Devoir de vacances... - Version imprimable +- Forum Tolkiendil (https://forum.tolkiendil.com) +-- Forum : Tolkiendil - www.tolkiendil.com (https://forum.tolkiendil.com/forum-4.html) +--- Forum : Arts (https://forum.tolkiendil.com/forum-16.html) +--- Sujet : Devoir de vacances... (/thread-3762.html) |
RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 23.04.2008 Ah non, il étaient tous franco-français... Ouf! Ca y est, j'ai fini de modifier le deuxième chapitre. RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 24.04.2008 ... et voilà le dixième. Je ne le trouve pas très chouette, il y a sans doute beaucoup de choses à modifier. Il doit ressembler un peu à la bataille du Gouffre de Helm, mais c'est tout à fait involontaire. J'attends vos remarques... Chapitre 10 : La forteresse assiégée Un soir, les Orques se décidèrent enfin à attaquer. Cela faisait plusieurs jours déjà qu’ils se rapprochaient dangereusement de Fondcombe. Ils ignoraient la position exacte de la cité, mais savaient où la précédente armée avait été décimée par les Aigles ; partant de là, ils avaient fait des cercles de plus en plus grands, sous la surveillance vigilante et discrète de Lindir et de ses hommes. Quand les sentinelles estimèrent que les Orques arriveraient à Fondcombe sous quelques heures, elles revinrent à la cité. Une cloche solitaire retentit dans la vallée ; l’entendant, chacun abandonna son activité et se rendit dans la salle où les armes avaient été entreposées. Il n’y avait aucune précipitation ni aucune panique ; malgré les longues années où ils étaient devenus bâtisseurs ou agriculteurs, ils étaient restés des soldats aguerris, rompus au combat, et ils ne craignaient pas d’affronter les Orques. Ils s’armèrent en hâte, s’aidant l’un l’autre à revêtir leurs cuirasses, légères mais solides. Suivant l’usage, chacun l’avait forgée lui-même, pour connaître ainsi parfaitement son poids, sa forme et ses points vulnérables, et faire corps avec elle. Munis de leurs sabres effilés ou de leurs arcs, ils se répartirent sur les murailles selon une disposition longuement pesée et mûrie, et, silencieux et calmes, ils attendirent l’Ennemi. Ils savaient que les Aigles ne viendraient pas cette fois-ci : de l’autre côté des montagnes, ils combattaient pour eux-mêmes face à des trolls qui désiraient s’installer sur les falaises abruptes et les grottes où nichaient les puissants oiseaux. Situé assez en hauteur, à un endroit où il pouvait voir toute son armée et lui donner ses ordres, Elrond aussi était prêt au combat. Il regardait avec fierté les rangées d’armures et de boucliers que la pénombre commençait à cacher à ses yeux. Quel que fût leur destin, il était fier de ses hommes ; courageux et obstinés, ils n’avaient jamais reculé devant les tâches les plus rudes, sans cesser de s’entraider comme des frères. A l’approche d’une mort probable, il aurait voulu les remercier et exprimer la profonde affection qu’il ressentait pour eux ; mais, sachant tout discours inutile, il se contenta de les bénir silencieusement, demandant à Elbereth de veiller sur chacun de ces soldats qu’il avait appris à connaître et à apprécier. Soudain, il vit d’innombrables silhouettes sombre sur la cime qui lui faisait face. Des cris et des hurlements de loup résonnèrent dans la vallée : l’armée des Orques approchait, bien plus nombreuse que la troupe qui avait poursuivi les Elfes dans les montagnes avant d’être décimée par les Aigles. Hors de portée des arcs elfiques, les soldats ennemis descendirent la falaise sans se presser. Malgré leurs torches, le chemin était difficile, car les Aiglons l’avaient recouvert d’une épaisse couche glissante, à base de plantes bouillies, utilisée ordinairement pour graisser les roues des charrettes. Plus d’un Orque trébucha et bascula dans le vide, sous les huées moqueuses de ses camarades. Mais les ennemis étaient nombreux, plus nombreux que les Elfes qui, impassibles, les attendaient. Certains restaient en arrière et installaient de grandes catapultes qu’ils avaient traînées jusqu’à la vallée. D’autres atteignirent le pont ; couverts de leurs boucliers, les plus belliqueux s’élancèrent pour le franchir, sans attendre l’ordre de leurs chefs. Sur un cri d’Elrond, une nuée de flèches traversa l’air en sifflant. Les Elfes visaient juste malgré l’obscurité de la nuit sans lune, et chaque trait avait une précision mortelle. Des dizaines de fois, le sifflement meurtrier se fit entendre. Mais les Orques, en trop grand nombre, progressaient toujours sur le pont et s’approchaient de la porte. Ils se mirent à riposter ; des Elfes tombèrent malgré la protection du parapet, vite remplacés par d’autres combattants. Pendant ce temps, les dernières catapultes avaient été installées, et une pluie de projectiles enflammés fendit le ciel noir comme une traînée d’étoiles filantes. Ils atterrirent au milieu de la cour, éclaboussant d’une lueur rouge les murs des maisons. Bientôt, les arbres qui encerclaient les constructions de pierre se mirent à flamber, et de nombreux Elfes durent s’éloigner de la bataille pour éradiquer l’incendie. La bataille dura longtemps. Les Elfes étaient courageux et adroits, mais les Orques prenaient peu à peu le dessus, possédés par une folie sanguinaire qui leur faisait perdre jusqu’à la peur de la souffrance et de la mort. Ils commencèrent à lancer des échelles d’assaut, mais ce n’était qu’une diversion : plus loin, des soldats martelaient la porte d’un lourd tronc mal équarri, scandant leurs efforts de grands cris guerriers. Vers la fin de la nuit, les soldats ennemis réussirent enfin à fracasser la porte ; et les loups entrèrent dans la bataille. Jusqu’alors, ils s’étaient contenté de pousser leurs cris sauvages, à distance respectueuse des Elfes, laissant les Orques épuiser leurs flèches et se faire tuer en tentant d’arriver à la porte. A présent, l’ardeur de la bataille et l’odeur du sang versé répandaient en leurs veines une sorte de folie irrépressible. En quelques foulées puissantes, une meute hurlante traversa le pont, sautant par-dessus les corps des Orques tués. Elle atteignit la muraille et, jaillissant à travers l’ouverture de la porte défoncée, se jeta sur les Elfes avec une fureur terrible. Les Aiglons se battaient désespérément, emplis d’une rage froide. Ils savaient qu’ils allaient mourir, mais ils tenaient à emporter de nombreux ennemis avec eux. Le ciel pâlissait à l’est, faisant disparaître les étoiles une par une, quand une clameur vibrante déchira l’air froid : -Elenna ! Vers les étoiles ! Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Juliεη - 26.04.2008 Uhm... Ca te dirait de ne pas trop faire souffrir les gens en coupant ton récit au moment le plus crucial Non, franchement, il est très bien écrit ton récit, très captivant! Une seule faute d'orthogaffe (« Ils commencèrent à lancer des échelles d’assaut, mais ce n’était qu’une diversion »). Il y a juste une chose que j'aurais changé dans ce pargraphe: Citation :La bataille dura longtemps. Les Elfes étaient courageux et adroits, mais les Orques prenaient peu à peu le dessus, possédés par une folie sanguinaire qui leur faisait perdre jusqu’à la peur de la souffrance et de la mort. Ils commencèrent à lancer des échelles d’assaut, mais ce n’était qu’un diversion : plus loin, des soldats martelaient la porte d’un lourd tronc mal équarri, scandant leurs efforts de grands cris guerriers. Tu parles de la folie sanguinaire des orcs (genre les bersekers nordiques)... dans, ce cas, pour ne pas apaiser cette folie, il faudrait utiliser à la place de soldats et guerriers des termes plus animals, plus sauvages... Enfin, à toi de voir. Sinon, j'attends avec hâte l'intervention du (des) héros dans la bataille, il y a toujours ce genre de moment dans les combats épiques Tinakë a écrit :J'attends vos remarques...*gromelle* Ben oui quoi! Révoltez-vous contre l'individualisme latent qui ronge notre société! On est entre Tolkiendili, alors s'entraider, se conseiller, ou même s'encourager c'est la moindre des choses! *sent qu'il va se faire taper * RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 30.04.2008 Citation :Uhm... Ca te dirait de ne pas trop faire souffrir les gens en coupant ton récit au moment le plus crucialVoilà, voilà, ça vient... Pour tes remarques sur le vocabulaire (guerrier, soldat...), je m'y mettrai dès que possible. La fin du chapitre est assez succincte; je n'ai pas trop eu le temps de la modifier... Chapitre 11 : Les renforts Le cœur d’Elrond fit un bond dans sa poitrine. Ce cri de ralliement, c’était son frère qui l’avait poussé pour la première fois, il y avait bien longtemps… Malgré les nombreux loups qui l’assaillaient de toutes parts, le Semi-Elfe prit le temps de jeter un coup d’œil sur le haut de la falaise voisine. Une grande silhouette se détachait du ciel ; surmontée d’un casque à haut cimier, elle brillait de mille feux comme le soleil se levait au-dessus des montagnes. Au-dessus de lui se profila un rapace qui survola la bataille et se dirigea vers l’est à vive allure après un glatissement puissant. C’était l’aigle qui avait guidé Gil-Galad jusqu’à Fondcombe, et à présent il partait en hâte aider les siens de l’autre côté des montagnes. Porté par le vent frais du matin, l’appel clair arriva aux oreilles des soldats assiégés, qui reprirent courage : les renforts arrivaient. -Hardi, Aiglons ! rugit Elrond, soudain galvanisé par la nouvelle situation. Le vent tourne ! Tenez bon ! Fortifiés par cette aide qu’ils n’espéraient plus, les Elfes retrouvèrent alors assez de force pour se débarrasser des loups qui avaient pénétré à l’intérieur des murailles. Leurs ennemis étaient à présent remplis de crainte, voyant la puissance des nouveaux arrivants. Peu désireux de continuer à se battre, ils préféraient chercher le moyen d’échapper aux centaines de petites formes sombres qui descendaient la falaise. Une fois la cité nettoyée de ses assiégeants, Elrond rassembla son armée pour une sortie. Ils passèrent à travers les débris de la porte enfoncée et se battirent au corps à corps avec les Orques. Il avaient abandonné leurs arcs et leurs javelots pour leurs sabres et leurs dagues aiguisées. Cependant, après un moment de stupeur et de panique générales, l’armée des Orques commença à riposter. Mais, coincée dans des passages étroits où il était difficile de manœuvrer, criblée de flèches du haut de la falaise, elle s’éparpilla bientôt comme elle le pouvait. Les Orques qui réussirent à s’enfuir, descendant jusqu’au torrent et suivant son lit pour sortir de la mortelle vallée, ne furent pas nombreux, mais ils gardèrent le souvenir du lieu de leur défaite et une haine dévorante envers ceux de la Cité-Refuge, ce que Celebrían devrait payer de sa vie. Une fois la bataille achevée, Gil-Galad entra dans la cour de Fondcombe. Les Aiglons étaient en train de transporter les blessés et de brûler les cadavres des ennemis avec l’aide des Hommes; mais, apercevant le Roi, ils se figèrent dans une attitude respectueuse. Gil-Galad les balaya d’un regard bienveillant, puis il leva les yeux vers les bâtiments construits ; il sentit des dizaines de prunelles brillantes de fatigue suivre chacun de ses mouvements, tentant de deviner le jugement du Roi sur leur travail. Son examen fini, il se tourna vers son héraut. Figé dans un impeccable garde-à-vous, aussi couvert de boue et de sang que ses troupes, Elrond le regardait d’un œil malicieux ; connaissant Gil-Galad depuis fort longtemps, il avait déjà compris que la Cité lui plaisait. Le Roi eut un petit rire amusé, se retourna vers les soldats et cria : « Rompez ! » Les visages se détendirent soudain, et les Elfes se remirent à leurs tâches. Gil-Galad se dirigea vers Elrond. Ils se donnèrent l’accolade, Elrond posant son front sur l’épaule de son roi en signe d’allégeance, puis, cheminant à travers le champ de bataille, ils évaluèrent rapidement leurs pertes et celles de l’Ennemi. La Salle Commune fut utilisée pour installer les blessés. Gil-Galad lui-même vint mettre ses compétences à leur service, ce qui suscita l’étonnement et l’admiration chez ceux qui le connaissaient mal, car il n’hésitait pas à rendre les plus humbles services comme un simple soldat. Malgré le prestige dont il était entouré, encore ravivé par les histoires que se racontaient les blessés d’une couche à l’autre, il eut assez de sagesse et de volonté pour laisser Elrond diriger Fondcombe à sa guise. Hommes et Elfes, ils avaient été nombreux à tomber dans l’ardeur de l’assaut, en particulier lors de l’attaque des loups. Mais si l’Histoire n’a pas retenu leur nom, chacun fut pleuré et présenté devant Mandos lors des chants du deuil. Morts aussi, Limtal l’Ardent et Sadorhen le Poète, compagnons fidèles et sûrs de l’armée de Mithlond. Ils furent enterrés avec maintes lamentations au pied de l’une des falaises qui bordait la vallée fertile, tout près de l’endroit où Yavanna avait effleuré la terre. Ce lieu accueillit plus tard la dépouille des Dúnedain qui avaient souhaité y reposer, comme Arathorn, le père d’Aragorn Elessar. Là où Elrond l’avait vue danser, les Elfes plantèrent un pêcher, l’arbre préféré de la Reine de la Terre. Il croissa rapidement et porta de beaux fruits ; et ses fleurs, en tombant, blanchirent les tombeaux qui l’entouraient. Grâce aux nombreux bras supplémentaires, la réparation des bâtiments et la fin de l’installation furent rapides ; en juillet, malgré des semailles tardives, il y eut la première moisson, issue du blé emporté dans les provisions des Númenoréens. Ce fut l’occasion de grandes festivités en l’honneur de Yavanna ; et ce le fut dorénavant à chaque récolte, pour perpétrer le souvenir de la Reine de la Terre rendant fertile tout ce que son pied si léger effleurait durant sa danse. Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 30.04.2008 Waouh, je viens de lire ton histoire depuis le début, t'as vraiment l'inspiration dis donc, j'adore ! Ton Gil Galad a vraiment la classe Noldor ! Mais puisqu'il faut s'entraider, comme l'a dit manthanoménos, tu as trébuché sur un passé simple compliqué (...), en effet on dit d'un arbre qu'il crût rapidement et non pas qu'il croissa (c'est le corbeau qui croasse...). J'espère que ton inspiration te permettra d'écrire de nouvelles histoires, au moins aussi bien que celle ci ! RE: Devoir de vacances... - Juliεη - 01.05.2008 Champagne! J'ai trouvé mon remplaçant! Maint'nant j'peux m'reposer et laisser Imrahil faire l'boulot à ma place! Bon, sérieusement, quand tu dis, Tinakë, que la bataille ressemble assez à celle du gouffre de Helm, je ne peux qu'approuver maintenant que je l'ai en version intégrale... Mais en même temps, comme ce doit être la première que tu écris, j'vais pas t'faire recommencer! Aussi, au lieu de changer le scénario, tu peux rajouter certaines choses qui ne sont pas dans la bataille de Helm (du moins telle que je m'en souvient...) Par exemple un discours d'Elrond soit au début pour galvaniser les troupes avant le combat, ou bien un autre discours, espèce d'oraison funèbre pour les morts au combat (prononcée par Gil-Galad?) ce qui te permet de dériver sur le projet de faire de Fondcombe non un avant-poste guerrier, mais un refuge pour toutes les personnes cherchant repos et pour ceux qui fuient l'ombre de Sauron à la recherche de paix, en gros non une garnison mais la "dernière maison simple"... telle que je crois le concevait Tolkien... Tu peux aussi rajouter un pendant aux héros elfiques (Elrond, Gil-Galad) comme un chef orque particulièrement terrifiant juché sur son loup... Avec peut-être une rencontre entre eux... Il n'y a pas non plus à ma mémoire ce genre de personnage à Helm... Quoi d'autre? *sent qu'il va se faire taper s'il en rajoute* Ce ne sont que des idées que je mets à ta disposition Sinon, mon passage préféré, c'est ce passage vers la fin: Citation :Hommes et Elfes, ils avaient été nombreux à tomber dans l’ardeur de l’assaut, en particulier lors de l’attaque des loups. Mais si l’Histoire n’a pas retenu leur nom, chacun fut pleuré et présenté devant Mandos lors des chants du deuil.Probablement parce que je le trouve très bien écrit, avec du style, une inscription dans l'Histoire ce qui donne à l'évènement sa note éternelle, ce dont les gens plus tard se souviendront... et puis pour finir, un brin de symbolisme... tout bonnement parfait à mon goût! Au fait est-ce la fin finale de ton histoire? Parce que si c'est le cas on s'en doute un peu sans trop le ressentir vraiment... une bonne fin est celle où tu n'a pas précisément besoin d'écrire le mot "FIN" si tu me comprends... Parfois, une ultime discussion entre deux personnages principaux, à la fois brève et intime, comme une sorte de bilan, de ce qu'ils ont retenu des évènements, en ajoutant parfois leurs espérances ou leurs objectifs futurs... ca peut ainsi jouer