15.04.2020, 00:23
(Modification du message : 17.04.2020, 20:39 par Chiara Cadrich.)
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Une veilleuse vacillait, suspendue à la clef de voûte. Des volutes tortueuses dansaient dans sa lumière ténue. Denethor les suivit du regard, cherchant leur source.Assis tranquillement dans un coin, un vieil homme l’observait, sa pipe aux lèvres.
Denethor sursauta et s’écria :
- Que faites-vous ici ?
Entre deux bouffées grises, sans cesser de scruter le nouveau venu, le vieillard répondit avec douceur :
- Je vous attendais…
Le jeune homme, encore sous le coup de la surprise, reprenait l’empire sur lui-même. Fâché de s’avérer si prévisible, il toisa longuement le vieil homme. Un conseiller de son père, sans cesse en vadrouille, qui s’éclipsait et revenait à l’improviste pour commander comme en pays conquis…On le connaissait sous le nom de Mithrandir, mais en son cœur, Denethor le surnommait "Corbeau des tempêtes"...
Le bonhomme persistait à le dévisager, une curieuse lueur un peu inquiète dans le regard. Denethor se drapa dans une autorité mal assurée et lança en se redressant :
- Comment êtes-vous entré ?
- Vous oubliez que votre père m’a confié les mots de passe de sa garde… et que les magiciens sont maîtres en tradition. Tout comme vous, je puis discerner la logique secrète, dissimulée sous les rimes d’autrefois…
Denethor s’approcha de la table de marbre où reposait la pierre. Une étoffe épaisse la recouvrait.
- Il suffit de voiler le palantir pour s’en protéger, souffla Gandalf…
Le sourcil altier de Denethor se leva en un arc interrogatif et agacé. Le magicien en savait donc un peu plus long que lui sur les prodiges elfiques...
Le souffle rauque, Gandalf égrena lentement, semblant choisir ses termes avec précaution :
- Il est périlleux, même pour moi, d’approcher la pierre sans y laisser errer le regard… car alors quelque chose pourrait l’accrocher… quelque chose ou quelqu'un... véritablement dangereux !
Ainsi, le vieux fou avait lui-même sondé le palantir de Minas Tirith ! La colère gagna le cœur de Denethor – de quel droit ?
Quoi qu’il y ait vu, le souvenir de la pierre tirait des traits las sur le visage du magicien :
- Je vous en conjure, Denethor, jeune capitaine et déjà maître du savoir de Minas Tirith, de renoncer à affronter le palantir ! A tout le moins, remettez à plus tard cette entreprise si difficile. Vous ignorez la malice implacable qui vous confrontera...
- Repousser le combat ! s’exclama le jeune homme, plein de mépris pour cette compassion pusillanime. N’est-ce pas ce que nous faisons depuis des décennies, sans pouvoir relever le gant ?
Une foi inflexible vibrait dans la voix du jeune homme :
- Quelle folie de mépriser un tel instrument de pouvoir ! Il nous a été légué par nos pères ! Apprenez que pour l’élite qui en est digne, utiliser la pierre n’est pas question de pouvoir, mais de devoir ! La maison des intendants, légataire de la majesté du Gondor, tiendra en respect l’ombre qui se lève à l’est ! Je ne recherche que le moyen de protéger mon peuple, et je tiendrai parole !
S’appuyant sur son bâton, Gandalf se leva et s'interposa entre le palantir et le jeune homme. Son long visage trahissait une grande fatigue, mais il parut grandir en s’approchant de Denethor :
- Voilà une promesse digne d’un vaillant seigneur des hommes ! Mais prenez garde ! Ce serment vous lie à présent ! Tout comme vous lie votre promesse d’obéissance à l’intendant votre père !
Gandalf observa le jeune homme s’éloigner, frémissant d'indignation. Le magicien se rassit, tirant sur sa pipe d’un air dubitatif. Il avait retardé l’inévitable, mais à quel prix ? Il avait échoué à gagner la sympathie de l’héritier du Gondor, et perdu un allié dans les luttes à venir.
Sur le pas de la porte, le bouillant Denethor se retourna, s’imposant visiblement un effort considérable pour retrouver le port majestueux qui sied au seigneur des lieux. Etre tenu en échec par un vieux touche-à-tout ! Après quelques instants seulement, toute trace de colère s’évanouit de son visage et ses traits se durcirent en un masque régal, sous lequel affleurait une détermination implacable. La sentence tomba :
- Mithrandir ! Vous gagnez pour cette fois ! Mais un jour je serai l’intendant de ce royaume ! Et alors mes vues feront loi ! Pour tous, vous compris ! Je ne permettrai plus que quiconque usurpe l’autorité de ma lignée ! Jamais !
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A suivre...