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Telle jumelle, tel jumeau
#9
J'ai pu avoir des nouvelles plus précises sur cette histoire. Mon frère bien-aimé a pour projet d'écrire trois histoires qui se suivent, dont celle-ci est la première. Et il y aura en plus des anecdotes à rajouter, des poèmes... Il m'a légué tout un dossier d'écrits, plus ou moins dans l'ordre, sans compter les brouillons, les anciennes versions... Je me sens comme Christopher Tolkien devant les écrits de son père!!

Et ce qui explique le rythme du texte, c'est qu'il se veut d'abord une réflexion "philosophique" sur les Elfes, et pas un roman d'action.

Voici toujours la suite... et merci pour toutes vos remarques!

Quand je me réveillai, j’étais calme et serein, allongé dans une étrange couverture, soyeuse au toucher, légère et d’une couleur indéfinissable entre le gris et le vert. Je regardai autour de moi ; j’aperçus tout d’abord deux êtres, situés trop loin de moi pour que je puisse clairement les distinguer, s’éloignant doucement. Leurs tenues vestimentaires que je pouvais percevoir n’avaient rien d’orque (de toute façon, ces derniers ne font que rarement des prisonniers, et ne les allongent pas sur des lits…).
Tournant la tête, j’aperçus mon ami assis auprès de moi. Heureux de me voir réveillé, il se rapprocha de moi avec un sourire, m’apprit le lieu où nous étions et me fit part de ses observations sur les Elfes, habitants de cette forêt. Etant arrivé un soir, j’avais dormi pendant presque deux jours pour enfin me réveiller vers midi. J’avais été soigné par le savoir de mes sauveurs. J’étais surpris de retrouver cet ami, et heureux de ne pas être seul sur ce territoire inconnu. Nous étions tous deux dans un endroit déboisé, et pourtant la voûte des arbres environnant nous couvrait. Les arbres, inconnus dans nos régions et dont la taille était démesurée, étaient pour certains parcourus de traits lumineux, signe d’un soleil éclatant au-dessus de nous. Je vis mon armure déposée près de mon lit ; elle était propre, mais toujours très abîmée. Plus loin étaient entassées toutes mes modestes affaires (constituées principalement d’une couverture, de provisions et de la selle de mon cheval…). A part une légère douleur à la tête, je me trouvais dans une assez bonne forme physique, et je ne portais d’ailleurs aucune trace visible de mes blessures.
Je décidai donc de tenter de me lever, ce que mon ami n’encouragea pas, préférant attendre un ordre d’un de ces êtres de la forêt. Il semblait encore plus craintif que moi, et comme son épée n’était plus à sa ceinture, on sentait qu’il restait d’autant plus sur ses gardes.

Et soudain, sortant de l’ombre des grands arbres, apparut devant nous une Elfe, belle et gracieuse. Elle était toute enveloppée de blanc et d’argenté, et à son front brillait un diadème éclatant aux reflets bleutés. Son visage était lumineux, et ses cheveux d’or reflétaient par endroit le soleil. Ces mêmes reflets se voyaient aussi sur son visage, et lui offraient un certain éclat supplémentaire. Ses yeux semblaient étrangement fermes, mais pourtant doux également ; ils étaient tristes mais pleins de bonté. On pesait dans ces mêmes yeux tout le temps qu’elle avait passé sur cette terre. Il ne manquait qu’une chose pour un visage parfait : en effet, ses lèvres ne souriaient pas, et semblaient simplement ne refléter que la lassitude et la tristesse, qui au fil du temps s’étaient accumulées et avaient pris progressivement possession de cet être. Elle avait un air presque dur, mais ces yeux nous rappelaient sans cesse la profonde paix qui régnait maintenant dans ce lieu. Il nous était difficile de traduire les sentiments qu’elle pouvait ressentir. En effet, comme tous ceux de sa race me semble-t-il, elle ne laissait percevoir qu’une seule expression, celle de la tristesse, peut-être même de la lassitude du temps qui passe, dure et se fait long…
Elle nous intriguait tous deux.
La lenteur de ses pas et le calme de sa progression sur l’herbe et sur les fleurs qui recouvraient le sol nous rassérénaient quelque peu.