le rôle d'une clôture qui ouvre sur le futur... Enfin, à toi de voir Voilà, j'espère ne pas avoir été trop vicieux, abject ou pleins d'autres mots compliqués... Et t'être utile par mes avis... A toi de me dire... Citation :J'espère que ton inspiration te permettra d'écrire de nouvelles histoires, au moins aussi bien que celle ci !Moi aussi je l'espère! RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 01.05.2008 manthanoménos a écrit :Champagne! J'ai trouvé mon remplaçant! Maint'nant j'peux m'reposer et laisser Imrahil faire l'boulot à ma place! Ho non, je n'ai surement pas ton expérience en matière de littérature... ... Eh mais attend une seconde, ... t'es pas si vieux que ça en fait ! T'as même pas une an de plus que moi ! Génération 90 en force ! manthanoménos a écrit :Sinon, mon passage préféré, c'est ce passage vers la fin: J'aime aussi beaucoup ce passage ! Il me fait penser a celui de la fin de la bataille sur le pelennor, avec le magnifique poème du ménestrel de Rohan. On y retrouve également un air homérique, lorsque celui ci annonce la mort de divers héros dans l'illiade, des phrases courtes et intenses, ça donne vraiment le coté épique et "éternel"... Bonne continuation Tinakë ! RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 01.05.2008 Un GRAND MERCI pour ces commentaires enthousiastes! C'est génial que ce texte plaise à d'autres personnes qu'à son auteur... Citation :Mais puisqu'il faut s'entraider, comme l'a dit manthanoménos, tu as trébuché sur un passé simple compliqué (...), en effet on dit d'un arbre qu'il crût rapidement et non pas qu'il croissa (c'est le corbeau qui croasse...).Ah, c'est vrai... mais n'existe-t-il pas un vieux verbe "croisser"? Je crois avoir déjà vu "croissa" dans une traduction de Tolkien. NB: Tinakë, ça veut dire Bernache, pas Corbeau Citation :Champagne! J'ai trouvé mon remplaçant! Maint'nant j'peux m'reposer et laisser Imrahil faire l'boulot à ma place!Ben dis donc, vu le commentaire qui suit, on ne dirait pas que tu as envie de passer la main Je vais réfléchir à tes remarques; ce qui est chouette, c'est que non seulement tu me dis ce qui ne va pas, mais en plus, tu suggères les variations à apporter. Après, je peux n'en faire qu'à ma tête en les ignorant (non, promis, j'en tiendrai compte!). Citation :Sinon, mon passage préféré, c'est ce passage vers la fin:C'est aussi mon passage préféré, comme toi, Imrahil! J'avoue que la formule "Morts aussi..." est dérobée à Tolkien, après la bataille du Pelennor. Je souhaitais aussi faire allusion à des évènements ultérieurs que nous connaissons, pour inscrire Fondcombe dans le temps. Citation :Au fait est-ce la fin finale de ton histoire? Parce que si c'est le cas on s'en doute un peu sans trop le ressentir vraiment... une bonne fin est celle où tu n'a pas précisément besoin d'écrire le mot "FIN" si tu me comprends... Parfois, une ultime discussion entre deux personnages principaux, à la fois brève et intime, comme une sorte de bilan, de ce qu'ils ont retenu des évènements, en ajoutant parfois leurs espérances ou leurs objectifs futurs... ca peut ainsi jouer le rôle d'une clôture qui ouvre sur le futur...Non, il reste un chapitre, pour quitter le flash-back. Et puis, j'ai encore tout à repeaufiner depuis le début! Sans compter la suite, qui sera dans une autre histoire... Citation :Quoi d'autre? *sent qu'il va se faire taper s'il en rajoute* Ce ne sont que des idées que je mets à ta disposition WinkN'hésite jamais, et toi non plus Imrahil, ou toi, lecteur inconnu, à me donner tes impressions, même négatives, ou tes remarques! C'est cela qui permet de progresser, tant que ce n'est pas un simple "C'est trop nuuul", point barre. L'écrivain est au service de ses lecteurs, pour leur faire plaisir le plus possible. Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Juliεη - 01.05.2008 Imrahil a écrit :Ho non, je n'ai surement pas ton expérience en matière de littérature...Arf la blague! "mon expérience littéraire" se limite à un 10/20 au bac de français et deux-trois p'tites histoires de nubi RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 01.05.2008 Si tu as passé ton bac français l'an dernier, on a du avoir le meme sujet, et j'ai pas brillé tant que ca non plus... Ah moins que tu passes le bac au Canada ? RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 02.05.2008 Petite modification: il reste TROIS chapitres avant la fin finale. J'aurai pu n'en faire qu'un, mais je trouve ça plus lisible quand c'est en plus petits morceaux. Voilà le premier. Bonne lecture! Chapitre 12: Gil-Galad Elrond referma le vieux livre avec un sourire de satisfaction. Ils avaient bien œuvré, ses Aiglons, abandonnant leur vie de soldats pour devenir maçons, menuisiers, agriculteurs ! Au début, la bruyante cité d’Eglarest leur avait manqué ; et puis, à mesure que passaient les mois, ils avaient appris à aimer la montagnes et sa rude beauté, l'austérité de ses roches brunes et l’éclat coloré des fleurs qui s’y accrochaient dans un sursaut de vie. Mais ils regrettaient encore tous une chose : la Mer. Dans cette profonde vallée où le regard était immédiatement stoppé par les montagnes, il leur restait au cœur un âpre désir de laisser leurs yeux scruter l’horizon lointain et contempler les douces couleurs de l’océan. Alors, quand la nostalgie était trop forte, quelques-uns des soldats repartaient vers l’ouest ; ils demeuraient quelques semaines, faisaient leur rapport au Roi et profitaient de la Cité. Puis ils revenaient à Imladris, où était leur place, chargés de cadeaux de la part de Gil-Galad et de leurs amis. Aucun, encore, ne prenait le bateau pour Valinor, car ils savaient avoir encore un rôle en Terre du Milieu. Le plateau où avait commencé l’établissement de leur cité s’était rapidement révélé trop petit, et il avait fallu s’adapter au terrain pentu pour agrandir leur demeure. En cela, Lindir avait fait des merveilles, et Fondcombe était désormais un lieu paisible et agréable, où il faisait bon se promener le soir à travers les jardins parfumés. Une partie du cours d’eau avait été habilement détournée pour venir alimenter un petit moulin, où on amenait le grain venant de la vallée fertile. La première bouchée de pain doré fut pour Elrond, tremblant de joie et de fierté ; à ses yeux, c’était le signe que la Cité-Refuge était à l’abri de la famine, ne dépendait plus de Mithlond pour la nourriture, pourrait résister à un siège ! L’attaque d’Imladris n’avait pas scellé l’arrêt de la guerre contre l’Ombre ; les Elfes et les Hommes s’étaient encore battu pendant deux ans avant de remporter la victoire. Acculé par la puissante armée de Númenor, Sauron s’était réfugié au Mordor avec les débris de son armée, où il était demeuré de nombreuses années, trop affaibli encore pour inquiéter les peuples libres de la Terre du Milieu. Après la défaite de l’Ombre, des Elfes avaient fait venir à Fondcombe leurs femmes et leurs enfants ; certains même, comme Inglor, s’étaient mariés dans la grande pièce claire qui servait aux cérémonies et aux festivités. La Cité-Refuge avait également accueilli Galadriel, l’épouse de Celeborn, et sa fille Celebrían. Elles étaient demeurées en Lorinand en attendant la fin des troubles de l’autre côté des montagnes, puis étaient parties à la recherche de Celeborn. Et bien qu’il n’en soufflât mot à personne, il se prit à aimer la gracieuse demoiselle. A cette époque avait eu lieu le Premier Conseil, en présence de Gil-Galad et de tous les Elfes vivant à Imladris. Il fut alors connu que Galadriel détenait Nenya, le troisième anneau des Elfes. Le Roi remit Vilya à Elrond pour l’aider à maintenir la place forte que représentait Fondcombe, et l’institua son vice-régent en Eriador. Puis il repartit à Eglarest avec ceux qui le désiraient ; mais beaucoup voulurent rester, car ils considéraient désormais comme leur demeure la cité qu’ils avaient construite de leurs propres mains. Imladris devint alors un puissant îlot de résistance face au mal qui croissait à nouveau, et un lieu d’aide pour tous ceux qui combattaient l’Ombre du Mordor. Et celle-ci grandissait de jour en jour : on racontait que d’étranges spectres, portant chacun une bague au doigt, parcouraient la Terre du Milieu pour le compte de leur maître Sauron. Celui-ci avait corrompu les hommes de Númenor qui, dans leur fol orgueil, avaient été anéantis par Eru lui-même dans un grand cataclysme engloutissant à jamais la belle île d’Andor. Elrond soupira : il savait que la vie heureuse de Fondcombe ne pourrait durer plus longtemps. Le mal qui grondait devait être contenu ; en compagnie de Gil-Galad, le Semi-Elfe allait reformer une armée et marcher sur le Mordor. Le Grand Roi avait reçu l’aide des hommes d’Arnor, menés par Elendil, dans une Ultime Alliance entre les deux races. Le prince Isildur s’était enfui au nord après la prise de Minas Ithil par Sauron, tandis que son frère Anárion défendait tant bien que mal Minas Anor et la ville d’Osgiliath. Il fallait agir très vite pour empêcher Sauron de détruire les peuples libres les uns après les autres. Elrond parcourut la salle du regard. De nombreuses années s’étaient écoulées depuis la fondation de Fondcombe, mais ses Elfes avaient gardé intactes leur force et leur valeur au combat, traquant les Orques qui habitaient encore les montagnes ou luttant entre eux par simple plaisir. Ils avaient passé plusieurs jours à préparer leurs affaires, fourbir leurs armes et vérifier la solidité de leurs armures ; ils avaient par surcroît renforcé les murs de la Cité-Refuge durant leur réparation annuelle. A présent, ils profitaient du calme de la brûlante journée d’été pour être en famille ou se divertir. Ils allaient repartir avec leur chef, mais pas tous : le regard d’Elrond se posa sur Erestor qui, penché sur un bois de lit, sculptait adroitement son dossier en un grillage de fines tiges au bout desquelles s’épanouissaient des fleurs délicates. Pour tout son travail, il ne se fiait plus qu’à ses mains ; durant le siège d’Imladris, un projectile enflammé était passé trop près de son visage, le privant de l’usage de ses yeux, et tout l’art de la médecine elfique n’avait pas été suffisant pour lui rendre la vue. Au début, il avait peiné à accepter son infirmité ; ses amis s’étaient discrètement relayés dans la Salle du Feu, implorant les Valar de lui accorder la paix. Puis, un matin, sans signe avant-coureur, il retrouva d’un coup la joie et la bonne humeur qui le caractérisaient auparavant. Personne ne put expliquer ce brusque changement, et il resta silencieux là-dessus ; mais quand on le voyait suivre des yeux une chose invisible, et qu’alors une joie ineffable illuminait son visage, on le soupçonnait de voir les « dieux d’au-delà de la Mer »- les Valar, qui visitaient discrètement les lieux. Et quelquefois, quand la nuit était belle ou le jour particulièrement réjouissant, il regardait, avec une expression joyeuse, quelque chose qui se déplaçait dans le jardin. Quand la chose passait près de lui, il s’inclinait respectueusement, puis retournait à ses occupations, tout empreint d’une sérénité contagieuse. Il avait conservé sa passion pour le travail du bois, qu’il effectuait toujours avec une habileté merveilleuse. Durant la guerre au Mordor, il allait demeurer à Fondcombe ; son excellente connaissance des lieux et sa mémoire étonnante lui permettrait de remplacer Elrond jusqu’à son retour, car Celeborn, qui ne partait pas non plus, refusait de tenir ce rôle malgré son haut rang et sa sagesse. Elrond en était là dans sa réflexion quand Erestor releva soudain la tête et dit joyeusement : « Gil-Galad arrive ! » Au bout de quelques instants, en effet, tous purent entendre le galop d’un cheval résonnant sur le sol rocheux. Ils se levèrent et descendirent en hâte jusqu’à la cour rougie par les premiers rayons du crépuscule, heureux de voir leur roi et impatients d’entendre ce qu’il avait à leur dire. Gil-Galad traversa le pont étroit puis entra dans la cour en passant sous un large porche. « Gloire à notre roi ! Qu’Elbereth te garde ! » Au milieu des cris de bienvenue, il descendit de cheval et salua le maître des lieux, puis les trois nobles Elfes qu’il hébergeait. Il était très grand, revêtu de son armure étincelante marquetée d’étoiles d’argent, et de son manteau bleu, couleur de Manwë, symbole de son autorité. Il était empli de vigueur et de sagesse, mais la bonté se lisait dans ses yeux, et il restait accessible à tous ceux qui désiraient venir à lui. Il tint à saluer tous ceux qui habitaient la Cité-Refuge, puis il se plaça sur le seuil de la maison aux côtés de son hôte : -Je suis heureux de vous retrouver tous ! La route est longue jusqu’ici, mais son souvenir s’efface déjà à revoir enfin tous vos visages. Je n’apporte pas de bonnes nouvelles : l’Ennemi est puissant à nouveau, et la bataille sera rude. Bien des nôtres tomberont avant la destruction de l’Ombre. Mais nous parlerons de ceci demain ; ce soir, nous fêtons le Mitan de l’année, en l’honneur d’Elbereth qui plaça au ciel ses précieux joyaux pour notre joie ! Il entra alors dans la maison, toute illuminée pour la fête. Il y eut un grand repas et de nombreux chants s’élevèrent. Quand ils le désiraient, les Elfes avaient la capacité de goûter l’instant présent en oubliant l’avenir obscur; le festin fut donc long et agréable sans arrière-pensées. Gil-Galad raconta ses errances à travers l’Eriador, à la recherche des Elfes qui vivaient disséminés dans le pays. Puis, pour chasser l’idée du départ prochain, il parla de sa rencontre avec Tom Bombadil, l’étrange et gai luron qui gambadait dans la forêt à longueur de journée, et de sa belle femme Baie d’Or, dont la voix se mêlait au bruissement des sources quand elle chantait. Des rires et des chants résonnèrent jusque fort tard dans la nuit, puis les Elfes se dispersèrent, qui vers sa chambre en quête d’un peu de repos avant le retour du soleil, qui dans la salle du Feu, là où des bûches se consumaient jour et nuit, amenant la paix et la clarté dans les réflexions de ceux qui les contemplaient. Certains restèrent un peu partout à discuter par petits groupes. Gil-galad partit dans les jardins en compagnie d’Elrond. Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 02.05.2008 Génial ! Pas mal du tout ta manière d'alterner entre présent et passé, on se sent vraiment plonger dans les souvenirs d'Elrond ! Mais deux ou trois remarques tout de même, certains détails m'ont choqué a propos de la vie des héros : le fait qu'Erestor soit aveugle me semble étrange, rien n'est dit a se sujet au moment du conseil d'Elrond (ou alors moi j'ai vraiment Alzeimer), quand a Gil Galad, sa rencontre avec Bombadil ne présente rien de choquant (a mon sens) mais ses errances, pour un haut roi des noldor me semblent quelque peu déplacées. Par contre j'ai vraiment apprécié le passage ou Erestor semblent apercevoir les valar se balader dans les jardins de Fondcombe, çà donne une note poétique très forte, empreinte de calme et de tristesse pour ce pauvre handicapé qui ne devrait pas l'être . Mais peut être envisages tu qu'il recouvre la vue ? Oula surtout ne dis rien, laisse nous découvrir !!! ... RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 03.05.2008 Imrahil a écrit :Génial !Que répondre hormis Merci, ça fait vraiment plaisir! Citation : le fait qu'Erestor soit aveugle me semble étrange, rien n'est dit a se sujet au moment du conseil d'Elrond (ou alors moi j'ai vraiment Alzeimer)Rassure-toi Justement, j'ai joué avec le fait que, nul part, ne sont décrits les Elfes présents au Conseil d'Elrond. Mon but était aussi de tenter de créer des méandres de compassion envers un personnage à la surface de vos consciences; je ne suis pas sûre d'avoir réussi... Citation : quand a Gil Galad, sa rencontre avec Bombadil ne présente rien de choquant (a mon sens) mais ses errances, pour un haut roi des noldor me semblent quelque peu déplacées.Par "errances", il faut comprendre "déplacements pas en ligne droite": dans mon esprit, il est possible que Gil-Galad se balade dans son royaume pour visiter des villages, des fermes isolées... afin de connaître la vie de ses sujets. La chose bizarre que je ne sais pas trop comment modifier, c'est qu'il fait un temps caniculaire, même les Elfes ne sortent pas, et Gil-Galad voyagerait dans la journée, en plein soleil?? -soit il a un pouvoir quelconque donné par les anneaux, -soit il connaît une super crème solaire, -soit il voyage torse nu, fait un détour par la rivière juste avant d'arriver et se montre frais et pimpant aux habitants d'Imladris. A moins que vous n'ayez d'autres suggestions un peu plus... elfiques? Citation :Par contre j'ai vraiment apprécié le passage ou Erestor semblent apercevoir les valar se balader dans les jardins de Fondcombe, çà donne une note poétique très forte, empreinte