04.01.2018, 22:56
(Modification du message : 10.01.2018, 00:24 par Chiara Cadrich.)
Merci Baradon !
.oOo.
Lorsque l’attelage improbable parvint à Bourg de Touque, la situation n’était pas brillante. Il semblait que l’hiver eût concentré là l’essentiel de ses attaques, pour y ensevelir l’âme de la Comté sous une tombe de glace.
Les Touque, qui avaient d’abord lutté pied à pied en transformant les congères en murs de neige, avaient été débordés et contraints d’abandonner le village pour se replier sur l’antique smial. Mais toutes les portes et fenêtres étaient à présent bloquées par une épaisse couche de neige dure. Les défenseurs, d’abord ravis de cette protection, avaient compris qu’ils étaient assiégés, ne pouvaient plus faire usage de leurs arcs, et devaient désormais compter sur eux seuls.
Le roi des loups blancs avait établi son trône au pied de l’antique mélèze, sous lequel le Touque, aux beaux jours, rendait ses arrêts de justice ordinaire. L’arbre vénérable surplombait la colline sous laquelle étaient excavées les galeries des Touque. Le crépuscule approchait et déjà les fauves creusaient des boyaux sur la colline ; la forteresse ne tarderait pas à être investie.
Pourtant c’était sans compter la combativité des deux vieillards. Leur décision prise en un instant de concertation, le beau traineau vert fit une embardée comme l’attelage de rennes courbait l’échine sous l’effort pour forcer le siège. Les grelots éclatèrent en un chant de joie, comme le traineau accélérait de façon vertigineuse et que le mage brun s’écriait « Yo-ho-ho ! » en fouettant les loups qui osaient s’approcher. Les occupants du traineau se sentirent transportés d’une allégresse combative, tandis que les loups gémissaient et se dispersaient.
Mais le roi des loups n’était pas le dernier des vagabonds. Il appela sa garde en hurlant et s’apprêta à bondir pour engloutir toute cette chair fraiche.
Mal lui en prit, car le magicien gris ne voulut pas se cantonner à un rôle de figuration en présence de son cousin. Il avait de longue date préparé ce moment, et préleva dans sa caisse, un paquet soigneusement étiqueté « Dagnir Carcarotha ». Lorsqu’il brandit son épée, un éclair rouge jeta une lueur ardente sur tout le traineau, comme si la flamme de l’espoir et de la vie elle-même eût été ravivée.
Le roi des loups blancs, dans son orgueil, attrapa au vol, dans sa gueule hérissée de crocs jaunes, le « cadeau » lancé par le magicien gris. Le monstre éclata en centaines de flammèches violettes et vertes, qui s’éparpillèrent autour de lui pour poursuivre les loups de sa garde.
Le magicien gris, très satisfait, à la vérité, de son petit tour, distribua de nombreux autres « cadeaux », que les jeunes hobbits se mirent en devoir de lancer autour du mélèze géant, et même dans ses branches. Les amis à plume du mage brun en jetèrent encore quelques-uns sur les loups les plus courageux, qui succombèrent eux aussi dans des gerbes de lueurs violettes. La colline toute entière ressembla bientôt à un immense feu d’artifice, l’arbre séculaire rayonnant de mille feux, environné des mystérieux paquets des deux vieillards.
Le traineau enchanté s’arrêta enfin près de l’arbre illuminé. Myriamel était ravie, son petit dernier semblait fasciné par le spectacle féérique qui marquait sa naissance ; elle se surprit même à lancer quelques petits paquets pour élargir le cercle de lumière autour de la colline. Une famille d’écureuils descendit du mélèze et entra en conversation avec le mage brun. Un couple de blaireaux, qui avait trouvé refuge entre les racines centenaires, vint également à son aide, et bientôt, il fut en mesure de guider la fine équipe.
Tandis que le magicien gris déchargeait le traineau de ses merveilles, son cousin creusait frénétiquement la glace. Ainsi fut dégagé le conduit de la grande cheminée du smial des Touque. Prudemment, les enfants s’y coulèrent le long d’une corde, suivi du bébé dans un panier d’osier, puis de maman et papa Lafutaie.
Le mage brun ne voulut pas s’éterniser – il devait rejoindre sa chère forêt. Mais il confia à son compère gris, un paquet des plus précieux : il s’agissait de jeunes plants verts portant de magnifiques étoiles rouges.
- Ils se nomment Poinsettia. Il vous faut les planter tout autour de ce mélèze !
Le magicien gris s’exécuta, sous la surveillance sourcilleuse du mage brun. Lorsqu’il eut terminé, le gris se releva en massant son dos meurtri :
- J’imagine qu’ils sont utiles dans la lutte contre les loups ? Ces horreurs y sont allergiques, peut-être ?
- Pas du tout, répondit le brun d’un air distrait. Mais je les trouve très jolies en hiver. C’est important !
