais à mon sens celles-ci doivent être particulières au groupe de la noblesse et non pas concerner toute la société, afin de permettre de définir ce qui définit la noblesse du Rohan, si seulement il y en a une. Dire que la droiture, l'honneur et la fidélité sont des valeurs révérées au Rohan ne mange certes pas de pain. Mais c'est aussi le cas d'un certain nombre de films hollywoodiens ou d'autres, réalisés en Nouvelle-Zélande. Qu'est-ce qui dans l'oeuvre permet de dire que les Rohirrim sont sur ce point différents des Elfes et des Gondoriens? D'où mon incrédulité face à l'affirmation (aux allures de sophisme...)

(30.07.2015, 08:12)Crayon Volant a écrit : On n' a rien à prouver ni à démontrer. Qui aime n' a pas à se justifier.

Continuant, qu'est-ce qui permet de dire que les [nobles] qui sont un groupe dont on cherche à deviner l'existence ou l'absence, ont des valeurs différentes ou identiques?

(30.07.2015, 02:03)Hyarion a écrit : Mais revenons à cette histoire de noblesse au Rohan, et à la subcréation aussi en même temps, forcément : peut-être, pour ce sujet comme pour d'autres, devrions-nous aborder les choses en commençant par ne pas trop segmenter notre vision de l'œuvre, notamment dans ses dimensions "interne" et "externe" (mais pas seulement) ?

Concernant la segmentation entre interne et externe, j'exprime ma préférence pour l'interne, étant donné la difficulté de connaître avec précision l'état des connaissances de Tolkien sur le sujet, et la plus grande faisabilité du commentaire de texte par rapport à des tentatives plus ou moins délicates d'exhumer l'historiographie du sujet.

Bref, étant donné l'ouverture de la question "y a t-il une noblesse au Rohan" (pas "Nulle noblesse au Rohan" ou "La Noblesse au Rohan), qui permettait d'avancer toutes sortes de raisonnements et de réponses, j'avoue être assez étonné du peu de foi accordé à la démarche "analytique". Certes le commentaire de n'importe quel document est toujours soumis à la plus ou moins grande soumission du commentateur, mais le résultat est loin d'être toujours une soumission du texte, il ne faut pas exagérer et faire si peu de cas du travail des gens d'ici-bas qui s'efforcent de lire les textes:

(29.07.2015, 22:17)Crayon Volant a écrit : ...poser des questions sur l' oeuvre de Tolkien de sorte qu' elles m' obligent à plier les arguments à ma propre volonté.

(30.07.2015, 08:12)Crayon Volant a écrit : Comment peut-on donner à voir et à entendre, c' est à dire offrir une nourriture consistante pour la pensée, si l' on ne fait pas l' effort d' écouter ?

(29.07.2015, 22:17)Crayon Volant a écrit : Mais la fin de vôtre post d' ouverture s' avançait déjà sur le fait qu' il n' y a pas de rapprochement arbitraire à décider. C' est déjà ça, un préjugé en moins !

(30.07.2015, 08:12)Crayon Volant a écrit : celui du mental discursif (dont Hyarion viens de déplier l' éventail) qui cherche à tout prix à convaincre ou à se rattraper aux branches par la myriade d' arguments qu' il a accumulé.

Je crois qu'on a compris qu'aucun argument ou référence précise à Tolkien concernant la question ne sera malheureusement donné, pour notre plus grande déception Smile

(30.07.2015, 02:03)Hyarion a écrit : On n'ose pas sortir de sa "zone de confort", celles de certitudes et de savoirs supposés "maitrisés", souvent qui plus est sous prétexte de fidélité à "Tolkien l'universitaire" et/ou à "Tolkien le catholique"... et c'est ce que je regrette, personnellement, au bout de toutes ces années à suivre le mouvement des études tolkieniennes

(30.07.2015, 02:03)Hyarion a écrit : Je ne sais pas si je fais bien d'écrire tout cela, ni même si ça vaut le coup... Enfin, bref : puisse quelque lecteur y trouver éventuellement de l'intérêt !

Quant à la zone de confort, je suis tout à fait d'accord avec toi Hyarion, nous courrons pour certains après la chimère d'une maîtrise de certains domaines, moi le premier.
Mais ne fait-on pas bien uniquement ce que l'on aime? N'est-ce pas Tolkien plutôt que Gandalf qui serait désigné par la phrase "Il était bon dans ce à quoi il décidait de s'adonner" (CLI Istari) ?
Cependant je suis tout à fait prêt à écouter ce que tu as à dire sur le sujet (dans un autre fuseau, préférablement), n'en étant moi-même pas à ce niveau d'expérience... mais il est évident qu'il y a toujours une oreille pour écouter, point de désespoir mon ami ^^

(30.07.2015, 08:12)Crayon Volant a écrit : ... Vous comprendrez que l' on ne va pas faire un fuseau spécifique pour inviter les gens à se taire ! Smile

Il faut savoir ce que l'on veut!

(30.07.2015, 08:12)Crayon Volant a écrit : Il vaut mieux s' économiser soi-même et ne signaler des choses essentielles qu' une seule fois. A force de bavardage on risquerait de finir par les oublier soi-même tout en se prenant pour de grands philosophes !... Soyons prudents !...

Qui se prend pour un grand philosophe?
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