de calme et de tristesse pour ce pauvre handicapé qui ne devrait pas l'être .Moi aussi, j'avoue que j'aime beaucoup ce passage... Je n'ai pas encore réfléchi à ce qu'il allait devenir. RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 03.05.2008 Tinakë a écrit :Rassure-toi Des méandres de compassion, moi j'en ai un fleuve de compassion pour ce pauvre Erestor ! Il est vraiment trop triste !! :cry: :cry: :cry: :cry: :cry: Tinakë a écrit :La chose bizarre que je ne sais pas trop comment modifier, c'est qu'il fait un temps caniculaire, même les Elfes ne sortent pas, et Gil-Galad voyagerait dans la journée, en plein soleil?? Etant donné qu'Ereinion Gil Galad porte l'anneau du feu, je ne sais pas si celui ci le protège de la chaleur (le protéger du froid par contre OK)... Mais les vêtements du haut roi des noldor doivent être parmi les meilleures créations elfiques, et comme les capes offertes a la communauté en Lorien, elle offrent toujours la température idéale... Il a un manteau avec la clim... quoi ! Sinon Manthanomenos a suggéré hier sur le chat que tu regroupes tout tes chapitres afin de gagner en lisibilité, je ne sais pas si il t'a envoyé un message pour te le dire, mais perso je trouve que c'est une excellente idée ! RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 03.05.2008 Elle est bonne, en effet. Faudrait-il que j'ouvre un nouveau fuseau du forum, ou est-ce que je mets le texte à la suite de celui-ci? Un manteau avec la clim? Ouah, c'est super elfique ça RE: Devoir de vacances... - Juliεη - 03.05.2008 Imrahil a écrit :Sinon Manthanomenos a suggéré hier sur le chat que tu regroupes tout tes chapitres afin de gagner en lisibilité, je ne sais pas si il t'a envoyé un message pour te le dire, mais perso je trouve que c'est une excellente idée !Ahhh... Manthanoménos est un grand timide ou un flemmard (à vous de voir) qui laisse les autres faire son boulot... D'ailleurs "d'un commun accord entre Druss Caldea et moi, mets le [ton texte regroupé] à la suite " (dixit Druss )... En tout cas ce sera mieux ainsi Sérieusement, revenons à ton texte: On commence par les petites erreurs de syntaxe: Citation :Aucun, encore, ne prenait le bateau pour Valinor, car ils savaient avoir encore un rôle (à tenir?) en Terre du Milieu. Citation : à ses yeux, c’était le signe que la Cité-Refuge était à l’abri de la famine, ne dépendait plus de Mithlond pour la nourriture, (et? et qu'elle?) pourrait résister à un siège !J'ai l'impression qu'il manque une liaison... Citation :les Elfes avaient la capacité de goûter l’instant présent en oubliant l’avenir obscurC'est peut-être la moins utile de mes remarques, mais là tu pourrais faire un chiasme: l'instant présent... l'obscur avenir J'ai toujours trouvé que les effets de style rendent mieux à l'oreille et à l'esprit (c'est une opinion ) Citation :Des rires et des chants résonnèrent jusque fort tard dans la nuit, puis les Elfes se dispersèrent, qui vers sa chambre en quête d’un peu de repos avant le retour du soleil, qui dans la salle du Feu, là où des bûches se consumaient jour et nuit, amenant la paix et la clarté dans les réflexions de ceux qui les contemplaient.Elle est vraiment longue cette phrase... la scinder en deux serait bien... Sinon, niveau scénario, une petite remarque: Citation :Elrond referma le vieux livre avec un sourire de satisfaction. [...25 lignes...] Elrond soupiraEn fait, on a quasiment oublié Elrond assis dans une salle d'Imladris au cours des 25 lignes où tu fait un topo de ce qui s'y est passé depuis la bataille... Du coup ce "Elrond soupira" m'a surpris un peu, et il fallait que je revienne en haut du chapitre pour savoir où on en était dans le temps présent. Et à part ca, le texte est bien fait surtout la partie après le moment où tu reprends ton récit: Elrond soupira etc... Très bien ce moment Voilà, j'ajouterai quelques précisions tout à l'heure... donc à plus! EDIT: bon les rajouts: c'était par rapport au problème cité juste avant... parce qu'en fait on sort d'un flash-back pour tout de suite revenir dans le passé durant 25 lignes et revenir à nouveau ds le présent... je reprends la fin de ton précedent chapitre. Citation :Grâce aux nombreux bras supplémentaires, la réparation des bâtiments et la fin de l’installation furent rapides ; en juillet, malgré des semailles tardives, il y eut la première moisson, issue du blé emporté dans les provisions des Númenoréens. Ce fut l’occasion de grandes festivités en l’honneur de Yavanna ; et ce le fut dorénavant à chaque récolte, pour perpétrer le souvenir de la Reine de la Terre rendant fertile tout ce que son pied si léger effleurait durant sa danse.Puis la suite: Citation :Elrond referma le vieux livre avec un sourire de satisfaction. Ils avaient bien œuvré, ses Aiglons, abandonnant leur vie de soldats pour devenir maçons, menuisiers, agriculteurs ! Au début, la bruyante cité d’Eglarest leur avait manqué ; et puis, à mesure que passaient les mois, ils avaient appris à aimer la montagnes et sa rude beauté, l'austérité de ses roches brunes et l’éclat coloré des fleurs qui s’y accrochaient dans un sursaut de vie.Et plus loin: Citation :Elrond soupira : il savait que la vie heureuse de Fondcombe ne pourrait durer plus longtemps. Le mal qui grondait devait être contenu ; en compagnie de Gil-Galad, le Semi-Elfe allait reformer une armée et marcher sur le Mordor. Le Grand Roi avait reçu l’aide des hommes d’Arnor, menés par Elendil, dans une Ultime Alliance entre les deux races. Le prince Isildur s’était enfui au nord après la prise de Minas Ithil par Sauron, tandis que son frère Anárion défendait tant bien que mal Minas Anor et la ville d’Osgiliath. Il fallait agir très vite pour empêcher Sauron de détruire les peuples libres les uns après les autres. Tu as deux solutions: -ou tu continues ton texte et tu ne parles d'Elrond que au moment de "Elrond soupira" -ou tu entrecoupes ton résumé historique de déplacements d'Elron ds la pièce, des paysages qu'il voit par sa fenêtre, des elfes pour qu'on garde le lien... (la deuxième solution est le plus dure, mais à mon avis, si elle est bien rédigée celle qui tiendra le lecteur en haleine sans l'ennuyer par le résumé historique ) Voilà, En espérant que ca t'aidera... *s'en va lire celui du frangin* (Montez une entreprise familiale! ) Re-EDit: Un manteau noir et long avec la clim pour l'été? JE VEUX MON TAILLEUR NELFIK!!! RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 03.05.2008 Désolé Mantha, le manteau de Gil Galad est bleu, pas noir... Sinon je suis de ton avis pour le flash back, voir Elrond dans le présent de temps en temps doit être dur a mettre en forme mais ça donne le coté vivant de la mémoire, peut être ses réactions actuelles (regrets ou autres) par rapport a ses souvenirs. Pour finir Tinake, suis donc le conseil du "légendaire Druss a la hache" , met ton texte en un seul morceau a la suite (a la limite si la fin approche, attends de l'avoir terminé). RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 03.05.2008 D'accord; un grand merci pour toutes ces remarques et suggestions, qui vont me permettre de peaufiner mon texte! Je commence tout de suite à le modifier depuis le début en prenant en compte toutes les remarques faites, et je publierai le texte en entier. Si l'attente est trop longue, vous pouvez toujours me supplier à genoux, et je vous donnerai les 2 derniers chapitres... *cherche désespérément le smiley avec les chevilles qui gonflent* Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 03.05.2008 Tant qu'on y est mantha, tu connais le smiley qui supplie a genoux ? RE: Devoir de vacances... - Juliεη - 03.05.2008 Les smileys par définition ne représentent que des t^tes... mais tu peux le faire pleurer tellement il supplie et qu'il a mal aux genoux RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 03.05.2008 manthanoménos a écrit :Les smileys par définition ne représentent que des têtes... Restent donc a inventer ceux qui représentent des corps entier... Il me semble qu'il existe quelque part des smileys spéciaux SdA. manthanoménos a écrit :mais tu peux le faire pleurer tellement il supplie et qu'il a mal aux genoux Et pour celui aux chevilles qui enflent tu fais quoi ? (Je suis pour une combinaison lunettes de crâneur+idée géniale) RE: Devoir de vacances... - Zelphalya - 03.05.2008 Imrahil a écrit :Il me semble qu'il existe quelque part des smileys spéciaux SdA.Effectivement, et ils appartiennent à leur auteur et ne peuvent être utilisés sans son accord Reste plus qu'à les trouver et trouver l'auteur pour demander Mais bon, ce sont principalement des smileys représentant les personnages des films, faut aimer RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 03.05.2008 Ok no problem, on monte un équipe, on pique un palantir pour repérer le zigoto, on le charge avec des méaras pour être sur qu'y s'échappe pas, on le ligote avec une corde a Galadriel et on le force a lire toutes les bêtises dites sur le chat jusqu'à qui nous file l'autorisation de faire joujou avec ses dessins... (Quoi, comment ça c'est pas une bonne idée ??? !!!) RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 04.05.2008 Oula, j'aurais jamais dû parler de smileys, moi... manthanoménos a écrit :Montez une entreprise familiale! :mrgreenPatience: je suis en train d'exercer une pression diplomatique (mais récurrente) sur ma petite sœur afin qu'elle rejoigne la bande, mais elle préfère écrire une histoire sur Alex Rider pour le moment... Elle ne sait pas ce qu'elle rate Tinakë, Totis visceribus! RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 23.06.2008 Ouf! Après des partiels sportifs, je vais enfin regrouper les chapitres, et rajouter les derniers. Ca ne se voit peut-être pas, mais j'ai essayé de prendre en compte la plupart de vos remarques; mais je continuerai à peaufiner le texte, alors n'hésitez pas à faire d'autres commentaires! J'ai aussi rajouté un petit passage sur la Salle du Feu, mais je ne le trouve pas génial. [quote=manthanoménos] [quote] Elle était parsemée de taches d’un blanc si éclatant que la neige semblait grise: ici, malgré le froid encore vif, les nieninqë* avaient déjà déroulé leurs pétales immaculés. Un des soldats déblaya la neige du pied, puis, se penchant, il gratta le sol gelé pour en détacher des mottes de terre brune qu’il écrasa entre ses doigts. [/quote] Dans le texte originel, j'avais mis "piquetée" à la place de "parsemée"; mais je pense garder le premier terme, qui fait allusion à la longue tige des perce-neiges, littéralement piquées dans la neige. Donc merci pour ta suggestion, mais je crois que je ne vais rien changer... Prologue Confortablement assis dans un profond fauteuil artistement sculpté, Elrond était penché sur un vieux livre relié d’or. Il contenait le récit de la construction de la Cité-Refuge, ainsi que de nombreux plans ; car, comme tous les étés depuis des siècles, les habitants d’Imladris vérifiaient l’état de leur demeure, réparant au besoin les charpentes ou les murs qui s’affaiblissaient. Les plans d’architecture renfermés dans les archives étaient alors d’un grand secours pour mener à bien ces travaux. On était au milieu de l’après-midi ; haut dans le ciel, le soleil envoyait impitoyablement sa morsure brûlante sur la Cité-Refuge d’Imladris, cachée en pleine montagne. Pourtant, la cascade qui tombait non loin n’avait pas diminué son débit, car elle était alimentée par les neiges blanches des plus hauts sommets, qui ne disparaissaient jamais totalement. Il faisait une chaleur torride dans les jardins qui entouraient la belle demeure. Personne n’osait s’y attarder quand le soleil atteignait le zénith. Les Elfes avaient pris l’habitude de se rassembler dans la Salle Commune durant les heures brûlantes, car c’était la salle la plus fraîche grâce à son orientation vers le nord. Mais, en ce mois d’août, la température y restait tout de même péniblement élevée. Quelques Elfes, assis par petits groupes, chantaient à mi-voix en pinçant les cordes de leurs harpes, et un groupe d’enfants jouait tranquillement avec deux jeunes femmes sur le tapis qui recouvrait les dalles du sol; mais la plupart des adultes lisaient ou écrivaient, puisant leur savoir dans la riche bibliothèque de Fondcombe où d’innombrables livres s’étaient accumulés au fil des âges, preuves et gardiens du savoir ancestral de la race elfique. Le Semi-Elfe feuilletait lentement le livre. Chaque page lui rappelait des heures de labeur, de peine, mais aussi d’entraide et de fierté quand la Cité avait enfin été achevée. Des images repassaient devant ses yeux : c’était plus de dix-sept siècles auparavant… Chapitre 1 : Ordre de mission Le soleil venait de se lever sur la cité de Mithlond quand Elrond arriva au palais. Iràl, le deuxième héraut du Roi, était venu le trouver au milieu de la nuit, chez lui, à quelques kilomètres de Mithlond, disant que Gil-Galad le mandait d'urgence. Ils s'étaient rendus ensemble à la Cité, chevauchant en hâte à travers les ombres grises, et l'inquiétude au coeur: le Roi n'avait pas donné plus de détails à son messager. Elrond descendit de cheval et le confia à Iràl. Un serviteur le guida dans les longs couloirs ornés de tapisseries. Ils arrivèrent devant une haute porte, que le Semi-Elfe connaissait bien pour l'avoir franchie de nombreuses fois: celle de la salle où travaillait le Roi. Le serviteur s'inclina devant Elrond et s'en alla sans bruit. Elrond eut juste le temps d'épousseter son manteau couvert de poussière quand la porte s'ouvrit sans aucun grincement. Il entra dans la pièce claire. Gil-Galad était assis derrière une table, et compulsait d’anciennes cartes avec un air soucieux. Le Semi-Elfe se rapprocha en faisant résonner ses pas contre le dallage coloré, mais le roi, absorbé par ses réflexions, gardait la tête penchée. Elrond s’arrêta devant la table, et, s’inclinant, il dit : -Tu m’as appelé, mon seigneur ? Que puis-je faire pour te servir ? Gil-Galad releva brusquement la tête, et son visage tiré par les préoccupations s’éclaira d’un sourire quand il vit son héraut debout devant lui. Il l’appréciait beaucoup, non seulement grâce à ses nobles origines et le destin de ses parents, désormais présents dans chaque chant et chaque légende, mais aussi pour son courage et sa grande habileté à mener des hommes. -Merci d’être venu aussi vite, Elrond ! Assieds-toi, je t'ai fait chevaucher une bonne partie de la nuit, tu dois être las. Il lui désigna un siège confortable, puis se leva et servit lui-même deux verres d'une boisson rafraîchissante. Elrond ne put s'empêcher de ressentir une légère gêne en le voyant faire, mais il connaissait suffisamment le Roi pour savoir qu'il ne devait pas protester: Gil-Galad tenait à se conduire souvent comme l'un de ses sujets, sans devoir appeler un serviteur chaque fois qu'il avait besoin de quelque chose. Il donna un verre à Elrond, retourna s'assoir et but une gorgée de vin. Son visage devint plus grave, comme s'il appréhendait de mettre Elrond au courant. Il y eut un instant de silence que le Semi-Elfe n'osa troubler, bien qu'une ombre tombât sur son coeur tandis qu'il regardait le visage de son souverain. Gil-Galad rompit enfin le silence, d'une voix saccadée et douloureuse, mais volontaire: -J’ai une mission urgente et dangereuse à te confier. Des messagers m’ont appris que Sauron remontait l’Eriador avec de grandes troupes, dans le but de conquérir le pays. Il a déjà ravagée bien des cités, et beaucoup de familles pleurent un proche ou un ami. L'hiver n'est pas loin et la famine risque d'apparaître dans ces contrées. -Souhaiterais-tu que j'apporte des vivres à cette population? demanda Elrond, croyant comprendre. Gil-Galad eut un faible sourire, puis son visage fut encore plus triste. -Non, Elrond, répondit-il avec douceur. Cela est à la portée de tout chef de guerre. Mais toi, tu es un officier de grande valeur, comme j'en ai rarement eu sous mes ordres. Il prit une large inspiration avant de continuer: -Celebrimbor sera bientôt assiégé en Eregion, dit-il en lui montrant une carte suspendue au mur. Je voudrais que tu lui viennes en aide. C'est une mission dangereuse, dont certains ne reviendront pas. Mais j'ai suffisamment confiance en ton expérience et ton courage pour penser que tu pourras mener cette mission à bien. Es-tu prêt à faire cela? Elrond se leva et alla consulter la carte. Les armées ennemies étaient représentées par des croix noires, les alliées, par des croix rouges. Il prit un moment de réflexion puis se retourna vers le Roi: -Bien ; je me chargerai de venir en aide à Celebrimbor. -Pars le plus tôt possible, avec dix mille soldats parmi ceux que tu souhaiteras, dit Gil-Galad, qui avait écarté toute émotion et dont le ton était net et posé.Quant à moi, je vais demander l’aide de Tar-Minastir, roi de Númenor, car je pressens