05.10.2017, 10:34
(Modification du message : 17.12.2017, 16:42 par Chiara Cadrich.)
... Suite et Fin.
Merci pour votre patience et vos encouragements.
Cet extrait est tiré du Livre vert de Bourg-de-Touque, une préquelle de Hob et SdA, contant les tribulation du Vieux Touque... lorsqu'il était jeune.
.oOo.
Malgré ses doutes, Gerry continua pourtant, scandant ses bobards de plus en plus rapidement :
-« … du temps des rois, il entra dans une troupe de saltimbanques. Mais dans chaque château le pauvre devait se cacher, reclus, pour ne pas spolier le public des cours seigneuriales de la surprise que constituait son entrée en scène lors de la représentation. Camoufler un corps gigantesque n’est pas une sinécure et il vivait mal de devoir se priver de lumière la majeure partie de son temps. Non vraiment, mes chers amis, la vie de géant ne lui était pas facile… »
Gerry lançait ses dernières idées. Les géants n’étaient plus qu’à une vingtaine de pas – de géant.
-« … En conclusion - et Gerry hurla en insistant beaucoup sur le mot, à l'attention de qui pourrait l'entendre – je vous propose que soient remis à sa famille ses ossements qui furent – c’est beau dommage ! - trop longtemps conservés pour être exposés. On raconte qu’il continua même de grandir par-delà la mort… »
A ce moment précis, Landroval, qui avait pris de la vitesse en dehors du champ de vision de Gerry et des géants, surgit au raz de la crête du volcan. Approchant à contre-soleil, ses longues ailes aux extrémités puissamment digitées fendaient l’air avec vivacité. Gerry l’apercevant du coin de l’œil, joua le tout pour le tout – s’interrompant soudain, il désigna l’endroit où les œufs avaient été substitués, derrière les géants, et cria, mimant la consternation avec un art consommé:
-« Attention, un aigle vole votre balle ! »
Les géants, naïfs et bon public, se retournèrent d’un même mouvement, donnant à Landroval la seconde qui lui manquait pour happer et enlever Gerry vers le lointain. Une fois encore, le choc fit perdre connaissance à Gerry, mais il fut convoyé à bon port, avec l’œuf subtilisé sur l’esplanade. Quant aux géants, l’enlèvement du lutin par leur ancien prisonnier les laissa pantois et perplexes. Le farfadet de suie, une fois son étrange cérémonie terminée, considérait-il que le monde avait retrouvé son ordre naturel, disparaissait en emmenant le danger aquilin avec lui, et mettait ainsi fin à la guerre ?
-« … du temps des rois, il entra dans une troupe de saltimbanques. Mais dans chaque château le pauvre devait se cacher, reclus, pour ne pas spolier le public des cours seigneuriales de la surprise que constituait son entrée en scène lors de la représentation. Camoufler un corps gigantesque n’est pas une sinécure et il vivait mal de devoir se priver de lumière la majeure partie de son temps. Non vraiment, mes chers amis, la vie de géant ne lui était pas facile… »
Gerry lançait ses dernières idées. Les géants n’étaient plus qu’à une vingtaine de pas – de géant.
-« … En conclusion - et Gerry hurla en insistant beaucoup sur le mot, à l'attention de qui pourrait l'entendre – je vous propose que soient remis à sa famille ses ossements qui furent – c’est beau dommage ! - trop longtemps conservés pour être exposés. On raconte qu’il continua même de grandir par-delà la mort… »
A ce moment précis, Landroval, qui avait pris de la vitesse en dehors du champ de vision de Gerry et des géants, surgit au raz de la crête du volcan. Approchant à contre-soleil, ses longues ailes aux extrémités puissamment digitées fendaient l’air avec vivacité. Gerry l’apercevant du coin de l’œil, joua le tout pour le tout – s’interrompant soudain, il désigna l’endroit où les œufs avaient été substitués, derrière les géants, et cria, mimant la consternation avec un art consommé:
-« Attention, un aigle vole votre balle ! »
Les géants, naïfs et bon public, se retournèrent d’un même mouvement, donnant à Landroval la seconde qui lui manquait pour happer et enlever Gerry vers le lointain. Une fois encore, le choc fit perdre connaissance à Gerry, mais il fut convoyé à bon port, avec l’œuf subtilisé sur l’esplanade. Quant aux géants, l’enlèvement du lutin par leur ancien prisonnier les laissa pantois et perplexes. Le farfadet de suie, une fois son étrange cérémonie terminée, considérait-il que le monde avait retrouvé son ordre naturel, disparaissait en emmenant le danger aquilin avec lui, et mettait ainsi fin à la guerre ?
