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Troie et Gondolin - Version imprimable

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Troie et Gondolin - Peredhel - 22.08.2014

Ayant récemment (bien) entamé l'Iliade en version intégrale (auparavant je n'en avais lu qu'une version abrégée) j'ai relevé des similitudes qui ne m'avaient pas sautés aux yeux auparavant entre le texte d'Homère et les premiers écrits de Tolkien. Si je vous consulte c'est parce que ce genre de comparaison est à faire avec des pincettes en général, et en particulier parce que les comparaisons entre La Chute de Gondolin et celle de Troie j'en ai déjà vu de nombreuses mais la plupart du temps la réponse se limitait à "la seule ressemblance c'est la chute d'une ville..." or j'en vois de nombreuses autres :

L'énumération, avant la bataille, des chefs, de leurs caractéristiques et des soldats et de leurs caractéristiques :
Homère (LIliade - Chant II) a écrit :Les Béotiens ont à leur tête Pénéléôs et Léite, (...). Ils sont arrivés sur cinquante nefs, et, montés à bord de chacune, sont cent vingt jeunes Béotiens.
Les habitants d'Asplédon, comme ceux d'Orchmène la minyenne, ont à leur tête Ascalaphe et Ialmène, fils d'Arés (...). Ceux-là mettent trente nefs creuses en ligne.
Les Phocidiens ont à leur tête Schédios et Épistrophe, tous deux fils d'Iphite, le Naubolide magnanime (...). Leurs chefs ont sous leurs ordres quarante nefs noires. Ils s'occupent à ranger les Phocidiens et se forment à coté des Béotiens, sur leur gauche.
Les Locriens obéissent au fils d'Oïlée, Ajax le Rapide, il n'a pas la taille du fils de Télmon ; il est moins grand lui, beaucoup moins grand même. Mais en déput de sa petite taille et de sa cuirasse de lin, pour lancer la javeline, il n'a pas de rival parmi les Panhellènes ou les Achéens (...).
Puis viennent ceux d'Eubée, les Abantes, respirant la fureur : gens de Calchis et d’Érétrie et d'Hestiée riche en grappes (...). Ceux là obéissent à Éléphénor, rejeton d'Arés, fils de Chalcodon capitaine des Abantes magnanimes (...).
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Là étaient les étendards lumineux de toutes les grandes maisons et familles des Gondothlim. Vaste était le déploiement de la maison du roi et ses couleurs étaient le blanc et l'or et le rouge, et ses emblèmes la lune et le soleil et le cœur écarlate. Maintenant en leur milieu se tenait Tuor, les dominant tous, et sa cotte d'argent luisait ; et autour de lui était une foule de gens les plus valeureux. Voici ! tous ceux-ci portaient des ailes comme des cygnes ou des mouettes sur leur heaumes et l'emblème de l'Aile Blanche était sur leurs boucliers. Mais les gens de Meglin étaient rassemblés au même endroit, et sable était leur harnachement, et ils ne portaient ni signes, ni emblème, mais leurs coiffes étaient rondes et recouverte de peau de taupe, et ils combattaient avec des haches à deux lames semblables à des masses (...).
Et de nombreuses autres familles étaient là, les gens de l'Hirondelle et de l'Arche Céleste, et de ce peuple venaient le plus grand nombre et les meilleurs des archers, et ils étaient déployés sur les parties larges de l'enceinte (...).

On note aussi les interventions "divines" (puisqu'à l'époque les Valar sont des dieux). Par exemple pour préserver les héros en les dissimulant :
Homère (LIliade - Chant XX) a écrit :A peine Poseidon, Ébranleur du sol, a-t-il entendu ces mots qu'il part à travers la bataille et le fracas des javelines. Il arrive à Énée et à l'illustre Achille. Sur les yeux d'Achille, le fils de Pelée, vite il épand un brouillard; après quoi, arrachant la pique de bronze au bouclier du magnanime Énée, il la dépose aux pieds d'Achille.
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Alors la Terre entière était étendue de la lumière grise de cette triste aube qui ne contemplait plus maintenant la beauté de Gondolin ; mais la plaine était emplie de brumes - et cela était un prodige, car aucune brume ni brouillard n'y était jamais venue auparavant, et ceci peut-être provenait de la fontaine du roi. Une fois de plus ils se levèrent, et couverts par les vapeurs continuèrent longtemps après l'aube en sécurité (...).

Enfin la troisième similitude notable : l'aristeia, la furie guerrière qui s'empare des héros, tant chez Tolkien que chez Homère :
Homère (LIliade - Chant XX) a écrit :Le valeureux Polypoetés, lui, tue Astyale, tandis qu'Ulysse abat Pidytés de Percote sous sa pique de bronze, et Teucros le divin Arétaon. Antiloque, le fils de Nestor, frappe Ablère de sa pique éclatante, et Agamemnon, protecteur de son peuple, Elate, qui, sur les bords du Satnioïs aux belles eaux, habite la haute Pédase. Le héros Léite fait sa proie de Phylaque qui cherche à s'enfuire. Eurypile tue Mélanthe.
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Là Tuor tua Othrod, un seigneur des Orcs, fendant son heaume, et Balcmeg il coupa en deux, et Lug il taillada de sa hache et ses jambes furent tranchées au genou, mais Echtelion coupa à travers deux capitaines des goblins d'un seul coup d'épée et fendit la tête d'Orcobal leur principal champion jusqu'aux dents ; et grâce à la grande bravoure de ces deux seigneurs ils parvinrent même jusqu'aux Balrogs.

Si les deux premiers procédés se retrouvent plusieurs fois chez Tolkien (l'énumération avec les troupes des fiefs et la dissimulation "divine" avec Hurin et Huor en Brethil par exemple) ce dernier est assez unique. Il est d'autant plus remarquable qu'il semble s'inspirer de l'Iliade non seulement pour ce qui est des événements décrits mais aussi pour le style : il est très rares que l'on nomme les capitaines ennemis, a fortiori si ils n’apparaissent que pour se faire tuer, alors que c'est très fréquent chez Homère. De même les descriptions, quoique courtes, sont particulièrement gores, Tolkien donne rarement des détails aussi précis que ceux de la mort d'Orcobal (quand Fingon où le chef Orque de la chambre de Marzabul sont tués de la même manière c'est la flamme qui s'échappe de leur heaume sur laquelle Tolkien insiste).
Pour le reste il est vrai que les similitudes ne touchent ni au fond (la Guerre de Troie et la chute de Gondolin ne traitent pas du tout des mêmes sujets) ni de la forme (l'écriture de ce texte rappelle, il me semble, d'avantage les textes médiévaux qu'antiques) et pourtant à la lecture ces éléments "empruntés" m'ont frappées alors que je ne les avaient pas remarquées auparavant.

On pourrait en évoquer d'autres autour de ce conte : la famille Tuor-Idril-Eärendil/Hector-Andromaque-Astianax, la fuite des Gondothlim/Troyens et les dynasties et villes qu'ils fondent, les armes d'origine divines de Tuor/Achille, etc.

Après peut-être ais-je tort : ce que je vois comme des similitudes entre les deux pourraient être des éléments récurrents dans de nombreux textes archaïques. C'est pourquoi je soumet cette hypothèse sur ce forum. Wink


RE: Troie et Gondolin - Tikidiki - 22.08.2014

C'est drôle, on avait évoqué ce point sur le warfo mais j'ai l'impression que le topic est perdu ou a été supprimé...

Il faudrait peut-être mettre à part les procédés stylistiques qui pourraient rappeler non Troie elle-même mais l'Iliade ou l'Enéide, des traits communs à Troie et à Gondolin.

Par exemple, l'énumération des chefs et de leurs soldats se retrouve à Minas Tirith dans le Seigneur des Anneaux, et peut être un simple procédé récurrent de tout récit de siège. Et pour ce qui est de l'aristeia, je trouve que Tolkien ne reprend pas vraiment le style d'Homère et énumère très crûment, comme tu le remarques, comme quelqu'un qui a vraiment vécu la guerre. D'autres combats de Tolkien pourraient reprendre les mêmes envolées lyriques.

Pour les interventions divines, je suis plus d'accord avec toi. Peu d'autres sièges ont pu mobiliser les interventions divines (éventuellement, le vent qui amène Aragorn à Minas Tirith), mais surtout les dieux interviennent parce qu'il s'agit d'un événement capital de cette époque (chez Tolkien, cela se manifeste par une confrontation entre le feu et l'eau, les Balrogs de Melko contre Ulmo).

Les intérêts des dieux sont concentrés dans ce moment central, car chacun des deux sièges est le plus grand que le monde ait connu.
Les deux cités, protégées par des murs titanesques, étaient des joyaux; malgré des combats épiques, ni leur population nombreuse ni leur puissant roi ne survit au siège, hormis une poignée de fuyards dont on connaît le destin; enfin, c'est la trahison qui pose son sceau sur la prise de la ville. Sa destruction marque le début d'une période sombre (domination de Morgoth, et "Dark Ages").

Pourtant, les deux cités sont regardées attentivement par l'histoire parce qu'elles portent surtout un espoir, et le germe de la renaissance. C'est là où la famille Tuor-Idril-Earendil rejoint le trio Enée-Anchise-Ascagne.
Leurs fuites, devant une Troie et une Gondolin encore en flammes, exportent dans l'exil la culture de leurs cités, et finissent par apporter au monde ce dont il a besoin: la lignée d'Enée (et éventuellement, a posteriori, celle d'Eärendil), et l'intervention d'Eärendil auprès des Valar. On note également que si Anchise est sur les épaules d'Enée, Eärendil est sur celles de Hendor, un suivant d'Idril. C'est aussi l'avis d'Isabelle Pantin, qui défend le legs de Troie dans le Légendaire, et lie la fuite d'Enée à celle de Tuor.