Enfin le magicien gris fit ses adieux à son fantasque cousin, et le traineau merveilleux s’envola une dernière fois, sous le regard ahuri et déjà un peu nostalgique de Cabochon et Pâquier.
Les Touque, qui avaient d’abord lutté pied à pied en transformant les congères en murs de neige, avaient été débordés et contraints d’abandonner le village pour se replier sur l’antique smial. Mais toutes les portes et fenêtres étaient à présent bloquées par une épaisse couche de neige dure. Les défenseurs, d’abord ravis de cette protection, avaient compris qu’ils étaient assiégés, ne pouvaient plus faire usage de leurs arcs, et devaient désormais compter sur eux seuls.
Le roi des loups blancs avait établi son trône au pied de l’antique mélèze, sous lequel le Touque, aux beaux jours, rendait ses arrêts de justice ordinaire. L’arbre vénérable surplombait la colline sous laquelle étaient excavées les galeries des Touque. Le crépuscule approchait et déjà les fauves creusaient des boyaux sur la colline ; la forteresse ne tarderait pas à être investie.
Pourtant c’était sans compter la combativité des deux vieillards. Leur décision prise en un instant de concertation, le beau traineau vert fit une embardée comme l’attelage de rennes courbait l’échine sous l’effort pour forcer le siège. Les grelots éclatèrent en un chant de joie, comme le traineau accélérait de façon vertigineuse et que le mage brun s’écriait « Yo-ho-ho ! » en fouettant les loups qui osaient s’approcher. Les occupants du traineau se sentirent transportés d’une allégresse combative, tandis que les loups gémissaient et se dispersaient.
Mais le roi des loups n’était pas le dernier des vagabonds. Il appela sa garde en hurlant et s’apprêta à bondir pour engloutir toute cette chair fraiche.
Mal lui en prit, car le magicien gris ne voulut pas se cantonner à un rôle de figuration en présence de son cousin. Il avait de longue date préparé ce moment, et préleva dans sa caisse, un paquet soigneusement étiqueté « Dagnir Carcarotha ». Lorsqu’il brandit son épée, un éclair rouge jeta une lueur ardente sur tout le traineau, comme si la flamme de l’espoir et de la vie elle-même eût été ravivée.
Le roi des loups blancs, dans son orgueil, attrapa au vol, dans sa gueule hérissée de crocs jaunes, le « cadeau » lancé par le magicien gris. Le monstre éclata en centaines de flammèches violettes et vertes, qui s’éparpillèrent autour de lui pour poursuivre les loups de sa garde.
Le magicien gris, très satisfait, à la vérité, de son petit tour, distribua de nombreux autres « cadeaux », que les jeunes hobbits se mirent en devoir de lancer autour du mélèze géant, et même dans ses branches. Les amis à plume du mage brun en jetèrent encore quelques-uns sur les loups les plus courageux, qui succombèrent eux aussi dans des gerbes de lueurs violettes. La colline toute entière ressembla bientôt à un immense feu d’artifice, l’arbre séculaire rayonnant de mille feux, environné des mystérieux paquets des deux vieillards.
Le traineau enchanté s’arrêta enfin près de l’arbre illuminé. Myriamel était ravie, son petit dernier semblait fasciné par le spectacle féérique qui marquait sa naissance ; elle se surprit même à lancer quelques petits paquets pour élargir le cercle de lumière autour de la colline. Une famille d’écureuils descendit du mélèze et entra en conversation avec le mage brun. Un couple de blaireaux, qui avait trouvé refuge entre les racines centenaires, vint également à son aide, et bientôt, il fut en mesure de guider la fine équipe.
Tandis que le magicien gris déchargeait le traineau de ses merveilles, son cousin creusait frénétiquement la glace. Ainsi fut dégagé le conduit de la grande cheminée du smial des Touque. Prudemment, les enfants s’y coulèrent le long d’une corde, suivi du bébé dans un panier d’osier, puis de maman et papa Lafutaie.
Le mage brun ne voulut pas s’éterniser – il devait rejoindre sa chère forêt. Mais il confia à son compère gris, un paquet des plus précieux : il s’agissait de jeunes plants verts portant de magnifiques étoiles rouges.
- Ils se nomment Poinsettia. Il vous faut les planter tout autour de ce mélèze !
Le magicien gris s’exécuta, sous la surveillance sourcilleuse du mage brun. Lorsqu’il eut terminé, le gris se releva en massant son dos meurtri :
- J’imagine qu’ils sont utiles dans la lutte contre les loups ? Ces horreurs y sont allergiques, peut-être ?
- Pas du tout, répondit le brun d’un air distrait. Mais je les trouve très jolies en hiver. C’est important !
Enfin le magicien gris fit ses adieux à son fantasque cousin, et le traineau merveilleux s’envola une dernière fois, sous le regard ahuri et déjà un peu nostalgique de Cabochon et Pâquier.
.oOo.
A suivre...