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[fan-fiction] Pour l'Honneur des Mirdain
#10
Après trois ou quatre versions du début, enfin une qui me plaît. Encore faut-il qu'elle plaise au public. Qu'en pensez-vous donc? (Ce n'est qu'un premier échantillon)

(Si vous ne savez pas trop quoi dire, sachez que j'attends plus des critiques concernant le style que l'histoire elle-même. C'est cela que je cherche à améliorer le plus, et qui m'a laissé pendant longtemps insatisfait Wink )

Citation :
Chapitre Premier
L'Anneau du Savoir
(1/2)


Ghost-in-Edhil. Heure inconnue. Jour inconnu.
Qu’importe d’ailleurs le mois ou l’année, cela ne change rien. La Cité est tombée ; nous ne sommes plus qu’une poignée d’elfes à défendre ses ruines, et si Elrond ne vient pas, tout espoir est perdu. Déjà le jour s’achève et le ciel embrasé s’estompe...
À mes soldats je dis : “Gardez espoir!” Mais eux me répondent : “À quoi bon?” Ils sont las. Et pourtant ils demeurent. Chacun s’affaire à la forge et le marteau frappe fort sur l’enclume. Les lames sont aiguisées, les arcs retendus, les explosifs vérifiés.
On attend l’assaut qui menace mais qui ne vient pas. Les orques ne vont plus jouer à saute-mouton avec nos mines. Ils ont peur. Et pourtant eux seuls ont le pouvoir de donner un sens à notre vie, transformer la honte en gloire, la défaite en victoire.
Car les Mirdain souffrent d’un mal ancien qui les ronge. Ils ont perdu leur honneur ; ils ont prêté l’oreille aux mensonges de Sauron et ils ont usurpé le pouvoir. Brigands, assassins, qui ira pleurer sur leurs dépouilles? Maudits! Maudits! Tel sera notre nom dans les mémoires, tel sera le mien. Celebrimbor l’orgueilleux, Celebrimbor le maudit.
Parfois j’entends la voie de l’antique guerrier qui disait : “Nos tours sont de plus en plus fortes et grimpent de plus en plus haut. Nos armes prolifèrent dans l’attente d’une guerre millénaire. Nos boucliers sont impénétrables, nos épées imparables, nos traits filent comme l’éclair sur des lieux entières sans jamais manquer. Mais ils laissent toute beauté derrière eux sur la terre, et les hommes bientôt n’auront plus d’amour ni d’attention pour la fabrication d’autres objets utiles ou agréables”.
Hélas l’histoire semble se répéter toujours.
Il est trop tard maintenant pour remédier au mal. Les grands anneaux de pouvoir sont disséminés de par le monde et notre destin est scellé.
Ici va s’achever notre histoire. Ici se referme le livre.



- Maître?
Dans l’encadrement de la porte se tenait un elfe. Il n’était plus très jeune. Ses traits étaient tirés et son regard était empreint de lassitude. Ses longs cheveux noirs dissimulaient tant bien que mal les rides, mais aussi les cicatrices de son visage. Si Eru semblait avoir doté les elfes d’une éternelle jeunesse, la guerre cependant n’en faisait pas de même. Son uniforme était sale et hideux. Le sang et la terre s’y mélaient et le tissu verdâtre se déchirait par endroits. Un vieux en haillons, voilà ce qu’on aurait dit. Mais pour Celebrimbor c’était plus que cela...
- Qu’y-a-t-il Progonas?
Ses lèvres remuaient à peine. Nul besoin d’ailleurs de crier : plongé dans l’obscurité, l’endroit était plus silencieux qu’un tombeau.
- Ce sont les orques, maître. Ils arrivent.
Un froid soudain pénétra dans la pièce et sur le bord de la table, la flamme de la bougie vacilla un instant. Aucune émotion, pourtant, ne transparaissait dans la voix rocailleuse de l’elfe. Il demeurait impassible, comme toujours. Quant à Celebrimbor, il n’avait pas bougé d’un pouce. Il tenait serré entre ses doigts une plume, et sur le papier jauni, une goutte d’encre s’écoulait. Saisissant un mouchoir blanc, Celebrimbor vint l’essuyer. Mais lorsqu’il retira le mouchoir, il vit que la tâche avait formé un cercle, et dans ce cercle il crut distinguer un crâne, souriant. Tristement l’elfe lui rendit son sourire. Puis d’un air résigné il referma le livre et se leva. Et dans le même moment sa main vint éteindre la bougie.