RE: Troie et Gondolin - Elendil - 22.08.2014

Je suis assez d'accord avec les points de convergence évoqués. On sait que Tolkien aimait la langue grecque et appréciait Homère : une influence directe ou non est donc envisageable.

(22.08.2014, 13:42)Tikidiki a écrit : Et pour ce qui est de l'aristeia, je trouve que Tolkien ne reprend pas vraiment le style d'Homère et énumère très crûment, comme tu le remarques, comme quelqu'un qui a vraiment vécu la guerre. D'autres combats de Tolkien pourraient reprendre les mêmes envolées lyriques.

Oh certaines descriptions homériques sont plutôt crues, si l'on se réfère à une traduction exacte et non a une des traductions "ennoblies" du XIXe ou du début du XXe siècle.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 22.08.2014

Ah ah ! Alors voilà pourquoi Tikil jouait les archivistes au Warfo !

Alors je vais répéter ce que j'y ai dit il y a 2 ans, tiens.

1) Il ne faut pas réduire la culture du grand Professeur à la nôtre, pauvres mortels que nous sommes. Pour nous, bons élèves de l'école française, la mythologie par excellence, c'est la mythologie grecque. Dans la tête de Tolkien, la mythologie grecque est présente, mais sa principale inspiration, c'est le Nord, le roi Arthur et le roman victorien. Il peut y avoir des références précises à la mythologie grecque (typiquement, Numenor/Atlantide). Mais ce n'est pas cette piste qu'il faut examiner en priorité lorsqu'on cherche les inspirations de Tolkien.

2) Je pense que pour parler d'inspiration, il faut qu'il y ait coïncidence sur des points précis, pas sur des grosses généralités/ficelles que l'on retrouve dans plein de récits différents.
Par exemple, je trouve ça pertinent de rapprocher le personnage d'Elendil de celui d'Enée, parce qu'il y a des coïncidences frappantes et précises : la piété, et l'emportement des Pénates/Arbre Blanc hors de la cité détruite.
En revanche, pour moi, le seul point commun entre Gondolin et Troie, c'est d'être des cités assiégées, ce qui est beaucoup trop maigre pour voir de l'inspiration.

Pour reprendre les points évoqués par Peredhil :
Citation :L'énumération, avant la bataille, des chefs, de leurs caractéristiques et des soldats et de leurs caractéristiques :
ça, c'est une convention universelle qui se trouve dans toutes les épopées. Que ce soit l'Iliade, la chanson de roland, la mort d'arthur ou tout le reste.

Citation : les interventions "divines"
ça, ça se retrouve par définition dans tous les récits mythiques ou religieux. Avec cet argument, la chute de Gondolin pourrait être inspirée du passage de la mer rouge ou du voyage de Mahomet à Jérusalem.

Citation : l'aristeia, la furie guerrière qui s'empare des héros, tant chez Tolkien que chez Homère :
La description de la fureur guerrière comme une possession, c'est une vision des choses qui se retrouve dans toutes les cultures païennes : aristeïa chez les Grecs, furor chez les Romains, berserkgang chez les Vikings...

Citation :il est très rares que l'on nomme les capitaines ennemis, a fortiori si ils n’apparaissent que pour se faire tuer, alors que c'est très fréquent chez Homère.
C'est très fréquent dans toutes les épopées. Lis la chanson de Roland, c'est court et édifiant.

Citation :De même les descriptions, quoique courtes, sont particulièrement gores,
Même remarque.

Citation :ces éléments "empruntés" m'ont frappées alors que je ne les avaient pas remarquées auparavant.
Je te pose la question sincèrement et sans pédantisme : qu'as-tu lu comme épopée jusqu'à présent ? Est-ce que tu connais l'Enéide, la Chanson de Roland, la Mort d'Arthur, les passages épiques des Métamorphoses ? Parce que là, je me trompe peut-être et tu peux me le dire, mais j'ai l'impression que tu découvres le genre épique à travers Homère...

Citation :la famille Tuor-Idril-Eärendil/Hector-Andromaque-Astianax
Je vois pas le rapport, tu peux expliquer ?

Citation :les armes d'origine divines de Tuor/Achille
Tu veux savoir combien d'armes d'origine divines on peut trouver dans la mythologie ?

Bref, la seule chose que montrent ces "ressemblances", c'est que le chute de Gondolin et l'Iliade sont des récits mythiques qui parlent de guerre et de bataille.


Poupi,
ça faisait longtemps, tiens.


RE: Troie et Gondolin - Tikidiki - 22.08.2014

Je suis plutôt d'accord avec Poupi, qui n'a pas pris la peine de descendre mes arguments Very Happy

Poupi, tu es bien catégorique. Tu dis que la mythologie grecque est présente mais assez peu pertinente dans l'analyse ("Ce n'est pas là qu'il faut chercher") mais ce n'est pas un argument pour rejeter une étude. Elle est pertinente dès lors que l'on trouve des liens sérieux.

Ensuite, le fait qu'Elendil puisse avoir des traits communs avec Enée n'exclut nullement que la figure d'Enée puisse être reprise ailleurs. Les inspirations ne s'excluent pas forcément.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 22.08.2014

Citation :Tu dis que la mythologie grecque est présente mais assez peu pertinente dans l'analyse ("Ce n'est pas là qu'il faut chercher"
Non ! Je ne dis pas que ça n'est pas pertinent, je dis que ça n'est pas premier, que ça n'est pas prioritaire ! Mais par exemple, comparer l'Atlantide et Numenor, c'est évidemment pertinent (au point d'être bateau, d'ailleurs !).
Citation :Ensuite, le fait qu'Elendil puisse avoir des traits communs avec Enée n'exclut nullement que la figure d'Enée puisse être reprise ailleurs. Les inspirations ne s'excluent pas forcément.
Je n'ai pas dit le contraire. Tu réponds à des propos que je ne tiens pas comme si je les tenais. je te reconnais bien là, fourbe.

Citation :qui n'a pas pris la peine de descendre mes arguments
Parce que tes arguments n'ont pas évolué d'un poil par rapport à il y a deux ans. Retourne lire le sujet du warfo.

Je commence par le truc le plus scandaleux dans ton propos :
Citation :Sa destruction marque le début d'une période sombre (domination de Morgoth, et "Dark Ages").
Non, ça c'est vraiment irrecevable pour deux raisons :
1) C'est une confusion absurde entre "Obscur" au sens historiographique (mal connu) et au sens spirituel (le règne du mal muhahaha)
2) C'est une référence complètement anachronique, les "Siècles obscurs" grecs ne sont étudiés que depuis les années 1970. Je te l'avais déjà dit il y a deux ans.

Sur le reste :
pour les interventions divines, etc, j'ai déjà répondu à Peredhil.
Idem sur le coup du traître : c'est un topos de la littérature et de l'épopée, ce n'est pas du tout précis comme coïncidence !

Sur la fuite d'Enée, plusieurs remarques :
1) Ce n'est pas issu de l'Illiade. Même en admettant qu'on parle de Troie en général, pas seulement d'Homère, c'est important je pense pour comprendre Tolkien. Car les récits qui racontent la fuite d'Enée ne parlent pas de Troie comme objet principal, mais c'est Enée leur objet principal. Par ailleurs, dans la littérature européenne (et notamment anglaise !) médiévale, c'était courant d'imaginer d'autres fils de Priam survivants en leur donnant très vite fait un background troyen avant de surtout en faire les ancêtres de l'Angleterre, de la France ou de l'Irlande.
2) Je reconnais tout à fait (comme je l'ai dit il y a deux ans) que la fuite d'Earendil peut évoquer celle d'Enée. Je dis simplement que c'est beaucoup moins fort que chez Elendil, et que par ailleurs, le personnage d'Earendil a d'autres dimensions qui ne se résument pas du tout à Enée : par exemple, son voyage jusqu'à Valinor, qui est quand même capital (alors que chez Elendil, une plus grande part de l'essentiel tourne autour de son rôle de survivant-fondateur). De plus, en liaison avec le 1), il ne me parait pas du tout plus pertinent de lier Earendil à Enée plutôt qu'à un de ses frangins médiévaux (alors qu'avec Elendil, il y a des détails forts). Parce que non, porter un enfant sur ses épaules, c'est trop indirect pour le lier avec le transport d'un vieillard.

Ma conclusion sur ce point, à titre personnel, est donc la suivante :
Il y a bien chez Earendil un thème (par ailleurs chez à Tolkien) de l'héritage de la cité disparue. Mais ce thème n'est pas spécifiquement énéien. Et les arguments d'autorité de m'impressionnent pas, misérable.


Bref, pour un type qui me demande de me renouveler, tu répètes exactement les même choses qu'il y a deux ans.

Poupi,
bis repetita placent, à propos de grécolatinitude


RE: Troie et Gondolin - Tikidiki - 22.08.2014

Mon cher Poupi, tu prends les universitaires des années 20 pour des naïfs. S'ils n'étudiaient pas comme nous actuellement la période des "siècles obscurs", ils la percevaient évidemment. Snodgrass, dans son livre The Dark Age (1971) y fait référence:

Citation :"There is a far-off island of knowledge, or apparent knowledge; then darkness; then the beginnings of continuous history.' These words of Gilbert Murray's, appearing first in 1907 fittingly embodied a doctrine which is largely the property of the present century. The period between the fall of the Mycenaean civilization and the rise of Archaic Greece, once its general nature and broad chronological limits had been agreed upon, was coming naturally to attract the name of a dark age (...)"

* G. Murray, The Rise of the Greek Epic, 1907

Voilà pour l'absurdité chronologique de l'historiographie; concernant l'application à Tolkien du terme d'âge sombre, cette période est mal connue du fait même des éléments catastrophiques qui concordent avec Gondolin: chute d'une civilisation, de la démographie, perte de l'écriture. Et la chute de Troie marque le commencement de la période. Ce n'est donc pas aux aspects historiographique ou archéologique que je faisais allusion, mais plutôt à ces événements, qui constituent un âge sombre pour les hommes de ce temps.

