30.04.2020, 14:36
Pour ma part, quand les films allaient sortir en 2001, j'ai décidé de lire les livres parce que je préfère toujours lire le livre avant de voir le film -autrement les souvenirs du film court-circuitent le processus de formation des images et on se retrouve prisonnier d'une vision qui n'est pas celle que le livre nous aurait inspiré spontanément ; du moins c'est mon cas. J'ai donc commencé par le Hobbit.
Pour mes 10 ans, en octobre 2001, j'ai reçu le coffret du Seigneur des Anneaux dans l'édition Folio Junior (que j'ai toujours d'ailleurs) et je l'ai lu à toute vitesse. Après, j'ai vu le premier film (qui m'avait enchanté) et en décembre 2001, j'ai reçu le Silmarillion pour Noël, que j'ai lu dans la foulée. Beaucoup de moments magiques, ce livre m'a, sans aucun doute, beaucoup marqué. Après, j'ai continué avec les Contes et Légendes Inachevés, mais là ça m'a déstabilisé : le récit décousu de Turambar auxquels il manque des bouts qu'il faut aller chercher dans le Silmarillion d'abord, les commentaires éditoriaux, puis, dans le second tome, la description de Númenor, qui m'a achevé (bien des années plus tard, en la relisant, je comprends toujours pourquoi).
Après cela, un long hiatus. Je me suis plongé dans la fantasy bien plus qu'auparavant mais j'en avais marre de Tolkien qui était l'étalon de tous les ouvrages, le nom qu'on mettait sur chaque quatrième de couverture ('Le meilleur auteur de fantasy depuis Tolkien !'), et parallèlement, l'engouement pour les films, que je ne partageais qu'à moitié (surtout le Retour du Roi qui m'avait beaucoup déçu au cinéma), a fini par me dégoûter. Je me sentais limité dans l'univers de Tolkien, surtout quand je découvrais, à côté, le très riche bestiaire de Donjons et Dragons -pour moi les Beholders sont des créatures de fantasy aussi iconiques que les Elfes et les Orques, par exemple.
J'ai gardé Tolkien à distance pendant près de 15 ans. Je n'ai pas été au courant de la parution des EdH ou de la re-traduction du Hobbit par exemple, même si je suis allé voir la trilogie jacksonienne avec une certaine satisfaction. Après quoi, ma compagne m'a offert La formation de la Terre du Milieu que j'ai lu avec plaisir. En même temps, coïncidence, il y avait à l'ENS un séminaire Tolkien, auquel j'ai assisté. Je m'y suis alors re-plongé sous un angle beaucoup plus "académique". J'ai découvert les Contes Perdus avec délectation, l'association Tolkiendil, et je me suis un peu impliqué ça et là.
Maintenant, c'est de nouveau "frustration". Il n'y aura pas beaucoup de nouvelles choses à découvrir ; quelques détails linguistiques peut-être, un poème de jeunesse exhumé quelque part, des choses comme ça, j'espère me tromper. Le côté oxonien de Tolkien, qui vit dans sa petite bulle universitaire, tend à m'agacer. Le prestige de Tolkien en tant qu'Auteur, bizarrement, me le rend moins sympathique, alors que j'ai toujours combattu pour voir cette reconnaissance arriver (peut-être du fait que je considère Tolkien avant tout comme un auteur de fantasy et que sa légitimation passe par une distanciation vis-à-vis des autres auteurs de Fantasy: regardez, il n'est pas "comme eux"; raison aussi pour laquelle je préfère les travaux d'Anne Besson, qui intègre Tolkien dans ce corpus de la fantasy, plutôt que de Vincent Ferré, qui justement l'en différencie ; et les deux approches ont un sens et une validité que je reconnais très bien cependant).
Paradoxalement, l'expo à la BnF, pour excellente qu'elle ait été, a un peu crevé l'abcès. Voir toute cette agitation, cet engouement soudain, Tolkien partout, c'était chouette, et en même temps, un peu épuisant. Ç'aurait dû être une victoire, c'en était une, mais parce que c'était la BnF, parce que c'était Vincent Ferré, parce que c'était un auteur d'Oxford. Pas parce que c'était de la fantasy, pas parce que c'était, avant toute chose, rigolo. La légitimation était atteinte, mais pas pour les "bonnes" raisons pour moi. Pas pour celles que j'avais essayé de faire valoir. De tous ces événements, celui où je me suis le mieux senti était encore l'inauguration du coin médias pour la Fantasy, en marge de l'expo. C'était une soirée agréable, où on sentait le public enthousiaste et passionné, mais sans grandeur, si vous voulez. Je retrouvais le petit coin douillet que j'avais apprécié tout au début, quand je lisais un roman lové dans mon canapé sur des gobelins qui couraient après des nains en leur lançant des pommes de pin.
