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Les Monts de Brumes *
#1
Les discussions de nos camarades dans la section Essais sur les Géants, m'ont donné envie de partager ce texte sur les habitants des Montagnes Brumeuses.

Gerry, un jeune hobbit, s'y est malencontreusement perdu en rentrant chez lui après des aventures en compagnie d'un magicien.
Oui, je sais, ça sonne comme du déjà vu... Mais poursuivons.
.oOo.
Ces mules étaient de bons animaux, dociles et doux, qui aimaient leurs maîtres et dont le hobbit s’était souvent occupé. Mais un loup-garou affamé et furieux fut une trop grande épreuve pour leur maigre courage. Terrorisées, les mules détalèrent au premier grondement, s’élançant sur l’étroit sentier couvert de glace. Gerry n’avait pas terminé de fixer leur harnachement. Empêtré dans les lanières de cuir, il tomba à terre et fut traîné sur la glace par les animaux lancés dans un galop à l’équilibre incertain. Et ce qui ne pouvait manquer d’arriver se produisit : les mules dérapèrent et furent précipitées dans la pente, entraînant Gerry avec elles.

Dégringolant le dévers, il vit du coin de l’œil des rapaces tourner dans le firmament.
-« Les charognards n’ont pas perdu de temps ! », se dit-il furtivement.

Mais la pensée de becs répugnants lacérant sa chair morte au pied du précipice, le révolta. Il focalisa sa volonté et il gagna un instant l’espoir de se tirer de ce mauvais pas. Il saisit sa dague et coupa le cuir qui le liait à la toile et à la mule. Puis il entreprit, toujours dévalant la pente, de freiner sa descente en plantant la dague dans la glace. Il parvint à piquer l’arme dans la paroi, mais la secousse fut si forte qu’il dut lâcher son arme. Son dernier espoir approchait à grande vitesse : une congère accumulée en forme de grosse dune au bord du précipice, pourrait peut-être l’arrêter. Les mains en sang, il manœuvra pour y aboutir.

La congère n’était pas de neige, mais de glace vive. Quelques secondes plus tard, notre hobbit s’envolait en une gracieuse parabole, propulsé dans les airs comme par un tremplin, tandis que les mules sombraient au fond du précipice dans des braiements pathétiques.
Gerry ferma les yeux et se prépara pour sa dernière randonnée. Des scènes de son enfance virevoltèrent dans son esprit, enchaînant rapidement veillées, chapardages, banquets et lutineries, ou superposant des visages marquants tels que ceux de Gandalf, de son père le Thain, d’Arathorn ou de proches parents. Une certaine amertume dominait ses humeurs lorsqu’il perdit connaissance sous le choc - aucun visage féminin ne s’était imposé à lui. Une constellation de minois ravissants et souriants, s’était fondue en une hobbite fade et sans personnalité propre.

Alors que Gerry plongeait vers la mort, un grand aigle le saisit au vol de ses serres puissantes. La violente secousse plongea le hobbit dans l’inconscient. Le majestueux rapace s’éleva dans une rafale d’air sifflant et emmena Gerry jusqu’à son aire.

Il faut vous dire que les grands aigles furent une puissante et noble race, qui peupla les aires montagneuses depuis les débuts du monde. Planant haut dans les cieux du nord, ils incarnaient la liberté des grands espaces et l’élévation des peuples libres. Au temps jadis, ils se rangèrent aux côtés des Elfes pour combattre les dragons volants, dont ils furent toujours les adversaires les plus acharnés. On dit que le Roi des aigles, le grand Thorondor, pouvait s’élever au firmament, embrasser du regard toute la Terre du Milieu et en surveiller la contrée la plus reculée. Ainsi les puissants n’ignoraient-ils rien des souffrances des peuples libres.

A l’époque de cette histoire, résidait dans les montagnes brumeuses, la branche ainée des grands aigles. Le vieux Gwaïhir , un descendant de Thorondor, y régnait sur des escadrilles qui menaient la vie dure aux êtres malfaisants. Aucun gobelin isolé ou warg en maraude ne pouvait se déplacer en surface, de jour comme de nuit, si le temps était beau. Car la vision des aigles, incomparable, en faisait des chasseurs implacables. Pourtant les aigles étaient craints des habitants des vallées de l’Anduin : les rapaces devaient, pour vivre, prélever un tribut parmi les troupeaux de moutons ou de chèvres. Les pasteurs les tiraient à l’arc lorsqu’ils s’approchaient trop de leurs chaumières. Indépendants et fiers, les grands aigles, repoussés par les gobelins jusqu’aux plus hauts sommets et aux pentes les plus abruptes, se montraient distants, méfiants et parfois sans pitié, comme le sont les prédateurs libres.

C’est dire que le sort de Gerry n’était guère enviable. L’aigle qui le captura l’avait d’abord pris pour un cabri, comme il dégringolait avec deux quadrupèdes le long de la paroi glacée. L’oiseau s’était approché car il convoitait les mules mais leur chargement les avait rendues inaccessibles, quoiqu’il eût accru leur intérêt. La chasse en plein vol – c’est-à-dire sans risque - d’une proie charnue de taille médiane constituait une aubaine à ne pas rater, qui allait mettre du baume au cœur du grand aigle.
Pourtant, lorsqu’il se posa sur son aire, l’aigle s’aperçut que sa proie, vêtue et dotée d’un pouce opposable, n’était certes pas un cabri. En toute vraisemblance, il ne pouvait s’agir que d’un petit gobelin. Mais l’aspect enfantin et aimable de son visage, la qualité de sa tenue et surtout un étrange pelage sur le dessus des pieds, retinrent le grand aigle de commettre l’irrémédiable. Dans le doute, il transporta Gerry vers son garde-manger - une aire tout-à-fait inaccessible entourée de falaises, avec un à-pic vertigineux sur le devant et une paroi verticale sur l’arrière, sans nul besoin de protection d’autre sorte. Son appétit déçu, le grand aigle déposa Gerry sans ménagement et s’en fut chasser son dîner.

.oOo.
à suivre...
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Les Monts de Brumes * - par Chiara Cadrich - 02.09.2017, 20:54

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