que Sauron ne pourra être arrêté par nos simples forces, et marchera vers ce rivage de la Terre du Milieu. Il leva la main ; deux éclairs jaillirent à son doigt, l’un rouge flamboyant, l’autre bleu comme la mer qu’on apercevait par la fenêtre. -Voici Vilya et Narya, forgés par Celebrimbor lui-même, expliqua-t-il devant l’étonnement d’Elrond. Ils donnent force et autorité à leurs gardiens, leur apportant aussi le pouvoir d’enflammer les cœurs et de chasser toute maladie. Celebrimbor les a envoyés ici pour les soumettre à l’avidité de Sauron. Mais celui-ci l’apprendra tôt ou tard, et il viendra les chercher si personne ne l’en empêche. Les posséder décuplerait ses forces, et il recouvrirait de ténèbres toute la Terre du Milieu… Il fixa Elrond de son regard perçant et ajouta : -Si ta venue devenait une débâcle, je veux que tu battes en retraite et que tu te caches dans les montagnes en attendant la défaite de Sauron. Car si tu vois que notre cause est perdue en Eregion, à quoi bon laisser encore périr des soldats valeureux? -Il sera fait selon ton désir, répondit le Semi-Elfe après un moment de silence, même si aucun de nous n’aime tourner le dos à l’ennemi. Mais une lueur d’incompréhension persistait dans son regard. Le Roi posa sa main sur l’épaule de son héraut et l’attira près de la fenêtre. Dehors, malgré l’heure matinale, les rues commençaient à être bruyantes : les commerçants ouvraient leurs boutiques, des ménestrels commençaient à se rassembler sur les places, quelques jeunes guérisseuses, un panier sous le bras, sortaient vers la forêt voisine… -Regarde-les, Elrond ! Ils sont heureux et libres, chacun accomplit paisiblement sa tâche. Nous en sommes responsables, nous sommes les garants de leur quiétude ; il est de notre devoir de les protéger de l’Ombre, quelles que soient les réticences dont notre orgueil et notre fierté peuvent nous emplir. Il avait parlé très doucement, comme pour lui-même. Ces paroles étaient dures à entendre pour le Semi-Elfe, mais Gil-Galad se les répétait depuis son couronnement pour trouver la force de remplir dignement son rôle. Elrond comprit que le Roi ne le blâmait pas personnellement et inclina respectueusement la tête devant sa sagesse. Sans rien ajouter d’autre, il prononça les habituelles salutations et s’en alla, laissant Gil-Galad contempler Mithlond depuis sa fenêtre. Un fois seul, le Roi soupira: -Mais pourquoi la paix doit-elle toujours s'obtenir par la guerre? Pourquoi la joie de la victoire est-elle toujours entachée par des pleurs de deuil? Pourquoi dois-je laisser partir pour un labeur incertain celui que je considère comme mon propre fils? Chapitre 2 : Départ pour la guerre Le Semi-Elfe alla d’abord dans les quatre casernes qui entouraient le palais royal et choisit les meilleurs soldats qu’il put trouver. Il en connaissait beaucoup pour avoir souvent guerroyé avec eux contre les Orques. Malgré son haut poste auprès du Roi, il aimait leur rude et joyeuse compagnie, et les traitait plus en frères d’armes qu’en subordonnés. Ceux-ci le surnommaient Thindolt, le Chef Gris, à cause de la couleur de ses yeux. Dans l’heure de midi, il s’arrêta à une taverne de la ville pour se reposer un peu ; il avait à peine eu le temps de s’asseoir qu’une voix l’interpella : -‘dolt ! Il leva les yeux et vit une cinquantaine d’Elfes s’avancer vers lui, menés par Erestor, un gai luron et courageux soldat qu’Elrond appréciait beaucoup. Ils se tassèrent tant bien que mal autour de la table du Semi-Elfe, remplissant presque la taverne à eux seuls ; heureusement, peu de personnes s’y trouvaient. Erestor se détacha du groupe et s’empara d’une chaise. Il s’assit sans vergogne devant Elrond puis lui sourit jusqu’aux oreilles : -Le bruit court dans la ville que tu recrutes des hommes ?demanda-t-il en affectant un ton de reproche. Nous n’étions pas en faction aujourd’hui et nous venons de l’apprendre. Nous réquisitionnons une place parmi ton armée ! -Ce n’est pas la mienne, mais celle du Roi, rectifia Elrond lui rendant son sourire. Et la rumeur dit-elle que cette mission est dangereuse, et qu’aucun de nous peut-être ne reviendra ? Erestor redevint sérieux, mais la joie resta imprégnée sur son visage- tels étaient son don et sa force-. -Elle le dit, mais nous voulions l’entendre par ta bouche. Nous n’avons pas peur de te suivre, même si la mort est probable ! Un murmure d’approbation parcourut les Elfes massés devant eux. -Dit-elle aussi que ce n’est pas tant nos vies que nous pourrions perdre, mais aussi notre fierté en reculant devant l’Ennemi ? Disant cela, il parcourut du regard les visages qui lui faisaient face. Il y vit l’angoisse de la souffrance et de la mort, que les Elfes portent en eux beaucoup plus profondément que les Hommes ; pourtant, cette peur bien compréhensible était peu de chose devant l’idéal qui guidait ces soldats. -Si telle doit être notre tâche, nous le ferons pour sauvegarder la paix en Terre du Milieu, répondit Erestor, résumant la pensée commune. Elrond sourit à nouveau et hocha la tête avec satisfaction: derrière leurs visages ardents à l’idée du combat, ils avaient compris l’importance de leur rôle et étaient prêts à faire tout ce qui était en leur pouvoir pour servir leur peuple. Les quatre jours qui suivirent, il y eut une affluence exceptionnelle chez les forgerons et les maréchaux-ferrants, heureusement très nombreux à Mithlond. Elrond imita les soldats; mais sa fonction lui permettait de jouir du savoir-faire du forgeron du Roi, ce qui lui épargnait les longues attentes auprès des fours surchauffés. Ayant fini tous ses préparatifs, il partit flâner dans la ville inondée de soleil. Ses pas le menèrent sur la place du marché. Il avait toujours aimé cet endroit : le poissonnier vantait à grands cris le produit de son étal, un scintillement d’écailles et de nageoires semblant venir tout droit du palais d’Ulmo ; une marchande de fleurs trônait au milieu de pétales colorés dont la fragrance recouvrait quasiment toute la place ; plus loin, le vendeur d’oiseaux exposait ses bêtes, aussi agréables à regarder qu’à écouter. Tout se faisait en un désordre indescriptible de bruits, d’odeurs et de couleurs qui étourdissait. Elrond marchait lentement à travers la place. Les souvenirs affluaient à chaque pas : cette boucherie, d’où était venu ce succulent sanglier du Nouvel An, ce marchand de tissus, où ses amis lui avaient fait confectionner en secret une magnifique cape… Une bouffée de tristesse le saisit soudain, et il prit conscience qu’il pourrait ne jamais revenir à Mithlond. Le souvenir des paroles d’Erestor ne parvenait pas à l’apaiser. -Après tout, pourquoi avoir peur ? se dit-il enfin. Je suis un soldat, et j’obéis aux ordres du Roi, quelles que soit leurs conséquences. Mon destin et celui de tous reposent entre les mains d’Elbereth ! Ayant un peu repris courage, il s’éloigna du brouhaha, traversa deux rues et franchit le seuil d’un édifice tout construit de marbre. Dans une vaste pièce claire se trouvaient quatorze statues sur piédestal, sept de chaque côté, représentant les Valar. Oromë et Nienna encadraient la porte; leurs représentations semblaient presque s'affronter, tant elles étaient différentes. Chevauchant Nahar, son destrier d'un blanc de neige, accompagné d'une meute de chiens hurlants, Oromë se dressait, les yeux flamboyants, la chevelure en désordre, et s'apprêtait à lancer un puissant appel dans son cor. En face de lui se tenait Nienna, agenouillée dans l'herbe. Enveloppée dans son manteau gris, la tête penchée avec douleur vers la terre, elle laissait ses longs cheveux s'y dérouler comme pour lui apporter un quelconque réconfort. Comme tous les guérisseurs, Elrond avait une affinité particulière pour cette dernière, et il se recueillit un instant silencieux auprès d'elle, implorant sa compassion et son pouvoir de ranimer l'espérance. Puis ses pas le portèrent vers Mandos le Juge. A son côté se trouvaient les parchemins où étaient écrits tous les faits et gestes de toutes les créatures dotées de vie, et une balance pour décider de leur destin. Un aigle se tenait près de lui, rappelant que Mandos ne prenait aucune décision par lui-même, mais uniquement sur ordre de son seigneur Manwë. Enlrond resta là un moment, se demandant combien des siens se tiendraient devant Mandos avant la venue du printemps. Il finit par se retourner vers Ulmo, le Valar qui aimait le plus le peuple des Elfes, et qui était jadis apparu à son ancêtre Tuor. Le Valar portait un long manteau serti de saphirs et d'opales. Ses yeux flamboyaient à travers son heaume noir. Malgré son apparence terrible, les Elfes aimaient ce Valar; car, au mépris de la prophétie énoncée par Mandos, Ulmo était resté près des Terres du Milieu, et il avait aidé maintes fois les Hommes et les Elfes en leur promulguant de sages conseils et en les aidant dans leurs quêtes. Plus loin se trouvaient ensemble le mari et la femme, Aulë le Forgeron et Yavanna Reine de la Terre. De ses doigts habiles, Aulë façonnait un bijou orné de pierreries chatoyantes, tandis que Yavanna, les bras tendus vers le ciel, en faisait descendre une lumière dorée qui redonnait vie à la terre infertile. Les pas d'Elrond résonnèrent dans la longue allée, et il arriva à son extrémité. Devant lui se tenait Elbereth, revêtue d'une longue robe étoilée. Grâce à l'art du sculpteur, où que se plaçait le visiteur, la reine des étoiles le fixait de son doux regard. A ses côtés, assis sur un haut trône, Manwë envoyait ses aigles porter des messages de par le monde. La statue était plus grande que les autres, mais le Valar avait le front intelligent et le visage aimable, si bien qu'il dégageait un inexprimable effet de bonté. Au fond de l’allée formée par les statues, il y avait un espace vide, symbolisant Eru, que nul art ne saurait représenter. Des lustres suspendus éclairaient le haut plafond de mosaïque, et dans l’air flottait la fraîche odeur des fleurs apportées en offrande devant le piédestal inoccupé. Le Semi-Elfe s’arrêta dans l’ombre d’une colonne, rabattit son capuchon sur sa tête et pria. Enfin, à l’aube du quatrième jour, Elrond franchit les portes de la cité de Mithlond. Gil-Galad avait tenu une dernière réunion avec Elrond et les Elfes qu’il avait choisi pour le seconder –Erestor s’était vu remettre la tâche d’aide de camp-. Il leur avait longuement parlé, enracinant le courage dans leurs cœurs par la vertu de ses anneaux. Et avec le Semi-Elfe partit un grand nombre d’Elfes à cheval et puissamment armés ; et tous, de leur chef au plus humbles des soldats, ils se demandaient qui de l’Ombre ou de la Lumière allait remporter le duel, et s’ils reverraient jamais la belle terre du Lindon. Chapitre 3 : Soir d’hiver Erestor jeta quelques bûches à côté du feu allumé devant la tente des officiers. Il était allé les chercher, avec mille précautions, dans la forêt qui bordait le campement de l’armée en déroute. Mais les Orques étaient encore loin ; Elrond avait forcé l’allure vers le nord, afin de laisser une nuit de repos à ses soldats avant le retour du soleil et des combats. Comme Gil-Galad l’avait craint, l’aide apportée par Elrond s’était révélée insuffisante face aux armées de Sauron : Celebrimbor avait été tué, et seuls quelques Elfes avaient réussi à rejoindre l’armée d’Elrond. Obéissant à Gil- Galad, le Semi-Elfe avait ordonné le repli de ses troupes ; pressés par les Orques qui les poursuivaient, ils s’étaient dirigés vers les montagnes. Le massacre était proche, mais Sauron avait appris la présence de Varya et Vilya au Lindon. Il avait alors marché vers l’ouest, ne laissant qu’une petite troupe traquer les Elfes, troupe pourtant assez importante pour les écraser jusqu’au dernier en cas d’attaque. Le Semi-Elfe n’était pas dans la tente ; seuls s’y trouvaient Limtal* et Sadorhen**, les deux Elfes envoyés par Celebrimbor avant l’attaque de Sauron pour mettre les trois plus beaux anneaux en sécurité à Mithlond. Ils en avaient confiés deux à Gil-Galad, puis étaient repartis avec Elrond et son armée, même si la situation leur semblait désespérée en Eregion. Ils installaient leurs affaires et s’interrogeaient sur l’itinéraire du lendemain. Erestor resserra son manteau autour de lui et se rapprocha du feu. La nuit tombait. Au bout d’un moment, les premières étoiles s’allumèrent au firmament et la lune se leva, faisant scintiller d’un éclat blanc et froid la neige qui recouvrait le sol. On n’entendait dans l’air glacé qu’un doux bourdonnement irrégulier : le murmure des Elfes qui discutaient dans leur tente, finissant de manger avant de prendre un peu de repos. Des pas firent soudain crisser la neige. Erestor se retourna, mais il savait déjà que c’était Elrond : aucun Elfe, plus léger, n’aurait fait autant de bruit en marchant ! Mais ses soldats lui pardonnaient volontiers ce défaut; c’était un bon chef, avisé et courageux, qui n’abusait jamais de son autorité. Chaque soir, il avait pris l’habitude de se promener dans le camp et de discuter avec les Elfes, afin de connaître l’état et le moral de ses troupes. De plus, c’était un excellent médecin, enseigné par Gil-Galad lui-même. En cas de blessures graves, les Elfes n’hésitaient jamais à venir le voir. Pourtant, ils murmuraient entre eux depuis qu’il avait ordonné la retraite, car l’idée d’une déroute les humiliait profondément. Elrond s’arrêta près du feu, aux côtés d’Erestor. Les flammes se reflétaient dans ses yeux gris, éclairant étrangement son visage soucieux et préoccupé. Erestor n’osa pas le questionner. Après quelques instants de silence, Elrond parla enfin : -Cette situation ne peut plus durer. Nous fuyons depuis des jours, et à présent les troupes préféreraient mourir sur place plutôt que montrer leur dos à l’ennemi une fois de plus. -C’est toi qui nous l’as ordonné, et nous t’avons obéi, répliqua Erestor, tentant de refouler la colère qui montait en lui. Malgré l’orgueil qu’il partageait avec les troupes, il s’était comme elles soumis à l’ordre de retraite, bien qu’il eût de loin préféré mourir au combat. -Les Orques sont trop nombreux ; à quoi une guerre ouverte nous servirait-elle ? répondit calmement Elrond. J’espérais que l’hiver aurait eu raison d’eux plus vite que de nous. Mais je me suis trompé, car ils ont de nombreux alliés dans cette région, des trolls et des géants qui leur fournissent assez de vivres et de combustibles pour vaincre le froid. A cela, il y a une solution : si nous trouvions un refuge dans un endroit caché et difficile d’accès, nous pourrions résister à un siège jusqu’à l’arrivée de ceux de Númenor. Erestor avait écouté sans rien dire. Après tout, le Semi-Elfe avait raison : soit ils continuaient à fuir, ce à quoi ils ne pouvaient se résoudre ; soit ils revenaient combattre, et se faisaient tuer jusqu’au dernier ; soit ils résistaient dans un lieu adéquat, comme le proposait Elrond. -Tu as raison, dit-il. Mais sais-tu où nous nous installerons pour faire face à l’ennemi ? -Je l’ignore encore. C’est pour l’instant ma première préoccupation. Nous devons invoquer la bienveillance toute-puissante des Valar, afin qu’ils nous guident vers un lieu propice ! soupira-t-il en tournant son regard vers l’Ouest. Je pense que les Orques ne se déplaceront plus à présent, persuadés que nous ne passerons pas les montagnes ; ils attendront que, affaiblis par le froid et sans courage, nous soyons faciles à retrouver et à faire disparaître. Va informer les troupes : dès demain, nous chercherons un endroit où regrouper nos forces. Erestor le salua avec joie et s’éloigna. Le Semi-Elfe n’avait pas voulu prévenir les soldats avant de soumettre son idée à son second et ami ; c’était une chose de plus qu’Erestor appréciait. Malgré l’heure tardive, la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre ; Elrond le réalisa en écoutant les chuchotements qui circulaient d’une tente à l’autre. Il s’enroula dans sa couverture et se prépara à dormir, comme ses officiers le faisaient déjà. Les Elfes n’aiment pas dormir trop près du sol ; les lits de camp étaient donc constitués de quatre bâtons droits plantés dans le sol, tendant entre eux un rectangle de toile. Une fois plié au fond du sac, ce matériel était léger et peu volumineux, et les soldats pouvaient l’emmener partout sans difficulté. Après avoir fait le tour du camp, Erestor rentra dans la tente, se faufila silencieusement entre les lits et se coucha près de celui de son chef. Tous deux se murmurèrent un bonsoir fatigué et s’endormirent presque aussitôt. *Limtal : en sindarin, Pied Rapide **Sadorhen : en sindarin, Œil Fidèle Chapitre 4 : Le don de Yavanna Beaucoup de gens croient que les Elfes ne connaissent pas le sommeil comme nous l’entendons, se contentant de laisser leur esprit errer sur les sentiers des rêves elfiques. Mais en réalité, il leur arrive de dormir véritablement, après un long