Note de ce sujet :
  • Moyenne : 0 (0 vote(s))
  • 1
  • 2
  • 3
  • 4
  • 5
L'Art selon Tolkien
#7
Comme il faut bien s’attaquer au problème par n’importe quel bout qui se trouve à notre portée, assez aléatoirement je commence par la première phrase de Tolkien que j’ai cité : « La faculté mentale de créer des images est une chose, ou un aspect, et c’est elle qui doit être appelée imagination à proprement parler. […] La réalisation de l’expression, qui donne (ou semble donner) « la consistance profonde de la réalité » –à savoir qui commande ou suscite la Croyance Secondaire-, est tout autre chose, ou un autre aspect, qui requiert un autre nom : l’Art, le lien à l’œuvre entre l’imagination et le résultat final qu’est la sub-création. »
En plus court : l’Art suscite la Croyance Secondaire et aboutit à la Sub-Création. Qu’est-ce que la Croyance Secondaire ? (A) Qu’est-ce que la Subcréation ? (B)


A. La Croyance Secondaire

Dans Du Conte de Fées, Tolkien évoque la notion de « croyance » tout d’abord dans le cas des enfants :

Citation :« Il semble assez clair que Lang [dans les Fairy Books] utilise croyance dans son sens ordinaire : croyance qu’une chose existe ou peut se produire dans le monde réel (primaire). […]
Les enfants sont bien entendus capables de croyance littéraire, lorsque l’art de l’auteur est assez bon pour l’engendrer. Cet état d’esprit est appelé « suspension volontaire de l’incrédulité ». Mais ce ne me semble pas être une bonne description de ce qui passe. Ce qui se passe en vérité est que l’auteur du conte s’avère un « sub-créateur » qui parvient à ses fins. Il crée un Monde Secondaire dans lequel votre esprit peut pénétrer. À l’intérieur, ce qu’il raconte est « vrai », c’est-à-dire correspond aux lois de ce monde. Par conséquent, vous y croyez, aussi longtemps que vous vous trouvez à l’intérieur en quelque sorte. Au moment où surgit l’incrédulité, le charme est rompu ; la magie, ou plutôt l’art, a échoué. Vous êtes alors de nouveau dans le Monde Primaire, à regarder de l’extérieur le petit Monde Secondaire avorté. »

Puis il l’évoque plus loin lorsqu’il traite de la Fantasy :

Citation :« La création d’un Monde Secondaire dans lequel le soleil vert serait crédible, et qui commande la Croyance Secondaire, requiert probablement du labeur et de la réflexion, et exige certainement un talent particulier, une sorte d’art elfique. »

Enfin il répète :
Citation :« L’art est le procédé qui fait naître au passage la Croyance Secondaire ».


Si on résume la pensée de Tolkien, elle est a priori assez claire. On différencie tout d’abord la Croyance Primaire de la Croyance Secondaire. La Croyance Primaire « est la croyance qu’une chose existe ou peut se produire dans le monde réel ». La Croyance Secondaire est la croyance qu’une chose existe ou peut se produire dans le monde secondaire (créé par l’artiste). En fait ce qui permet la croyance est la conformité de la chose avec les règles qui régissent le monde dans lequel elle apparaît. Il faut également noter que cette croyance est subjective, c’est-à-dire que la personne juge cette conformité en fonction des règles qu’il croit être celles qui régissent le monde donné. Ainsi, l’ignorance ou l’erreur peut conduire en la croyance de choses qui de manière objectives ne sont pas conformes aux règles, et pour donner un exemple, un enfant ignorant croira plus facilement à l’existence des trolls ou des vampires dans notre monde réel. Il s’agit là, il faut le noter, d’une théorie où les règles du monde primaire demeurent inchangées.

Or Tolkien semble avoir omis ou exclu le cas où l’artiste change lui-même les règles du monde primaire. Pour donner un exemple ultra populaire : celui d’Harry Potter, avec des magiciens, des dragons et des araignées géantes dans notre monde réel. Impossible et incroyable a priori. Mais rendus crédibles par la modification des règles du monde primaire qu’opère Rowling. Par conséquent la définition de la croyance pourrait être ainsi complétée : croyance qu’une chose existe ou peut se produire dans le monde donné, conformément aux règles régissant ce monde qu’aura fixées l’artiste ; soit l’artiste crée de nouvelles règles, soit il reprend les règles préexistantes, soit il modifie les règles préexistantes.

Ou bien l’on considère que les histoires d’Harry Potter ne se passent pas dans le monde primaire, mais dans un monde secondaire qui s’inspire du monde primaire. D’ailleurs on peut en dire tout autant d’Arda qui matériellement s’inspire de notre monde réel et en reprend la plupart des lois physiques. L’on retombe alors dans la théorie de Tolkien où finalement les règles du monde primaire demeurent inchangées.

Bref la question se pose de savoir si, selon Tolkien, l’art –et donc l’artiste- a le pouvoir de modifier les règles d’un monde qu’il n’a pas créé, qu’il s’agisse notamment du monde primaire (que Dieu a créé) ou bien du monde secondaire d’un autre artiste (l’auteur qui rédige ses fan-fictions dans le monde de Tolkien par exemple).


De plus, si l’on veut pousser plus loin cette notion de croyance, une autre question peut se poser : « L’art est le procédé qui fait naître au passage la Croyance Secondaire », et nous l’avons vu cette Croyance Secondaire va de pair avec un Monde Secondaire. Mais qu’en est-il de la musique ? Car celle-ci ne produit pas de Monde Secondaire (à moins que je ne me trompe). Dès lors que conclure : que la musique n’est pas un art au sens où Tolkien l’entend ? Ou bien que l’art ne produit pas nécessairement la Croyance Secondaire et peut donc se comprendre indépendamment d’elle ?
Répondre


Messages dans ce sujet
L'Art selon Tolkien - par Juliεη - 03.11.2009, 16:10

Sujets apparemment similaires…
Sujet Auteur Réponses Affichages Dernier message
  Sondage : selon vous, les (rares) défauts du SDA Elros Tar-Minyatur 102 115 186 15.12.2013, 20:30
Dernier message: Isaure
  Saruman, sa position réelle selon vous? Eldacar 80 103 761 28.11.2008, 19:06
Dernier message: Belgarion

Atteindre :


Utilisateur(s) parcourant ce sujet : 1 visiteur(s)