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La Dernière Maison Simple [fanfiction]
#6
Chapitre 7 : Au travail
Le lendemain, le vent était tombé, mais le temps restait encore couvert. Un épais brouillard couvrait les cimes qui encerclaient la vallée. Malgré le froid glacial qui avait fixé des stalactites aux bords des tentes, la tranquille vallée se mit à résonner d’appels et de tintements d’outils. L’inactivité forcée de la nuit, alors qu’ils venaient d’arriver, avait assombri bien des visages durant la soirée; mais chacun semblait s’être juré de rattraper ce retard en travaillant de tout son cœur à la première occasion. Quelques-uns avaient même taillé, pendant la nuit, des pelles et autres outils dans des morceaux de bois ramassés la veille.

Durant une bonne heure, les troupes déblayèrent autour des tentes la neige accumulée pendant la nuit, puis s’attaquèrent aux buissons de genêts et de bruyère qui couvraient le plateau. Inglor mena une vingtaine d’Elfes à la carrière naturelle, d’où ils se mirent à extraire de gros blocs d’une solide pierre beige. D’autres commencèrent à abattre des arbres, d’autres encore à creuser les fondations de leur future demeure, suivant les plans d’Inglor. Ils reçurent les précieux conseils de l’un des rescapés du siège de l’Eregion, nommé Celeborn, un Elfe de haut rang et lointain parent d’Elrond: il avait longtemps été enseigné par Celebrimbor lui-même, et savait beaucoup de choses sur la taille des pierres et la forge d’outils. Quant à Limtal et Erestor, ils se chargèrent d’organiser le guet le long de la falaise, car on disait que les montagnes abondaient de loups, de trolls et d’autres créatures malveillantes auxquelles les on-dit ne donnaient pas de nom.


Elrond allait d’un groupe à l’autre, creusant, taillant et sciant avec la même ardeur que ses hommes. Des chants éclataient ça et là, scandés par les respirations essoufflées des travailleurs. Malgré le froid qui transformait leur haleine en nuages blancs, les travailleurs retirèrent bientôt leurs épais manteaux de fourrure pour œuvrer plus à leur aise.

Le Semi-Elfe se rendait régulièrement dans sa tente : Lindir dormit lourdement toute la matinée, et quand il s’éveilla finalement, il fallut toute l’autorité du Semi-Elfe pour qu’il reste couché encore un peu. Son poignet était déjà presque cicatrisé ; même si Elrond connaissait la puissance de l’onguent qu’il avait appliqué la veille sur la plaie, il était toujours étonné par son action si rapide.

En milieu de journée, les Elfes se rassemblèrent près du grand foyer, à présent ceint de fossés délimitant les contours de la salle, et mangèrent un peu. Le vent avait fini par chasser les nuages; le ciel gris s’était changé en une voûte d’un bleu très pur, d’où le soleil faisait étinceler la neige de mille éclats Puis Elrond les conduisit jusqu’à l’entrée de la vallée fertile, car tous voulaient voir ce lieu visité par Yavanna. Munis de flambeaux de résine, ils traversèrent la grotte sombre, faisant s’envoler des dizaines de chauves-souris affolées par la lumière. Le plafond était haut, si bien que, par endroits, la lumière de leurs torches ne l’atteignait pas. Ils débouchèrent enfin sur le grand espace en forme de cirque. Ils restèrent quelques instants sans bouger, laissant le soleil les réchauffer après le passage du tunnel glacé et parcourant la plaine du regard avec un étonnement joyeux. Elle était piquetée de taches d’un blanc si éclatant que la neige semblait grise: ici, malgré le froid encore vif, les nieninquë* avaient déjà déroulé leurs pétales immaculés. Hormis quelques buissons, c’était les seules touches de végétation ; la vallée recouverte de neige était vierge et lisse, comme si elle attendait docilement qu’on la façonnât.
A droite, un torrent gelé ornait la falaise de longs pics de glace. Son lit serpentait un peudans la vallée, puis disparaissait sous la roche, près de la grotte.
Un des soldats déblaya la neige du pied, puis, se penchant, il gratta le sol gelé pour en détacher des mottes de terre brune qu’il écrasa entre ses doigts.
-C’est très étrange, dit-il en se relevant. On dirait la bonne terre du champ de mon père, à Mithlond. Bien aérée, sans pierres… Les plantes qui grandiront ici seront vigoureuses et donneront beaucoup de fruits.
-Et le sol est bien exposé au soleil, ajouta un autre Elfe. Si, par surcroît, ce lieu est béni par Yavanna, alors la récolte sera belle dès l’année prochaine !
Elrond les remercia pour leurs paroles, puis son regard se remit à errer sur la vaste plaine enneigée. Malgré lui, ses yeux cherchaient la gracieuse silhouette qui ne laissait aucune trace de pas dans la neige, Yavanna et sa danse magnifique. Il en était certain : du temps où les Valar parcouraient encore la Terre du Milieu, chacun l’embellissant selon ses dons et ses désirs, la Reine de la Terre était venue ici, semant son pouvoir de vie et de fertilité. Depuis, la cime des montagnes avait été usée par les intempéries, les torrents avaient modifié leur cours, mais la vallée demeurait encore, visible souvenir du passage de Yavanna Kementari.

L’armée des Aiglons oeuvra sans répit, nuit et jour, durant des semaines. Malgré la détermination des soldats, le travail était considérable : la priorité était la construction d’une solide muraille autour du plateau herbeux qu’ils allaient habiter. Ils envisageaient également de construire un pont de pierres, assez étroit pour limiter le passage d’une importante force ennemie, en prévision du dégel futur. Des équipes extrayaient des blocs de pierre et montaient les murs, tandis que d’autres débitaient le bois en longues planches et allaient se jucher sur les édifices pour fixer la charpente. Certains s’occupaient de la chasse ; ils conservaient le gibier dans la rivière gelée grâce à un trou pratiqué dans la glace. Les Orques étaient toujours attentivement surveillés, et les précautions furent redoublées à cause des loups qui les accompagnaient. Mais ils ne se déplaçaient pas, attendant le printemps en fourbissant leurs armes et en se disputant en permanence à la manière de leur détestable race. Une ou deux fois, les éclaireurs aperçurent Sadorhen de loin. Il était en permanence sous bonne garde, au milieu du camp des Orques, et sortait rarement de la tente où on le maintenait prisonnier. Il avait beaucoup maigri, mais pouvait marcher sans aide. Le plus frappant était son attitude : le fier et orgueilleux guerrier était désormais morne et abattu, résigné à son sort.
Elrond regrettait profondément de ne rien pouvoir faire pour lui ; même attaquer le camp des Orques avec tous ses soldats aurait été en pure perte. Ils étaient si peu nombreux !
« Attendons, disait-il. Attendons et travaillons. Au printemps, quand les Orques viendront ici, nous auront peut-être une occasion de libérer Sadorhen. »

* perce-neiges (littéralement « larmes blanches »)
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