labeur ou un dur effort physique. Certains prétendent même qu’ils ont le sommeil plus lourd que les Hommes, et qu’il est difficile de réveiller un Elfe endormi ; mais personne n’a jamais pu confirmer ces dires. Les soldats étaient épuisés, car la journée avait été rude. Peu d’entre eux avaient déjà foulé cette contrée si éloignée de Mithlond. Chez eux, l’hiver était le frais repos de la nature, la paisible méditation de toute chose ; ici, la morte saison était sauvage, cruelle, prête à arracher la vie par ses griffes gelées. De plus, ils devaient se contenter de l’air rare des montagnes, auquel ils n’étaient pas habitués. Hormis les sentinelles, ils dormaient donc tous profondément, et Elrond et Erestor ne faisaient pas exception à cette règle. Alors qu’il sommeillait, le Semi-Elfe vit soudain, montant de l’est et dépassant la cime des hautes montagnes, une étoile plus brillante que toutes celles qui piquetaient le ciel. Un aigle se dirigea vers elle ; il survola un bois de pins sombres, puis vint se percher sur le haut d’une falaise qui surplombait un gouffre vertigineux. Un torrent bondissait au fond, en cascades d’écume blanche. De l’autre côté, le sol remontait doucement, couvert d’un foisonnant tapis herbeux. Quasiment tout en haut, il y avait un orifice dans la paroi, comme l’entrée d’une grotte. L’aigle s’envola et y pénétra ; après quelques dizaines de mètres dans la galerie, il se retrouva à l’air libre, dans une immense vallée presque plane, encerclée de falaises. Et au milieu, une femme svelte, revêtue de vert et couronnée de fleurs dorées, dansait gracieusement. Sous ses pas, et à chaque endroit que frôlait un pan de sa robe, la terre devenait fertile, les fleurs éclosaient et les arbres donnaient du fruit. Elrond ne l’avait jamais vue, mais son cœur lui dicta son nom : Yavanna Kementari, la Valar Reine de la Terre, dont la danse faisait jaillir la vie. Elrond se réveilla en sursaut. Il sauta à bas de son lit et sortit précipitamment de la tente. Un éclat blanc l’aveugla à moitié : Ëarendil, l’Etoile de l’Espoir, s’était levé sur le camp des Elfes, fidèle aux sentinelles du début de la nuit. Le Semi-Elfe baissa les yeux ; il reconnut la forêt de pins de son rêve, mais son regard ne portait pas au-delà. Il bondit en avant, le cœur battant, sans se soucier de l’étonnement des sentinelles qui le virent sortir du camp en toute hâte. Il s’engagea dans le bois sombre. L’épaisse couche d’aiguilles qui recouvrait le sol étouffait le bruit de ses pas tandis qu’il s’enfonçait entre les arbres. Il avait perdu tout notion du temps, se demandant de temps à autre si cette forêt obscure et sans fin n’était pas la suite de son rêve ; il courait, courait sans s’arrêter, et son souffle haletant s’envolait en nuages blancs dans l’air glacé des premières heures du matin. Il voyait l’étoile qui le guidait se rapprocher de plus en plus de l’horizon, tandis que le ciel pâlissait devant lui, prémisse de l’aube toute proche. Arrivant enfin à la limite des arbres, il ralentit l’allure, n’osant croire à ce qu’il allait découvrir. Il s’avança jusqu’au bord de la corniche : la vallée était exactement celle dont il avait rêvé, hormis qu’elle était toute blanchie par la neige des montagnes. Face à lui, le soleil levant teintait la roche de reflets dorés, tandis que l’Etoile pâlissait devant son éclat avant de disparaître à l’horizon. La falaise du haut de laquelle il se tenait semblait à pic à première vue, mais la roche ressortait par endroits, formant grossièrement un sentier en saillie jusqu’en bas. La rivière était gelée. Le regard d’Elrond se porta devant lui : sur la pente opposée, il vit le large plateau, recouvert de buissons touffus enfouis dans la neige, qui de loin formaient de grosses sphères blanches. Il repéra ensuite l’entrée de la faille qui menait à la vallée voisine, avec une bouffée d’émotion en pensant que Yavanna l’avait bénie. Etrangement, la vallée était orientée d’ouest en est, presque perpendiculairement à l’orientation de la chaîne de montagnes. Cela lui permettait de recevoir la lumière du soleil jusqu’au lit du torrent. C’était un lieu magnifique, idéal, quasiment imprenable en cas d’attaque et de siège. Elrond murmura un nom, Imladris, la Profonde Vallée de la Faille, puis un chant jaillit de ses lèvres pour remercier Yavanna qui lui offrait ainsi le lieu où il pourrait fonder la Cité-Refuge. Chapitre 5 : L’installation dans la vallée Le camp des Elfes s’était réveillé aux premières lueurs de l’aube. En quelques minutes, le paisible village de toile s’était transformé en une fourmilière active : les soldats ranimaient les feux, rangeaient leurs affaires et pliaient les tentes en prévision d’un proche départ. Ceux qui avaient fini de se préparer se regroupaient autour des feux pour partager un rapide repas en attendant les ordres de leur chef. La nouvelle de la veille avait accru leurs forces et leur courage, bien amoindris par l’humiliation de la fuite dans les montagnes. Ils reprenaient espoir, sûrs maintenant de ne plus avoir à fuir comme du gibier devant le chasseur qui le rabat. Les officiers aussi se préparaient à partir ; mais sans rien dire aux soldats, ils se demandaient avec étonnement où était Elrond. Alors qu’une des sentinelles s’approchait d’Erestor pour lui raconter ce qui s’était passé dans la nuit, des bruits de pas se firent entendre près du camp. Elrond apparut à l’orée du bois, tout haletant, le visage rendu écarlate par sa course. Au bout d’un moment, après avoir repris son souffle, il raconta ce qu’il avait vu aux soldats rassemblés autour de lui; le camp redoubla alors d’activité et d’excitation, et l’armée put rapidement se mettre en route. Disparue, la fatigue, finies, la crainte et l’humiliation de la fuite ! Tous retrouvèrent des forces nouvelles pour repartir. Malgré la forte probabilité que les Orques ne les poursuivraient plus, des veilleurs aux yeux perçants furent placés en arrière-garde, car la montagne recelait des loups et des trolls en grand nombre. Elrond marchait en tête ; comme tous les soldats qui lui restaient, il avait perdu son cheval lors d’une bataille. Il avançait à grandes enjambées, enfonçant parfois dans la neige molle jusqu’au-dessus des chevilles, impatient de montrer le lieu qu’il avait découvert. Il portait un long manteau noir, exactement de la même teinte que ses cheveux; il produisait un bruissement très doux quand il ondulait autour de son porteur, et avait la faculté d’apporter l’apaisement où on le déposait; c’était celui que Luthien avait tissé avec ses cheveux, avant de s’évader d’Hisilorn pour partir à la recherche de Beren. Ce précieux vêtement avait été conservé et transmis par ses descendants, qui le portaient comme symbole de leur appartenance aux deux races à la fois. Ils cheminèrent sans encombre jusqu’au soir ; fortifiés par une nuit de repos, ils voyagèrent toute la nuit à travers la forêt obscure. La température était un peu remontée durant la journée, et le ciel s’était couvert d’épais nuages blancs. Au petit matin, atteignant enfin sa limite, les soldats durent se contraindre à ne pas se précipiter vers le bord de la falaise, tant ils avaient hâte de connaître enfin l’endroit que leur chef avait décrit avec tant d’enthousiasme. Quand ils accueillirent la vision qui s’offrait à eux, il y eut de nombreux murmures d’étonnement joyeux et de louange des Valar. -Ca alors ! s’écria Erestor, qui ne pouvait détacher son regard de la magnifique vallée. Jamais je n’aurais imaginé un lieu plus propice ! Quant à Elrond, après avoir vérifié d’un coup d’œil que tous partageaient son opinion sur le choix de l’endroit, il commença à descendre vers le torrent, se frayant précautionneusement un chemin entre les arbustes épineux et les rochers. L’un après l’autre, les soldats le suivirent. Le sentier était étroit et irrégulier. Par endroits, il fallait enjamber des failles, où la roche était absente ; le regard plongeait alors jusqu’au fond du ravin, laissant imaginer à chacun ce que serait une chute malencontreuse. Mais tous étaient des Elfes, habiles et aguerris, et ils avaient l’équilibre inné et la légèreté de leur race. Une fois en bas, ils traversèrent la rivière gelée en sautant sur des pierres qui émergeaient de la glace et gravirent l’autre versant. Cette partie du voyage se fit sans mal car le sol remontait en pente douce. Ils arrivèrent enfin sur un large plateau où la neige s’était accumulée en grande quantité, à mi-hauteur du flanc de la montagne, non loin de l’entrée de la grotte qui menait à la vallée fertile. Là, ils déposèrent leurs affaires, puis Elrond se jucha sur une pierre qui sortait du sol, et tous se mirent en formation autour de lui pour l’écouter. Il balaya ses troupes du regard, et fut saisi d’orgueil en voyant ses hommes, las mais fiers, les prunelles ardentes, prêts à lui obéir jusqu’au bout de leurs forces. « Ce lieu sera désormais celui où nous vivrons ! dit-il d’une voix vibrante. Et il sera comme un nid de rapace, dont nous serons les aigles. Nous le rendrons inaccessible, et jamais les Orques ne pourront nous y vaincre ! Ce sera une cité-refuge, où tous les ennemis de l’Ombre noire pourront obtenir aide et conseil. Notre force ne résidera pas dans une puissante armée, mais dans cette citadelle imprenable ! » Un murmure d’approbation parcourut les rangs. Jamais les soldats n’auraient accepté de s’installer dans un endroit si dissimulé qu’aucun ennemi ne le découvrirait ; mais ils savaient qu’ils auraient à la fois un rôle d’accueil de ceux qui partageaient leur cause et de résistance face aux troupes ennemies. Elrond répartit alors leurs tâches à ceux qui les secondaient : «Lindir, prends quelques soldats avec toi pour faire un tour de reconnaissance dans la vallée. Sadorhen et Erestor, retournez en arrière et observez ce que font les Orques. Si ils nous surveillent, ils réaliseront que nous sommes partis ; soit ils resteront dans leur camp, soit ils suivront nos traces, que la neige a conservées. Quant à toi, Inglor, je crois me souvenir que tu es doué en architecture (l’interpellé baissa modestement la tête avec un grand sourire); va m’attendre dans ma tente, et nous réfléchirons aux constructions à prévoir. Et vous, Aiglons ! Vous avez été courageux ces derniers jours, plus que je ne l’espérais. Vous avez obéi à tous mes ordres sans les remettre en question, vous fiant à moi dans une situation périlleuse, et je vous en remercie. A présent, notre errance est finie, et notre rôle dans la lutte contre l’Ennemi va changer. Je vous ferai part du labeur à entreprendre ; pour l’instant, je vous laisse vous installer. Il sauta à bas de la pierre imposante, et les troupes se dispersèrent. Avant de rejoindre Inglor, Elrond fit le tour du campement, aussi bien pour connaître réellement ce que pensaient ses soldats que pour prendre des nouvelles des nombreux Elfes blessés dans les batailles contre les Orques. Hors des rassemblements militaires, les Elfes s’entretenaient plus familièrement avec lui ; sous le fragile abri de leurs tentes, ils osaient dévoiler leurs espérances et leurs craintes, sachant trouver compréhension et sagesse dans les yeux gris de leur chef. La visite se révéla plutôt positive : aucune blessure ne s’était compliquée grâce au froid qui empêchait les infections de se développer, et les soldats étaient optimistes sur la sécurité du lieu face à une prévisible attaque d’Orques. Ils étaient impatients de commencer la construction de leur cité, qu’ils appelaient déjà Fondcombe, la signification d’Imladris, le nom jailli des lèvres du Semi-Elfe. « Car, disaient-ils, nous allons habiter au cœur des montagnes, pour résister à la volonté de l’Ennemi de toutes nos forces! » Mais un doute persistait : si les troupes de Númenor n’arrivaient pas avant le printemps, la famine était à craindre en cas de siège, car les Orques mettraient en fuite ce qui restait du gibier, et aucune plante n’aurait encore donné son fruit sur les pentes de la vallée fertile. « Nous n’avons pas le choix, répondait Elrond à leurs interrogations inquiètes. Mais j’ai bon espoir : cela fait trois mois que Gil-Galad a demandé des renforts, et peut-être les bateaux des Hommes ont-ils déjà atteint les rivages du pays de Lun. Ils arriveront à temps. » Enfin, le Semi-Elfe pénétra dans sa tente, qu’Inglor avait montée avec quelques soldats. L’officier l’attendait ; il avait déjà esquissé des plans de bâtiments. Il était en train de les soumettre à son chef quand Lindir revint de sa mission. Jusqu’au soir, tous trois discutèrent des constructions à mener en priorité, s’appuyant sur le savoir d’Inglor et l’expérience militaire d’Elrond ; et Lindir y ajouta ce qu’il avait pu observer de la roche, de la disposition de la vallée et des bois environnants. Durant ce temps, les soldats s’installaient : ils montaient leurs tentes, faisaient fondre de la glace et amassaient de grandes réserves de bois mort pour alimenter les feux qui brûlaient devant leurs abris. Certains partirent chasser dans la montagne et ramenèrent des bouquetins, un mouflon et quelques perdrix blanches qui, engourdies par le froid, n’avaient pas eu le temps de se dérober aux chasseurs. Le soir venu, les Elfes se rassemblèrent autour du grand feu qui flambait au centre du camp. Ce lieu fut désormais choisi pour les conseils et les rassemblements ; et là fut construite la salle où se déroulèrent le Grand Conseil Blanc et le Conseil d’Elrond, durant lesquels se joua le destin de la Terre du Milieu. Inglor exposa ce qu’il projetait de faire : « Le plus urgent est de bâtir une muraille autour du plateau où nous nous trouvons. La falaise au nord est inaccessible ; le danger ne peut donc venir que du sud. Au printemps, le torrent sera une barrière efficace, mais pour le moment, il nous faut résister sans son aide. Nous commencerons demain à extraire des blocs de pierres dans un lieu situé non loin d’ici. A l’aube nous pourrons nous mettre au travail; mais nous aurons une tempête de neige durant la nuit. » En effet, le ciel qui s’assombrissait était couvert de nuages voilant déjà les plus hauts sommets, et une bise glacée soufflait par rafales en soulevant la porte des tentes. Chacun rentra dans son frêle abri de toile, après avoir resserré les cordes qui le rivaient au sol. Les officiers et leur chef firent de même, mais Elrond était inquiet et il refusa qu’on barricadât l’entrée : Sadorhen et Erestor n’étaient toujours pas rentrés. Chapitre 6 : L’attente dans la tente Le soleil se coucha, caché sous les épais nuages menaçants. Le vent redoubla de violence tandis que la neige se mettait à tomber en gros flocons tourbillonnants. On n’entendait au-dehors que le bruit feutré de la neige qui tombait ; quelquefois, un grand souffle naissait de nulle part, gagnait en puissance, puis venait s’abattre sur les tentes avec fureur. Il leur semblait que la montagne elle-même, après une grande inspiration, soufflait de toutes ses forces sur les fragiles abris, qui se mettaient à claquer comme des étendards. Dans la tente des officiers, une lampe posée au sol projetait les ombres des soldats sur les parois mouvantes. Tous étaient allongés sur leurs couchettes ; malgré leurs couvertures, le froid les tenaillait autant que la pensée des deux absents. Quelquefois, l’un d’eux se levait, pour tuer le temps, essayer de se réchauffer en bougeant, et secouer la neige qui alourdissait le toit de l’abri. Ils se posaient mille questions : que faisaient les Orques ? Sadorhen et Erestor avaient-ils été capturés par eux, ou avaient-ils péri dans la tempête ? Lindir à l’ouïe fine fut le premier à sauter de son lit. Au-dehors, enfin ! des pas hésitants et irréguliers venaient de rompre le bruit monotone de la tempête. Tandis que les autres sortaient avec peine de leur engourdissement anxieux, Elrond s’assit sur le rebord de son lit et s’empara de la lampe. Lindir entrouvrit un pan de la toile. Une bourrasque s’y engouffra, déposant des paquets de neige sur les lits, et faillit éteindre la flamme vacillante, mais les Elfes n’y prêtèrent aucune attention : ils s’avancèrent juste à temps pour recevoir dans leurs bras les deux formes titubantes et couvertes de neige. Chapitre 7 : Retour des éclaireurs Chancelants, transis de froid, les arrivants furent happés à l’intérieur de la tente et transportés par des bras robustes jusqu’à leurs couchettes. Leurs beaux visages étaient gris de fatigue, et dans leurs yeux se lisait la peur rétrospective de ceux qui ont échappé de justesse à un grave danger. Sadorhen avait le poignet droit serré dans un bandage taché de sang. Elrond leur fit boire un cordial qui, après une bonne quinte de toux, colora leurs joues pâlies par le froid. Après quelques minutes de repos, ils purent enfin répondre aux interrogations muettes de ceux qui les entouraient. Sadorhen fut le