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Scène Lúthien - Mandos
#1
Bonjour à tous,
Je me suis récemment essayé à retranscrire la rencontre entre Lúthien et Mandos de manière un peu ludique, en usant de vers anglais à la couleur un peu vieillie afin de construire une scène de théâtre. Je me suis seulement référé au passage concerné dans le Silmarillion, donc je m'excuse si cette scène contredit certains éléments donnés par JRRT dans d'autres ouvrages.
J'ai également proposé une traduction, que je me suis efforcé de rendre aussi fidèle sémantiquement que "littérairement", afin que le texte soit plus facile à suivre.
J'espère que ça vous plaira !


Texte original


LÚTHIEN – O royal Mandos – hail thee, dreaded Guardian,
Who bestride both worlds even with a thought.
My princely attires I cast before Thee,
Upon seeing Thy divine orbs thus blaz’d,
Icy-fired by wrath, that turns men’s and Elven minds
Awry, and humbly ask for audience to Thee,
O all-ruling eyes, watching on life and death, 
That takes the world’s end as your throne.
But though I tread upon this soil,
A mortal sea that softly sways away 
The sleepy dwellers and casts the trespassers
In gnawing foam, I feel no fear.
For a lov’ly sight light-dials must prove,
Awesome yet soothing, to her who saw
The silvery sun of th’immortal air-seas,
The highest deed of Finwë’s kin,
Galadriel’s hair by Fëanor’s craft – 
The triple light of the Edhil enclos’d
In dreadful Morgoth’s dark crownet.
 
MANDOS – True and plain, what is your cause for audience?
 
LÚTHIEN – To meet again the son of Barahir.
 
MANDOS – This naught, either power or will, can grant,
For death’s a rigid doom, an unyielding fate,
And Eru’s gift’s not yours to throw away.
Hence your manner, once so courteous and loving,
Now verges on insolence stain’d with pride.
For th’earthly envelope’s a blessing that
Embodies a life’s ephemeral stuff.
A broken fabric wants unspoil’d value;
If mended, ‘tis but bound to split anew.
Bare thee back to Thingol and stop this bargain;
The thread once cut cannot be woven again.
 

Lúthien stands still. Silence for a while.
 
Get thee gone.
 
LÚTHIEN – I beseech Thee, hear my claim.
[Singing.]

When the world was young and light first flew
White birds sang high and fair flowers grew.
On the purple rose the wind first blew;
He sang for us and our hearts were true.
 
The Firstborn ones by the green oak-tree
Sail’d unhinder’d on the azure sea;
Under the stars then their souls were free
Till the son of Finwë made the Three.
 
We saw all things about us die,
By sharpened slings we came to cry.
And when our love had turn’d awry
We struck our kin and now they lie.
 
The transient dew ever shall fade,
Our younger mirth’s already stray’d,
We are forsaken though we pray’d
Till our time in whole be paid.
 
To rescue Thingol he that sped
Has play’d his life, and it has fled;
He shall no more on Arda tread,
Nor fill his deadly foes with dread.
 
The starry forms under this plight
Have abandon’d the gloomy night;
Women and men have stopp’d in fright
Their flooding tears are piercing bright.
 
Birds are quiet and days turn soundless,
Save for the cries heard in Westernesse;
For pointy arrows Edain’s hearts press,
Till their shells from life they dispossess.
 
So spring ne’er shall blossom again,
Till th’atonement’s done by Elves and Men. 
In tying this bond gave the slain Beren
The acrid jewel of grief to Lúthien.

Traduction
LÚTHIEN – Ô royal Mandos – je Te salue, redouté Gardien,
Toi qui englobes les deux mondes d’une seule pensée.
Mes attributs princiers, je les jette à Tes pieds,
À la vue de Tes orbes divins ainsi enflammés
D’un courroux de feu glacé, qui des Hommes et des Elfes détraque
Les âmes, et Te prie d’entendre ma requête,
Ô regard régisseur, surplombant vie et mort,
Qui trônes depuis le seuil du monde.
Bien que je foule ce sol,
Mer mortelle qui porte délicatement
Les habitants au repos et lance aux intrus
Une écume qui les ronge, je n’ai pas peur ;
Car ces fenêtres lumineuses se révèlent agréables,
Imposantes et pourtant apaisantes, pour celle qui vit
Le soleil argenté des éternelles ondes célestes,
Le chef-d’œuvre de la maison de Finwë,
La chevelure de Galadriel selon l’art de Fëanor,
Les trois lumières des Edhil emprisonnées
Dans la sombre couronne du terrible Morgoth.
 
MANDOS – Parle vrai et sans détours : quel désir te meut ?
 
LÚTHIEN – Celui de revoir le fils de Barahir.
 
MANDOS – Cela, nulle puissance ou volonté ne peut l’accorder
Car la mort est un sort inflexible, un indomptable destin,
Et tu ne peux refuser le don d’Eru.
Ainsi tes manières, il y a peu si courtoises et aimantes,
Se teintent désormais d’une insolence mêlée d’orgueil ;
Car le corps terrestre est une grâce
Illustrant l’étoffe éphémère de la vie.
Un tissu déchiré regrette sa pureté ;
Si amendé, il ne peut qu’encore s’étioler.
Retrouve Thingol et laisse là le marché ;
Le fil coupé ne peut être à nouveau tissé.
 

Une pause. Lúthien se tient immobile.
 
Repars.
 
LÚTHIEN – Écoute mes prières, je T’en supplie.
 
[Elle chante.]
 

À l’aube du monde un flot de lumière
Peignit blancs oiseaux et vertes clairières.
La rose pourpre vit sur elle l’Auster
Chanter pour nous et bercer nos cœurs clairs.
 
Les Premiers-Nés délaissant lacs et bois
Voguèrent au loin dans l’azur et le froid ;
Sous les étoiles n’était aucun effroi
Jusqu’à ce que Fëanor fît les Trois.
 
Autour de nous tout disparut,
Nous succombâmes aux traits aigus ;
Et quand notre amour fut perdu,
L’Elfe frappa, son frère mourut.
 
Jeune rosée toujours mourra :
Déjà nous perdons notre joie.
Nous errerons seuls sur Arda
Tant que la faute durera.
 
Le brave sauveur de Thingol
Paye le prix : sa vie s’envole.
Il abandonne ce pauvre sol,
L’ennemi chasse une peur folle.
 
L’œuvre de Varda affligée
Quitte une sombre nuit peinée ;
Les Successeurs sont pétrifiés ;
Leurs larmes les rendent muets.
 
Les oiseaux et les jours se sont éteints,
Pleins seulement des pleurs des Edain :
Atroces flèches et terribles mains 
Mènent la vie de l’Homme à sa fin.
Toujours le printemps sera en peine
Jusqu’au rachat de nos fautes anciennes ;
 Le sacrifice du preux Beren
Laisse un joyau funeste à Lúthien.

 
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#2
Très belle plume Smile. Je suis impressionnée par la qualité de ton texte (juste un peu surprise par le choix de faire rimer le poème) !
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#3
Bravo pour cette traduction et particulièrement la partie en rimes. J'aime beaucoup !
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