Bref, les éléments qui rappellent Troie ont beau être des topoi, le croisement des deux histoires montre que Gondolin est relativement proche de Troie, à moins que tu trouves beaucoup d'autres cités aux mêmes caractéristiques dont Tolkien aurait pu s'inspirer en 1917.

A la rigueur, même si Tolkien ne s'est pas du tout inspiré de la cité-forte elle-même pour Gondolin; et même s'il n'y avait pas de référence à Enée dans cette histoire (ce que je ne crois pas), Gondolin paraît bien comme un avatar de Troie dans le légendaire.

Mais Tolkien avait bien en tête le siège de Troie lorsqu'il écrivit la Chute de Gondolin, et il semble donc peu probable que son histoire ne l'ait donc pas influencé au moment de l'écriture:

Citation :Nor Bablon, nor Ninwi, nor the towers of Trui, nor all the many takings of Rum that is greatest among Men, saw such terror as fell that day upon Amon Gwareth in the kindred of the Gnomes; and this is esteemed the worst work that Melko has yet thought of in the world.

Ni Bablon, ni Ninwi, ni les tours de Troie, ni plus les sacs de Rum qui est la plus grande parmi les Hommes, virent une telle terreur comme celle qui s'abattit ce jour sur Amon Gwareth au sein de la famille des Gnomes; et cela on le compte comme la pire chose à laquelle Melko ait pensé au monde.

(ma traduction) Lost Tales, III, The Fall of Gondolin
*Note: Bablon, Ninwi, Trui, Rum. The original text of Tuor A had Babylon, Nineveh, Troy, and (probably) Rome. These were changed to the forms given in the text, except Nineveh > Ninwe, changed to Ninwi in Tuor B.

Au passage, les tours sont un trait de l'architecture de Gondolin que Tolkien a particulièrement développé.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 22.08.2014

Je te promets que ce n'est pas juste pour entretenir le débat (je suis tout à fait prêt à être convaincu quand j'estime que c'est juste), mais en l’occurrence, tu ne me convaincs pas.

Concernant les Siècles Obscurs : ta référence montre précisément que "darkness" n'est pas à prendre dans son sens opposé à "âge d'or", mais dans son sens opposé à "knowledge, history". C'est à dire que cette période est d'abord nommée ainsi à cause du manque d'information à son sujet, pas parce qu'elle est censée représenter un truc horrible à vivre.
Je ne pense pas prendre nos glorieux ancêtres pour des naïfs en disant qu'on avait pas encore identifié, dans les années 20, une baisse de la démographie ou d'autres stats de ce genre au sujet de la Grèce d'il y a trois mille ans.

J'ajoute un argument qui n'est pas une démonstration, mais une donnée à garder en mémoire. Peut-être que je suis trop rigide sur ce principe, mais je suis toujours très très sceptique quand on veut voir des références historiographiques (au sens scientifique de l'histoire) importantes chez Tolkien. Pour moi, la dimension littéraire, mythologique, religieuse prime sur la dimension scientifique.
Or, en l’occurrence, avec tes Âges Sombres, il me semble que tu veux cherche une inspiration historique précise (la Grèce de tels siècles) plutôt qu'une thématique spirituelle récurrente chez Tolkien, celle de la chute, des merveilles passées qui ne reviendront pas, de la présence du Mal...
Ce sentiment n'est pas seulement affaire de sensibilité personnelle ; je trouve frappant que dans sa Correspondance, lorsqu'il livre ses inspirations, Tolkien ne donne jamais de références historiques, mais toujours des références mythiques/religieuses. Par exemple, lorsqu'il dit s'être inspiré des anciens Égyptiens pour le Gondor, l'histoire de l’Égypte n'a évidemment rien à voir avec celle du Gondor ; mais il parle de ces tombeaux qui sont plus grands que les demeures des vivants... De telles considérations ne sont pas celles d'un historien, mais celles d'un philosophe ou d'un moraliste.

Bref, quand tu dis ceci :
Citation :le croisement des deux histoires montre que Gondolin est relativement proche de Troie
Tes deux histoires, c'est "cité assiégée + déclin civilisationel = Troie". Ce à quoi je répond "cliché universel + obsession récurrente chez Tolkien = Obi-Wan Kenobi".
Par contraste, je vais reprendre mon exemple où je vois une inspiration de l'Enéide : "Survivant d'une cité détruite + piété exemplaire + j'emporte les symboles de mon ancien royaume pour en fonder un nouveau", je valide pour "Elendil = Enée", surtout à cause du troisième point, qui est hyper précis. Tu vois, si les Balrogs avaient construit un Oliphant de bois et s'étaient cachés à l'intérieur pour prendre Gondolin, j'eusse reconnu l'inspiration homérique.
Citation :à moins que tu trouves beaucoup d'autres cités aux mêmes caractéristiques dont Tolkien aurait pu s'inspirer en 1917.
Il n'y a pas besoin de s'inspirer d'un exemple précis pour imaginer une histoire de siège, quand c'est un exercice de style aussi répandu.
Il n'y a pas besoin de s'inspirer d'un exemple précis pour imaginer une histoire d'âge des ténèbres, quand c'est la thématique la plus récurrente de ton œuvre (j'allais dire "quand c'est ta névrose personnelle" ; on pourrait dire plus justement "quand tu as une vision aussi sombre que celle de Tolkien du devenir de la civilisation occidentale").
Attention, je ne dis pas que tu ne peux pas t'en inspirer. Mais ce n'est en rien une obligation.

Quant à ta citation des Contes Perdus, ce qui me frappe, c'est que Troie y est précisément citée au sein de toute une liste de villes ayant connu un destin semblable.

Quelle était ta question déjà ? Est-ce que je peux te donner d'autres exemples de villes ayant été assiégées, siège qui déboucha sur une sombre période ?
Et bien, à tout hasard, je prendrai comme exemples Ninive, Babylone ou bien Rome. Razz


RE: Troie et Gondolin - Peredhel - 23.08.2014

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit : Je te pose la question sincèrement et sans pédantisme : qu'as-tu lu comme épopée jusqu'à présent ? Est-ce que tu connais l'Enéide, la Chanson de Roland, la Mort d'Arthur, les passages épiques des Métamorphoses ? Parce que là, je me trompe peut-être et tu peux me le dire, mais j'ai l'impression que tu découvres le genre épique à travers Homère...
Rholôlô ! Heureusement que j'ai précisé que ce que je voyais dans l'Iliade pouvait peut-être se retrouver dans de nombreux textes (même si "archaïque" -j'écrivais tard- n'était peut-être pas le terme le plus adapté) sans doute parce que dans un coin de ma tête je me souvenais m'être fait taper sur les doigts auparavant. Donc non : je n'ai pas lu l’Énéide, ni la Chanson de Roland, ni la Mort d'Arthur ni les passages épiques de Métamorphoses. Effectivement je découvre le genre épique à travers Homère et c'est bien pour ça que je présentais ici les parallèles que je faisais au cours de ma lecture : pour savoir si ils étaient valides et à quel titre.

Peredhel, en toute humilité, qui se fait encore taper dessus...


RE: Troie et Gondolin - Tikidiki - 23.08.2014

(22.08.2014, 23:34)Poupi a écrit : je suis toujours très très sceptique quand on veut voir des références historiographiques (au sens scientifique de l'histoire) importantes chez Tolkien. Pour moi, la dimension littéraire, mythologique, religieuse prime sur la dimension scientifique.
Or, en l’occurrence, avec tes Âges Sombres, il me semble que tu veux cherche une inspiration historique précise (la Grèce de tels siècles) plutôt qu'une thématique spirituelle récurrente chez Tolkien, celle de la chute, des merveilles passées qui ne reviendront pas, de la présence du Mal...
Ce sentiment n'est pas seulement affaire de sensibilité personnelle ; je trouve frappant que dans sa Correspondance, lorsqu'il livre ses inspirations, Tolkien ne donne jamais de références historiques, mais toujours des références mythiques/religieuses. Par exemple, lorsqu'il dit s'être inspiré des anciens Égyptiens pour le Gondor, l'histoire de l’Égypte n'a évidemment rien à voir avec celle du Gondor ; mais il parle de ces tombeaux qui sont plus grands que les demeures des vivants... De telles considérations ne sont pas celles d'un historien, mais celles d'un philosophe ou d'un moraliste.

Mais justement, Tolkien donne des références historiques très précises en parlant de Ninive, Babylone, Rome, et Troie. Et ainsi lie-t-il son légendaire à l'histoire. Bien plus tard dans ses Lettres il fait référence à l'Egypte (lettre 211) pour la couronne du Gondor - rien de moral ou de religieux, apparemment.

Oui, les Ages Sombres sont l'âge de l'ignorance pour les historiens, mais ils connaissent les caractéristiques de cet âge. C'est "l'évidence des pierres" qu'évoque Murray. A cette époque, on vient de découvrir les ruines de Troie. Murray passe en revue les cités de Mycènes, Knossos, Troie, et partout la conclusion est la même: à de florissantes cités palatiales où l'on discerne la marque du feu et de la destruction brutale, succèdent de petits établissements, marque d'un éparpillement de la population.

Citation :There was a great city there before 2000 B.C., the second of the series. It used red ware for its pottery (...). That city was destroyed by war and fire ; and others followed. The greatest of all was the sixth city, which we may roughly identify with the Troy of Greek legend. Of this city we can see the wide circuit, the well-built stone walls, the terraces, the gates, and the flanking towers. We have opened the treasure houses and tombs, and have seen the great golden ornaments and imports from the East. Then we see the marks of flame on the walls : and afterwards what ? One struggling attempt at a seventh city ; a few potsherds [tessons de céramique] to mark the passage of some generations of miserable villages (...).