S’étant rapprochée de nous, elle parla ainsi :
« Bienvenue à vous,
Oh ! nobles étrangers ;
Vous êtes ici chez vous,
Soyez nos invités. »

S’adressant à moi elle prit ainsi la parole :
« J’ai pansé vos blessures,
Vous me semblez bien mieux ;
Restez sans votre armure,
Vous reposer un peu. »

Elle se tourna ensuite vers Milthonar :
« Quant à vous son ami,
Depuis votre arrivée,
Avez veillé sur lui,
Sans craindre enfin soyez. »

Comme elle nous parlait pour la première fois, je fus heureusement surpris de l’entendre en Langage Commun, ne pensant pas que ces êtres, tellement différents de nous à première vue, puissent, si loin des autres peuples, connaître cette langue. Admiratif de ces paroles magnifiques, bien que parfois in explicites, je tentai une question, désireux de savoir si cette belle dame était la reine de cette forêt. Elle sembla rire intérieurement de ma question avant de nous répondre quelle n’était auparavant qu’une servante de la gardienne de la Lothlorien. Devant nos airs d’incompréhension, elle reprit alors en ces termes :

« Ma Maîtresse n’est plus là, elle a quitté ces Terres,
Elle a rejoint les siens au-delà de la Mer.
D’abandonner ces lieux, il était temps pour elle,
De repartir là-bas vers une terre nouvelle. »

Tous ses mouvements étaient calmes et lents, presque doux. Et sa voix chantante, mélodieuse et pleine de tendresse, nous permettait tous deux de rêver à un lieu lointain, et de nous abandonner à une terre calme, remplie de paix et d’amour. A elle seule, cette Elfe nous présentait toute l’élégance et l’aspiration de sa race … Elle était jeune, mais semblait pourtant avoir vécu tous les âges, et avoir parcouru bien plus de dix vies d’homme.
Sans nous laisser le temps de poser d’autres questions, elle reprit :

« Demeurez quelques temps
En ces lieux de repos ;
Surtout profitez-en,
Vous partirez bientôt. »

Ces quelques paroles nous troublèrent encore un peu plus. Nous devions profiter de cette forêt tout en étant prêts à partir. Même si la crainte nous quittait peu à peu, nous ne savions que faire de nos journées dans cette forêt étrange.
Elle inclina légèrement la tête puis nous quitta de son pas lent, nous laissant seuls. J’aurais aimé la suivre pour connaître ce peuple qui m’intriguait de plus en plus. Néanmoins, ne connaissant aucune de leurs coutumes, j’aurais probablement été très rapidement chassé d’ici. Mon ami à mes côtés semblait ne plus être inquiet. Il respirait l’air de cette forêt, tournant sur lui-même pour admirer la végétation.
Quelques instants plus tard, sans aucun échange entre nous, mon ami et moi partîmes ensemble profiter de cette forêt. J’étais tiraillé entre l’espoir d’apercevoir à nouveau quelques-uns de mes sauveurs, et la crainte que j’éprouvais à leur égard qui me forçait à espérer que nous pourrions nous promener seuls.

Cette forêt magnifique nous offrait tous deux matière à réflexion. Elle paraissait infinie et immortelle. Pendant le jour, il y avait continuellement des bruits d’oiseaux que nous ne pouvions voir, tout comme les cors que nous entendions et qui semblaient se répondre. Tout en admirant les grands arbres que le temps avait recouverts de mousse, nous aperçûmes quelques Elfes de loin. C’était la première fois qu’il m’était donné d’observer des Elfes. Ils ne semblaient pas si différents de nous vus de l’extérieur, bien qu’étant légèrement plus grands en moyenne, et possédant des oreilles pointues. Ils s’éloignaient cependant de nous dans toutes leurs occupations journalières, du moins toutes celles que je vis. Rêvant ou méditant sans cesse, je n’en vis aucun effectuer le moindre travail manuel ou agricole. Ils semblaient toujours être loin de tout ce qui les entourait. Ils étaient très étranges. Leurs pas étaient légers, comme s’ils ne faisaient que frôler l’herbe. De plus, ils ne dormaient jamais, et semblaient simplement s’assoupir et rêver les yeux ouverts. De quoi rêvent-ils ?…