premier à rompre le silence : -Les Orques ne se sont pas déplacés. En les épiant, nous avons pu entendre des conversations : ils pensent nous vaincre aisément dès le dégel, mais ils attendront d’ici-là. -Cela nous laisse environ deux mois pour renforcer nos positions, répondit Elrond, agenouillé devant lui pour soigner sa blessure. Et cela laisse aussi deux mois à Gil-Galad pour arriver jusqu’ici. Erestor but une longue gorgée de cordial et laissa sa chaleur se propager dans son corps, puis il ajouta : -Ce ne sera pas aussi simple. Des loups sont descendus des plateaux du nord pour renforcer les rangs ennemis. Ignorant cela, nous nous sommes approchés trop près du camp, et ils nous ont repérés. Nous en avons tué quatre avant de nous éloigner ; mais ils nous suivaient de près, et l’un d’eux a réussi à mordre Sadorhen. Nous avons alors traversé une rivière gelée, et trois autres sont morts en voulant nous suivre, la glace trop fine se brisant sous leurs pas. Le reste a fait demi-tour en sentant la tempête arriver, et nous sommes rentrés ici en toute hâte. -Mais cela n’a pas suffi, dit amicalement Limtal en leur apportant chacun une couverture supplémentaire. Elrond acheva de panser la large entaille de l’Elfe. Elle avait peu saigné grâce au froid, mais était empoisonnée, comme le sont trop souvent les morsures de loup. Gil-Galad avait découvert quelle plante permettait de neutraliser l’effet du poison, et avait transmis ce précieux savoir à son héraut, qui emportait toujours avec lui quelques plantes séchées susceptibles de sauver la vie de nombreux soldats. Elrond ne craignait donc rien pour Sadorhen. Ils se couchèrent encore un peu plus tard, car les deux éclaireurs avaient des renseignements à donner à leur chef sur le nombre, l’armement et le moral des troupes d’Orques. Ils étaient toujours beaucoup plus nombreux que leur propre armée, mais l’hiver les avaient affaiblis tout de même, et rendus maussades, si bien qu’ils étaient à la fois moins dangereux et plus irascibles. Quand Elrond éteignit précautionneusement la lampe au milieu des Elfes endormis, le soleil commençait à faire pâlir le ciel à l’Est. RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 23.06.2008 Chapitre 8 : Au travail Le lendemain, le vent était tombé, mais le temps restait encore couvert. Un épais brouillard couvrait les cimes qui encerclaient la vallée. Malgré le froid glacial qui avait fixé des stalactites aux bords des tentes, la tranquille vallée se mit à résonner d’appels et de tintements d’outils. L’inactivité forcée de la nuit, alors qu’ils venaient d’arriver, avait assombri bien des visages durant la soirée; mais chacun semblait s’être juré de rattraper ce retard en travaillant de tout son cœur à la première occasion. Durant une bonne heure, les troupes déblayèrent autour des tentes la neige accumulée pendant la nuit, puis s’attaquèrent aux buissons de genêts et de bruyère qui couvraient le plateau. Lindir mena une vingtaine d’Elfes à la carrière naturelle, d’où ils se mirent à extraire de gros blocs d’une solide pierre beige. D’autres commencèrent à abattre des arbres, d’autres encore à creuser les fondations de leur future demeure, suivant les plans de Gildor. Ils reçurent les précieux conseils de l’un des rescapés du siège de l’Eregion, nommé Celeborn, un Elfe de haut rang et lointain parent d’Elrond: il avait longtemps été enseigné par Celebrimbor lui-même, et savait beaucoup de choses sur la taille des pierres et la forge d’outils. Quant à Limtal et Sadorhen, ils se chargèrent d’organiser le guet le long de la falaise, car on disait que les montagnes abondaient de loups, de trolls et d’autres créatures malveillantes auxquelles les on-dit ne donnaient pas de nom. Elrond allait d’un groupe à l’autre, creusant, taillant et sciant avec la même ardeur que ses hommes. Des chants éclataient ça et là, scandés par les respirations essoufflées des travailleurs. Le vent avait chassé les nuages; le ciel gris de la veille s’était changé en une voûte d’un bleu très pur, d’où le soleil faisait étinceler la neige de mille éclats. Malgré le froid qui transformait leur haleine en nuages blancs, les travailleurs retirèrent bientôt leurs épais manteaux de fourrure pour œuvrer plus à leur aise. En fin de matinée, ils se rassemblèrent près du grand foyer, à présent encerclé de fossés délimitant les contours de la salle, et mangèrent un peu. Puis Elrond les conduisit jusqu’à l’entrée de la vallée fertile, car tous voulaient voir ce lieu visité par Yavanna. Munis de flambeaux de résine, ils traversèrent la grotte sombre, faisant s’envoler des dizaines de chauves-souris affolées par la lumière. Le plafond était haut, si bien que, par endroits, la lumière de leurs torches ne l’atteignait pas. Ils débouchèrent enfin sur le grand espace en forme de cirque. Ils restèrent quelques instants sans bouger, laissant le soleil les réchauffer après le passage du tunnel glacé et parcourant la plaine du regard avec un étonnement joyeux. Elle était piquetée de taches d’un blanc si éclatant que la neige semblait grise: ici, malgré le froid encore vif, les nieninqë* avaient déjà déroulé leurs pétales immaculés. Un des soldats déblaya la neige du pied, puis, se penchant, il gratta le sol gelé pour en détacher des mottes de terre brune qu’il écrasa entre ses doigts. -La terre est bonne, dit-il en se relevant, bien aérée et sans pierres. Elle est parfaite pour accueillir toutes sortes de plantes. -Et le sol est bien exposé au soleil, ajouta un autre Elfe. Si, par surcroît, ce lieu est béni par Yavanna, alors la récolte sera belle dès l’année prochaine ! Elrond les remercia pour leurs paroles, puis son regard se remit à errer sur la vaste plaine enneigée. Malgré lui, ses yeux cherchaient la gracieuse silhouette qui ne laissait aucune trace de pas dans la neige, Yavanna et sa danse magnifique. Il en était certain : du temps où les Valar parcouraient encore la Terre du Milieu, chacun l’embellissant selon ses dons et ses désirs, la Reine de la Terre était venue ici, semant son pouvoir de vie et de fertilité. Depuis, la cime des montagnes avait été usée par les intempéries, les torrents avaient modifié leur cours, mais la vallée demeurait encore, visible souvenir du passage de Yavanna Kementari. L’armée des Aiglons oeuvra sans répit, nuit et jour, durant des semaines. Malgré la détermination des soldats, le travail était considérable : la priorité était la construction d’une solide muraille autour du plateau herbeux qu’ils allaient habiter. Ils envisageaient également de construire un pont de pierres, assez étroit pour limiter le passage d’une importante force ennemie, en prévision du dégel futur. Des équipes extrayaient des blocs de pierre et montaient les murs, tandis que d’autres débitaient le bois en longues planches et allaient se jucher sur les édifices pour fixer la charpente. Certains s’occupaient de la chasse ; ils conservaient le gibier dans la rivière gelée grâce à un trou pratiqué dans la glace. Les Orques étaient toujours attentivement surveillés, et les précautions furent redoublées à cause des loups qui les accompagnaient. Mais ils ne se déplaçaient pas, attendant le printemps en fourbissant leurs armes et en se disputant en permanence à la manière de leur détestable race. * perce-neiges (littéralement « larmes blanches ») Chapitre 9 : Une aide inattendue Vers la fin du mois de février, alors que les nuits commençaient à être moins rudes et que la neige fondait aux heures les plus chaudes, le grand Súlion, fils de Thorondor, se rendit à la cité cachée. L’une des sentinelles qui, situées sur les falaises environnantes, surveillaient les environs, vit à l’est une silhouette sombre fendre l’air en remontant la vallée. Après quelques instants, elle devint plus distincte : c’était un aigle gigantesque, dont le plumage brun prenait des reflets roux dans le soleil. Le guetteur saisit le cor accroché à sa ceinture, le porta à ses lèvres et lança une sonnerie claire qui résonna dans toute la vallée. L’entendant, Elrond quitta son travail et sortit dans la cour. Pendant ce temps, le majestueux oiseau s’était rapproché ; brassant puissamment l’air froid, il fit une fois le tour de Fondcombe, puis se laissa soudain tomber comme une pierre et atterrit juste devant Elrond dans un grand bruissement d’aile. -Bienvenue, seigneur du vent, dit le Semi-Elfe en s’inclinant. Que Manwë protège ton aire et fortifie tes ailes pour te mener vers lui. -C’est à moi de t’accueillir ici, répondit Súlion en le fixant de ses yeux perçants. Mon peuple règne sur ces montagnes depuis des années, et chaque vallon, chaque bois et chaque sommet lui appartiennent. Il était si imposant que, dressé sur le gravier, il n’avait pas besoin de lever la tête pour regarder son interlocuteur. -Mais je te cèderai volontiers cette vallée, reprit-il, car je sais que les Elfes ont toujours combattu Sauron, et que par votre présence les Orques se feront rares dans les Monts Brumeux. Nous ne les aimons pas ; nombre d’entre nous ont été capturés jadis par ces viles créatures, et conduits devant Morgoth qui voulait leur arracher les incantations qui le feraient voler. Mais, devant leur refus, et sur les conseils de Sauron, il leur trancha les ailes, tenta vainement de s’en façonner une paire à son usage et prit notre peuple en haine. Désormais, nous traquons férocement les serviteurs de l’Ombre qui osent s’aventurer dans les montagnes, craignant pour nos vies et pour la liberté de nos petits qui ne volent pas encore. -Nous serons heureux de participer à la protection des tiens, répondit Elrond. Nous nous apprêtons justement à résister à une armée d’Orques qui campe vers l’ouest. Un éclair flamboyant passa dans le regard de l’oiseau, et un frisson de colère ébouriffa son plumage. -Quel est leur nombre ? demanda-t-il d’une voix tranchante. -Environ deux mille. Nous pourrons les combattre, mais sans vivres, nous ne survivrons pas à un siège de la vallée. Les yeux de Súlion se plissèrent jusqu’à n’être plus que deux fentes brillantes. -Vous n’aurez pas besoin de vous battre, dit-il. Nous sommes assez nombreux pour les anéantir. Et Sauron comprendra que ces montagnes demeurent encore le royaume invaincu du peuple de l’air ! -Que nos deux races soient unies, pour résister à l’Ennemi avec plus de forces ! dit Elrond. Vous pourrez compter sur nous pour vous apporter tout le soutien dont vous pourrez avoir besoin. -Qu’il en soit désormais ainsi, et que Manwë en soit le témoin ! répondit Súlion. En disant cela, il se rapprocha du Semi-Elfe en le fixant de ses yeux étincelants. Leurs fronts se frôlèrent, scellant leur alliance à la manière des Aigles. A quelques centimètres du bec terrible, les yeux dans les yeux du puissant oiseau, Elrond restait silencieux, fasciné, osant à peine respirer. Il revoyait en Súlion l’image de son père, celui qui avait jadis protégé les rescapés de Gondolin en flammes, et permis aux Elfes d’enterrer dignement Glorfindel aux cheveux d’or. Puis le grand rapace s’écarta et tourna la tête vers le soleil, qu’il regardait sans sourciller. Il se ramassa sur lui-même, prit son essor et s’éleva dans les airs sous les yeux de tous ceux qui étaient sortis pour recevoir l’étrange visiteur. Il monta de plus en plus haut avant de se diriger vers l’est, le cœur des montagnes, où l’attendait son peuple rassemblé. Alors qu’il s’éloignait, le vent porta aux oreilles des Elfes l’ancestral chant de ralliement des Aigles, datant du règne de Morgoth quand le monde était plus jeune : -O vous, les miens, entendez mon appel ! Vous qui volez plus haut que tout autre et nichez à la cime des orgueilleuses montagnes, écoutez-moi ! Notre peuple est en danger ce soir. L’ennemi s’approche, déjà il est chez nous ; Leurs jets féroces transperceront nos nichées et ils proclameront les montagnes soumises à leur volonté. Cela sera-t-il, ô mon peuple ? Laisserons-nous les Orques prendre possession de nos aires, nous faire périr jusqu’au dernier ? Demain les sources se teindront d’écarlate, Le sang coulera dans les vallées ; Nous vengerons les dépouilles de nos frères. Entendez ma voix ! Venez combattre ! Il est venu, le temps où notre haine se montrera en plein jour ! Chapitre 10 : Construction Les jours suivants, les Elfes continuèrent leur travail acharné. Le beau temps leur permettait d’œuvrer quasiment sans relâche, nuit et jour. Les Elfes travaillaient par roulement : quand un soldat, épuisé, allait prendre un peu de repos, un autre quittait sa couche pour aller le remplacer. A la demande d’Elrond, ils bâtirent une salle en sous-sol, sombre et fraîche ; il ne voulut pas en expliquer la fonction, mais il l’appela la Salle du Feu, et disait que Gil-Galad lui donnerait tout son sens. Il y installa en personne un grand piédestal en bronze, où il disposa du bois, mais refusa que quiconque l’allumât. Les Aigles revinrent souvent à Fondcombe pour transmettre des nouvelles : Súlion avait rassemblé son peuple et ils avaient fondu sur les Orques au milieu de la nuit. Laissant enfin leur haine dévorante se déchaîner, ils n’en laissèrent aucun leur échapper. Quelquefois, le messager amenait sur son dos l’un des siens qui avait besoin du savoir elfique : dans la rudesse de l’hiver tout juste déclinant, de nombreux petits affaiblis étaient tombés malades, ou des oiseaux malmenés par la furie du vent s’étaient blessés en percutant des rochers. Une étrange amitié s’était donc créée entre ces deux races pourtant si orgueilleuses et si lentes à demander de l’aide. Súlion revint une ou deux fois en personne ; il informa les Elfes de l’arrivée prochaine d’une armée orque bien plus importante que la précédente, ayant pour ordre de faire disparaître les restes de l’armée elfique. Mais, menés par un aigle messager de Súlion, Gil-Galad et les forces númenoréennes traversaient l’Eregion en grande hâte pour porter secours à la Cité-Refuge. Malgré tout, les Orques avaient une sérieuse avance sur l’armée des Hommes, contrainte à se frayer un passage dans le pays envahi par les forces de l’Ombre. Les Aiglons se préparèrent donc à accueillir les soldats ennemis : parallèlement à la construction, certains furent affectés à la forge sommaire rapidement mise en place afin d’augmenter le nombre des armes déjà disponibles. Celeborn, qui excellait dans ce domaine, fut chargé d’ordonner leurs tâches, et les Aiglons s’enrichirent de tout son vaste savoir. Et les murs s’élevaient, des salles apparaissaient, et une muraille les ceignit bientôt de ses puissants contreforts ; les Elfes purent rouler leurs tentes et dormir sous un vrai toit. Cela leur apporta un grand soulagement, non seulement pour le confort, mais aussi pour le sentiment de protection que donnaient les murs autour d’eux. Et les jours rallongèrent, la rivière fit enfin entendre son doux gazouillis, et l’armée de Gil-Galad se fit ardemment désirer. Chapitre 11 : La forteresse assiégée Un soir, les Orques se décidèrent enfin à attaquer. Cela faisait plusieurs jours déjà qu’ils se rapprochaient dangereusement de Fondcombe. Ils ignoraient la position exacte de la cité, mais savaient où la précédente armée avait été décimée par les Aigles ; partant de là, ils avaient fait des cercles de plus en plus grands, sous la surveillance vigilante et discrète de Lindir et de ses hommes. Quand les sentinelles estimèrent que les Orques arriveraient à Fondcombe sous quelques heures, elles revinrent à la cité. Une cloche solitaire retentit dans la vallée ; l’entendant, chacun abandonna son activité et se rendit dans la salle où les armes avaient été entreposées. Il n’y avait aucune précipitation ni aucune panique ; malgré les longues années où ils étaient devenus bâtisseurs ou agriculteurs, ils étaient restés des soldats aguerris, rompus au combat, et ils ne craignaient pas d’affronter les Orques. Ils s’armèrent en hâte, s’aidant l’un l’autre à revêtir leurs cuirasses, légères mais solides. Suivant l’usage, chacun l’avait forgée lui-même, pour connaître ainsi parfaitement son poids, sa forme et ses points vulnérables, et faire corps avec elle. Munis de leurs sabres effilés ou de leurs arcs, ils se répartirent sur les murailles selon une disposition longuement pesée et mûrie, et, silencieux et calmes, ils attendirent l’Ennemi. Ils savaient que les Aigles ne viendraient pas cette fois-ci : de l’autre côté des montagnes, ils combattaient pour eux-mêmes face à des trolls qui désiraient s’installer sur les falaises abruptes et les grottes où nichaient les puissants oiseaux. Situé assez en hauteur, à un endroit où il pouvait voir toute son armée et lui donner ses ordres, Elrond aussi était prêt au combat. Il regardait avec fierté les rangées d’armures et de boucliers que la pénombre commençait à cacher à ses yeux. Quel que fût leur destin, il était fier de ses hommes ; courageux et obstinés, ils