It is the same in Crete. City upon city from prehistoric times onward flourishing and destroyed ; palace upon palace, beginning with the first building of Cnossos, in a peculiar non-Hellenic architecture ; proceeding to those vast and intricate foundations in which Sir Arthur Evans finds a palace, a citadel, and a royal city round about, the growth and accumulation of many hundreds, perhaps thousands, of years. There are porcelains reminding one of Babylon, ornaments from Egypt, marks of a luxurious king's court, (...) then shattered gates, flame-blackened walls and evidences of calamity, a feeble pulsing of life outside the ruined palaces, and afterwards silence.

It is the same with the cities of the Argive plain, Mycenae and Tiryns. They possessed less importance, and were inhabited for a less vast stretch of history, than the cities of Cnossos and Troy. But the treasures yielded to the excavator, especially in Mycenae, are very great in proportion to the importance of the town, and the historical problem is simpler. We all know the Mycenaean remains : the Lion Gates, the earlier shaft graves, and the later vaulted graves ; the remains of mummified kings ; the skeletons in masks of gold, with their weapons, their drinkingbowls, and sometimes the ashes of burnt sacrifice lying beside them. And in the end, as in Troy and Cnossos, the marks of flame upon the walls, traces of a dwindling population still hovering about the old town, and quickly degenerating in the arts of civilized life ; and then a long silence.

Such is the evidence of the stones.

G. Murray, The Rise of Greek Epic, 1907

(je tiens à préciser que l'histoire a progressé depuis)

Certes, Tolkien aurait pu ne s'inspirer de rien, merci du conseil. Mais à imaginer qu'il se soit inspiré de quelque chose - ce que nous supposons donc ici - le plus probable est-il que ce soit de Rome, Ninive, ou Babylone comme ta boutade le suggère, ou de Troie? Troie figure effectivement au plein milieu de ses concurrentes, mais son histoire est plus que bien connue par Tolkien, tandis que les autres sièges ne sont que des chutes d'empire, pour ainsi dire. Aucun récit ne nous permet de faire le rapprochement entre elles et Gondolin, mais pour Troie, nous avons des récits, que Tolkien tutoyait (bilingue en latin et grec, que veux-tu qu'il fasse de sa vie?). Nous avons donc non seulement des éléments qui les lient fortement, des topoi certes, mais qu'on ne trouve pas ailleurs à ce point au moins jusqu'à ce que tu montres le contraire, et une bonne raison pour que Tolkien s'en soit inspiré.

Concernant Tuor, il n'est pas si éloigné d'Enée: c'est un survivant d'une cité détruite, certes comme Elendil, mais aussi assiégée, au contraire de ce dernier: ce qui implique de se battre et de sauver de sa main sa famille; Tuor est l'instrument d'un Vala dans une cité que les dieux ont abandonnée, comme Elendil, et s'il n'emmène pas de symbole puisqu'il n'a pas de trirème pour traîner cette bonne pierre d'Erech au pays, Idril emporte bien l'Elessar, qui passera après maints détours (versions CLI obligent) à Aragorn; et ces deux n'en sont pas moins à l'origine d'une royale lignée.

L'on pourrait donc avancer: chute d'une cité assiégée + déclin civilisationnel + Enée = hakuna matata Smile


RE: Troie et Gondolin - Cuthalion-64 - 23.08.2014

Si on compare Troie à Gondolin, alors on pourrait aussi la comparer à Minas Ithil (je sais pas vraiment pourquoi, mais je sens que je vais me faire taper dessus, ayez pitié de ma maigre suppositionCrying or Very sad).

Oui car quand la cité de Minas Ithil est assiégée par les Nazgul et qu'elle devient par la suite Minas Morgul, Anarion et ses fils (ou lui tout seul ou ses fils tout seuls, je ne sais plus) s'enfuient avec une pousse de l'arbre blanc. Après, je l'avoue, on ne parle pas d'un quelconque déclin de civilisation ou d'une époque sombre, mais bon, il faut toujours tenter sa chance et se mettre en avant dans cette société de malheur !Evil or Very Mad

Je suis très loin d'avoir lu la majorité des récits épique de toutes les mythologie de la planète. Et je n'ai lu que quelques récits de vulgarisation concernant l'Iliade (ou quelques passages isolés du récit). Alors je ne voudrais pas faire erreur, mais je pense que, comme l'on compare Enée à Elendil, ou encore à Tuor, l'on pourrait tout aussi bien le comparer à Anarion.

Aï ! je sens déjà les coups me tomber sur la tête ! Crying or Very sad


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 23.08.2014

@Peredhil : eh, du calme, y'a pas de problème.
Citation :Mais justement, Tolkien donne des références historiques très précises en parlant de Ninive, Babylone, Rome, et Troie.
Non, tu ne comprends pas ce que je veux dire.
Comprends-moi bien : l'histoire n'est pas une matière, c'est une discipline. C'est à dire que faire de l'histoire, ce n'est ps simplement parler du passé, c'est d'en parler dans le cadre d'un intérêt scientifique (ce que font tes braves historiens qui étudient les Siècles Obscurs).
Pour reprendre des exemples de ville : Le Sermon sur la Chute de Rome de Saint Augustin, ce n'est pas un travail d'historien. Pareil sur les Lamentations de Jérémie sur Jérusalem (tiens, encore un exemple de ville assiégée, siège qui débouche sur un âge sombre !).
Eh bien, dans ta citation de Tolkien (qui en l’occurrence est plus épique que lamentatoire), je trouve qu'il ne les cite pas ans un intérêt historique.

Citation :dans ses Lettres il fait référence à l'Egypte (lettre 211) pour la couronne du Gondor
Non, ça n'est pas ça du tout. Il en parle d'abord à cause de leur goût des tombeaux gigantesque (ce qui est un commentaire moral et religieux, môssieur Tiki). Ensuite, il poursuit sur le Gondor, en vient à la couronne, et dit qu'elle est très grande. Comme il vient d'évoquer l'Egypte et que ça lui est toujours en tête, il dit grande comme celle des Egyptiens, justement. Mais tout de suite après, il précise que l'apparence de la couronne est en soit très différente de celle des Pharaons, que ce n'est que la taille qui est semblable. Fin bref, c'est vraiment une comparaison vite-fais, et certainement pas une revendication d'inspiration.

Concernant les Siècles Obscurs, je ne vais pas faire semblant : tu apportes du nouveau à ma connaissance, c'est un point que je suis très loin de maîtriser.
Tu donnes de bons arguments, mais je reste hyper sceptique pour une raison très forte : c'est que jamais Tolkien ne cite Troie comme source d'inspiration (ne me ressort ps ton extrait des Contes Perdus, ça n'est pas du tout ça). Or, je trouve que justement, entre ses correspondances, les travaux de ses biographes ou de son fils, etc... On arrive à un tableau relativement complet au moins des grandes lignes de ses inspirations, quoique les détails restent parfois pleins de surprises.
Tu le dis toi-même, Troie, c'est un truc massif dans la culture occidentale. Et Tolkien s'en serait inspirée pour Gondolin, mais il ne n'aurait jamais évoqué Troie en parlant Gondolin et de la genèse de son récit ?

J'ajoute sur ce point :
Citation :Troie figure effectivement au plein milieu de ses concurrentes, mais son histoire est plus que bien connue par Tolkien, tandis que les autres sièges ne sont que des chutes d'empire, pour ainsi dire
La chute de Rome, c'est aussi un grand thème littéraire de l'Occident. Et je ne parle pas de Jérusalem.

Citation :Si on compare Troie à Gondolin, alors on pourrait aussi la comparer à Minas Ithil (je sais pas vraiment pourquoi, mais je sens que je vais me faire taper dessus, ayez pitié de ma maigre suppositionCrying or Very sad).

Oui car quand la cité de Minas Ithil est assiégée par les Nazgul et qu'elle devient par la suite Minas Morgul, Anarion et ses fils (ou lui tout seul ou ses fils tout seuls, je ne sais plus) s'enfuient avec une pousse de l'arbre blanc. Après, je l'avoue, on ne parle pas d'un quelconque déclin de civilisation ou d'une époque sombre, mais bon, il faut toujours tenter sa chance et se mettre en avant dans cette société de malheur !
Je suis tout à fait d'accord avec ça. Si on comparle Troie à Gondolin, alors on peut la comparer à beaucoup beaucoup de villes du légendaire, car il y a beaucoup de villes assiégées. On peut même la comparer à Ninive, Babylone, Rome ou Jerusalem.
C'est pour ça que je ne trouve pas cette comparaison pertinente : si tout le monde est troyen, alors autant dire que personne ne l'est.

Et arrêtez avec vos coups de bâtons, personne ne va taper personne. (sauf Tiki s'il le mérite)



Bon, j'ai un peu le sentiment d'arriver en bout d'argumentaire, je pense que chacun a exprimé ce qu'il pensait, et je ne pense pas qu'aucun de nous ait encore un argument dans sa boîte. On peut en rester là ou continuer si je me trompe...


