Note de ce sujet :
  • Moyenne : 0 (0 vote(s))
  • 1
  • 2
  • 3
  • 4
  • 5
Troie et Gondolin
#1
Ayant récemment (bien) entamé l'Iliade en version intégrale (auparavant je n'en avais lu qu'une version abrégée) j'ai relevé des similitudes qui ne m'avaient pas sautés aux yeux auparavant entre le texte d'Homère et les premiers écrits de Tolkien. Si je vous consulte c'est parce que ce genre de comparaison est à faire avec des pincettes en général, et en particulier parce que les comparaisons entre La Chute de Gondolin et celle de Troie j'en ai déjà vu de nombreuses mais la plupart du temps la réponse se limitait à "la seule ressemblance c'est la chute d'une ville..." or j'en vois de nombreuses autres :

L'énumération, avant la bataille, des chefs, de leurs caractéristiques et des soldats et de leurs caractéristiques :
Homère (LIliade - Chant II) a écrit :Les Béotiens ont à leur tête Pénéléôs et Léite, (...). Ils sont arrivés sur cinquante nefs, et, montés à bord de chacune, sont cent vingt jeunes Béotiens.
Les habitants d'Asplédon, comme ceux d'Orchmène la minyenne, ont à leur tête Ascalaphe et Ialmène, fils d'Arés (...). Ceux-là mettent trente nefs creuses en ligne.
Les Phocidiens ont à leur tête Schédios et Épistrophe, tous deux fils d'Iphite, le Naubolide magnanime (...). Leurs chefs ont sous leurs ordres quarante nefs noires. Ils s'occupent à ranger les Phocidiens et se forment à coté des Béotiens, sur leur gauche.
Les Locriens obéissent au fils d'Oïlée, Ajax le Rapide, il n'a pas la taille du fils de Télmon ; il est moins grand lui, beaucoup moins grand même. Mais en déput de sa petite taille et de sa cuirasse de lin, pour lancer la javeline, il n'a pas de rival parmi les Panhellènes ou les Achéens (...).
Puis viennent ceux d'Eubée, les Abantes, respirant la fureur : gens de Calchis et d’Érétrie et d'Hestiée riche en grappes (...). Ceux là obéissent à Éléphénor, rejeton d'Arés, fils de Chalcodon capitaine des Abantes magnanimes (...).
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Là étaient les étendards lumineux de toutes les grandes maisons et familles des Gondothlim. Vaste était le déploiement de la maison du roi et ses couleurs étaient le blanc et l'or et le rouge, et ses emblèmes la lune et le soleil et le cœur écarlate. Maintenant en leur milieu se tenait Tuor, les dominant tous, et sa cotte d'argent luisait ; et autour de lui était une foule de gens les plus valeureux. Voici ! tous ceux-ci portaient des ailes comme des cygnes ou des mouettes sur leur heaumes et l'emblème de l'Aile Blanche était sur leurs boucliers. Mais les gens de Meglin étaient rassemblés au même endroit, et sable était leur harnachement, et ils ne portaient ni signes, ni emblème, mais leurs coiffes étaient rondes et recouverte de peau de taupe, et ils combattaient avec des haches à deux lames semblables à des masses (...).
Et de nombreuses autres familles étaient là, les gens de l'Hirondelle et de l'Arche Céleste, et de ce peuple venaient le plus grand nombre et les meilleurs des archers, et ils étaient déployés sur les parties larges de l'enceinte (...).

On note aussi les interventions "divines" (puisqu'à l'époque les Valar sont des dieux). Par exemple pour préserver les héros en les dissimulant :
Homère (LIliade - Chant XX) a écrit :A peine Poseidon, Ébranleur du sol, a-t-il entendu ces mots qu'il part à travers la bataille et le fracas des javelines. Il arrive à Énée et à l'illustre Achille. Sur les yeux d'Achille, le fils de Pelée, vite il épand un brouillard; après quoi, arrachant la pique de bronze au bouclier du magnanime Énée, il la dépose aux pieds d'Achille.
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Alors la Terre entière était étendue de la lumière grise de cette triste aube qui ne contemplait plus maintenant la beauté de Gondolin ; mais la plaine était emplie de brumes - et cela était un prodige, car aucune brume ni brouillard n'y était jamais venue auparavant, et ceci peut-être provenait de la fontaine du roi. Une fois de plus ils se levèrent, et couverts par les vapeurs continuèrent longtemps après l'aube en sécurité (...).