n’avaient jamais reculé devant les tâches les plus rudes, sans cesser de s’entraider comme des frères. A l’approche d’une mort probable, il aurait voulu les remercier et exprimer la profonde affection qu’il ressentait pour eux ; mais, sachant tout discours inutile, il se contenta de les bénir silencieusement, demandant à Elbereth de veiller sur chacun de ces soldats qu’il avait appris à connaître et à apprécier. Soudain, il vit d’innombrables silhouettes sombres sur la cime qui lui faisait face. Des cris et des hurlements de loup résonnèrent dans la vallée : l’armée des Orques approchait, bien plus nombreuse que la troupe qui avait poursuivi les Elfes dans les montagnes avant d’être décimée par les Aigles. Hors de portée des arcs elfiques, les soldats ennemis descendirent la falaise sans se presser. Malgré leurs torches, le chemin était difficile, car les Aiglons l’avaient recouvert d’une épaisse couche glissante, à base de plantes bouillies, utilisée ordinairement pour graisser les roues des charrettes. Plus d’un Orque trébucha et bascula dans le vide, sous les huées moqueuses de ses camarades. Mais les ennemis étaient nombreux, plus nombreux que les Elfes qui, impassibles, les attendaient. Certains restaient en arrière et installaient de grandes catapultes qu’ils avaient traînées jusqu’à la vallée. D’autres atteignirent le pont ; couverts de leurs boucliers, les plus belliqueux s’élancèrent pour le franchir, sans attendre l’ordre de leurs chefs. Sur un cri d’Elrond, une nuée de flèches traversa l’air en sifflant. Les Elfes visaient juste malgré l’obscurité de la nuit sans lune, et chaque trait avait une précision mortelle. Des dizaines de fois, le sifflement meurtrier se fit entendre. Mais les Orques, en trop grand nombre, progressaient toujours sur le pont et s’approchaient de la porte. Ils se mirent à riposter ; des Elfes tombèrent malgré la protection du parapet, vite remplacés par d’autres combattants. Pendant ce temps, les dernières catapultes avaient été installées, et une pluie de projectiles enflammés fendit le ciel noir comme une traînée d’étoiles filantes. Ils atterrirent au milieu de la cour, éclaboussant d’une lueur rouge les murs des maisons. Bientôt, les arbres qui encerclaient les constructions de pierre se mirent à flamber, et de nombreux Elfes durent s’éloigner de la bataille pour éradiquer l’incendie. La bataille dura longtemps. Les Elfes étaient courageux et adroits, mais les Orques prenaient peu à peu le dessus, possédés par une folie sanguinaire qui leur faisait perdre jusqu’à la peur de la souffrance et de la mort. Ils commencèrent à lancer des échelles d’assaut, mais ce n’était qu’une diversion : plus loin, des soldats martelaient la porte d’un lourd tronc mal équarri, scandant leurs efforts de grands cris guerriers. Vers la fin de la nuit, les soldats ennemis réussirent enfin à fracasser la porte ; et les loups entrèrent dans la bataille. Jusqu’alors, ils s’étaient contentés de pousser leurs cris sauvages, à distance respectueuse des Elfes, laissant les Orques épuiser leurs flèches et se faire tuer en tentant d’arriver à la porte. A présent, l’ardeur de la bataille et l’odeur du sang versé répandaient en leurs veines une sorte de folie irrépressible. En quelques foulées puissantes, une meute hurlante traversa le pont, sautant par-dessus les corps des Orques tués. Elle atteignit la muraille et, jaillissant à travers l’ouverture de la porte défoncée, se jeta sur les Elfes avec une fureur terrible. Les Aiglons se battaient désespérément, emplis d’une rage froide. Ils savaient qu’ils allaient mourir, mais ils tenaient à emporter de nombreux ennemis avec eux. Le ciel pâlissait à l’est, faisant disparaître les étoiles une par une, quand une clameur vibrante déchira l’air froid : -Elenna ! Vers les étoiles ! Chapitre 12 : Les secours Le cœur d’Elrond fit un bond dans sa poitrine. Ce cri de ralliement, c’était son frère qui l’avait poussé pour la première fois, il y avait bien longtemps… Malgré les nombreux loups qui l’assaillaient de toutes parts, le Semi-Elfe prit le temps de jeter un coup d’œil sur le haut de la falaise voisine. Une grande silhouette se détachait du ciel ; surmontée d’un casque à haut cimier, elle brillait de mille feux comme le soleil se levait au-dessus des montagnes. Au-dessus de lui se profila un rapace qui survola la bataille et se dirigea vers l’est à vive allure après un glatissement puissant. C’était l’aigle qui avait guidé Gil-Galad jusqu’à Fondcombe, et à présent il partait en hâte aider les siens de l’autre côté des montagnes. Porté par le vent frais du matin, l’appel clair arriva aux oreilles des soldats assiégés, qui reprirent courage : les renforts arrivaient. -Hardi, Aiglons ! rugit Elrond, soudain galvanisé par la nouvelle situation. Le vent tourne ! Tenez bon ! Fortifiés par cette aide qu’ils n’espéraient plus, les Elfes retrouvèrent alors assez de force pour se débarrasser des loups qui avaient pénétré à l’intérieur des murailles. Leurs ennemis étaient à présent remplis de crainte, voyant la puissance des nouveaux arrivants. Peu désireux de continuer à se battre, ils préféraient chercher le moyen d’échapper aux centaines de petites formes sombres qui descendaient la falaise. Une fois la cité nettoyée de ses assiégeants, Elrond rassembla son armée pour une sortie. Ils passèrent à travers les débris de la porte enfoncée et se battirent au corps à corps avec les Orques. Ils avaient abandonné leurs arcs et leurs javelots pour leurs sabres et leurs dagues aiguisées. Cependant, après un moment de stupeur et de panique générales, l’armée des Orques commença à riposter. Mais, coincée dans des passages étroits où il était difficile de manœuvrer, criblée de flèches du haut de la falaise, elle s’éparpilla bientôt comme elle le pouvait. Les Orques qui réussirent à s’enfuir, descendant jusqu’au torrent et suivant son lit pour sortir de la mortelle vallée, ne furent pas nombreux, mais ils gardèrent le souvenir du lieu de leur défaite et une haine dévorante envers ceux de la Cité-Refuge, ce que Celebrían devrait payer de sa vie. Une fois la bataille achevée, Gil-Galad entra dans la cour de Fondcombe. Les Aiglons étaient en train de transporter les blessés et de brûler les cadavres des ennemis avec l’aide des Hommes; mais, apercevant le Roi, ils se figèrent dans une attitude respectueuse. Gil-Galad les balaya d’un regard bienveillant, puis il leva les yeux vers les bâtiments construits ; il sentit des dizaines de prunelles brillantes de fatigue suivre chacun de ses mouvements, tentant de deviner le jugement du Roi sur leur travail. Son examen fini, il se tourna vers son héraut. Figé dans un impeccable garde-à-vous, aussi couvert de boue et de sang que ses troupes, Elrond le regardait d’un œil malicieux ; connaissant Gil-Galad depuis fort longtemps, il avait déjà compris que la Cité lui plaisait. Le Roi eut un petit rire amusé, se retourna vers les soldats et cria : « Rompez ! » Les visages se détendirent soudain, et les Elfes se remirent à leurs tâches. Gil-Galad se dirigea vers Elrond. Ils se donnèrent l’accolade, Elrond posant son front sur l’épaule de son roi en signe d’allégeance, puis, cheminant à travers le champ de bataille, ils évaluèrent rapidement leurs pertes et celles de l’Ennemi. La Salle Commune fut utilisée pour installer les blessés. Gil-Galad lui-même vint mettre ses compétences à leur service, ce qui suscita l’étonnement et l’admiration chez ceux qui le connaissaient mal, car il n’hésitait pas à rendre les plus humbles services comme un simple soldat. Malgré le prestige dont il était entouré, encore ravivé par les histoires que se racontaient les blessés d’une couche à l’autre, il eut assez de sagesse et de volonté pour laisser Elrond diriger Fondcombe à sa guise. Hommes et Elfes, ils avaient été nombreux à tomber dans l’ardeur de l’assaut, en particulier lors de l’attaque des loups. Mais si l’Histoire n’a pas retenu leur nom, chacun fut pleuré et présenté devant Mandos lors des chants du deuil. Morts aussi, Limtal l’Ardent et Sadorhen le Poète, compagnons fidèles et sûrs de l’armée de Mithlond. Ils furent enterrés avec maintes lamentations au pied de l’une des falaises qui bordait la vallée fertile, tout près de l’endroit où Yavanna avait effleuré la terre. Ce lieu accueillit plus tard la dépouille des Dúnedain qui avaient souhaité y reposer, comme Arathorn, le père d’Aragorn Elessar. Là où Elrond l’avait vue danser, les Elfes plantèrent un pêcher, l’arbre préféré de la Reine de la Terre. Il croissa rapidement et porta de beaux fruits ; et ses fleurs, en tombant, blanchirent les tombeaux qui l’entouraient. Grâce aux nombreux bras supplémentaires, la réparation des bâtiments et la fin de l’installation furent rapides. Les Aiglons comprirent enfin le rôle de la Salle du Feu quand Gil-Galad s’y rendit un matin. Murmurant une chanson lente et profonde, il alluma lui-même le haut foyer, qui flamba bientôt en crépitant joyeusement. Le Roi se releva et parcourut du regard les visages qui l’entouraient. Seul Elrond souriait, conscient de l’importance de l’acte accompli. -Le pouvoir du feu, dit enfin Gil-Galad, est de redonner courage et lucidité à ceux qui le désirent. Ici demeurera un peu du pouvoir de Narya, l’anneau du feu que je porte, afin qu’Imladris soit endurante dans l’épreuve. Il passa soudain la main sur son visage, comme si une force l’avait quitté, puis quitta la salle. En juillet, malgré des semailles tardives, il y eut la première moisson, issue du blé emporté dans les provisions des Númenoréens. Ce fut l’occasion de grandes festivités en l’honneur de Yavanna ; et ce le fut dorénavant à chaque récolte, pour perpétrer le souvenir de la Reine de la Terre rendant fertile tout ce que son pied si léger effleurait durant sa danse. Chapitre 13 : Réflexions Elrond referma le vieux livre avec un sourire de satisfaction. Ils avaient bien œuvré, ses Aiglons, abandonnant leur vie de soldats pour devenir maçons, menuisiers, agriculteurs ! Au début, la bruyante cité d’Eglarest leur avait manqué ; et puis, à mesure que passaient les mois, ils avaient appris à aimer la montagne et sa rude beauté, l'austérité de ses roches brunes et l’éclat coloré des fleurs qui s’y accrochaient dans un sursaut de vie. Mais ils regrettaient encore tous une chose : la Mer. Dans cette profonde vallée où le regard était immédiatement stoppé par les montagnes, il leur restait au cœur un âpre désir de laisser leurs yeux scruter l’horizon lointain et contempler les douces couleurs de l’océan. Alors, quand la nostalgie était trop forte, quelques-uns des soldats repartaient vers l’ouest ; ils demeuraient quelques semaines, faisaient leur rapport au Roi et passaient quelques jours à Mithlond. Puis ils revenaient à Imladris, où était leur place, chargés de cadeaux de la part de Gil-Galad et de leurs amis. Aucun, cependant, ne prenait le bateau pour Valinor, car ils savaient avoir encore un rôle en Terre du Milieu. Elrond se leva et s’approcha de la fenêtre. Un léger courant d’air lui effleura le visage. La température diminuait progressivement, annonçant l’arrivée du soir. Le plateau où avait commencé l’établissement de leur cité s’était rapidement révélé trop petit, et il avait fallu s’adapter au terrain pentu pour agrandir leur demeure. En cela, Lindir avait fait des merveilles, et Fondcombe était désormais un lieu paisible et agréable, où il faisait bon se promener le soir à travers les jardins parfumés. Une partie du cours d’eau avait été habilement détournée pour venir alimenter un petit moulin, où on amenait le grain venant de Faëltum*. La première bouchée de pain doré fut pour Elrond, tremblant de joie et de fierté ; à ses yeux, c’était le signe que la Cité-Refuge était à l’abri de la famine, ne dépendait plus de Mithlond pour la nourriture, et pourrait résister à un siège ! L’attaque d’Imladris n’avait pas scellé l’arrêt de la guerre contre l’Ombre ; les Elfes et les Hommes s’étaient encore battus pendant deux ans avant de remporter la victoire. Acculé par la puissante armée de Númenor, Sauron s’était réfugié au Mordor avec les débris de son armée, où il était demeuré de nombreuses années, trop affaibli encore pour inquiéter les peuples libres de la Terre du Milieu. Après la défaite de l’Ombre, des Elfes avaient fait venir à Fondcombe leurs femmes et leurs enfants ; certains même, comme Inglor, s’étaient mariés dans la grande pièce claire qui servait aux cérémonies et aux festivités. La Cité-Refuge avait également accueilli Galadriel, l’épouse de Celeborn, et sa fille Celebrían. Elles étaient demeurées en Lorinand en attendant la fin des troubles de l’autre côté des montagnes, puis étaient parties à la recherche de Celeborn. Et bien qu’il n’en soufflât mot à personne, il se prit à aimer la gracieuse demoiselle. A cette époque avait eu lieu le Premier Conseil, en présence de Gil-Galad et de tous les Elfes vivant à Imladris. Il fut alors connu que Galadriel détenait Nenya, le troisième anneau des Elfes. Le Roi remit Vilya à Elrond pour l’aider à maintenir la place forte que représentait Fondcombe, et l’institua son vice-régent en Eriador. Puis il repartit à Eglarest avec ceux qui le désiraient ; mais beaucoup voulurent rester, car ils considéraient désormais comme leur demeure la cité qu’ils avaient construite de leurs propres mains. Imladris devint alors un puissant îlot de résistance face au mal qui croissait à nouveau, et un lieu d’aide pour tous ceux qui combattaient l’Ombre du Mordor. Et celle-ci grandissait de jour en jour : on racontait que d’étranges spectres, portant chacun une bague au doigt, parcouraient la Terre du Milieu pour le compte de leur maître Sauron. Celui-ci avait corrompu les hommes de Númenor qui, dans leur fol orgueil, avaient été anéantis par Eru lui-même dans un grand cataclysme engloutissant à jamais la belle île d’Andor. Elrond soupira : il savait que la vie heureuse de Fondcombe ne pourrait durer plus longtemps. Le mal qui grondait devait être contenu ; en compagnie de Gil-Galad, le Semi-Elfe allait reformer une armée et marcher sur le Mordor. Le Grand Roi avait reçu l’aide des hommes d’Arnor, menés par Elendil, dans une Ultime Alliance entre les deux races. Le prince Isildur s’était enfui au nord après la prise de Minas Ithil par Sauron, tandis que son frère Anárion défendait tant bien que mal Minas Anor et la ville d’Osgiliath. Il fallait agir très vite pour empêcher Sauron de détruire les peuples libres les uns après les autres. Elendil demeurait Imladris depuis trois mois déjà ; et, après bien des jours d’errance et de danger, son fils Isildur avait fini par le rejoindre, accompagné de sa femme et de ses quatre fils. Elrond parcourut la salle du regard. De nombreuses années s’étaient écoulées depuis la fondation de Fondcombe, mais ses Elfes avaient gardé intacts leur force et leur valeur au combat, traquant les Orques qui habitaient encore les montagnes ou luttant entre eux par simple plaisir. Ils avaient passé plusieurs jours à préparer leurs affaires, fourbir leurs armes et vérifier la solidité de leurs armures ; ils avaient par surcroît renforcé les murs de la Cité-Refuge durant leur réparation annuelle. A présent, ils profitaient du calme de la brûlante journée d’été pour être en famille ou se divertir. Ils allaient repartir avec leur chef, mais pas tous : le regard d’Elrond se posa sur Erestor qui, penché sur un bois de lit, sculptait adroitement son dossier en un grillage de fines tiges au bout desquelles s’épanouissaient des fleurs délicates. Pour tout son travail, il ne se fiait plus qu’à ses mains ; durant le siège d’Imladris, un projectile enflammé était passé trop près de son visage, le privant de l’usage de ses yeux, et tout l’art de la médecine elfique n’avait pas été suffisant pour lui rendre la vue. Au début, il avait peiné à accepter son infirmité ; ses amis s’étaient discrètement relayés dans la Salle du Feu, implorant les Valar de lui accorder la paix. Puis, un matin, sans signe avant-coureur, il retrouva d’un coup la joie et la bonne humeur qui le caractérisaient auparavant. Personne ne put expliquer ce brusque changement, et il resta silencieux là-dessus ; mais quelquefois, quand la nuit était belle ou le jour particulièrement réjouissant, on le voyait suivre des yeux, une joie ineffable illuminant son visage, quelque chose d’invisible qui se déplaçait dans le jardin. Quand la chose passait près de lui, il s’inclinait respectueusement, puis retournait à ses occupations, tout empreint d’une sérénité contagieuse. On le soupçonnait de voir les « dieux d’au-delà de la Mer »- les Valar, qui se rendaient discrètement à Imladris. Il avait conservé sa passion pour le travail du bois, qu’il effectuait toujours avec une habileté merveilleuse. Durant la guerre au Mordor, il allait demeurer à Fondcombe ; son