RE: Troie et Gondolin - Druss - 23.08.2014

(23.08.2014, 10:00)Poupi a écrit :
Citation :dans ses Lettres il fait référence à l'Egypte (lettre 211) pour la couronne du Gondor
Non, ça n'est pas ça du tout. Il en parle d'abord à cause de leur goût des tombeaux gigantesque (ce qui est un commentaire moral et religieux, môssieur Tiki). Ensuite, il poursuit sur le Gondor, en vient à la couronne, et dit qu'elle est très grande. Comme il vient d'évoquer l'Egypte et que ça lui est toujours en tête, il dit grande comme celle des Egyptiens, justement. Mais tout de suite après, il précise que l'apparence de la couronne est en soit très différente de celle des Pharaons, que ce n'est que la taille qui est semblable. Fin bref, c'est vraiment une comparaison vite-fais, et certainement pas une revendication d'inspiration.
Mais on sait que Tolkien est joueur, lorsqu'on maitrise un peu le personnage. Il a tendance à brouiller les pistes, parce qu'il n'aimait pas qu'on décortique son œuvre. Mais en l'occurrence, j'ai écrit un article complet sur l'inspiration historique égyptienne dans l'Arc et le Heaume 3 et en particulier, sur les couronnes égyptiennes. Et non, ce n'est pas une comparaison vite-fait mais bel et bien une inspiration pleine et entière ; et c'est valable pour bien plus que les couronnes égyptiennes et pour beaucoup d'autres périodes historiques.


RE: Troie et Gondolin - Cuthalion-64 - 23.08.2014

(23.08.2014, 10:12)Druss a écrit : Mais on sait que Tolkien est joueur, lorsqu'on maitrise un peu le personnage. Il a tendance à brouiller les pistes, parce qu'il n'aimait pas qu'on décortique son œuvre.

Avec moi, Tolkien n'est pas seul sur ce point. Et si on le laissait tranquille avec ses inspirations. Comme il a écrit pour Tom Bombadil, il y a des mystères dans les contes et les légendes qui mérite de ne pas être élucidés. Et si il ne nous a pas livrer toutes ses inspirations, je pense que c'est pour que cette part de mystère grandisse et rende son oeuvre plus intéressante et attirante (ce doit être un procédé d'écriture de légende reconnu et efficace...Cool). Je suis parfois d'accord avec les propos de Tikidiki, et je suis en d'autres point en accord avec ceux de Poupi, et je pense que si chacun des membres cherchait à décortiquer en profondeur ce que Tolkien n'a pas voulut nous livrer comme informations sur son monde et ses inspirations, et que chacun trouverait et découvrirait toutes les facettes de l'esprit de l'Auteur, alors ce monde qu'il a imaginé et crée n'en serait que beaucoup moins intéressant et palpitant.

Or je vous invite à vous intéresser grandement à ce qu'il a bien voulut nous livrer comme informations, pour que les mystères sois préservés et pour que la magie de son oeuvre opère dans toute sa grandeur. Je pense aussi que - et si il y en a parmi vous qui écrivent ou inventent des histoires et des mondes comprendront - l'auteur, dans la création et dans l'élaboration de son monde, veut garder pour lui, à l'insu de ses lecteurs, quelque uns des secrets de sa création.

J'espère que la majorité d'entre vous comprendront les paroles insignifiantes d'un vulgaire Cuthalion-64.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 23.08.2014

Citation :en l'occurrence, j'ai écrit un article complet sur l'inspiration historique égyptienne dans l'Arc et le Heaume 3 et en particulier, sur les couronnes égyptiennes. Et non, ce n'est pas une comparaison vite-fait mais bel et bien une inspiration pleine et entière ; et c'est valable pour bien plus que les couronnes égyptiennes et pour beaucoup d'autres périodes historiques.
Vlà-ti pas des choses intéressantes. Après 2 années, cet article est-il accessible quelque part ? C'est que je ne demande qu'à être détrompé dans mes certitudes, moi...


RE: Troie et Gondolin - Druss - 23.08.2014

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RE: Troie et Gondolin - Elendil - 23.08.2014

Bonjour Poupi, et ravi de te relire !

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit : 1) Il ne faut pas réduire la culture du grand Professeur à la nôtre, pauvres mortels que nous sommes. Pour nous, bons élèves de l'école française, la mythologie par excellence, c'est la mythologie grecque. Dans la tête de Tolkien, la mythologie grecque est présente, mais sa principale inspiration, c'est le Nord, le roi Arthur et le roman victorien. Il peut y avoir des références précises à la mythologie grecque (typiquement, Numenor/Atlantide). Mais ce n'est pas cette piste qu'il faut examiner en priorité lorsqu'on cherche les inspirations de Tolkien.

Globalement d'accord avec tout cela, tant sur la culture de Tolkien que sur ses centres d'intérêts. Je nuancerais volontiers au sujet d'Arthur, puisqu'il affirme lui-même à plusieurs reprises que la mythologie celtique et notamment arthurienne lui paraît défectueuse : elle fait donc partie de ce que je considère comme les influences refoulées (consciemment ou non), à l'instar de la mythologie irlandaise ou justement de la mythologie gréco-romaine.

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit : En revanche, pour moi, le seul point commun entre Gondolin et Troie, c'est d'être des cités assiégées, ce qui est beaucoup trop maigre pour voir de l'inspiration.

Pour reprendre les points évoqués par Peredhil :
Citation :L'énumération, avant la bataille, des chefs, de leurs caractéristiques et des soldats et de leurs caractéristiques :
ça, c'est une convention universelle qui se trouve dans toutes les épopées. Que ce soit l'Iliade, la chanson de roland, la mort d'arthur ou tout le reste.

Je nuancerais volontiers cette critique : d'abord parce que l'énumération homérienne est devenue une référence consciente de toute la littérature épique ultérieure, ensuite parce que c'est une des rares énumérations du type à décrire les troupes en rapport avec leurs chefs directs et non avec le commandant suprême. La seule exception qui me vient actuellement à l'esprit est justement l'énumération correspondante de l'Enéide, qui est un calque volontaire de l'énumération homérique. Ayant récemment lu la Chanson de Roland en ancien français, l'arrangement des batailles par Charlemagne dans ce texte me semble d'un esprit tout à fait différent : Turold (qui devait sûrement connaître Homère, au moins par une adaptation latine ou médiévale comme le Roman de Troie) renouvelle le genre. Pour la Mort d'Arthur, je ne vois pas le passage correspondant auquel tu fais allusion.

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit :
Citation : l'aristeia, la furie guerrière qui s'empare des héros, tant chez Tolkien que chez Homère :
La description de la fureur guerrière comme une possession, c'est une vision des choses qui se retrouve dans toutes les cultures païennes : aristeïa chez les Grecs, furor chez les Romains, berserkgang chez les Vikings...

Vrai chez les Grecs archaïques, les Scandinaves et les Celtes, nettement moins chez les Romains, qui méprisent l'emportement guerrier, lequel est contraire à leur philosophie. C'est d'ailleurs en lien avec ce rejet du furor que vient la légende de l'assassinat de Camilla Horatia et de la cérémonie purificatrice du Sororium Tigillum.

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit :
Citation :la famille Tuor-Idril-Eärendil/Hector-Andromaque-Astianax
Je vois pas le rapport, tu peux expliquer ?

La menace de Maeglin de tuer Eärendil en le lançant du haut du rempart me semble un retournement assez clair de l'assassinat d'Astyanax par Néoptolème, pour ma part. De la même manière, le refus de Turgon de suivre Tuor et Idril pourrait bien être une réinterprétation du moment où le fantôme de Créuse apparaît à Enée pour le dissuader de continuer à la chercher dans la cité en flammes.

(22.08.2014, 18:01)Poupi a écrit : [Tu donnes de bons arguments, mais je reste hyper sceptique pour une raison très forte : c'est que jamais Tolkien ne cite Troie comme source d'inspiration (ne me ressort ps ton extrait des Contes Perdus, ça n'est pas du tout ça).

Oui, Tolkien rejette explicitement les inspirations grecques dans une de ses Lettres. Mais curieusement, il cite Troie à plusieurs reprises, généralement dans des contextes où l'on peut déceler qu'il y a influence. Comparer la chute de Gondolin au sac de Rome ou à la chute de Troie, c'est déjà indiquer qu'il y a des parallèles, littéraires ou historiques. De la même manière, cet extrait d'une lettre me semble assez révélateur (cf. L, n° 294) :

Tolkien a écrit :If Hobbiton and Rivendell are taken (as intended) to be at about the latitude of Oxford, then Minas Tirith, 600 miles south, is at about the latitude of Florence. The Mouths of Anduin and the ancient city of Pelargir are at about the latitude of ancient Troy

Certes, il n'y a pas de revendication d'influence, mais à lire le texte de plus près, on constate qu'il n'y a pas qu'une comparaison de latitude entre les Hobbits et Oxford, vu que la Comté tout entière s'inspire de l'Angleterre rurale de la fin du XIXe siècle et notamment de la topographie de l'Oxfordshire. De la même manière, ce n'est sûrement pas un hasard si Minas Tirith est comparée à Florence : les deux cités sont renommées pour leur architecture, complètement différente de l'architecture des pays du Nord, dans le Monde Primaire comme dans le Monde Secondaire. Enfin, Troie comme Pelargir sont proches de la mer, ont été enrichies par le commerce et ont été bâties par des personnages extraordinaires (Apollon et Poséidon d'un côté, les Númenóriens de l'autre).

De la même manière, Tolkien nie toute emprunt aux légendes irlandaises, mais je crois avoir montré qu'un certain nombre de correspondances précises se retrouvent dans ses textes.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 23.08.2014

@Elendil :

Citation : Bonjour Poupi, et ravi de te relire !
Bonjour. Euh... On se connaît ?

Citation :Je nuancerais volontiers au sujet d'Arthur, puisqu'il affirme lui-même à plusieurs reprises que la mythologie celtique et notamment arthurienne lui paraît défectueuse : elle fait donc partie de ce que je considère comme les influences refoulées
Non, je suis pas du tout d'accord : ce n'est pas parce qu'il trouve cette mythologie défectueuse qu'il ne s'en inspire pas, au contraire, il cherche justement à "boucher les trous". La Trilogie Cosmique de Lewis, écrite dans les années 30-40, était censée s'insérer dans le legendarium de Tolkien en parachevant les liens entre ce légendaire et le roi Arthur. Merlin y est explicitement désigné comme un héritier de Numenor et c'est assez lourdement insinué pour Arthur. Donc il y a inspiration directe et balourde.
Mais on s'éloigne du sujet.