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Ppa se précipita pour soustraire le jouet de ses enfants à la concupiscence supposée de l’aigle. Il fut très fier de le sauver, même s’il ne vit pas l’aigle. Par la suite il remarqua que ce ballon était nettement plus lourd et moins élastique qu’auparavant. En fait, il cassait souvent l’extrémité souple du sapin dont il se servait pour jouer. Le géant fut donc contraint de sculpter et consolider des crosses pour jouer en famille.
C’est ainsi que le noble sport de hockey sur gazon trouva son origine parmi les géants. C’est en tout cas ce que l’on raconte chez les hommes d’aujourd’hui. Bien sûr, la balle a évolué et s’est adaptée à la corpulence des joueurs, tout comme les crosses.
Pour ce qui est de la balle de Morrg et Dyya, leur mère finit par deviner que la lourde pierre ovoïde apportée par l’aigle était probablement un cadeau de paix, un gage d’équilibre en compensation d’un trésor perdu. Il n’y eut plus jamais d’affrontement entre aigles et géants.
Il semble que Gerry fut le seul à s’émouvoir des tendres retrouvailles de Celegwelwen et Landroval. Apparemment les grands aigles ne s’épanchent ni ne s’étreignent, du moins en public. Les témoignages d’affection, s’ils existent, sont confinés à la sphère strictement intime.
Si Celegwelwen montra quelques signes de satisfaction quant à délivrance de son consort, notre hobbit ne sut les reconnaître. La présentation du petit Corongwinig fut lente et formelle. Landroval laissa la boule de plumes lui mordiller le bec puis régurgita un peu de nourriture pour son rejeton.
Notre hobbit se rendit compte alors que la femelle Celegwelwen était plus imposante que son consort, même si Landroval apparaissait plus vif et musculeux.
Gerry, fourbu physiquement et épuisé moralement, grignota ses dernières réserves de biscuits des nains et s’endormit rapidement. Il put passer enfin une nuit tranquille et réparatrice, à l’écart sur la pente herbeuse. Au matin, Landroval lui apprit qu’il avait restitué l’œuf volé à ses parents. Les escadrilles des aigles exultaient de la fin de la guerre avec les géants et du recouvrement de l’œuf, mais Gwaïhir le roi des aigles était inquiet - le nord frémissait de rumeurs alarmantes. Aussi Landroval était-il convoqué pour un conseil le lendemain. En attendant, le grand aigle exprimait à Gerry la reconnaissance des parents de l’œuf sauvé et la considération de Gwaïhir lui-même. Il pria Gerry de nommer ce qu’il souhaitait en prix de son propre sang d’aigle.
En dehors de ses conquêtes féminines, notre hobbit était un garçon modeste. L’amitié des aigles tout-puissants lui semblait bien au-dessus de sa condition. Aussi ne lui vint-il pas à l’esprit de demander quoi que ce fût pour lui-même.
-« Maître Landroval, en tant qu’ami des nains de Dùrin, je voudrais solliciter de votre haute bienveillance, que vous fassiez ce qui est en votre pouvoir pour sauvegarder Barum-Nahal, le volcan des pères des nains.
- Nous veillerons comme nous l’avons toujours fait, et enseignerons la terreur aux créatures mauvaises qui s’en approcheront. Mais il nous reste à trouver la balance dans notre compte ! Celegwelwen a sauvé une vie de hobbit. Le hobbit a sauvé la vie d’un œuf et d’un aigle. Les aigles restent vos débiteurs…
- Oh mais pas du tout Maître Landroval ! En paiement de ma dette à Celegwelwen, j’ai accepté de m’occuper de son petit. C’est ce que j’ai fait – bien que ne l’ayant pas projeté d’avance – en vous aidant à trouver un moyen de fuir. Désormais vous pourrez remplir vos devoirs de père, infiniment mieux que je ne saurais le faire ! En outre vous êtes pour moitié responsable du sauvetage de l’œuf ! J’en déduis donc que nous sommes quittes. Cependant, j’aurais une demande pour l’avenir : dussiez-vous croiser un hobbit, vous saurez désormais le reconnaître. Pourrez-vous lui venir en aide en souvenir du frère d’aire de Corongwinig ?