Enfin la troisième similitude notable : l'aristeia, la furie guerrière qui s'empare des héros, tant chez Tolkien que chez Homère :
Homère (LIliade - Chant XX) a écrit :Le valeureux Polypoetés, lui, tue Astyale, tandis qu'Ulysse abat Pidytés de Percote sous sa pique de bronze, et Teucros le divin Arétaon. Antiloque, le fils de Nestor, frappe Ablère de sa pique éclatante, et Agamemnon, protecteur de son peuple, Elate, qui, sur les bords du Satnioïs aux belles eaux, habite la haute Pédase. Le héros Léite fait sa proie de Phylaque qui cherche à s'enfuire. Eurypile tue Mélanthe.
Tolkien (La Chute de Gondolin) a écrit :Là Tuor tua Othrod, un seigneur des Orcs, fendant son heaume, et Balcmeg il coupa en deux, et Lug il taillada de sa hache et ses jambes furent tranchées au genou, mais Echtelion coupa à travers deux capitaines des goblins d'un seul coup d'épée et fendit la tête d'Orcobal leur principal champion jusqu'aux dents ; et grâce à la grande bravoure de ces deux seigneurs ils parvinrent même jusqu'aux Balrogs.

Si les deux premiers procédés se retrouvent plusieurs fois chez Tolkien (l'énumération avec les troupes des fiefs et la dissimulation "divine" avec Hurin et Huor en Brethil par exemple) ce dernier est assez unique. Il est d'autant plus remarquable qu'il semble s'inspirer de l'Iliade non seulement pour ce qui est des événements décrits mais aussi pour le style : il est très rares que l'on nomme les capitaines ennemis, a fortiori si ils n’apparaissent que pour se faire tuer, alors que c'est très fréquent chez Homère. De même les descriptions, quoique courtes, sont particulièrement gores, Tolkien donne rarement des détails aussi précis que ceux de la mort d'Orcobal (quand Fingon où le chef Orque de la chambre de Marzabul sont tués de la même manière c'est la flamme qui s'échappe de leur heaume sur laquelle Tolkien insiste).
Pour le reste il est vrai que les similitudes ne touchent ni au fond (la Guerre de Troie et la chute de Gondolin ne traitent pas du tout des mêmes sujets) ni de la forme (l'écriture de ce texte rappelle, il me semble, d'avantage les textes médiévaux qu'antiques) et pourtant à la lecture ces éléments "empruntés" m'ont frappées alors que je ne les avaient pas remarquées auparavant.

On pourrait en évoquer d'autres autour de ce conte : la famille Tuor-Idril-Eärendil/Hector-Andromaque-Astianax, la fuite des Gondothlim/Troyens et les dynasties et villes qu'ils fondent, les armes d'origine divines de Tuor/Achille, etc.

Après peut-être ais-je tort : ce que je vois comme des similitudes entre les deux pourraient être des éléments récurrents dans de nombreux textes archaïques. C'est pourquoi je soumet cette hypothèse sur ce forum. Wink
Répondre


Messages dans ce sujet
Troie et Gondolin - par Peredhel - 22.08.2014, 00:28

Sujets apparemment similaires…
Sujet Auteur Réponses Affichages Dernier message
Wink au sujet de la chute de Gondolin Utilisateur 7 1 295 03.04.2024, 18:05
Dernier message: Tikidiki
  Des portes de Gondolin Peredhel 5 10 329 09.04.2013, 16:31
Dernier message: Peredhel
  Diverses questions sur la chute de Gondolin Amroth 25 28 982 03.03.2012, 17:55
Dernier message: Hadhod
  Chute de Gondolin Amroth 4 7 592 04.05.2011, 09:43
Dernier message: Saint-Jey
  Thématique Juillet 2010 - Gondolin Zelphalya 17 24 915 24.07.2010, 14:55
Dernier message: Beren
  Gondolin Alouqua 9 20 616 02.03.2010, 18:42
Dernier message: Alouqua
  Questions sur Gondolin et Himring siegfried005 10 22 738 16.08.2009, 16:45
Dernier message: siegfried005
  [Contes Perdus] La chute de Gondolin Anón 11 15 833 09.02.2005, 18:52
Dernier message: Anón
  Le 7 portes de Gondolin Undómiel 1 6 896 13.07.2003, 22:38
Dernier message: Belgarion

Atteindre :


Utilisateur(s) parcourant ce sujet : 1 visiteur(s)