excellente connaissance des lieux et sa mémoire étonnante lui permettrait de remplacer Elrond jusqu’à son retour, car Celeborn, qui ne partait pas non plus, refusait de tenir ce rôle malgré son haut rang et sa sagesse. Elrond en était là dans sa réflexion quand Erestor releva soudain la tête et dit joyeusement : « Gil-Galad arrive ! » Au bout de quelques instants, en effet, tous purent entendre le galop d’un cheval résonnant sur le sol rocheux. Ils se levèrent et descendirent en hâte jusqu’à la cour rougie par les premiers rayons du crépuscule, heureux de voir leur roi et impatients d’entendre ce qu’il avait à leur dire. Gil-Galad traversa le pont étroit puis entra dans la cour en passant sous un large porche. « Gloire à notre roi ! Qu’Elbereth te garde ! » Au milieu des cris de bienvenue, il descendit de cheval et salua le maître des lieux et ses nobles hôtes. Il était très grand, revêtu de son armure étincelante marquetée d’étoiles d’argent, et de son manteau bleu, couleur de Manwë, symbole de son autorité. Il était empli de vigueur et de sagesse, mais la bonté se lisait dans ses yeux, et il restait accessible à tous ceux qui désiraient venir à lui. Il tint à saluer tous ceux qui habitaient la Cité-Refuge, puis il se plaça sur le seuil de la maison aux côtés de son hôte : -Je suis heureux de vous retrouver tous ! La route est longue jusqu’ici, mais son souvenir s’efface déjà à revoir enfin tous vos visages. Je n’apporte pas de bonnes nouvelles : l’Ennemi est puissant à nouveau, et la bataille sera rude. Bien des nôtres tomberont avant la destruction de l’Ombre. Mais nous parlerons de ceci demain ; ce soir, nous fêtons le Mitan de l’année, en l’honneur d’Elbereth qui plaça au ciel ses précieux joyaux pour notre joie ! Il entra alors dans la maison, toute illuminée pour la fête. Elrond le conduisit à sa chambre, une belle pièce calme que le Roi affectionnait particulièrement. -As-tu fait un bon voyage, mon Seigneur ? demanda une servante en lui apportant une bassine d’eau fraîche. -J’ai voyagé surtout de nuit à cause de la chaleur, répondit Gil-Galad. Mais aujourd’hui, j’étais si impatient d’arriver que je n’ai pas attendu la fraîcheur du soir. Sois mille fois bénie ! Je rêve depuis ce matin de me rafraîchir le visage. Ce qu’il fit aussitôt, avec un soupir de satisfaction, sous le regard amusé de la servante. Elrond et Gil-Galad se retrouvèrent seuls un moment ; le Semi-Elfe semblait anxieux. Le Roi lui posa la main sur l’épaule. -Voici mon seul et unique ordre de la journée. Tu vas tâcher d’oublier tes soucis pour profiter pleinement de cette soirée. Nous parlerons sérieusement plus tard. D’accord ? -Oui, mon Roi. Je ferai de mon mieux, répondit Elrond en essayant de sourire. Gil-Galad lui tapota l’épaule. -Bien. Allons dîner. Il y eut un grand repas et de nombreux chants s’élevèrent. Quand ils le désiraient, les Elfes avaient la capacité de goûter l’instant présent en oubliant l’obscur avenir; le festin fut donc long, agréable et sans arrière-pensées. Par son ascendance humaine, Elrond peina au début à partager la joie ambiante ; mais il sourit bientôt aux plaisanteries d’Erestor, qui faiait tout son possible à dissiper l’idée du départ prochain. Gil-Galad raconta ses errances à travers l’Eriador, à la recherche des Elfes qui vivaient disséminés dans le pays. Il déclencha de nombreux rires en relatant sa rencontre avec Tom Bombadil, l’étrange et gai luron qui gambadait dans la forêt à longueur de journée, et de sa belle femme Baie d’Or, dont la voix se mêlait au bruissement des sources quand elle chantait. Des rires et des chants résonnèrent jusque fort tard dans la nuit, puis les Elfes se dispersèrent, qui vers sa chambre en quête d’un peu de repos avant le retour du soleil, qui dans la salle du Feu. Certains restèrent un peu partout à discuter par petits groupes. Gil-galad partit dans les jardins en compagnie d’Elrond. *Faeltum : vallée généreuse, fertile Chapitre 14 : La paix du soir C’était l’heure très douce où le jour cède le pas à la nuit, quand les premières étoiles commencent à tapisser la voûte de saphir et les fleurs à exhaler leurs fragrances les plus délicates. La rivière faisait bruire les roseaux qui la bordaient ; les chouettes encore mal réveillées s’élançaient de leur vol feutré. Après l’écrasante chaleur de la journée, le calme du soir donnait envie de courir à travers les jardins parfumés et de s’enivrer de l’air frais et pur des montagnes. Ils cheminèrent un instant en silence, jusqu’au moment où ils n’entendirent plus les échos de la fête ; la quiétude de la nuit les entoura alors, dans l’heure propice aux confidences et à la réflexion. Ils étaient arrivés sur une terrasse surplombant les rives du torrent. Une partie du cours d’eau avait été détournée pour alimenter une fontaine sculptée sous la forme d’un cygne prenant son essor. Gil-Galad semblait étrangement changé. Elrond aperçut soudain ses traits tirés de fatigue et la poussière qui couvrait son manteau. Le prestige de son arrivée l’avait quitté ; il était redevenu un simple Elfe, avec ses soucis et ses limites, et n’était plus le grand roi inébranlable que son peuple imaginait. Il s’assit au bord de la fontaine, se mouilla le visage et but une gorgée d’eau claire au creux de sa main. Une fois rafraîchi, il regarda le Semi-Elfe d’un air grave : -Combien de soldats peux-tu emmener avec toi ? lui demanda-t-il. -Nous sommes 300 ici, répondit Elrond, et des Elfes rescapés de la Moria sont arrivés la semaine dernière, après une longue errance dans les montagnes : 200 bons archers. Et le roi Oropher de la Forêt Noire en promet 5000 qui nous rejoindront à Carrock. -1500 Nains des Montagnes de Fer nous attendrons à Dagorlad, ajouta le roi. Une armée est partie d’Annuminas il y a 2 jours, formée d’Elfes et d’Hommes, et menée par Círdan. Les Hommes ont beaucoup contribué à grossir les rangs, car ils sont nombreux et bien armés. Quand serez-vous prêts à partir ? -En deux heures, nous pouvons charger les chevaux et te suivre. Tout a été préparé depuis longtemps. -Nous nous accorderons encore trois jours de répit, puis nous rejoindrons l’armée d’Annuminas au col de Rubicorne. Un rire clair comme un grelot s’éleva soudain dans l’air parfumé. En contrebas, près du torrent, Celebrían jouait avec Valandil fils d’Isildur, et Gildor, l’aîné d’Inglor et de sa femme Mirka. Ils la pourchassaient avec de grands cris d’amusement, et, alors qu’ils tendaient la main pour saisir le pan de son habit, elle se dérobait à eux et courait, svelte et légère, à travers les arbres en fleurs, répandant partout son rire argentin. Sa splendide chevelure dorée scintillait dans la lumière de la lune. Elle laissa finalement les enfants la rejoindre et se cramponner à sa robe dans une cascade de rires. Ils partirent en courant, la laissant marcher en arrière. Elle leva les yeux vers Gil-Galad et Elrond, eut un signe de tête pour le premier et s’attarda avec un sourire sur le deuxième, puis continua son chemin, souple et silencieuse comme une ombre. Elrond s’accouda à la barrière qui bordait la terrasse et ne put s’empêcher de soupirer. Trois jours ! Dans trois jours, il lui faudrait quitter ce havre de paix et de bonheur, où il avait élaboré tant de projets ! Mais il lui fallait y renoncer, au moins momentanément, car le destin de la Terre du Milieu allait être scellé aux portes du Mordor. Tout en songeant, il suivit d’un regard brillant la gracieuse silhouette qui disparaissait dans la pénombre. Comme pour lui-même, il murmura : -Ma place est au Pays Noir. Je me battrai aux côtés des peuples libres ; mais plût aux Valar que je revienne ici ! Gil-Galad l’avait observé sans rien dire. Il ne lui avait pas fallu beaucoup de temps pour comprendre le lien qui unissait les deux Elfes. Il pressentait que beaucoup allaient mourir à la guerre, et que bien des familles entonneraient le chant du deuil. Il était en son pouvoir de laisser son peuple dans la quiétude heureuse où il l’avait trouvé; mais il fallait tout faire pour éradiquer le mal qui s’étendait, et chaque soldat était nécessaire dans cette lutte. Il laissa son regard errer dans le firmament d’un bleu profond, puis dit soudain d’une voix étrange : -Vois, Elrond ! L’ombre n’est que temporaire. Elbereth elle-même a placé dans le ciel le signe de la victoire de la lumière ! Etonné, le Semi-Elfe suivit son regard : devant eux brillait la faucille des Valar, le symbole de défi qu’ils avaient donné à Morgoth quand la Terre était jeune. Sa vue les apaisa ; quel que fût leur destin, ils savaient qui gagnerait le combat final ! Ils restèrent longtemps silencieux, l’un à côté de l’autre, se laissant emplir d’espérance par la forme scintillante qui ornait le ciel ; puis ils se détournèrent et retournèrent vers la maison. Chapitre 15 : Adieux à la Cité cachée Le temps s’écoula trop vite. Peu à peu, l’atmosphère changea, comme si chacun était anxieux de profiter de tous les instants, mais déjà angoissé d’ignorer s’il les revivrait jamais. Le dernier soir, après la traditionnelle veillée durant laquelle les Elfes implorèrent les Valar (et en particulier Tulkas), chacun alla rassembler ses affaires pour partir dès l’aube. Elrond, qui avait déjà fait ses préparatifs, s’échappa dans les jardins ; il traversa une allée de bouleaux, descendit un petit sentier pavé et se retrouva à l’entrée d’une vaste pelouse. La pleine lune déposait des gouttes argentées sur les feuilles de rosiers entourant l’espace sans arbres. Un cerisier poussait à son centre, projetant sur le sol son ombre étrange. C’est là que Celebrían et Elrond se rencontrèrent pour se dire adieu. Peu de paroles furent prononcées, car ce qu’ils portaient en eux dépassait tous les mots ; mais ils restèrent longtemps l’un devant l’autre, se tenant les mains et se contemplant l’un l’autre. Ils s’échangèrent un anneau doré, qu’ils mirent à l’index droit, promesse de leur prochaine union par le mariage, dès le retour du Semi-Elfe. Le lendemain, alors que les premiers rayons du soleil commençaient juste à dorer les beaux bâtiments de Fondcombe, l’armée de Gil-galad se rassembla dans la cour. Elendil et Isildur, déjà en selle, semblaient impatients de rejoindre leur armée. Les adieux furent rapides, car ils avaient déjà été faits la veille ou dans la nuit, puis les soldats s’engagèrent l’un après l’autre sur le pont et le chemin qui menaient hors de la vallée. Ils avaient fière allure : leurs cuirasses étincelaient dans les feux de l’aurore, leurs fougueux étalons piaffaient d’impatience, et il semblait qu’aucune ombre ne pourrait les vaincre. Pourtant, leurs visages étaient sombres et empreints de cette étrange résignation des soldats qui partent à la guerre sans savoir s’ils reverraient un jour leur maison et leur famille. Le Roi et son héraut sortirent en dernier de la maison, après un long entretien avec le Seigneur et la Dame. Malgré l’émotion du départ, ceux qui les virent arriver ne purent s’empêcher de sourire, car, en bons militaires, ils réglaient inconsciemment leur allure pour marcher au même pas. A la suite de son souverain, Elrond salua tous ceux qui restaient ; il se contenta de s’incliner devant Celebrían en la regardant intensément, comme pour graver en sa mémoire ce visage tant aimé. Emplie d’émoi, elle demeura silencieuse, mais ses yeux brillants lui criaient : « Reviens ! » Arrivé à Erestor, ils se donnèrent l’accolade, puis l’Elfe aveugle le fixa de ses deux prunelles sans vie - Elrond se demandait toujours comment il faisait cela- et lui dit : « Tu reviendras, car tu ne vis plus seulement pour toi-même. » Et, à tâtons, sa main effleura l’anneau d’or qu’Elrond portait au doigt. Puis le Semi-Elfe monta sur son cheval, vint se placer aux côtés de Gil-Galad en queue de cortège et brandit l’étendard royal, trois étoiles brillant dans un ciel d’azur. Tandis qu’ils s’éloignaient de leur demeure, les soldats entonnèrent un chant de marche pour masquer leur tristesse ; mais beaucoup se retournèrent encore pour un dernier adieu à leur cité. Celebrían les regarda partir, se demandant si sa vie aurait encore un sens si Elrond ne revenait pas. Et près d’elle se serra Nyamar, la jeune épouse d’Isildur, assaillie par les mêmes pensées. Les deux femmes restèrent dehors jusqu’à ce que les chants s’éteignent au loin ; puis, soudainement étreintes par un vent froid, elles rentrèrent dans la maison, la fragile humaine appuyée contre l’Elfe élancée. Il leur fallait désormais vivre avec leurs occupations quotidiennes, tourner leurs pensées vers des soucis plus matériels ; mais jamais l’anneau que chacune portait à son doigt n’eut autant de valeur pour elles. RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 23.06.2008 J'aime ! Ton style pour décrire l'espoir et la peur des elfes permet vraiment de s'identifier a eux, on comprend leur affection pour Fondcombe et leur vie paisible et heureuse. Tu es sure de vouloir t'arreter si tot ? (ben oui, quoi, la guerre va commencer !!! ) Un seul détail me chiffone pour l'instant, le fait que Cirdan soit partit avec une armée d'Annuminas, alors qu'il est dit que : - Celui ci devait garder l'anneau de Gil Galad lorsque le grand roi partit en guerre, ce qui peut laisser supposer qu'il restait lui meme aux havres... - On dit qu'Elendil attendit l'arrivée de Gil Galad et son armée du haut des tours de l'Amon Hen (me semble t'il), on comprend donc mal ce qu'il fait a Imladris (a moins qu'il ai fait un sacré détour...) L'armée elfe va t'elle marcher vers l'ouest pour rejoindre le chemin vert ? RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 25.06.2008 Merci pour tes remarques, je vais tenter d'y répondre. Lors du Conseil d'Elrond, le Semi-Elfe raconte que Cirdan et lui ont tenté de dissuader Isildur de garder l'Anneau. Cela signifie donc que Cirdan était également au Mordor. Et puis, si le rôle de Cirdan était de garder Narya en sécurité, Elrond ne serait pas non plus parti, lui qui gardait Vilya... Je pense que Gil-Galad se doutait plus ou moins qu'il allait mourir, et voulait donc confier ses anneaux à ses amis avant. Mais là, je m'avance peut-être un peu. Ensuite, Tolkien dit quelque part (dans le Silmarillion, je crois) que Gil-Galad et Elendil ont parcouru tout l'Eriador pour rassembler une armée, avant de se rendre à Imladris. Dans cette chronologie, logiquement, leur armée devrait s'y rendre avec eux; mais quel désordre! Des centaines de soldats à devoir héberger au pied levé! Alors j'émets l'hypothèse que l'armée les rejoindra au Col de Rubicorne, menée à la fois par Cirdan ET par Elendil (ce que j'ai oublié de mettre dans le texte). Mais Elendil devrait peut-être faire seul un détour à Fondcombe, en compagnie de Gil-Galad... c'est ce que j'avais fait dans un brouillon précédent, mais ça me semblait bizarre qu'Elendil laisse son armée sans chef. Voilà, en gros, j'ai un peu cafouillé, mais je voulais coller le plus possible à l'histoire de Tolkien, ce qui n'a pas été simple. Hem... le mot "Fin" est officiel (ce qui n'exclut pas de nombreuses modifications encore possibles!). L'histoire suivante démarre après la guerre, car je ne sais vraiment pas comment l'écrire. Mais si quelqu'un veut se lancer, ce serait chouette... RE: Devoir de vacances... - Imrahil - 30.06.2008 Je viens tout juste de relire le silmarillon et j'ai trouvé un détail susceptible de t'intéresser : En effet tu as raison Elendil et Gil Galad sont passés a Imladris avant de partir vers la guerre mais ils étaient accompagnés d'Isildur, ce dernier avait fuit Minas Ithil lors de son assaut, puis était remonté vers le nord sur la mer afin de solliciter son père de l'aider lui et son frère contre Sauron. De même Isildur a du débarquer avec toute sa petite famille puisqu'il est dit plus tard, après le massacre des champs aux Iris, que ses trois fils ainés moururent avec lui mais que celui ci "avait laissé a Imladris sa femme et Valandil, son plus jeune fils, quand il était partit pour la guerre". Voila, a toi de jouer maintenant RE: Devoir de vacances... - Tinakë - 05.07.2008 Ah? J'avais oublié qu'Isildur venait aussi... Mais c'est vrai que cela semble bizarre que Gil-Galad passe à Imladris, en laissant Elendil et sa famille camper sous la tente avec leurs soldats! A vrai dire, dans une version précédente, Elendil apparaissait aux côtés de Gil-Galad; mais je trouvais cela plus facile et intéressant que seul le Roi des Elfes vienne, cela permet de bien parler de lui, seul nouveau personnage arrivant dans le texte. Mais c'est vrai que j'ignore un peu ce que dit Tolkien sur ce passage. Et puis, si Elendil venait, il faudrait lui dénicher un manteau elfique pour résister à la chaleur A ce moment-là, je vais peut-être dire qu'Elendil est déjà à Imladris avec ses proches, ce qui permet d'éviter de raconter leur arrivée. Je ne sais pas si je suis très claire... |