16.11.2017, 16:51
(16.11.2017, 12:40)Tikidiki a écrit : J'espère franchement que l'esthétique sera au moins renouvelée (passe encore le scénario avec ses libertés évidentes). On a une belle occasion de se défaire du visuel des films, justement.
Je me joins à cet espoir. Le visuel des films, très riche, très puissant, est devenu, par son omniprésence, presque totalitaire. En relisant le Seigneur des Anneaux, comme beaucoup, je ne pouvais pas ne pas voir les scènes du film, et cela m'a gâché une très large partie du plaisir (j'étais presque heureux lorsque les films déviaient vraiment du livre, puisque cela permettait de refaire place au pouvoir d'imagination, si délicieusement sollicité par la prose tolkienienne ; notamment pour le Retour du Roi pour lequel le livre et le film n'ont plus grand-chose à voir).
Mettre en place une autre esthétique permettrait de casser, ou du moins d'amoindrir, l'irrésistible pouvoir de l'image. Si les images que nous avons d'Aragorn deviennent plurielles, multiples, discordantes, et ne se résument plus à Viggo Mortensen (indépendamment du fait qu'il s'agisse selon moi d'une quasi-perfection de casting), alors nous serons enfin libérés, nous serons de nouveau libres de choisir, de mêler, de retrancher tel élément, de privilégier tel autre, et, dans cette marge de variation, d'introduire notre propre vision.
Donc, oui, je souhaite profondément voir une autre Rivendell, d'autres Elfes, d'autres Nains, et plus cette série sera une œuvre propre, distincte de la lettre et graphiquement innovante, plus je serai susceptible de l'apprécier. Une "illustration" de certaines scènes des appendices, soucieuse de respecter les moindres détails, ne serait pas du tout à mon goût, mais c'est une préférence toute personnelle, cela va de soi. J'ai mes propres illustrations en tête, d'une certaine manière, et je ne voudrais pas les voir s'effacer devant le réalisme et la netteté de l'image télévisuelle !
Par ailleurs toutes les grands œuvres ont fait l'objet de déclinaisons multiples et diversement heureuses. On compare souvent Tolkien au mythe arthurien, pour lequel chacun accepte qu'il y ait des versions très différentes, même dans l'esprit (la Quête du Graal est d'orientation beaucoup plus théologique que les romans de Chrétien de Troyes, par exemple). Cela nous choque peut-être plus en ce qui regarde le Seigneur des Anneaux car l'œuvre-livre et l'œuvre-film sont temporellement beaucoup plus proches. Mais cette pluralité d'écritures, de visions, est selon moi un signe de vitalité d'abord, une déviation mercantile ensuite.
Quant à cette déviation mercantile, justement, il ne faut pas oublier que les grosses productions ne sont possibles que parce qu'il y a des investisseurs, qui cherchent à rentrer dans leurs frais ; d'où la recherche d'un succès public et commercial. Si l'un d'entre nous était multi-millionnaire, il pourrait financer, si cela lui chante, une adaptation pieuse et fidèle, sans se soucier des rentrées possibles. Mais ce n'est pas le cas.
En revanche (on peut toujours rêver !), l'animation, moins coûteuse, offre plus de liberté ; je serais personnellement heureux de voir une adaptation en japanimation de n'importe quelle œuvre de Tolkien (imaginez une réinvention de Biblo par les studios Ghibli !).