Citation :l'énumération homérienne est devenue une référence consciente de toute la littérature épique ultérieure
Tu fais là une remarque importante, et elle me permet d'exprimer un peu mieux ma méfiance vis-à-vis de l'assimilation Troie=Gondolin.
C'est que effectivement, le corpus homérique a un caractère fondateur dans toute la littérature occidentale. C'est en quelque sorte l'arrière-grand-père de tous les livres ultérieurs, et du coup, on retrouve ses gènes un peu partout. Mais je pense que pour parler d'inspiration homérique, il faut qu'elle soit directe, pas issue d'une lointaine filiation.
Pour le dire franchement : je me doute bien que dès qu'un auteur occidental parle de cité assiégée, le fantôme de Troie n'est pas loin. Mais j'exige des inspirations directes pour dire qu'il s'en inspire vraiment. Par exemple, on peut trouver des éléments de comparaison entre le Sermon sur la Chute de Rome et le sac de Troie. Mais je ne parlerai pas d'inspiration homérique chez Saint Augustin à ce sujet. C'est pareil avec Gondolin.


Sur le furor :
J'ai dit que c'était universel de dépeindre la fureur guerrière comme une possession. Après, elle peut être perçue positivement ou négativement, ce n'est pas la question.

Citation :La menace de Maeglin de tuer Eärendil en le lançant du haut du rempart me semble un retournement assez clair de l'assassinat d'Astyanax par Néoptolème, pour ma part.
Pareil, je suis pas convaincu. La seule ressemblance, c'est la mort par précipitation.
Mais la mort par précipitation, c'est une mort très impressionnante qui du coup est souvent utilisée dans les récits à sensations (ou même dans les films hollywoodiens ou dans la bande-annonce d'assassin's creed revelations).
La menace qui pèse sur Astyanax n'a de sens qu'à cause de la mort de son père : il ne faut pas que le fils grandisse pour venger son père. Là, ça n'a rien à voir. Ou alors Ezio da Firenze est aussi un avatar d'Astyanax.

Regardez donc : à force de vouloir faire coïncider Troie et Gondolin, vous arrivez à des versions où Tuor est tantôt un équivalent d'Enée, tantôt un équivalent d'Hector ! N'importe nawak !


Ton argument "géographique" me semble aussi très bancal, il ne marche qu'avec les Hobbits. Minas Tirith n'a pas la même architecture que les royaumes éloignés du Nord, mais je ne vois pas en quoi elle est décrite comme ayant une architecture italienne. Et le raisonnement "les hobbits ressemblent aux anglais, donc les gondoriens aux florentins, donc Gondolin à Troie" est beaucoup trop vague et capillotracté pour être sérieux.

Poupi,
des Troyens, des Egyptiens, des Italiens... Ils sont fous ces Gondoriens !


RE: Troie et Gondolin - Elendil - 23.08.2014

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit : Bonjour. Euh... On se connaît ?

Pas plus que ça, mais j'ai déjà lu avec plaisir certaines de tes interventions.

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit : Non, je suis pas du tout d'accord : ce n'est pas parce qu'il trouve cette mythologie défectueuse qu'il ne s'en inspire pas, au contraire, il cherche justement à "boucher les trous". La Trilogie Cosmique de Lewis, écrite dans les années 30-40, était censée s'insérer dans le legendarium de Tolkien en parachevant les liens entre ce légendaire et le roi Arthur. Merlin y est explicitement désigné comme un héritier de Numenor et c'est assez lourdement insinué pour Arthur. Donc il y a inspiration directe et balourde.

Pas du tout, Tolkien n'apprécie pas les romans arthuriens, il le dit clairement dans les Lettres n° 122 et 131 (entre autres). Ce n'est donc pas la même chose qu'avec les mondes scandinaves et finnois, qu'il apprécie et dont il souhaite à l'occasion "boucher les trous", comme tu le dis (ex : la matière de Sigurd).

Quant à la trilogie cosmique, c'est un projet de Lewis et c'est Lewis qui a décidé, vraisemblablement seul, d'y insérer des éléments du Légendaire tolkienien. Sinon Númenor n'y aurait vraisemblablement pas été orthographié "Numinor", chose que Tolkien critique (L, n° 276). On sait aussi que Tolkien n'aimait nullement le dernier volume de la Trilogie cosmique (L, n° 259).

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit : Sur le furor :
J'ai dit que c'était universel de dépeindre la fureur guerrière comme une possession. Après, elle peut être perçue positivement ou négativement, ce n'est pas la question.

Plutôt qu'universel, je dirais volontiers indo-européen. Les travaux de Bernard Sergent sont assez intéressants à ce sujet. A ma (modeste) connaissance, on ne retrouve pas du tout la même idée du guerrier possédé par la fureur guerrière en Égypte ancienne, en Chine ou au Japon, pour citer quelques civilisations éminemment littéraires.

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit :
Citation :La menace de Maeglin de tuer Eärendil en le lançant du haut du rempart me semble un retournement assez clair de l'assassinat d'Astyanax par Néoptolème, pour ma part.
Pareil, je suis pas convaincu. La seule ressemblance, c'est la mort par précipitation.

Plutôt la mort par précipitation d'un enfant par un adulte sacrilège, à cause d'une haine occasionnée par la famille de cet enfant, à un endroit en lien avec la mort du père de l'assassin. C'est assez précis comme parallèle. En effet, Néoptolème est non seulement sacrilège dans l'assassinat d'Astyanax, mais s'est rendu coupable d'impiété gravissime en tuant Priam dans un lieu sacré, sur un autel (celui de Zeus dans certaines versions du mythe). Et si l'assassinat d'Astyanax peut être éventuellement motivé par la peur d'une vengeance ultérieur, celui de Priam ne peut qu'avoir la haine pour cause. Enfin c'est du haut du rempart de Troie qu'est partie la flèche d'Alexandre qui a tué Achille. Quant à Maeglin, il est doublement sacrilège, en s'associant à Morgoth et en allant contre les desseins d'Ulmo, de même qu'en essayant d'assassiner un membre de sa famille proche. Et son père est mort précipité du même rempart.

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit : [Regardez donc : à force de vouloir faire coïncider Troie et Gondolin, vous arrivez à des versions où Tuor est tantôt un équivalent d'Enée, tantôt un équivalent d'Hector ! N'importe nawak !

C'est pour cela que la prise de Troie est éventuellement une source d'inspiration pour la chute de Gondolin ; il ne s'agit pas une adaptation. De la même manière, Túrin est inspiré librement par Sigurd et par Kullervo, et il possède même certains traits qui l'apparentent à Gunnar (refus de tenir compte des présages, notamment) ou à Lemminkäinen (pouvoir de séduction et éducation). Et pourtant, nul ne prétendra que le personnage de Túrin est incohérent.

(23.08.2014, 14:18)Poupi a écrit : Ton argument "géographique" me semble aussi très bancal, il ne marche qu'avec les Hobbits. Minas Tirith n'a pas la même architecture que les royaumes éloignés du Nord, mais je ne vois pas en quoi elle est décrite comme ayant une architecture italienne. Et le raisonnement "les hobbits ressemblent aux anglais, donc les gondoriens aux florentins, donc Gondolin à Troie" est beaucoup trop vague et capillotracté pour être sérieux.

J'ai indiqué quelques points de convergences qui montrent que quand Tolkien cite des noms de cette façon-là, c'est qu'il est (consciemment ou non) influencé par les noms qu'il cite. Il y en a d'autres. Maintenant, je n'ai ni le temps ni l'envie de reprendre l'ensemble des descriptions de Minas Tirith et de faire un cours d'architecture comparative sur l'Italie et l'Angleterre du haut Moyen Âge. Libre à toi d'être convaincu ou non et d'avoir éventuellement l'envie d'observer ce sujet avec un œil ouvert. J'admets commencer à être agacé par cette façon de dire "non, non, non" sans apporter le moindre argument sourcé.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 23.08.2014

Citation :J'admets commencer à être agacé par cette façon de dire "non, non, non" sans apporter le moindre argument sourcé.
Je comprends, je m'agace moi-même en me relisant Smile
Je vais essayer de faire un effort, mais il faut comprendre que ma position est difficile à défendre de manière très intéressante : en effet, j'exprime mon scepticisme face à une thèse, mais je n'ai pas d'autre thèse à lui opposer...
(en plus, je suis tout seul contre le monde entier, méchants que vous êtes)

Très rapidement sur le HS :
Citation :Pas du tout, Tolkien n'apprécie pas les romans arthuriens, il le dit clairement
Il ne les apprécie pas pour des raisons littéraires, il les trouve mal écrit, mais son projet de légendaire a aussi l'ambition d'offrir une "mythologie nationale" à l'Angleterre, mythologie nationale qui doit inclure l'épopée arthurienne dans ses horizons.

Citation :C'est pour cela que la prise de Troie est éventuellement une source d'inspiration pour la chute de Gondolin ; il ne s'agit pas une adaptation
Je comprends cet argument, et je l'approuve évidemment.
Mais sur les exemples que tu donnes, j'ai vraiment du mal ; typiquement, le rapport entre Maeglin et la famille de Tuor repose sur un triangle amoureux qui me semble très très différent de la situation d'Andromaque avec Pyrrhus. C'est à dire, pour moi, pour comparer Maeglin et Pyrrhus, il faudrait dire que Maeglin est une version très "romantisée" de Pyrrhus (au sens, qui a des sentiments amoureux, pas juste des captives de guerre) qui a raté son coup... ça fait 2 grosses différences (sentiments amoureux + échec) entre les 2 personnages qu'à mon sens on ne peut pas expliquer juste en disant "c'est une inspiration, pas une adaptation exacte".
Et avant même que Pyrrhus ne soit en relation avec Andromaque, on ne peut pas comparer je pense la haine entre Pyrrhus et Astyanax (qui est d'abord une histoire de pères à venger) à la haine de Maeglin à Tuor (qui est d'emblée placée sous le thème du triangle amoureux).