Progonas raviva le faisceau lumineux de sa lampe à cristal. Celui-ci émit un vif éclat vermeil, conférant aux murs sales et humides du couloir un aspect sanglant. Puis l’elfe avança suivi de son maître. Le couloir était long et étroit. Tous les cinq mètres ils découvraient sur leur droite une porte de fer forgé. La plupart étaient fermées, mais d’autres s’ouvraient sur de sinistres chambres.
À l’intérieur une femme elfe, aux yeux rougis par les larmes, tenait un enfant mort entre ses bras ; elle était aussi immobile et silencieuse qu’une froide statue de pierre. Ou alors c’était une petite fille en haillons écarlates, recroquevillée sous une table et occupée à dessiner des corbeaux dans la poussière.

- Pourquoi dessines-tu cela? demanda Celebrimbor en s’accroupissant devant elle.
- À cause d’une chanson que le vent m’a apportée, répondit la fille sans cesser de dessiner.
- Et que dit-elle cette chanson?
- “À l’est, dans la pénombre, gisent les héros,
Froides sont leurs tombes, ternes leurs épées.
À l’ouest, dans le matin gris, chantent les corbeaux,
Promise est la ruine, viennent les damnés.”

- Est-ce vrai ce que racontent aussi les étoiles? demanda-t-elle. Est-ce vrai que nous ne verrons pas la Soleil se lever?
Celebrimbor hésita avant de répondre :
- Je ne sais pas...

Le couloir paraissait interminable. Les deux elfes ne virent personne d’autre, sinon des portes closes, et sur leur gauche une rangée de fenêtres barricadées de bois. À l’extérieur le vent soufflait, lugubre, apportant l’angoissante rumeur des chants orques. Des incantations sinistres s’y mêlaient, qui disaient :

“Komut bruzumi-snagûl, thrakut gâsh agh thot
Brakut urduishi-tur, shtrakut lisht agh glob.
Venez esclaves des ténèbres, apportez le feu et la mort
Brisez la porte de ce monde, ôtez-en espoir et clarté”



Ou alors, elles reprenaient d’un air inlassable et moqueur cette sombre rengaine:
“À l’est dans la pénombre gisent les héros,
À l’ouest dans le matin gris chantent les corbeaux...”


Brusquement une brise vint ébranler les cloisons de bois. Le vent s’engouffra à travers les planches, insidieux, et se laissa glisser le long des murs. Puis il s’approcha des elfes. Ceux-ci crurent alors percevoir un murmure, des mots, que le vent leur soufflait à l'oreille. “Elfes noirs! Elfes noirs!” appelait-il. Mais il n’eut pas de réponse. Impassibles, les elfes continuaient leur marche. Ils refusaient d’écouter. Le vent reprit donc de plus belle :
“Elfes noirs! Elfes noirs! Que votre coeur est froid! Froid comme vos frères qui gisent au dehors! Froid comme la sorcière qui vous maudit en son coeur!”
Et les elfes silencieux s’affligeaient à ces paroles.

