03.02.2016, 09:37
(02.02.2016, 11:20)Hofnarr Felder a écrit : On voit ici qu'un certain sens d'outrecuidance se dégage, associé au cynisme, à la cuistrerie, ou comme je le disais, au culot. Certes, d'autres exemples vont plus dans ton sens, car il s'agit d'un terme tout à fait riche du point de vue sémantique ; mais l'essentiel, c'est qu'il y a cette association d'idées possible, ce canal conceptuel, qui éloigne l'esprit du sens qui nous intéresse, ou plutôt lui adjoint certains développements sémantiques parasites qui viennent le recouvrir partiellement, mais suffisamment pour le rendre partiellement méconnaissable.
Méconnaissable, je ne pense pas. Plus riche qu'ofermod, c'est inévitable s'agissant d'un terme vivant, régulièrement utilisé, plutôt que d'un mot attesté à seulement deux reprises dans une langues morte depuis un millénaire.
(02.02.2016, 11:20)Hofnarr Felder a écrit : Mais revenons à l'important. Je réfléchissais, et je me disais : a-t-on des exemples d'ofermod dans la tradition mythologique gréco-romaine ? J'ai pu lire par exemple (dans le texte associé au lien qui figure dans mon message initial) qu'Ulysse en fournissait un exemple ; mais je n'arrive pas à voir en quel épisode il manifeste pareille attitude. Faut-il voir là un trait d'héroïsme, ou plutôt, de démesure héroïque, plus propre à la tradition germanique (la Chanson de Roland pouvant à la rigueur s'y rattacher) ? Auquel cas ce serait très intéressant.
Pour Ulysse, je ne vois vraiment pas en quoi il ferait preuve d'ofermod, ni d'ailleurs en quoi il serait un tragically flawed character, en tout cas dans la tradition grecque. Je pense que l'auteur a dû confondre avec l'un des deux Ajax, ou encore avec Agamemnon, trois personnages qui font preuve d'un indiscutable hybris.
Je ne pense nullement que l'ofermod au sens où Tolkien l'entend soit un trait de caractère propre à la tradition germanique. Comme Tolkien le souligne, ce n'est pas un trait purement épique, et il ne faut pas s'attendre à le retrouver dans un texte comme l'Iliade. En revanche, dans les sociétés où l'honneur ne consiste pas simplement à vaincre, mais à vaincre en y mettant les formes, il faut s'attendre à l'y retrouver.
Rollant est proz e Oliver est sage.
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
— La Chanson de Roland
Ambedui unt merveillus vasselage :
Puis que il sunt as chevals e as armes,
Ja pur murir n’eschiverunt bataille.
— La Chanson de Roland