- Nous le ferons certainement, quoi qu’il nous soit difficile de discerner le hobbit du lapin ! Mais vous parlez d’avenir. N’y a-t-il rien que votre propre cœur désire à présent ? »
Gerry ne releva pas le tout premier trait d’humour aigle dont Landroval l’avait gratifié :
-« Mon cœur désire revenir sur la terre ferme, auprès de la pâquerette et du renard, au pays de la petite personne que je suis.
- Vos deux vœux seront exaucés. »
C’est ainsi qu’un matin de la fin d’Urui, Celegwelwen transporta notre hobbit par les airs vers le « pays de la petite personne ». Comme à son habitude, le hobbit ne résista pas à la sensation de chute lors des descentes vertigineuses et s’évanouit rapidement.
Lorsqu’il retrouva ses esprits, la grande aigle veillait sur lui, au sommet d’un mamelon herbeux, au fond d’une vallée chaude et riante. Les sapins tout autour ne lui étaient pas familiers, mais le hobbit se trouvait à présent à une altitude propre à sa survie.
-« Sommes-nous bien dans la Comté ?, demanda-t-il avidement.
- Celegwelwen ignore comment se nomme cette partie du monde. Nous y connaissons fort bien une petite personne qui y vit. Les aigles nomment cet endroit la vallée évanouie, parce que ses habitants sont profondément insouciants des malheurs du monde alentours.»
Gerry reconnut dans cette description, qui convenait parfaitement à la Comté, la grande faculté d’observation des aigles. Il allait demander à son hôtesse de le rapprocher des habitations, mais il se souvint quel sort les pâtres réservent aux aigles lorsqu’ils approchent trop des troupeaux. En outre l’envergure de son amie allait certainement effrayer tout le voisinage. Il résolut donc de n’en rien faire et d’accomplir le reste du chemin à pied.
-« Par où vit la petite personne que vous connaissez ? », demanda-t-il pour s’orienter.
La grande aigle lui désigna le sud, à travers les bosquets. Enfin ils se quittèrent, non sans larmes du petit hobbit. La majestueuse Celegwelwen s’éleva vivement dans le firmament.
- « Souffle bonne brise sous vos ailes au-dessus des orages ! », cria-t-elle en laissant tomber une belle plume blanche et noire.
- « Merci, répondit Gerry qui avait retenu la réponse appropriée, Puissiez-vous trouver les ascendants propices jusqu’à votre aire ! »
C’est ainsi que le noble sport de hockey sur gazon trouva son origine parmi les géants. C’est en tout cas ce que l’on raconte chez les hommes d’aujourd’hui. Bien sûr, la balle a évolué et s’est adaptée à la corpulence des joueurs, tout comme les crosses.
Pour ce qui est de la balle de Morrg et Dyya, leur mère finit par deviner que la lourde pierre ovoïde apportée par l’aigle était probablement un cadeau de paix, un gage d’équilibre en compensation d’un trésor perdu. Il n’y eut plus jamais d’affrontement entre aigles et géants.
Il semble que Gerry fut le seul à s’émouvoir des tendres retrouvailles de Celegwelwen et Landroval. Apparemment les grands aigles ne s’épanchent ni ne s’étreignent, du moins en public. Les témoignages d’affection, s’ils existent, sont confinés à la sphère strictement intime.
Si Celegwelwen montra quelques signes de satisfaction quant à délivrance de son consort, notre hobbit ne sut les reconnaître. La présentation du petit Corongwinig fut lente et formelle. Landroval laissa la boule de plumes lui mordiller le bec puis régurgita un peu de nourriture pour son rejeton.
Notre hobbit se rendit compte alors que la femelle Celegwelwen était plus imposante que son consort, même si Landroval apparaissait plus vif et musculeux.
Gerry, fourbu physiquement et épuisé moralement, grignota ses dernières réserves de biscuits des nains et s’endormit rapidement. Il put passer enfin une nuit tranquille et réparatrice, à l’écart sur la pente herbeuse. Au matin, Landroval lui apprit qu’il avait restitué l’œuf volé à ses parents. Les escadrilles des aigles exultaient de la fin de la guerre avec les géants et du recouvrement de l’œuf, mais Gwaïhir le roi des aigles était inquiet - le nord frémissait de rumeurs alarmantes. Aussi Landroval était-il convoqué pour un conseil le lendemain. En attendant, le grand aigle exprimait à Gerry la reconnaissance des parents de l’œuf sauvé et la considération de Gwaïhir lui-même. Il pria Gerry de nommer ce qu’il souhaitait en prix de son propre sang d’aigle.