Quand soudain un bruissement d’aile retentit derrière eux. Il éparpilla le vent et sa voix moqueuse. Celebrimbor sentit alors une plume effleurer son visage. Il leva les yeux et aperçut un oiseau blanc qui volait à ses côtés. C’était un animal fabuleux, de la taille d’un corbeau, doté d’une tête d’aigle et de la queue d’un serpent. Il appartenait à la noble race des Galadres, oiseaux immaculés de Valinor. Mais Celebrimbor l’appelait tout simplement “l’albinos”, car il n’avait aucune coloration ni sur les ailes, ni sur le bec, ni sur la queue. Et pour une raison qu’il ignorait totalement, il était le seul parmi les Mirdain à voir cet oiseau...
- Nous arrivons à la forge, déclara soudain Progonas.
Et il éteignit sa lampe. Les deux elfes se trouvaient maintenant en haut d’un escalier, et de là ils pouvaient apercevoir la salle en contrebas. L’albinos vint se poser sur la rembarde, puis il porta son regard sur les artisans. Le visage couvert de suie, les mains remplies de charbon, ils s’affairaient aux fourneaux. “Elfes Noirs” chantait le vent, et elfes noirs ils étaient. Mais aussi marchands de mort et fidèles serviteurs du Grand Veneur, Celebrimbor. D’un air songeur celui-ci fit le tour des visages. Il se rappelait la ténébreuse histoire de chacun...

Il y avait Sidereù, l’Exilé, surgit de nulle part. De son passé, on ne savait rien, sinon qu’il était plus trouble que les ombres. À son arrivée on l’avait assigné à la fabrication de cottes de mailles. Mais lui s’était mit à créer des cottes d’écailles. Ecailles de serpent, écailles de caïmans, mais aussi plus rarement écailles de dragons. Et toutes il les dotait d’étranges enchantements, qui parfois tournaient en maléfices pour quiconque les portait trop longtemps... Mais les Mirdain l’estimaient pour cela, et depuis il n’était jamais reparti.

Ce qui était surtout le fait de Paragello. Lui, la guerre lui avait tout pris : sa femme, ses enfants, sa maison. Les épées qu’il forgeait étaient aussi froides et acérées que la vengeance qui consumait son coeur. Et lorsque Sidereù était apparu, il avait trouvé en lui une oreille attentive à ses malheurs. Logiquement faits pour se comprendre, ils n’était d’ailleurs pas rare qu’ils combinent leurs étranges dons, donnant ainsi naissance à des armes aussi sublimes que terrifiantes...

Quant à Cyphid, il n’entendait rien aux ombres et aux mauvais présages. Ce qui l’intéressait c’était la variété, les grands jets de flammes et les artifices hauts en couleur. Lorsque Sauron vint enseigner l’art de manipuler la poudre et de confectionner des explosifs aux elfes, il s’y adonna à coeur joie et devint l’un des meilleurs artificiers de la Cité. Il avait été en cela suivi par son frère jumeau, Kitonye, et tous deux avaient conçu les fameux Arcs des Mirdains. Tout de fer forgé, ils comportaient un mécanisme capable de tirer à grande vitesse leurs traits. Il suffisait simplement d’enclencher un chargeur en leurs milieux, chaque chargeur contenant dix traits sans empennage, longs d’une coudée et à peine plus épais qu’un doigt. Une fois la corde tendue, on laissait partir le coup et le trait explosait en rencontrant sa cible. Rapides, ingénieuses, mais aussi redoutablement efficaces, ces armes avaient fait la renommée des deux frères...

Mais aussi le malheur du vieil Hempeïro : il s’était un jour trouvé sur la trajectoire d’un de ces traits, et s’il avait pu éviter de justesse le coup, il en était ressorti borgne et défiguré. Depuis il avait paru froid et aigri, mais cela n’avait en rien altéré ses qualités d’orfèvre. Lui seul avait le don de fabriquer des boucliers aussi durs que la pierre, et dans le même temps plus magnifiques qu’aucune autre oeuvre d’art. L’elfe y gravait avec soin mille symboles et entrelacs, tous plus étriqués et plus scintillants les uns que les autres, qui pouvaient rendre fou quiconque les regardait de trop près. C’était lui qui d’ailleurs avait forgé la Porte des Mirdains, avec l’indispensable concours de son maître artisan, Celebrimbor...

