15.04.2021, 18:05
(Modification du message : 25.04.2021, 11:16 par Chiara Cadrich.)
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De jeunes chênes, des sorbiers ont envahi les gradins. Bergil se fraie un passage au travers des buissons de myrte et d’arbousiers, écartant ronces et lierres de son poignard. L’arène s’est tue. Seuls s’élèvent dans le clair-obscur, les craquements des branches brisées et le piétinement balourd de l’homme.
Lorsqu’il atteint la scène, la Dame lui fait face, auréolée de fleurs de ciste.
Sa chevelure scintille d’un jais profond qui éclipse les étoiles. Une altière réserve durcit la finesse de ses traits. Des griefs ont creusé ses joues d’albâtre. Mais son regard sombre perce au cœur qui gravit les degrés de son jardin.
Mince et adamantine sous les rais de la lune, la petite Dame dresse sa silhouette noire comme l’obsidienne, voilant de colère sa beauté fanée.
Le visiteur subjugué s’arrête sous le chêne-liège. Un pâle sourire, désabusé, un peu cruel, chasse les ridules d’amertume aux joues de la Dame. Ses prunelles s’allument d’un charme âpre et puissant. Ses lynx ont cerné Bergil, dans un silence d’embuscade.
La Dame relève son visage acéré en étendant les bras devant elle, comme pour se saisir de l’objet de sa convoitise :
– Nul ne brandit son braquemart dans ma demeure, si ce n’est à mon service !
L’arme étincelante, comme ternie d’un maléfice, tombe aux pieds de l’homme, se fichant profondément au sol, perdue entre les racines et l’ivraie.
Bergil se dégage des escarboucles de lierre qui enserrent ses mollets. Sous le regard étincelant des félins tapis sous les lauriers, l’aventurier libère ses mains des brins de genêts, s’agenouillant galamment :
– Un chevalier puîné implore asile en votre cour !
Un ris léger, moqueur mais satisfait, fait taire les grondements sourds des lynx qui s’apprêtaient à bondir sur l’intrus.
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