Sur le point du sacrilège, je trouve aussi que tu places sous un même mot 2 réalités assez différentes : le sacrilège du meurtre de Priam est une profanation au sens propre (souiller un temple) ; celui de Maeglin relève plus de la félonie, ce qu'on peut éventuellement aussi qualifier de sacrilège (et ça se discute), mais pas du même genre. Et j'ai encore envie de dire "Alors un coup Maeglin est Sinon, un coup il est Neoptolème...".

Citation :Libre à toi d'être convaincu ou non et d'avoir éventuellement l'envie d'observer ce sujet avec un œil ouvert.
Je sais pas trop quelle est la part de reproches dans ce que tu me dis là... Je te promets que je ne fais pas de l'assimilation Troie-Gondolin une affaire d'honneur, que ça ne me dérangerait pas du tout d'être convaincu, et que je cherche pas à me cramponner dans une position pour le plaisir...

Bon, je sais pas si je suis beaucoup plus constructif dans ce message (mais je ne sais pas quoi construire, moi !) , j'espère ne pas être top irritant...


RE: Troie et Gondolin - Elendil - 23.08.2014

(23.08.2014, 16:49)Poupi a écrit : Mais sur les exemples que tu donnes, j'ai vraiment du mal ; typiquement, le rapport entre Maeglin et la famille de Tuor repose sur un triangle amoureux qui me semble très très différent de la situation d'Andromaque avec Pyrrhus. C'est à dire, pour moi, pour comparer Maeglin et Pyrrhus, il faudrait dire que Maeglin est une version très "romantisée" de Pyrrhus (au sens, qui a des sentiments amoureux, pas juste des captives de guerre) qui a raté son coup... ça fait 2 grosses différences (sentiments amoureux + échec) entre les 2 personnages qu'à mon sens on ne peut pas expliquer juste en disant "c'est une inspiration, pas une adaptation exacte".

Je ne prétends nullement faire d'Eärendil une adaptation du personnage d'Astyanax, ce serait absurde ! C'est uniquement le geste de Néoptolème et de Maeglin, et la relation entre les personnages impliqués au moment de ce geste qui me semble suffisamment comparable pour qu'il y ait là une allusion voulue. De la même manière, les manières de tuer le dragon et les raisons de le tuer ne sont pas les mêmes pour Sigurd et Túrin, mais le geste lui-même (frapper au ventre avec une épée depuis une fosse ou crevasse en dessous du dragon) est identique.

(23.08.2014, 16:49)Poupi a écrit : Sur le point du sacrilège, je trouve aussi que tu places sous un même mot 2 réalités assez différentes : le sacrilège du meurtre de Priam est une profanation au sens propre (souiller un temple) ; celui de Maeglin relève plus de la félonie, ce qu'on peut éventuellement aussi qualifier de sacrilège (et ça se discute), mais pas du même genre. Et j'ai encore envie de dire "Alors un coup Maeglin est Sinon, un coup il est Neoptolème...".

Maeglin est sacrilège avant tout parce qu'il s'allie à l'ennemi des Valar et s'oppose ouvertement aux desseins d'Ulmo.


RE: Troie et Gondolin - Faerestel - 23.08.2014

Quelle savante discussion! Wink

Bien sûr Gondolin n'est pas Troie! Gondolin est une cité cachée bâtie à l'initiative d'un Roi désireux de ne pas risquer la vie de son peuple dans des entreprises guerrières qui lui paraissent vouées à l'échec et ce, sur les conseils d'un "Dieu" qui a ses propres motivations. Des motivations dont les brumes environnantes se dissipent avec l'arrivée de Tuor et qui éclatent à la lumière du destin d'Eärendil. Troie est une tête de pont militaire (et vraisemblablement commerciale) bâtie (ou finalement occupée) par des Grecs dont l'emplacement et l'existence même furent l'objet de bien des débats pendant des siècles. Leur nature est totalement différente.

Et pourtant Gondolin a des traits de Troie. Et là est la différence entre un remake et une libre inspiration.

Je pense qu'Elendil donne le parfait exemple à travers le personnage de Turin. Une analyse le laisse apparaître comme un personnage composite mêlant des traits de caractère ou des actes décelables chez des personnages mythiques antérieurs tandis que le conte nous offre une extraordinaire cohérence interne. J'ai d'ailleurs toujours pensé que si Turin empruntait, entre autres, à Kullervo héros du Kalavela, la texture de sa légende doit beaucoup à la tragédie grecque. Destin implacable, amour impossible, meurtre d'un ami, suicide, présence fantastique, exploits fabuleux, famille déchirée... tous les ingrédients sont là!

Inspirer, c'est prendre une bouffée d'air, l'assimiler et en faire le moteur de sa propre histoire. Tolkien n'a rien plagié mais a beaucoup inspiré! Au sens transitif et intransitif d'ailleurs!


RE: Troie et Gondolin - Elendil - 23.08.2014

(23.08.2014, 19:16)faerestel a écrit : Troie est une tête de pont militaire (et vraisemblablement commerciale) bâtie (ou finalement occupée) par des Grecs dont l'emplacement et l'existence même furent l'objet de bien des débats pendant des siècles. Leur nature est totalement différente.

Personnellement, quand je compare Troie et Gondolin, je considère uniquement la Troie mythique. La cité réelle et son histoire n'entrent guère en ligne de compte -- sauf éventuellement pour l'intérêt renouvelé que pouvaient susciter les fouilles de Schliemann à la fin du XIXe siècle.

(23.08.2014, 19:16)faerestel a écrit : J'ai d'ailleurs toujours pensé que si Turin empruntait, entre autres, à Kullervo héros du Kalavela, la texture de sa légende doit beaucoup à la tragédie grecque. Destin implacable, amour impossible, meurtre d'un ami, suicide, présence fantastique, exploits fabuleux, famille déchirée... tous les ingrédients sont là!

J'éviterais quand même de généraliser : à un tel niveau macroscopique, tous les ingrédients que tu mentionnes, sans en excepter un seul, se retrouvent dans l'histoire de Sigurd / Siegfried. Et pour Kullervo, il ne manque que le meurtre d'un ami pour remplir la liste.


RE: Troie et Gondolin - Cuthalion-64 - 24.08.2014

Tout ce qu'il faut savoir, c'est que les Grec sont partis à Troie, mais que seulement deux en sont revenus...Cool


RE: Troie et Gondolin - Yirmeyah - 24.08.2014

Citation :Avec moi, Tolkien n'est pas seul sur ce point. Et si on le laissait tranquille avec ses inspirations. Comme il a écrit pour Tom Bombadil, il y a des mystères dans les contes et les légendes qui mérite de ne pas être élucidés. Et si il ne nous a pas livrer toutes ses inspirations, je pense que c'est pour que cette part de mystère grandisse et rende son oeuvre plus intéressante et attirante (ce doit être un procédé d'écriture de légende reconnu et efficace...Cool). Je suis parfois d'accord avec les propos de Tikidiki, et je suis en d'autres point en accord avec ceux de Poupi, et je pense que si chacun des membres cherchait à décortiquer en profondeur ce que Tolkien n'a pas voulut nous livrer comme informations sur son monde et ses inspirations, et que chacun trouverait et découvrirait toutes les facettes de l'esprit de l'Auteur, alors ce monde qu'il a imaginé et crée n'en serait que beaucoup moins intéressant et palpitant.

Or je vous invite à vous intéresser grandement à ce qu'il a bien voulut nous livrer comme informations, pour que les mystères sois préservés et pour que la magie de son oeuvre opère dans toute sa grandeur. Je pense aussi que - et si il y en a parmi vous qui écrivent ou inventent des histoires et des mondes comprendront - l'auteur, dans la création et dans l'élaboration de son monde, veut garder pour lui, à l'insu de ses lecteurs, quelque uns des secrets de sa création.

Un peu hors-sujet, je m'en excuse, mais je désirais réagir à ce sujet.

J'ai l'impression que cette conception des choses tend à dénigrer la culture ou la recherche scientifique/intellectuelle. Cette vision des choses me semble se rapprocher un peu d'une autre, qui est que les analyses littéraires/stylistiques seraient des sortes de dissections des œuvres, à considérer comme des organismes vivants, détruisant leur beauté plutôt que ne l'approchant. Je pense au contraire que l'analyse de façon générale, nous permet d'approfondir ce qui nous touche. On peut, au contraire, apprécier la réécriture d'un thème littéraire, les nuances et les écarts qu'il apporte, ou sa réactualisation. D'autant plus qu'ici il ne s'agit pas d'inspirations personnelles, touchant à la vie intime de l'auteur, mais d'inspirations provenant d’œuvres appartenant à la culture générale.


RE: Troie et Gondolin - Cuthalion-64 - 24.08.2014

(24.08.2014, 17:44)Yirmeyah a écrit : D'autant plus qu'ici il ne s'agit pas d'inspirations personnelles, touchant à la vie intime de l'auteur, mais d'inspirations provenant d’œuvres appartenant à la culture générale.

