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Ils voulaient rester libres
#24
Chapitre 3.2


« Voici notre Pentirn » déclara Vorondil. Et ajoutant pour devancer ma question :
« Les Pentirn sont des tours, dont l’usage s’est perdu. Des tours de guet probablement »
« Et pour guetter quoi ? » me demandai-je en promenant un regard inquiet sur les sommets environnants. Mardil chantonna un refrain, ce qui fit sourire les autres mais augmenta mon inquiétude :
« Va chez grand-mère par Ered ethryn,
Ne dévie pas de la ligne de crête,
Entre soumission et personnalité,
Sinon les géants t’écraseront de leurs pierres. » (*)
La tour était bâtie en pierre, la face orientale était éboulée sur toute la hauteur des trois niveaux. Trois marches donnaient sur une porte au niveau bas, une meurtrière perçait le deuxième et le troisième comportait des créneaux ainsi que le reste de la tourelle d’escalier.
Nous en fîmes d’abord précautionneusement le tour, en particulier aux abords de la face éboulée où le terrain était encombré de débris, blocs de pierre, rochers et pierres de taille dont certaines étaient branlantes. La face éventrée laissait apparaître l’intérieur : d’autres meurtrières au niveau médian, un plancher en bois protégé des intempéries par le sol de pierre du dernier niveau. La tour de l’escalier en colimaçon, éventrée elle aussi, devrait cependant nous permettre d’y monter.
À mes pieds je fis cependant une autre lecture de cette tour. Un grand bras, comme celui d’une statue de géant, gisait entre deux rochers. Plus loin, un bassin et sa jambe et Anborn qui trouve une tête.
« Une bataille se sera déroulée là, piégeant plusieurs trolls au point du jour alors qu’ils s’acharnaient sur le mur de la tour… » supposa Damrod.
Je distinguai maintenant les restes de plusieurs trolls, pétrifiés, ensevelis sous des décombres qui les avaient brisés.
En s’approchant davantage, Orodreth constata que la porte, vermoulue à l’extérieur avait été solidement condamnée de l’intérieur. Il nous invita à passer par les décombres et à franchir d’un bond le plancher partiellement effondré. J’aperçus sous mes pieds une eau sale, sombre qui remplissait les fondements de la tour. L’odeur était désagréable, bien que le plancher ne portât pas de trace de pourriture.
Toujours avec prudence nous gagnâmes le deuxième niveau. Là encore, le bois n’avait pas souffert des atteintes du temps. Vorondil qui tentait de déchiffrer des inscriptions sur les murs s’en étonnait :
« Cette tour doit dater des implantations Númenoréennes, et pourtant table et chaises sont encore solides… »
Orodreth lui aussi tentait d’interroger les murs :
« Mardil a vu juste ; la comptine de sa grand-mère était déjà connue des occupants de la pentirn. Par contre je ne comprends pas le sens de ces petites phrases gravées de-ci, de-là. En tout cas le lien entre elles… »
Vorondil et Lothíriel complétaient la liste à tour de rôle :
« Ethryn, géants, Pentirn, Tarlang et Ered Nimrais, Aeglinn et Gondratiriel… Seul un maître du savoir ancien pourrait nous éclairer »
Le dernier niveau était une terrasse en pierre, entourée de créneaux. De là on avait une vue dégagée sur les monts environnants, sur le lac, et on apercevait en contre-bas le haut des immenses entrées de mines. Près des créneaux tournés vers le nord se tenaient les restes d’une sorte de pupitre en pierre, qui devait à l’origine se tenir sur une estrade de deux marches. Les débris étaient mélangés avec ceux de la façade est, une bonne partie des créneaux étant tombée à l’intérieur. Nous étions là pour chercher quelque chose, une sorte de testament laissé par Hirluin. Je tenais fermement mon bâton, que m’avait transmis mon père lors de notre départ pour l’ouest.
« Qui cherche des champignons, prend un bâton
« Appuie-toi sur lui si tu veux méditer
« Et dresse ton fils comme se tient un bâton
Tout enfant du clan connaissait ces maximes, mais mon père en avait rajouté une nouvelle :
« Un œil à tes doigts, un nez qui entend et la langue qui voit
« Tu iras plus vite, tu verras plus loin que les sorciers ne croient
« Tu leur imposeras, vous ne fléchirez pas, comme le bâton est droit
En disant cela ses doigts parcouraient alors des signes mystérieux, gravés sur mon bâton. Les Akôèmes n’utilisent pas l’écriture ; ils parlent. Mais aujourd’hui je sais que ces signes sont des Cirth, des runes couramment employées au Gondor. D’où mon père tenait-il ce bâton ? J’oubliai vite la question, car je venais de trouver ce quelque chose. Au milieu des gravois de créneaux, sous un gros bloc : un morceau de parchemin roulé, une pierre taillée transparente à l’intérieur.
Mes compagnons firent cercle autour de moi, Orodreth à qui je le tendis examina le parchemin, pendant que Vorondil faisait tourner entre ses doigts le morceau de cristal.
Orodreth avait l’air bouleversé. Se contenant, il dit à voix basse (nous n’étions pas loin de Verlamin) : il s’agit à n’en pas douter de l’écriture de mon père ! Le parchemin est récent, il a été caché là depuis peu. Mais le texte est incomplet, il a été coupé avec deux coups de dague.
Comme j’avais encore beaucoup de mal avec la lecture, c’est Vorondil qui me vint en aide. Mais il n’y avait pas grand-chose à comprendre de ce texte coupé, si ce n’est que les deux lignes du bas étaient écrites de manière précipitée.


(*) Mardil cite la comptine de mémoire, voici la véritable version:
Mardil fait partie d'une famille où sont nombreux les sages, voyants et poètes. Sa grand mère Finduilas, qui habite dans la région de Tarlang est une poétesse, maîtresse en légendes. C'est sur ses genoux qu'il a appris la comptine des géants et c'est avec ses petits camarades qu'il a crié « ouh ! » en jetant son gant.

[les enfants font la ronde pendant les trois couplets]

Si tu vas chez grand mère en passant par Tarlang
Le long d'Ered ethryn tu devras voyager
Tu sera bien polie si tu tiens bien ta langue
Suit la route indiquée sans dévier sans changer.

Si tu vas chez grand mère près du Tafnen-celon
Éviter les serpents les embûches qu'ils sèment
Ce que tu as appris sers toi en tout le long
Il te faudra choisir, décider par toi même.

De Ciril ou Morthond les deux vont à la mer
Entre les deux versants tu dois trouver tes pas
Si tu marches en travers le chemin est amer
Car la ligne de crête peut marquer ton trépas.

[changement de ton, les enfants chantent plus fort, une ligne est tracée au sol, les enfants marchent dessus, on jette son gant sur celui qui fait un écart en criant « ouh ! »]

Non ne mets pas les pieds
Sur la ligne de crête
Ou tu sera broyé
Comme un pain qu'on apprête
Sous les pierres jetées
Comme on jette le gant
Les pierres projetées
Par les mains des géants.
La lumière n'indique pas le bout du tunnel, c'est la lanterne de celui qui comme toi, cherche à sortir.
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Ils voulaient rester libres - par sam sanglebuc - 21.08.2022, 13:35
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