- Maître?
Intrigué, Progonas observait son supérieur qui demeurait immobile, comme plongé dans un profond sommeil. Finalement Celebrimbor demanda:
- Quel est le plus important d’après toi, Progonas : le rêve ou la réalité?
L’elfe hésita un instant avant de répondre : il ne s’était pas attendu à ce genre de question. Enfin, il déclara :
- Les morts... ne rêvent pas! Je crois qu’en temps de guerre les rêves sont funestes.
Pensif, Celebrimbor leva alors son regard en quête de l’albinos. Mais l’oiseau blanc avait disparu.
- Et bien... répondit-il en caressant la rembarde déserte, faisons en sorte que cette guerre s’achève!

Et suivit de Progonas, il commença à descendre l’escalier. Les marches de fer résonnèrent sous ses pas, et l’échos métallique qu’elles produisirent se répandit dans toute la forge. Il n’était cependant pas suffisamment fort pour couvrir le vacarme du marteau sur l’enclume et des explosifs que testaient les artisans. Quelques uns malgré tout aperçurent la silhouette grisonnante de leur maître. Les larges pans de sa veste effleuraient l’escalier noir de suie. Ses habits n’étaient plus blancs mais tâchés de poussière et de sang. Même son haubert et ses cheveux d’argent ne réfléchissait plus les flammes de la forge. Pour autant, l’elfe ne semblait ni vieux ni fatigué. Il était au contraire doté d’une forte carrure, presqu’intimidante. Son pas était ferme et assuré. Et si l’éclat de ses armes s’était terni, ses yeux étincellaient encore d’une farouche détermination. Il émanait ainsi de lui une force et un charisme impressionants. Et lorsqu’il eut atteint le bas des marches, les plus proches elfes s’arrêtèrent pour le saluer.

“Maître” disaient-ils en inclinant la tête. Puis une fois Celebrimbor passé, ils retournaient à leur ouvrage. Cependant ils ne parlaient, ni ne riaient. Leurs visages étaient sombres et leurs marteaux sonnaient comme le glas. L’elfe passa au milieu d’eux. Il se faufila entre les établis, croisa leurs regards. Mais tous semblaient rêver. Tous étaient ailleurs, loin de la forge et de son vacarme, loin de la ville et de ses ruines, loin de l’enfer. Ils frappait le fer, machinals, et forgeaient les armes qui, peut-être, les en délivrerait.
Pendant ce temps, les enfants couraient pieds nus, entre les fourneaux. Certains apportaient de l’eau, d’autres des outils. Mais Celebrimbor eut préféré qu’ils leur apportent un sourire. Au lieu de cela, il croisa un jeune, trop jeune apprenti. Il était assis, replié sur lui-même, au pied d’un vieux fermier. Et dans ses yeux, l’elfe vit son innocence, presque éteinte, qui l’implorait.

À cet instant, le vieillard fit crisser la pierre entre ses doigts. Il aiguisait sa faux. Mais à l’inverse de tous, il paraissait complètement absorbé par son travail. Ses vieux doigts, couverts de cals, glissaient concencieusement sur la lame. On aurait dit même qu’ils y prenaient plaisir. Celebrimbor passa devant lui, mais il ne put voir son visage. Le fermier avait la tête couverte d’un vieux chapeaux, aux larges bords, tout cabossé. Et lorsque ce dernier leva son regard, l’elfe n’était plus là. Mais Progonas, qui venait juste derrière, l’aperçut, lui. Et cette vision le terrifia. Le sourire narquois du vieillard n’avait rien de naturel, ni même le feu qui couvait dans ses yeux. Ils étaient laids et avides ; avides de souffrances, avides de mort. Soudain ces horreurs s’effacèrent. Courbant la tête, le fermier salua Progonas, et de sa main ridée il lui indiqua Celebrimbor. L’elfe s’empressa alors de rejoindre son maître.
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