Je suis d'accord. Et d'ailleurs, après réflexion, je me suis demandé si j'avais bien fait de publier ce message hors sujet. Car, d'une heure à l'autre, ou d'une journée à l'autre, ma pensée par rapport à ce sujet-là a changée (donc je l'avoue, ce message était strictement inutile, d'autant que j'ai changé de point de vue ). Cette phrase que je cite (celle de Yirmeyah) m'a convaincu dans mes troubles, je crois, car à mes yeux, elle résout le problème que je me posait. Je l'avoue aussi, je n'aime pas être convaincu, quand j'ai une opinion ferme, mais en l’occurrence, elle ne l'était point, donc je suis assez fier d'avoir été convaincu (merci Yirmeyah pour m'avoir ôté cette idée saugrenue de la tête, décortiquons l'oeuvre de Tolkien, allons chercher dans ses pensées ce qui l'a influencé lors de l'écriture de ses œuvres et analysons ce que nous pouvons tant que nous pouvons ! Je ne suis pas contre, et je ne voudrais pas nous détourner du sujet à cause de vaines paroles obsolètes).

Veuillez accepter mes plus plates excuses : pour ce message hors sujet, mais aussi pour la petite blague que je viens de publier juste avant (le message juste avant celui de Yirmeyah). Avouez quand même qu'elle est plutôt pas mal Mr. Green.


RE: Troie et Gondolin - cellardoor - 25.08.2014

Citation : Poupi a écrit :
Je suis toujours très très sceptique quand on veut voir des références historiographiques (au sens scientifique de l'histoire) importantes chez Tolkien. Pour moi, la dimension littéraire, mythologique, religieuse prime sur la dimension scientifique.

Il me semble que c'est précisément dans ce contexte littéraire que la comparaison s'inscrit. Si j'émets plus de réserves quant à la question historique des Dark Ages, le rapprochement de divers passages fait sens au point de vue du texte. Il y a entre autres la fameuse énumération des troupes et des chefs, le topos du "Catalogue" selon l'expression consacrée. Il est impensable que Tolkien n'ait pas eu à un certain degré conscience de ces procédés littéraires en écrivant son récit. Peut-être que certains sont irrités par ce qu'ils croient être une tentative de caser la Chute de Gondolin dans le cadre étroit d'un modèle qui relèverait quasiment de la référence. Ce n'est pas ce suggérait le premier post, la comparaison était textuelle, voire narrative, bref, littéraire et fondée sur des topoi . Sans chercher une correspondance entre les villes ou les histoires, on peut parler de points de similitude entres les textes.

Je mentionne en passant un des éléments qui m'avaient amenés à faire le même rapprochement entre La Chute de Gondolin et le "cycle" de l'Iliade et de l'Énéide : la présence émouvante de la famille du héros au milieu des combats.

Dans L'Iliade, l'Énéide et La Chute de Gondolin, le héros cherche, alors que la guerre fait rage, à rejoindre sa femme et son fils. Je ne sais si l'on peut parler de topos, mais ces passages sont relativement proche dans les trois textes.

Citation : Homère a écrit :
Mais Hector répondit : [...] Je vais aller voir ma femme et mon fils avant de partir, car je ne sais si je reviendrai ou si les dieux me dompteront par les mains achéennes.

Citation : Virgile a écrit :
Je me rappelai Créuse délaissé, mon palais au pillage et les périls du jeune Iule.

Citation : Tolkien a écrit :
Maintenant Tuor en décida ainsi, bien que sa bravoure fit un bond au bruit de la guerre, pour faire ses adieux à Idril et à Eärendel.

Dans l'Iliade comme dans La Chute de Gondolin, il arrive un moment où la famille est réunie : le héros met son enfant dans les bras de sa mère, ce qui offre l'occasion d'un moment de joie. Le vers suivant notamment, peut-être l'un des plus beaux de l'Iliade, montre comment la candeur de son petit enfant fait rire Andromaque au milieux de ses larmes; un mélange de joie et de douleur qu'on retrouve également chez Tolkien.

Citation : Homère a écrit :
Puis, il déposa l'enfant entre les bras d'Andromaque qui le prit contre son sein parfumé, pleurant et riant à la fois.

Citation : Tolkien a écrit :
Tuor donna Eärendelà sa mère qui était en grande joie ; mais Eärendel ne voulut pas être porté dans ses bras car il dit : "Mère Idril, tu es épuisée [...] et sa mère rit au milieu de sa douleur.



RE: Troie et Gondolin - Poupi - 25.08.2014

Bon, ça fait quelques messages auxquels je n'ai pas répondu, alors rapidement : je suis de plus en plus convaincu que le désaccord vient du fait qu'on parle d'un mythe si originel et fondamental dans notre culture que la frontière entre l'inspiration ou la référence directe d'une part et le simple topos/cliché d'autre part ne peut que porter à débat. En gros, je comprends vraiment votre point de vue à chaque exemple que vous citez, mais pour moi, ça reste à chaque fois de la ficelle universelle (ou européenne, quoi).

Sur les exemples :
-Maeglin/Pyrrhus
Citation :la relation entre les personnages impliqués au moment de ce geste qui me semble suffisamment comparable
Pour moi, le triangle amoureux où sont pris Maeglin et Tuor est fondamental ; une relation qui ne contient pas ce triangle n'est pas "suffisamment comparable".

Citation :Maeglin est sacrilège avant tout parce qu'il s'allie à l'ennemi des Valar
D'accord. Mais dans cette optique, par définition, TOUS les "méchants" de Tolkien sont sacrilèges. Cet argument pourrait servir à comparer Maeglin et le Pharaon de l'Exode (par exemple), ce que je trouve peu pertinent.

Citation :l y a entre autres la fameuse énumération des troupes et des chefs, le topos du "Catalogue" selon l'expression consacrée. Il est impensable que Tolkien n'ait pas eu à un certain degré conscience de ces procédés littéraires en écrivant son récit.
Bien sûr qu'il en a conscience ! La question est : est-ce qu'en en ayant conscience, il s'inspire directement et précisément de l'Illiade ou juste d'un exercice de style répandu dans le genre épique ?

Citation :Peut-être que certains sont irrités par ce qu'ils croient être une tentative de caser la Chute de Gondolin dans le cadre étroit d'un modèle qui relèverait quasiment de la référence.
Oh non, je suis le premier à considérer que repérer une inspiration ou une référence, ça n'est pas du tout emprisonner le texte. Et je ne fais pas une affaire d'honneur à différencier Troie de Gondolin. J'exprime juste un scepticisme sincère.

Citation :le héros cherche, alors que la guerre fait rage, à rejoindre sa femme et son fils. Je ne sais si l'on peut parler de topos
Eh bien dans ce cas, 80% des navets hollywoodiens sont inspirés de l’Iliade.

Citation :Dans l'Iliade comme dans La Chute de Gondolin, il arrive un moment où la famille est réunie : le héros met son enfant dans les bras de sa mère, ce qui offre l'occasion d'un moment de joie.
Même remarque.

Notez, je les traite de navets, mais ce sont de jolies scènes en soi.


RE: Troie et Gondolin - cellardoor - 26.08.2014

Il s'agit en effet de scènes dont la portée est universelle, bien que les qualifier de "ficelles" me semble bien dédaigneux à l'égard de passages dont on s'accorde tous à reconnaître la beauté. Cet universalisme peut se concevoir de deux manières : soit la détection a posteriori d'un pattern issu d'une culture commune dans des oeuvres indépendantes ; soit la participation d'un auteur à une tradition littéraire, définie par des figures.

Je rappelle que je parle ici uniquement de la proximité des textes non des villes, des légendes et autres.

On ne peut ranger l'écriture de La chute de Gondolin et les similitudes qu'elle présente avec l'Iliade derrière une simple culture commune entre Tolkien et Homère. Nous ne somme pas dans le cas d'un "topos/cliché" occidental présent indépendamment dans deux oeuvres. Nous sommes en présence d'un écrivain nourri de culture antique, profondément versé dans sa langue et sa littérature. Aussi, l'utilisation d'un topos par Tolkien ne saurait être fortuite et ne s'oppose donc pas à une "inspiration ou référence directe", comme le suggère Poupi.

Ainsi, à la question,
Citation : est-ce qu'en en ayant conscience, il s'inspire directement et précisément de l'Iliade ou juste d'un exercice de style répandu dans le genre épique ?
faute d'une note de Tolkien sur ce point, on ne peut répondre qu'en pointant les procédés textuels, ce qu'on précisément fait les intervenants. D'un point de vue littéraire, la connaissance détaillé de l'Iliade par Tolkien, la proximité de certaines expressions ( dakruoen gelasasa contra laughed amid her sorrow), la présence de procédés tels le Catalogue ainsi que les autres figures citées suffisent à établir l'existence d'une certaine intertextualité.

Je retourne la question : si ce n'est ce genre d'éléments, quelle type de preuve serait probante ?

En ce qui concerne Hollywood, il serait tout à fait intéressant de discuter de l'influence de la littérature classique sur le cinéma. Mais en ce qui nous concerne, ta remarque n'a pas de valeur argumentative, l'existence d'une "ficelle universelle" faite de "topos/cliché" qui serait présente ailleurs dans les Arts n'exclut en rien la possibilité d'une réelle influence chez Tolkien.


RE: Troie et Gondolin - Poupi - 26.08.2014

Rapidement :

-quand je dis "ficelle", dans ma bouche (ou sur mon clavier), ce n'est pas dédaigneux. On peut dire d'une histoire qu'elle est super bien "ficelée".
Citation :l'existence d'une certaine intertextualité.
Entre l'intertextualité et ce que tu appelles "culture commune", la distinction me semble difficile et en tout cas discutable.

Citation :dakruoen gelasasa contra laughed amid her sorrow)
Tiens ! Alors là on découvre les limites de chacun !
Après tout ce que vous m'avez balancé, tous unis contre moi que vous êtes, et tout ce à quoi j'ai résisté vl'a ti pa que ce sont les pleurs et les rires d'Andromaque qui me convainquent !
Cellardoor peut donc se vanter de m'avoir fait rejoindre le camp des moutons bêlant et de proclamer avec le troupeau une inspiration homérique dans la chute de Gondolin. Comme quoi.