En dehors de ses conquêtes féminines, notre hobbit était un garçon modeste. L’amitié des aigles tout-puissants lui semblait bien au-dessus de sa condition. Aussi ne lui vint-il pas à l’esprit de demander quoi que ce fût pour lui-même.
-« Maître Landroval, en tant qu’ami des nains de Dùrin, je voudrais solliciter de votre haute bienveillance, que vous fassiez ce qui est en votre pouvoir pour sauvegarder Barum-Nahal, le volcan des pères des nains.
- Nous veillerons comme nous l’avons toujours fait, et enseignerons la terreur aux créatures mauvaises qui s’en approcheront. Mais il nous reste à trouver la balance dans notre compte ! Celegwelwen a sauvé une vie de hobbit. Le hobbit a sauvé la vie d’un œuf et d’un aigle. Les aigles restent vos débiteurs…
- Oh mais pas du tout Maître Landroval ! En paiement de ma dette à Celegwelwen, j’ai accepté de m’occuper de son petit. C’est ce que j’ai fait – bien que ne l’ayant pas projeté d’avance – en vous aidant à trouver un moyen de fuir. Désormais vous pourrez remplir vos devoirs de père, infiniment mieux que je ne saurais le faire ! En outre vous êtes pour moitié responsable du sauvetage de l’œuf ! J’en déduis donc que nous sommes quittes. Cependant, j’aurais une demande pour l’avenir : dussiez-vous croiser un hobbit, vous saurez désormais le reconnaître. Pourrez-vous lui venir en aide en souvenir du frère d’aire de Corongwinig ?
- Nous le ferons certainement, quoi qu’il nous soit difficile de discerner le hobbit du lapin ! Mais vous parlez d’avenir. N’y a-t-il rien que votre propre cœur désire à présent ? »
Gerry ne releva pas le tout premier trait d’humour aigle dont Landroval l’avait gratifié :
-« Mon cœur désire revenir sur la terre ferme, auprès de la pâquerette et du renard, au pays de la petite personne que je suis.
- Vos deux vœux seront exaucés. »
C’est ainsi qu’un matin de la fin d’Urui, Celegwelwen transporta notre hobbit par les airs vers le « pays de la petite personne ». Comme à son habitude, le hobbit ne résista pas à la sensation de chute lors des descentes vertigineuses et s’évanouit rapidement.
Lorsqu’il retrouva ses esprits, la grande aigle veillait sur lui, au sommet d’un mamelon herbeux, au fond d’une vallée chaude et riante. Les sapins tout autour ne lui étaient pas familiers, mais le hobbit se trouvait à présent à une altitude propre à sa survie.
-« Sommes-nous bien dans la Comté ?, demanda-t-il avidement.
- Celegwelwen ignore comment se nomme cette partie du monde. Nous y connaissons fort bien une petite personne qui y vit. Les aigles nomment cet endroit la vallée évanouie, parce que ses habitants sont profondément insouciants des malheurs du monde alentours.»
Gerry reconnut dans cette description, qui convenait parfaitement à la Comté, la grande faculté d’observation des aigles. Il allait demander à son hôtesse de le rapprocher des habitations, mais il se souvint quel sort les pâtres réservent aux aigles lorsqu’ils approchent trop des troupeaux. En outre l’envergure de son amie allait certainement effrayer tout le voisinage. Il résolut donc de n’en rien faire et d’accomplir le reste du chemin à pied.
-« Par où vit la petite personne que vous connaissez ? », demanda-t-il pour s’orienter.
La grande aigle lui désigna le sud, à travers les bosquets. Enfin ils se quittèrent, non sans larmes du petit hobbit. La majestueuse Celegwelwen s’éleva vivement dans le firmament.
- « Souffle bonne brise sous vos ailes au-dessus des orages ! », cria-t-elle en laissant tomber une belle plume blanche et noire.
- « Merci, répondit Gerry qui avait retenu la réponse appropriée, Puissiez-vous trouver les ascendants propices jusqu’à votre aire ! »
.oOo.
... Fin.Merci pour votre patience et vos encouragements.
Cet extrait est tiré du Livre vert de Bourg-de-Touque, une préquelle de Hob et SdA, contant les tribulation du Vieux Touque... lorsqu'il était jeune.