Pour mes 10 ans, en octobre 2001, j'ai reçu le coffret du Seigneur des Anneaux dans l'édition Folio Junior (que j'ai toujours d'ailleurs) et je l'ai lu à toute vitesse. Après, j'ai vu le premier film (qui m'avait enchanté) et en décembre 2001, j'ai reçu le Silmarillion pour Noël, que j'ai lu dans la foulée. Beaucoup de moments magiques, ce livre m'a, sans aucun doute, beaucoup marqué. Après, j'ai continué avec les Contes et Légendes Inachevés, mais là ça m'a déstabilisé : le récit décousu de Turambar auxquels il manque des bouts qu'il faut aller chercher dans le Silmarillion d'abord, les commentaires éditoriaux, puis, dans le second tome, la description de Númenor, qui m'a achevé (bien des années plus tard, en la relisant, je comprends toujours pourquoi).
Après cela, un long hiatus. Je me suis plongé dans la fantasy bien plus qu'auparavant mais j'en avais marre de Tolkien qui était l'étalon de tous les ouvrages, le nom qu'on mettait sur chaque quatrième de couverture ('Le meilleur auteur de fantasy depuis Tolkien !'), et parallèlement, l'engouement pour les films, que je ne partageais qu'à moitié (surtout le Retour du Roi qui m'avait beaucoup déçu au cinéma), a fini par me dégoûter. Je me sentais limité dans l'univers de Tolkien, surtout quand je découvrais, à côté, le très riche bestiaire de Donjons et Dragons -pour moi les Beholders sont des créatures de fantasy aussi iconiques que les Elfes et les Orques, par exemple.
J'ai gardé Tolkien à distance pendant près de 15 ans. Je n'ai pas été au courant de la parution des EdH ou de la re-traduction du Hobbit par exemple, même si je suis allé voir la trilogie jacksonienne avec une certaine satisfaction. Après quoi, ma compagne m'a offert La formation de la Terre du Milieu que j'ai lu avec plaisir. En même temps, coïncidence, il y avait à l'ENS un séminaire Tolkien, auquel j'ai assisté. Je m'y suis alors re-plongé sous un angle beaucoup plus "académique". J'ai découvert les Contes Perdus avec délectation, l'association Tolkiendil, et je me suis un peu impliqué ça et là.
Maintenant, c'est de nouveau "frustration". Il n'y aura pas beaucoup de nouvelles choses à découvrir ; quelques détails linguistiques peut-être, un poème de jeunesse exhumé quelque part, des choses comme ça, j'espère me tromper. Le côté oxonien de Tolkien, qui vit dans sa petite bulle universitaire, tend à m'agacer. Le prestige de Tolkien en tant qu'Auteur, bizarrement, me le rend moins sympathique, alors que j'ai toujours combattu pour voir cette reconnaissance arriver (peut-être du fait que je considère Tolkien avant tout comme un auteur de fantasy et que sa légitimation passe par une distanciation vis-à-vis des autres auteurs de Fantasy: regardez, il n'est pas "comme eux"; raison aussi pour laquelle je préfère les travaux d'Anne Besson, qui intègre Tolkien dans ce corpus de la fantasy, plutôt que de Vincent Ferré, qui justement l'en différencie ; et les deux approches ont un sens et une validité que je reconnais très bien cependant).
Paradoxalement, l'expo à la BnF, pour excellente qu'elle ait été, a un peu crevé l'abcès. Voir toute cette agitation, cet engouement soudain, Tolkien partout, c'était chouette, et en même temps, un peu épuisant. Ç'aurait dû être une victoire, c'en était une, mais parce que c'était la BnF, parce que c'était Vincent Ferré, parce que c'était un auteur d'Oxford. Pas parce que c'était de la fantasy, pas parce que c'était, avant toute chose, rigolo. La légitimation était atteinte, mais pas pour les "bonnes" raisons pour moi. Pas pour celles que j'avais essayé de faire valoir. De tous ces événements, celui où je me suis le mieux senti était encore l'inauguration du coin médias pour la Fantasy, en marge de l'expo. C'était une soirée agréable, où on sentait le public enthousiaste et passionné, mais sans grandeur, si vous voulez. Je retrouvais le petit coin douillet que j'avais apprécié tout au début, quand je lisais un roman lové dans mon canapé sur des gobelins qui couraient après des nains en leur lançant des pommes de pin.