Le soir venu, alors que nous nous apprêtions à nous étendre dans nos couvertures pour passer la nuit, mon ami me fit part de son opinion sur ce peuple : les Elfes étaient renfermés sur eux-même personnellement et pourtant certains étaient un peu accueillants, bien qu’on ne puisse parler d’accueil chaleureux ou de courtoisie au sens où nous l’entendions nous. Il n’y avait chez eux en quelque sorte qu’une tolérance bienveillante. La nuit ne suffit pas à élucider chaque mystère de ce peuple, dont je ne me souciais aucunement il y a encore peu de temps. Le matin venu, après un réveil des plus silencieux, nous vîmes deux Elfes nous offrir une sorte de pain blanc dans de larges feuilles. N’osant dire un mot, nous ne fîmes qu’un sourire. Après une légère inclination, ces deux Elfes repartirent d’un air lointain. Comme tous ceux de leur race, on ne saurait distinguer s’ils vivaient dans leur long passé, ou s’ils avaient déjà les yeux tournés vers le futur. Après un frugal petit déjeuner (mais suffisant, car nous n’éprouvions aucune faim), mon ami et moi recommençâmes notre promenade de la veille. La forêt, identique depuis notre arrivée, nous offrit bientôt la vision d’un Elfe assis sur la branche la plus basse d’un arbre énorme et sans fleur. Il paraissait rêver, ou plutôt espérer. Il nous présentait bien l’état d’esprit de tous les elfes que nous ayons vus. En effet, ils nous semblaient tous étranges comme s’ils vivaient tout à un autre palier que nous, et paraissaient tout voir dans une autre dimension. Ils ne se parlaient que rarement, et quant ils le faisaient, c’était d’une voix chantante et calme. Le reste du temps ils ne faisaient que se sourire, mais le regard qu’ils échangeaient ressemblait plus à une contemplation réciproque qu’à une quelconque critique. Ils semblaient en paix avec eux même et avec leurs semblables, heureux me paraît-il, d’être là où ils étaient et de cette vie qu’ils menaient. Chacun cependant avait le cœur totalement tournés vers l’Ouest… Aucun ne nous regardait avec une grande curiosité, celle que nous aurions utilisée dans le cas inverse de leur visite chez nous. Quelque chose d’autre m’intrigua également : tous ces Elfes se connaissaient et paraissaient vivre ensemble depuis toujours et aucun ne semblait avoir de nom… Peut-être n’apportaient-ils pas suffisamment d’importance à l’existence pour s’individualiser … Ils semblaient pourtant tous être libres, et malgré leurs ressemblances ils paraissaient ne pas se lasser de se voir… Peut-être avaient-ils cependant une identité propre qui m’était cachée, des activités les différenciant qui m’étaient inconnues. Ce peuple me semblait totalement libre, sans attache d’aucune sorte ; ils n’avaient aucune obligation quotidienne et aucune idole… Mais cela signifiait-il qu’ils se sentaient au-dessus de tous et maîtres de chaque chose ? Ils n’ont pourtant rien créé… Cet état d’esprit, en étroit parallèle avec une liberté totale pourrait-elle chez eux se traduire par un égoïsme commun (celui d’un peuple tout entier), d’où la froideur chez certains, et leur souhait à tous de quitter cette terre, et ainsi toutes les autres races qu’ils jugent souvent « indignes de leur présence »…

De plus, je ne vis dans ce peuple aucun enfant ; bien que possédant chacun un âge indéfinissable pour moi, je puis affirmer que l’esprit de jeunesse n’en habitait plus aucun. Cela explique sûrement la lassitude, voir même la décrépitude de certains de ces êtres ;en effet, les enfants nécessitent un don d’amour immense, par lequel ils entraînent ensuite une grande joie de vivre chez leur entourage. Ils possèdent une simplicité contagieuse nécessaire à toute vie heureuse. Il en découle une constante et commune espérance en l’avenir, provenant de l’amour partagé par les proches. Et un manque d’espérance les empêche de voir loin, tout du moins au-delà de leurs rivages tant espérés. Les Elfes ont déjà le cœur tourné vers l’Ouest, et ne peuvent donc avoir de l’amour pour cette terre ; en revanche, le peuple des Hommes étant plus pragmatique, il tient à se rapprocher des choses matériels de ce monde et peut donc aimer en réalité. Et l’Amour est nécessaire pour réaliser de grandes choses. Ce ne furent pas les Elfes, mais bien les Hommes qui purent vaincre le mal qui emplissait autrefois ces vastes terres ; non par la force de leur bras, leur courage et leur bravoure, bien qu’ils n’en manquèrent point, mais par cet Amour empli d’espérance, qui les rendait plus puissants que leurs adversaires.

Pendant que je remuais toutes ces idées qui s’embrouillaient de plus en plus dans ma tête, le soleil passa au zénith et commença progressivement à redescendre, belle métaphore de la longue vie des Elfes de la forêt.
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Telle jumelle, tel jumeau - par Tinakë - 03.05.2008, 12:36

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